Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Drouet, président-assesseur,
- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public,
- et les observations de Me de Raismes, avocat (Cabinet Le Prado, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation), pour le centre hospitalier de Paray-le-Monial.
Considérant ce qui suit :
1. Par jugement n° 1402928 du 9 avril 2015, le tribunal administratif de Dijon a retenu à .... Par jugement n° 1402928 du 10 mars 2016, le tribunal administratif de Dijon a condamné le centre hospitalier de Paray-le-Monial à payer à Mme A... épouse C... une indemnité de 59 790 euros et une rente annuelle de 6 219 euros à revaloriser par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale, en réparation des conséquences dommageables de la prise en charge fautive de son accouchement le 16 juillet 2010 et une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte-d'Or une indemnité de 9 359,41 euros et une somme de 1 047 euros au titre du 9ème alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, à rembourser annuellement à la caisse, sur justificatifs, ses frais futurs et a mis à la charge du centre hospitalier les frais de l'expertise ordonnée le 9 avril 2015 par le tribunal. Par arrêt n° 16LY01849 du 30 novembre 2017 devenu définitif, la cour a rejeté l'appel principal du centre hospitalier de Paray-le-Monial et l'appel incident de Mme A... épouse C... dirigés contre le jugement n° 1402928 du 9 avril 2015 du tribunal administratif de Dijon. Par arrêt n° 16LY01850 du 30 novembre 2017, la cour, sur appel principal du centre hospitalier de Paray-le-Monial et appel incident de Mme A... épouse C... dirigés contre le jugement n° 1402928 du 10 mars 2016 du tribunal administratif de Dijon, a confirmé ce jugement en ce que le tribunal avait retenu l'existence d'un retard fautif dans l'intervention de l'obstétricien et un taux de 80 % de perte de chance pour la parturiente de se soustraire au dommage corporel qui s'est réalisé, et a ordonné une expertise médicale sur le lien de causalité entre l'intervention chirurgicale subie le 24 octobre 2016 par Mme A... épouse C... et la faute commise par le centre hospitalier de Paray-le-Monial à l'occasion de l'accouchement du 16 juillet 2010 et sur les préjudices résultant de cette intervention chirurgicale. L'expert a déposé son rapport le 28 décembre 2018.
Sur la responsabilité pour faute et l'évaluation de la perte de chance :
2. D'une part, la cour, ainsi qu'il vient d'être dit, a, par arrêt n° 16LY01849 du 30 novembre 2017 devenu définitif, rejeté l'appel principal du centre hospitalier de Paray-le-Monial et l'appel incident de Mme A... épouse C... dirigés contre le jugement n° 1402928 du 9 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Dijon a notamment statué sur le principe de la responsabilité en retenant une faute par retard du gynécologue-obstétricien à intervenir lors de l'accouchement de Mme A... épouse C... le 16 juillet 2010. Dans ces conditions, Mme A... épouse C... est fondée dans la présente instance à opposer l'autorité de la chose jugée par cet arrêt n° 16LY01849 du 30 novembre 2017 de la cour sur le principe de la responsabilité au moyen, repris par le centre hospitalier de Paray-le-Monial dans ses mémoires après expertise, tiré de l'absence de retard fautif du gynécologue-obstétricien à intervenir. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.
3. D'autre part, la cour, ainsi qu'il a été dit au point 1, a, par arrêt n° 16LY01850 du 30 novembre 2017, avant d'ordonner une expertise sur le lien de causalité entre l'intervention chirurgicale du 24 octobre 2016 et la faute commise par le centre hospitalier de Paray-le-Monial à l'occasion de l'accouchement du 16 juillet 2010 et sur les préjudices résultant de cette intervention, confirmé le jugement n° 1402928 du 10 mars 2016 en ce que le même tribunal avait retenu un taux de 80 % de perte de chance pour la parturiente de se soustraire au dommage corporel qui s'est réalisé. Dès lors, la cour a épuisé sa compétence sur cette question du taux de perte de chance. Dans ces conditions, et alors que le dispositif de l'arrêt n° 16LY01850 du 30 novembre 2017 n'a réservé que les moyens sur lesquels il n'a pas été statué, ne peut qu'être écarté le moyen, repris par le centre hospitalier de Paray-le-Monial dans ses mémoires après expertise, tiré de ce que le taux de perte de chance est inférieur à 80 %.
