La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/07/2019 | FRANCE | N°17LY01549

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 18 juillet 2019, 17LY01549


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B..., représenté par MeA..., a demandé au tribunal administratif de Lyon, dans le dernier état de ses écritures le 18 mars 2016 :

1°) à titre principal, de condamner le centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne, en sa qualité d'employeur du professeur Bousquet, à lui verser la somme totale de 4 875 888 euros euros à titre de dommages et intérêts et une rente de 8 000 euros par mois en réparation des préjudices consécutifs à l'intervention réalisée lors de sa prise en charg

e à la Réunion le 12 décembre 1985 ;

2°) à titre subsidiaire, de désigner un expert a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B..., représenté par MeA..., a demandé au tribunal administratif de Lyon, dans le dernier état de ses écritures le 18 mars 2016 :

1°) à titre principal, de condamner le centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne, en sa qualité d'employeur du professeur Bousquet, à lui verser la somme totale de 4 875 888 euros euros à titre de dommages et intérêts et une rente de 8 000 euros par mois en réparation des préjudices consécutifs à l'intervention réalisée lors de sa prise en charge à la Réunion le 12 décembre 1985 ;

2°) à titre subsidiaire, de désigner un expert afin d'évaluer son état de santé actuel et les conséquences subies en raison de l'erreur commise par le professeur Bousquet.

Par jugement n° 1408347 du 28 mars 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M.B....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 avril 2017 et des mémoires enregistrés les 30 juillet 2017 et 7 août 2017, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 mars 2017 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) à titre principal, de condamner le centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne, en sa qualité d'employeur du professeur Bousquet, à lui verser la somme totale de 4 875 888 euros euros à titre de dommages et intérêts et une rente de 8 000 euros par mois en réparation des préjudices consécutifs à l'intervention réalisée lors de sa prise en charge à la Réunion le 12 décembre 1985 ;

3°) de condamner le professeur Bousquet à lui verser une somme de 1 980 780,97 euros ;

4°) à titre subsidiaire, de désigner un expert afin de vérifier le lien de causalité, et d'évaluer les préjudices lui ayant été causés par l'erreur du professeur Bousquet.

M. B...soutient que :

- sa demande indemnitaire à l'encontre du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne n'était pas prescrite en ce que le délai de prescription quadriennale ne court qu'à compter de la date de consolidation ; il a introduit un recours contentieux devant le tribunal administratif de la Réunion le 10 avril 2003 dans le délai de 10 ans prévu par l'article L. 1142-28 du code de la santé publique, ce recours a interrompu la prescription ; son état de santé s'est aggravé et n'est pas consolidé ;

- le jugement du tribunal administratif de Lyon est irrégulier car entaché d'une insuffisance de motivation, les premiers juges n'ayant pas répondu au moyen tiré de ce que le Pr Bousquet était en mission pour le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne lors de son déplacement en 1985 à la Réunion ;

- il a été victime d'un accident de la circulation le 1er avril 1982 à la suite duquel ont été diagnostiquées une fracture de la jambe droite et des lésions aux ligaments croisés du genou ;

- le professeur Bousquet, qui était en mission à la Réunion, l'a opéré le 12 décembre 1985 à la clinique Saint-Benoit et au cours de cette opération a réalisé une transplantation du ligament/ ligament plastie sans l'en avoir informé au préalable et sans avoir obtenu son consentement ; la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Saint- Etienne, employeur du professeur Bousquet est engagée ; le professeur Bousquet n'avait pas été recruté par le centre hospitalier de la Réunion ;

- il appartient au médecin ou à l'établissement de santé d'établir que l'information sur l'opération envisagée et des risques éventuels de celle-ci lui a été bien délivrée ; ce défaut d'information lui a causé un préjudice d'impréparation et un préjudice de perte de chance dès lors qu'il n'a pas pu se soustraire aux risques de cette opération ;

- le professeur Bousquet a commis une erreur médicale lors de l'intervention chirurgicale du 12 décembre 1985 en procédant une plastie à deux faisceaux gracilis et jumeau laquelle a aggravé l'état de son genou, ce qui a entrainé d'autres opérations chirurgicales ;

- il y a lieu de faire réaliser une expertise judiciaire avant-dire-droit sur les conséquences de l'erreur commise par le Pr Bousquet ;

- il évalue ses préjudices physiques et moraux à la somme de 4 875 888 euros à laquelle doit être ajoutée une rente viagère de 8 000 euros par mois à compter du 12 décembre 1985 ; ces sommes doivent être mises à la charge du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne ;

- une somme de 1 980 780,97 euros doit être mise à la charge du Pr Bousquet dans le cadre de la faute professionnelle grave qu'il a commise ;

- son état de santé s'est aggravé à raison de l'état dépressif réactionnel grave dont il souffre ;

