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06/08/2019 | FRANCE | N°18LY04640

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 06 août 2019, 18LY04640


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... E... et Mme B... E... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération du 15 novembre 2016 par laquelle le conseil municipal de Lapeyrouse-Mornay a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 1700252 du 25 octobre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la délibération du 15 novembre 2016 en tant qu'elle approuve le classement en zone agricole des parcelles bâties du hameau de Bois-Vieux et de la parcelle cadastrée Section ZC n

40, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande des consorts E....

P...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... E... et Mme B... E... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération du 15 novembre 2016 par laquelle le conseil municipal de Lapeyrouse-Mornay a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 1700252 du 25 octobre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la délibération du 15 novembre 2016 en tant qu'elle approuve le classement en zone agricole des parcelles bâties du hameau de Bois-Vieux et de la parcelle cadastrée Section ZC n°40, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande des consorts E....

Procédure devant la cour

I - Par une requête et des mémoires en réplique enregistrés sous le n° 18LY04640 le 20 décembre 2018 et les 21 mai et 19 juin 2019, la commune de Lapeyrouse-Mornay, représentée par la Selarl Conseil affaires publiques, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 25 octobre 2018 en tant qu'il annule la délibération du 15 novembre 2016 et rejette ses conclusions au titre des frais d'instance, à titre subsidiaire de réformer l'article 1er de ce jugement en tant qu'il ne limite pas l'annulation prononcée à l'enveloppe du bâti existant ;

2°) de mettre à la charge solidaire des consorts E... les sommes de 2 000 et 3 000 euros au titre des frais exposés en 1e instance et en appel.

Elle soutient que :

- compte tenu des caractéristiques des lieux, de la configuration des parcelles et du parti d'aménagement de la commune, c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le classement du hameau de Bois-Vieux et celui de la parcelle ZC40 procédaient d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- c'est à tort que le tribunal a considéré qu'elle était partie perdante pour l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- les conclusions d'appel incident des consorts E... ne sont pas recevables et les moyens invoqués au soutien de celles-ci ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense enregistrés les 18 avril et 11 juin 2019, M. C... E... et Mme B... E..., représentés par la Selarl Fayol et Associés, concluent :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à la réformation du jugement attaqué et à l'annulation de la délibération du 15 novembre 2016 dans son intégralité ou, à titre subsidiaire, en tant qu'elle approuve le classement en zone agricole des parcelles cadastrées Section ZD n° 224, 289, 290 et 292 ;

3°) à ce que la somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la commune requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- le rapport de présentation est insuffisant au regard des exigences de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme relatives à l'inventaire des capacités de stationnement ;

- le classement en zone agricole des parcelles cadastrées Section ZD n° 224, 289, 290 et 292 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

II - Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés sous le n° 18LY04663 les 21 décembre 2018 et 11 juin 2019, M. C... E... et Mme B... E..., représentés par la Selarl Fayol et Associés, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 25 octobre 2018 en tant qu'il rejette leur demande ;

2°) d'annuler la délibération du 15 novembre 2016 dans son intégralité ou, à titre subsidiaire, en tant qu'elle approuve le classement en zone agricole des parcelles cadastrées Section ZD n°224, 289, 290 et 292 ;

3°) de mettre la somme de 3 500 euros à la charge de la commune intimée en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- comme ils sont recevables à l'invoquer, le rapport de présentation est insuffisant au regard des exigences de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme relatives à l'inventaire des capacités de stationnement ;

- le classement en zone agricole des parcelles cadastrées Section ZD n° 224, 289, 290 et 292 situées dans un secteur qui a perdu sa vocation agricole est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par des mémoires en défense enregistrés les 21 mai et 19 juin 2019, la commune de Lapeyrouse-Mornay, représentée par la Selarl Conseil affaires publiques, conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire à ce qu'il soit fait application de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme, et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge solidaire des consorts E... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de l'insuffisance du rapport de présentation n'est pas recevable, et ne saurait tout au plus justifier qu'une annulation partielle du PLU ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 24 juin 2019 dans l'instance n°18LY04663 par une ordonnance du 12 juin précédent.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Antoine Gille, président ;

- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public ;

- les observations de Me A... pour les consorts E..., ainsi que celles de Me D... pour la commune de Lapeyrouse-Mornay.