Sur la réparation des préjudices :
4. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée le 30 novembre 2017 par la cour, que l'intervention chirurgicale du 24 octobre 2016, justifiée par la rupture du sphincter externe survenue lors de l'accouchement du 16 juillet 2010, est en relation certaine et directe avec le retard fautif du gynécologue-obstétricien du centre hospitalier de Paray-le-Monial à intervenir lors de cet accouchement et que la consolidation de l'état de Mme A... épouse C... doit être regardée comme acquise à la date du 30 avril 2017. Cette date de consolidation, eu égard aux termes de l'expertise, s'analyse comme valant pour l'ensemble des troubles ayant résulté de l'accouchement du 16 juillet 2010 et de ses suites ainsi que de l'intervention chirurgicale du 24 octobre 2016.
En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :
5. En premier lieu, s'agissant des dépenses de santé liées à l'intervention chirurgicale du 24 octobre 2016, il résulte de l'instruction, et notamment des pièces produites en appel par Mme A... épouse C... et par la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte-d'Or, que ces dépenses, qui comprennent des frais hospitaliers, médicaux, pharmaceutiques, de huit séances de thérapie psychologique et de transport, s'élèvent à la somme totale de 4 230,09 euros. Compte tenu du taux de perte de chance de 80 % appliqué à cette somme, soit la somme de 3 384,07 euros, et déduction faite des prestations prises en charge par la caisse primaire d'assurance maladie à hauteur de 3 215,45 euros et correspondant à des frais hospitaliers, médicaux, pharmaceutiques et de transport, Mme A... épouse C... a droit à la somme de 168,62 euros en remboursement des dépenses de santé et la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte-d'Or a droit à la somme de 3 215,45 euros en remboursement des dépenses de santé qu'elle a exposée pour son assurée sociale.
6. En deuxième lieu, Mme A... épouse C... ne justifie pas, par les pièces qu'elle produit tant en première instance qu'en appel, avoir supporté des frais de déplacement de Paray-le-Monial à Orléans pour un montant total de 697,36 euros. Par suite, elle n'est pas fondée à solliciter une indemnisation à ce titre.
7. En troisième lieu, la requérante ne justifie pas, par les pièces qu'elle produit en appel, avoir été privée d'une prime dite " de service " du fait de l'intervention qu'elle a subie le 24 octobre 2016. Par suite, elle n'est pas fondée à solliciter une indemnisation à ce titre.
8. En dernier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport du 25 septembre 2015 de l'expertise ordonnée par le jugement n° 1402928 du 9 avril 2015 du tribunal administratif de Dijon et il n'est pas sérieusement contesté par le centre hospitalier de Paray-le-Monial, que, du fait des troubles de la continence résultant de la prise en charge fautive de son accouchement, l'état de Mme A... épouse C... a nécessité à compter d'avril 2013 l'assistance par une tierce personne à hauteur de 11 heures et 30 minutes par semaine, soit 1,64 heures par jour. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée le 30 novembre 2017 par la cour, que l'intéressée ne subit, après le 30 avril 2017, date de sa consolidation fixée par cet expert, aucun préjudice en lien avec la faute du centre hospitalier du fait de l'amélioration de l'état de la continence et qu'ainsi, l'assistance par une tierce personne n'est plus nécessaire après le 30 avril 2017. Il y a lieu, pour le calcul des frais échus de cette assistance, de fixer ce tarif horaire à 13 euros afin de tenir compte de l'évolution du salaire minimum moyen et des charges sociales. Compte tenu de ce tarif horaire, d'une assistance de 1,64 heure par jour, d'un nombre de 412 jours dans l'année pour prendre en compte les majorations de rémunération liées aux congés payés et au travail les dimanches et jours fériés et de la durée de quatre ans et un mois qui s'est écoulée entre avril 2013 et avril 2017 inclus, les frais au titre de l'assistance par une tierce personne s'établissent à la somme de 35 867,35 euros. Il ne résulte pas de l'instruction que l'intéressée aurait perçu par ailleurs des prestations ayant pour objet la prise en charge de tels frais et qui devraient venir en déduction de l'indemnisation due. Par suite, Mme A... épouse C... a droit à la somme de 28 693,88 euros à ce titre, compte tenu du taux de perte de chance de 80 %.
