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14/11/2019 | FRANCE | N°17LY03402

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 14 novembre 2019, 17LY03402


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La Fédération nationale des associations d'usagers des transports (FNAUT) a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision de SNCF Réseau du 9 mars 2016 décidant la fermeture à tout trafic de la section, comprise entre les points kilométriques 21,990 (Beaurepaire) et 49,800 (Izeaux) de l'ancienne ligne ferroviaire reliant Saint-Rambert-d'Albon à Rives.

Par un jugement n° 1504252-1603193 du 11 juillet 2017, le tribunal administratif de Grenoble a notamment rejeté cette demande.r>
Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 13 septembre 2017, la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La Fédération nationale des associations d'usagers des transports (FNAUT) a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision de SNCF Réseau du 9 mars 2016 décidant la fermeture à tout trafic de la section, comprise entre les points kilométriques 21,990 (Beaurepaire) et 49,800 (Izeaux) de l'ancienne ligne ferroviaire reliant Saint-Rambert-d'Albon à Rives.

Par un jugement n° 1504252-1603193 du 11 juillet 2017, le tribunal administratif de Grenoble a notamment rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 13 septembre 2017, la FNAUT, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande ;

2°) d'annuler cette décision de SNCF Réseau du 9 mars 2016 ;

3°) de mettre à la charge de SNCF Réseau la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'article L. 120-1 du code de l'environnement a été méconnu dès lors que la décision contestée a une incidence directe et significative sur l'environnement ;

- le dossier de consultation est insuffisant ;

- il n'est pas établi que les membres du conseil d'administration de SNCF réseau ont été destinataires du dossier complet de consultation ;

- l'avis émis par la région l'a été par un organe incompétent ;

- la proposition de fermeture devait émaner du conseil d'administration de SNCF Réseau et non de la directrice du développement social et humain.

- la décision contestée ne prend pas en compte les intérêts dont SNCF Réseau a la charge dès lors que la réouverture de cette ligne est prévue par le schéma régional des transports à l'horizon 2030 ;

- la décision contestée est entachée de détournement de pouvoir.

Par un mémoire en défense enregistré le 26 novembre 2018, l'établissement public SNCF Réseau, représenté par la SCP Meier-Bourdeau Lécuyer, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la FNAUT une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la FNAUT ne sont pas fondés.

La clôture de l'instruction a été fixée au 7 janvier 2019 par une ordonnance du 28 novembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des transports ;

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les conclusions de Mme B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 9 mars 2016, l'établissement public SNCF Réseau, anciennement Réseau Ferré de France (RFF), a décidé la fermeture à tout trafic de la section de l'ancienne ligne ferroviaire reliant Saint-Rambert-d'Albon à Rives comprise entre les points kilométriques 21,990 (Beaurepaire) et 49,800 (Izeaux). La Fédération nationale des associations d'usagers des transports (FNAUT) relève appel du jugement du 11 juillet 2017 du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la légalité de la délibération contestée :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 120-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable modifié notamment par la loi du 27 décembre 2012 relative à la mise en oeuvre du principe de participation du public défini à l'article 7 de la Charte de l'environnement : " Le présent article définit les conditions et limites dans lesquelles le principe de participation du public, prévu à l'article 7 de la Charte de l'environnement, est applicable aux décisions, autres que les décisions individuelles, des autorités publiques ayant une incidence sur l'environnement lorsque celles-ci ne sont pas soumises, par les dispositions législatives qui leur sont applicables, à une procédure particulière organisant la participation du public à leur élaboration (...) ". Aux termes de l'article 7 de la Charte de l'environnement : " Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi (...) de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ".