Et après avoir pris connaissance des notes en délibéré présentées pour les consorts E..., enregistrées le 10 juillet 2019 ;

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes de la commune de Lapeyrouse-Mornay et des consorts E... sont dirigées contre un même jugement, sont relatives à la même délibération et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. M. C... E... et Mme B... E... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération du 15 novembre 2016 par laquelle le conseil municipal de Lapeyrouse-Mornay a approuvé le plan local d'urbanisme (PLU) de la commune. Par un jugement du 25 octobre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a partiellement fait droit à cette demande et a annulé la délibération du 15 novembre 2016 en tant qu'elle approuve le classement en zone agricole des parcelles bâties du hameau situé au lieu-dit Bois-Vieux et de la parcelle cadastrée Section ZC n° 40. La commune de Lapeyrouse-Mornay relève appel de ce jugement en tant qu'il a fait droit à la demande des consorts E... et a rejeté ses conclusions au titre des frais d'instance. Les consorts E... relèvent également appel de ce jugement, tant à titre principal qu'à titre incident, en ce qu'il a rejeté le surplus de leurs conclusions dirigées contre la délibération du 15 novembre 2016.

Sur la légalité de la délibération du 15 novembre 2016 :

En ce qui concerne le rapport de présentation :

3. Au titre de l'inventaire des capacités de stationnement public mentionné au dernier alinéa de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme, le rapport de présentation du PLU de Lapeyrouse-Mornay, s'il indique que l'absence de marquage au sol ne permet pas de connaître le nombre de places de stationnement disponibles, fait toutefois état de la possibilité de stationner sur la place Cavalli et sur la place de la Paix, précise que 6 emplacements de stationnement sont matérialisés près du bureau de poste, dont un réservé aux personnes handicapées, et relève l'absence de stationnement permettant d'assurer la recharge d'un véhicule électrique. Dans ces conditions, et alors qu'il n'apparaît pas que la situation de la commune aurait requis l'établissement d'un inventaire plus précis, le moyen tiré sur ce point de l'insuffisance du rapport de présentation doit être écarté.

En ce qui concerne le classement du hameau de Bois-Vieux et de la parcelle cadastrée Section ZC n°40 :

4. Aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". Aux termes du 1er alinéa de l'article L. 151-12 du code de l'urbanisme : " Dans les zones agricoles, naturelles ou forestières et en dehors des secteurs mentionnés à l'article L. 151-13, les bâtiments d'habitation existants peuvent faire l'objet d'extensions ou d'annexes, dès lors que ces extensions ou annexes ne compromettent pas l'activité agricole ou la qualité paysagère du site ". Aux termes du 1er alinéa de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur et désormais repris à l'article R. 151-22 de ce code : " Les zones agricoles sont dites "zones A". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ".

5. Il appartient aux auteurs d'un PLU de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce PLU, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

6. Pour annuler la délibération du 15 novembre 2016 en tant qu'elle approuve le classement en zone agricole des parcelles bâties du hameau du Bois-Vieux et de la parcelle cadastrée Section ZC n°40, le tribunal administratif a retenu le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont procédait ce classement au regard du caractère urbanisé que présente désormais ce secteur où se trouvent une trentaine de maisons d'habitation.