En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux :
9. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport du 27 novembre 2013 de l'expertise ordonnée par la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médiaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales de Bourgogne, de l'avis du 7 janvier 2014 de cette commission et du rapport de l'expertise ordonnée le 30 novembre 2017 par la cour, que Mme A... épouse C..., dont l'état est consolidé au 30 avril 2017, a subi un déficit fonctionnel temporaire de 25 % du 16 juillet 2010 au 18 novembre 2013 et un déficit fonctionnel temporaire de 15 % du 19 novembre 2013 au 22 octobre 2016 du fait de la prise en charge fautive de son accouchement et un déficit fonctionnel temporaire de 100 % du 23 octobre 2016 au 26 octobre 2016, un déficit fonctionnel temporaire de classe 2, soit 25 %, du 27 octobre 2016 au 4 janvier 2017 et un déficit fonctionnel temporaire de classe 1, soit 10 %, du 5 janvier 2017 au 30 avril 2017 du fait de l'intervention chirurgicale du 24 octobre 2016 en lien avec la prise en charge fautive de l'accouchement. Dans ces conditions, Mme A... épouse C... a droit à 80 % de la somme de 7 000 euros, soit 5 600 euros au titre de ces déficits fonctionnels temporaires.
10. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 4 concernant la date de consolidation de Mme A... épouse C... au 30 avril 2017, et dès lors que, comme l'expert l'indique dans son rapport du 21 décembre 2018, il n'y a aucun chef de préjudice indemnisable après la consolidation compte tenu de l'amélioration de l'état de continence, que celle-ci n'est pas fondée à solliciter une indemnisation au titre d'un déficit fonctionnel permanent.
11. En troisième lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du 27 novembre 2013 et du rapport d'expertise du 21 décembre 2018, que Mme A... épouse C... a, avant sa consolidation acquise au 30 avril 2017, enduré, du fait de la prise en charge fautive de son accouchement, des souffrances physiques et des souffrances psychiques évaluées respectivement à 3/7 et à 4/7 par l'expert en novembre 2013 et des souffrances physiques, évaluées à 2/7 par l'expert en décembre 2018, en raison de l'intervention chirurgicale du 24 octobre 2016. Dans ces conditions, la requérante a droit à 80 % de la somme de 8 500 euros, soit 6 800 euros, en réparation de ces souffrances endurées.
12. En quatrième lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport du 25 septembre 2015 de l'expertise ordonnée le 9 avril 2015 par le tribunal administratif de Dijon, que Mme A... épouse C..., née le 4 juin 1982, subit du fait des conséquences dommageables de la prise en charge de son accouchement un préjudice d'agrément en ce qu'elle ne peut plus faire de sport, alors qu'elle pratiquait régulièrement le vélo et le step, et que les activités ludiques avec sa famille sont limitées. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice d'agrément en lui allouant à ce titre une somme de 5 000 euros, compte tenu du taux de perte de chance de 80 %.
13. En cinquième lieu, il sera fait une juste appréciation du préjudice sexuel subi par Mme A... épouse C... du fait de la prise en charge fautive de son accouchement et de l'intervention du 24 octobre 2016 en lui accordant à ce titre une somme de 13 000 euros, compte tenu du taux de perte de chance de 80 %.