3. L'article L. 120-1 du code de l'environnement, qui a pour seul objet la mise en oeuvre du principe de participation qu'il énonce, doit être interprété en conformité avec l'article 7 de la Charte de l'environnement, tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel. Il en résulte que la procédure qu'il prévoit ne concerne que les décisions ayant une incidence directe et significative sur l'environnement. La décision contestée est fondée notamment sur l'absence d'exploitation d'une section de ligne fermée de longue date à tout trafic. Elle n'implique en outre pas nécessairement la dépose des voies et autres infrastructures, alors d'ailleurs que ces opérations ne peuvent être exécutées qu'en application d'une décision de déclassement susceptible être contestée devant le juge de l'excès de pouvoir. Dès lors, aucun élément du dossier ne permet de regarder la décision de fermeture de la section de ligne concernée comme de nature, par elle-même, à présenter une incidence directe et significative sur l'environnement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 120-1 du code de l'environnement doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 22 du décret n° 97-444 du 5 mai 1997 dans sa rédaction alors applicable : " Lorsque RFF envisage la fermeture d'une ligne ou d'une section de ligne, il soumet le projet de fermeture à la région compétente pour organiser les services ferroviaires régionaux de voyageurs sur la ligne ou la section de ligne en cause ou, le cas échéant, au Syndicat des transports d'Ile-de-France. La région ou le syndicat dispose d'un délai de trois mois pour faire connaître son avis. L'absence de réponse de l'organe délibérant dans ce délai vaut avis favorable. / (...) ".

5. La FNAUT soutient que le dossier soumis à la région Rhône-Alpes en vue de recueillir son avis sur le projet de fermeture de la section de ligne en application de ces dispositions était insuffisant pour lui permettre d'émettre un avis éclairé aux motifs que ce dossier comporterait des informations imprécises concernant le potentiel de trafic - fret et voyageur - sur cette section de ligne et n'indiquerait pas la "véritable raison" de la fermeture envisagée. Il ressort toutefois des pièces du dossier que ce dossier de consultation comporte cent neuf pages dont plusieurs présentent la procédure de fermeture de la ligne, qui est par ailleurs décrite, et qu'il comporte un point 6, intitulé "Estimation du potentiel de demande ferroviaire" qui étudie la question de la demande potentielle en matière de fret et en matière de voyageurs. Il ressort également des pièces du dossier qu'au vu de ce dossier de consultation, la commission permanente de la région a rendu un avis circonstancié le 21 novembre 2014, dont il ne ressort pas qu'elle se serait estimée insuffisamment informée sur le projet pour émettre son avis. Dès lors, le moyen doit être écarté.

6. En troisième lieu, si la FNAUT soutient qu'il n'est pas établi que les membres du conseil d'administration de SNCF Réseau auraient été destinataires de l'entier dossier de consultation, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces membres n'auraient pas reçu une information suffisante sur le projet pour leur permettre de délibérer en toute connaissance de cause. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que les membres du conseil d'administration se seraient estimés insuffisamment informés, ni qu'ils auraient sollicité en vain des précisions ou explications sur le bien-fondé de la proposition qui leur était soumise. Dès lors, le moyen doit être écarté.

7. En quatrième lieu, l'article L. 4221-1 du code général des collectivités territoriales prévoit que le conseil régional règle par ses délibérations les affaires de la région dans les domaines de compétence que la loi lui attribue. En vertu de l'article L. 4221-5 du même code, il peut déléguer une partie de ses attributions à sa commission permanente, à l'exception de celles relatives au vote du budget, à l'approbation du compte administratif et aux mesures relatives aux dépenses obligatoires. A la suite de la consultation de la région Rhône-Alpes, conformément à l'article 22 du décret du 5 mai 1997, c'est la commission permanente du conseil régional qui a émis un avis, le 21 novembre 2014.

8. Par la décision contestée, SNCF Réseau a décidé la fermeture de la ligne en dépit de l'avis défavorable donné par la commission permanente du conseil régional. Par suite, l'irrégularité dont pourrait être entaché cet avis ne peut, en tout état de cause, avoir eu d'influence sur le sens de la décision prise.