7. Toutefois, contrairement à ce qu'allèguent les requérants lorsqu'ils invoquent sans autre précision une erreur de droit et ainsi que l'envisage l'article L. 151-12 du code de l'urbanisme reprenant sur ce point les dispositions de l'ancien article L. 123-1-5 de ce code, la présence de plusieurs bâtiments d'habitation dans un secteur ne fait pas en elle-même obstacle au classement de ce secteur, y compris de sa partie bâtie, en zone agricole du PLU. Il ressort en outre des pièces du dossier, en particulier des énonciations du rapport de présentation du PLU en litige, que, si une trentaine de maisons d'habitation se trouvent dans le secteur de Bois-Vieux, qui accueille, y compris dans le hameau qui s'y trouve, des bâtiments agricoles, ce secteur se trouve, à près d'un kilomètre du centre bourg de Lapeyrouse-Mornay, au coeur d'une vaste plaine agricole de bonne valeur agronomique et facilement exploitable. Alors que le rapport de présentation rappelle la faible densité des constructions de ce secteur, qui s'établit à environ 4 habitations par hectare, et que le Schéma de cohérence territoriale des Rives du Rhône classe la commune en "polarité village" au sein "d'espaces agricoles stratégiques", l'inclusion en zone agricole du hameau de Bois-Vieux, qui, malgré le développement d'un habitat pavillonnaire, a conservé un caractère rural, répond aux caractéristiques et à la localisation de ce secteur ainsi qu'aux objectifs que les auteurs du PLU se sont donnés et que rappelle le projet d'aménagement et de développement durables de rechercher un équilibre entre le développement résidentiel et le maintien des qualités rurales de la commune en favorisant le recentrage de l'urbanisation sur le bourg, de reconsidérer les perspectives de développement des hameaux s'étant étendus le long des voies en les contenant dans leur enveloppe actuelle ou encore de valoriser les qualités paysagères et de préserver les ressources de la commune, en particulier la ressource agricole. Dans ces conditions, et alors que le règlement de la zone A en litige fixe les conditions dans lesquelles les bâtiments d'habitation existants peuvent être étendus ou des constructions annexes édifiées, la commune de Lapeyrouse-Mornay est fondée à soutenir que le classement en zone agricole du secteur de Bois-Vieux, notamment de la parcelle cadastrée Section ZC n°40 qui en relève, n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation. Par suite, c'est à tort que les premiers juges ont, pour faire partiellement droit à la demande des consorts E..., retenu comme fondé le moyen tiré de ce qu'une telle erreur entachait sur ce point le PLU de la commune.

En ce qui concerne le classement des parcelles cadastrées Section ZD n° 224, 289, 290 et 292 :

8. Eu égard à ce qui a été dit au point qui précède, les circonstances dont les consorts E... font état, tirées notamment du caractère urbanisé du hameau de Bois-Vieux dont relèvent les parcelles concernées et de leur absence de valeur agricole particulière, ne suffisent pas pour considérer que le classement en zone agricole des parcelles non bâties n° 224, 289, 290 et 292 procède d'une erreur manifeste d'appréciation.

9. Il résulte de ce qui précède que la commune de Lapeyrouse-Mornay est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a partiellement fait droit aux conclusions de la demande des consorts E... dirigées contre la délibération du 15 novembre 2016, et à demander, outre l'annulation de cet article, le rejet des conclusions de la demande que le tribunal avait ainsi accueillies. Il résulte également de ce qui précède que les consorts E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Sur les frais liés au litige :

10. Contrairement à ce que soutient la commune de Lapeyrouse-Mornay pour demander l'annulation de l'article 3 du jugement en litige, il ressort des termes de ce jugement que le tribunal administratif n'a pas rejeté ses conclusions au titre des frais exposés en première instance sur sa qualité, qu'elle conteste, de partie perdante, mais sur l'appréciation qu'il a portée sur les circonstances de l'espèce et qu'il y a lieu, en tout état de cause, de confirmer.

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de la commune de Lapeyrouse-Mornay, qui n'est pas partie perdante en appel. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application de ces mêmes dispositions et de mettre à la charge solidaire des consorts E... le versement à la commune de Lapeyrouse-Mornay de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés en appel.

DECIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 25 octobre 2018 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de la demande des consorts E... devant le tribunal administratif de Grenoble dirigées contre la délibération du conseil municipal du Lapeyrouse-Mornay du 15 novembre 2016 en tant qu'elle approuve le classement en zone agricole du hameau de Bois-Vieux et de la parcelle cadastrée Section ZC n° 40, la requête n° 18LY04663 des consorts E... et les conclusions formées à titre d'appel incident et au titre des frais d'instance par les consorts E... dans la requête n° 18LY04640 sont rejetées.

Article 3 : Les consorts E... verseront solidairement à la commune de Lapeyrouse-Mornay la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la commune de Lapeyrouse-Mornay est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Lapeyrouse-Mornay ainsi qu'à M. C... E..., premier requérant nommé pour les consorts E....

Délibéré après l'audience du 9 juillet 2019, à laquelle siégeaient :

M. Antoine Gille, président ;

Mme Christine Psilakis, premier conseiller ;

Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 août 2019.

2

N° 18LY04640, 18LY04663

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY04640
Date de la décision : 06/08/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU).


Composition du Tribunal
Président : M. GILLE
Rapporteur ?: M. Antoine GILLE
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : SELARL CAP - ME MOLLION

Origine de la décision
Date de l'import : 27/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-08-06;18ly04640 ?
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