14. En dernier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du 25 septembre 2015, que Mme A... épouse C... ne peut envisager une nouvelle maternité compte tenu du traumatisme psychologique en rapport avec les conditions de son accouchement au centre hospitalier de Paray-le-Monial et des effets que pourrait avoir son traitement médical sur le foetus. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice d'établissement en lui allouant à ce titre une somme de 8 000 euros, compte tenu du taux de perte de chance de 80 %.
15. Il résulte de tout ce qui précède, et sans que le centre hospitalier de Paray-le-Monial puisse utilement faire valoir que l'indemnité sollicitée par Mme A... épouse C... dans son mémoire enregistré le 15 mars 2019 au titre de l'intervention subie le 24 octobre 2016 est supérieure à celle sollicitée par l'intéressée au même titre dans son mémoire enregistré le 16 octobre 2017, qu'il y a lieu de porter à 67 262,50 euros le montant de l'indemnité due par le centre hospitalier de Paray-le-Monial à Mme A... épouse C... et de réformer en ce sens le jugement attaqué du 10 mars 2016 du tribunal administratif de Dijon. Il y a lieu également de condamner le centre hospitalier de Paray-le-Monial à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte-d'Or une indemnité de 3 215,45 euros au titre des débours exposés en conséquence de l'intervention chirurgicale du 24 octobre 2016, ainsi que, par voie de conséquence, une somme de 1 071,82 euros correspondant au tiers de cette somme de 3 215,45 euros, au titre du 9ème alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.
Sur les dépens :
16. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. / L'Etat peut être condamné aux dépens. ".
17. Les dépens, qui comprennent les frais de l'expertise ordonnée le 30 novembre 2017 par la cour, liquidés et taxés à la somme de 1 920 euros, doivent être mis à la charge du centre hospitalier de Paray-le-Monial, partie perdante.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de Mme A... épouse C... tendant à ce que lui soit accordée au titre des frais exposés par elle en première instance et non compris dans les dépens une somme supplémentaire à celle que le tribunal administratif de Dijon lui a allouée au même titre par le jugement attaqué du 10 mars 2016. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier de Paray-le-Monial une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A... épouse C... dans la présente instance et non compris dans les dépens et la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte-d'Or dans la présente instance et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du centre hospitalier de Paray-le-Monial est rejetée.
Article 2 : La somme de 59 790 euros que le centre hospitalier de Paray-le-Monial a été condamné à verser à Mme A... épouse C... par le jugement n° 1402928 du 10 mars 2016 du tribunal administratif de Dijon est portée à 67 262,50 euros.
Article 3 : Ce jugement est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le centre hospitalier de Paray-le-Monial est condamné à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte-d'Or une indemnité de 3 215,45 euros au titre des débours exposés en conséquence de l'intervention chirurgicale du 24 octobre 2016 et une somme de 1 071,82 euros au titre du 9ème alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.
Article 5 : Les dépens, qui comprennent les frais de l'expertise ordonnée le 30 novembre 2017 par la cour, sont mis à la charge du centre hospitalier de Paray-le-Monial.
Article 6 : Le centre hospitalier de Paray-le-Monial versera à Mme A... épouse C... et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte-d'Or une somme de 1 500 (mille cinq cent) euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 7 : Le surplus des conclusions présentées devant la cour par Mme A... épouse C... et par la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte-d'Or est rejeté.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Paray-le-Monial, à Mme D... A... épouse C..., à la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte-d'Or, à la Caisse des dépôts et consignations et à la Mutuelle nationale hospitalière. Copie en sera adressée pour information à M. E... B....
Délibéré après l'audience du 4 juillet 2019, à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Drouet, président-assesseur,
Mme Caraës, premier conseiller.
Lu en audience publique le 5 septembre 2019.
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N° 16LY01850