9. En cinquième lieu, l'article 22 du décret du 5 mai 1997 prévoyait alors que Réseau Ferré de France adresse au ministre chargé des transports une proposition motivée de fermeture. Si la fermeture d'une ligne doit être décidée par une délibération du conseil d'administration de l'établissement public, l'engagement de la procédure n'est pas subordonnée à l'intervention d'une telle délibération. Dès lors la proposition de fermeture pouvait, comme c'est le cas en l'espèce, être adressée au ministre ou à la région par un autre organe de RFF devenu SNCF Réseau. Par suite, le moyen tiré de ce que la proposition de fermeture devait exclusivement émaner du conseil d'administration de RFF devenu SNCF Réseau et non de la directrice du développement social et humain doit être écarté.

10. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 2111-9 du code des transports : " L'établissement public national à caractère industriel et commercial dénommé "SNCF Réseau" a pour missions d'assurer, conformément aux principes du service public et dans le but de promouvoir le transport ferroviaire en France dans une logique de développement durable : 1° L'accès à l'infrastructure ferroviaire du réseau ferré national, comprenant la répartition des capacités et la tarification de cette infrastructure ; 2° La gestion opérationnelle des circulations sur le réseau ferré national ; 3° La maintenance, comprenant l'entretien et le renouvellement, de l'infrastructure du réseau ferré national ; 4° Le développement, l'aménagement, la cohérence et la mise en valeur du réseau ferré national ; 5° La gestion des installations de service dont il est propriétaire et leur mise en valeur. SNCF Réseau est le gestionnaire du réseau ferré national. Sa gestion vise à une utilisation optimale du réseau ferré national, dans des objectifs de sécurité, de qualité de service et de maîtrise des coûts et dans les conditions fixées à l'article L. 2122-4-3 (...) ".

11. Il ressort des pièces du dossier, en particulier du dossier de consultation, que la fermeture de la section de ligne a été décidée par la délibération contestée alors que cette section n'était plus commercialement exploitée depuis plusieurs décennies, ni pour le fret ni pour les voyageurs et était d'ailleurs en partie inutilisable. La FNAUT fait valoir que la perspective de la reprise du trafic aurait dû être envisagée par SNCF Réseau dès lors que la réouverture de la ligne à l'horizon 2030 est inscrite au schéma régional des transports. Toutefois, et alors que ce schéma n'a qu'une valeur indicative, elle n'apporte aucun élément précis de nature à remettre en cause l'analyse détaillée du dossier de consultation selon laquelle il n'existe pas de perspective de reprise du trafic. En outre, l'emprise ferroviaire de la ligne demeure dans le domaine public, conformément à l'autorisation ministérielle du 19 janvier 2016, ce qui préserve la possibilité d'accueillir à nouveau une infrastructure de transport. Dans ces conditions, la délibération contestée n'apparaît pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

12. En septième lieu, en se bornant à affirmer que la "véritable raison" de la décision de fermeture réside dans la volonté de SNCF Réseau d'éviter au département de l'Isère de faire l'objet de contraventions de grande voirie, la FNAUT n'établit pas le détournement de pouvoir qu'elle entend ainsi alléguer.

13. Il résulte de tout ce qui précède que la FNAUT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 9 mars 2016 par laquelle le conseil d'administration de SNCF Réseau a décidé de la fermeture de la section de ligne ferroviaire Beaurepaire - Izeaux.

Sur les conclusions relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que SNCF Réseau, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à la FNAUT une somme au titre des frais liés au litige. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à ce titre à la charge de la FNAUT la somme de 2 000 euros à verser à SNCF Réseau.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la Fédération nationale des associations d'usagers des transports est rejetée.

Article 2 : La Fédération nationale des associations d'usagers des transports versera une somme de 2 000 euros à SNCF Réseau au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Fédération nationale des associations d'usagers des transports et à SNCF Réseau.

Délibéré après l'audience du 17 octobre 2019, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme C..., premier conseiller.

Lu en audience publique le 14 novembre 2019.

C...

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N° 17LY03402


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17LY03402
Date de la décision : 14/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Nature et environnement.

Transports - Transports ferroviaires - Lignes de chemin de fer.

Transports - Transports ferroviaires - Réseau ferré de France.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Véronique VACCARO-PLANCHET
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : SCP MEIER-BOURDEAU LÉCUYER

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-11-14;17ly03402 ?
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