Par un mémoire enregistré le 28 janvier 2019, le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- par décision du 30 novembre 2011, le Conseil d'Etat a condamné le centre hospitalier départemental Félix Guyon de la Réunion à verser une somme de 25 000 euros à M. B...en réparation des préjudices subis liés à l'absence d'information sur l'opération d'ablation de la rotule ayant été réalisée le 11 octobre 1990 dans cet établissement hospitalier ;

- la cour administrative d'appel de Bordeaux par arrêt du 22 novembre 2016 a rejeté, compte tenu des conclusions de deux expertises pratiquées respectivement le 22 novembre 2005 et le 8 avril 2016, une nouvelle demande indemnitaire de M. B...à l'encontre du centre hospitalier départemental Félix Guyon de la Réunion ; M. B...a alors recherché pour des opérations réalisées antérieurement la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne ;

- la demande de M. B...devant le tribunal administratif de Lyon était irrecevable, M. B...n'ayant mené aucune action pour interrompre la prescription quadriennale prévue par l'article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances des établissements publics ; le délai de prescription décennale institué par la loi du 4 mars 2002 n'a pas vocation à s'appliquer aux créances déjà prescrites à la date d'entrée en vigueur de cette loi ; l'intervention de transplantation de ligament plastie dont se plaint M. B...ayant eu lieu le 12 décembre 1985, la créance de M. B...était prescrite au 1er janvier 1990 ; la circonstance que M. B...ait adressé un courrier le 25 octobre 2002 au directeur du centre hospitalier départemental Félix Guyon de la Réunion concernant une ablation de la rotule réalisée le 10 novembre 1990, qui concerne un fait générateur différent, n'a pu modifier le délai de prescription ;

- les premiers juges ont correctement motivé leur jugement en mentionnant qu'il n'y avait pas de faute prouvée du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne et que l'intervention en litige ayant eu lieu au centre hospitalier départemental Félix Guyon, seule la responsabilité de l'établissement hospitalier réunionnais pouvait être engagée pour faute ; par arrêt du 22 novembre 2016 de la cour administrative d'appel de Bordeaux, M. B...a vu rejetées ses conclusions contre le centre hospitalier départemental Félix Guyon de la Réunion ;

- M. B...a déjà été indemnisé par le Conseil d'Etat et ne peut pas réclamer une double indemnisation ;

- le requérant ne justifie pas d'une aggravation liée à des actes médicaux accomplis au centre hospitalier départemental Félix Guyon ; il ne justifie pas davantage du quantum des indemnités demandées ;

Par courriers du 30 avril 2019, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur des moyens relevés d'office tirés premièrement de l'incompétence de la juridiction administrative pour connaître des conclusions tendant à la condamnation du Pr Bousquet à raison d'actes personnels dans le cadre des soins médicaux et secondement de l'irrecevabilité de telles conclusions qui n'ont pas été présentées en première instance et sont donc nouvelles en appel.

Par décision du 30 mai 2017, M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Cottier, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Terrade, rapporteur public ;

- et les observations de Me Moutoussamy, avocat, pour M.B....

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., né en 1956, a été victime le 1er avril 1982 sur l'Ile de la Réunion d'un accident de la circulation nécessitant la prise en charge médicale de son tibia droit et de son genou droit. Il a subi plusieurs opérations au sein du centre hospitalier régional Félix Guyon de La Réunion, et au sein de la clinique Saint-Benoît, établissement privé à but non lucratif et notamment, dans ce dernier établissement, une intervention de ligamentoplastie le 12 décembre 1985, laquelle aurait été pratiquée avec le concours du professeur Bousquet, praticien hospitalier du centre hospitalier de Saint-Etienne qui aurait été "en mission" à cette date à la Réunion. Par une décision n° 327658 en date du 30 novembre 2011, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a condamné le centre hospitalier Félix Guyon à l'indemniser des préjudices résultant du défaut d'information quant aux risques et conséquences possibles de l'ablation de la rotule droite ayant été réalisée le 11 octobre 1990. Par un arrêt du 22 novembre 2016, devenu définitif, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté d'autres conclusions indemnitaires de M. B...à l'encontre du centre hospitalier Félix Guyon, en l'absence de toute aggravation de son état de santé. M. B...a demandé le 10 octobre 2014 au tribunal administratif de Lyon à titre principal, de condamner le centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne, en sa qualité d'employeur du professeur Bousquet, à lui verser la somme totale de 4 875 888 euros à titre de dommages et intérêts ainsi qu'une rente de 8 000 euros par mois en réparation des préjudices consécutifs à la prise en charge du 12 décembre 1985 et, à titre subsidiaire, de désigner un expert afin d'évaluer son état de santé actuel et les préjudices subis en lien avec la faute médicale qui aurait été commise par le professeur Bousquet. M. B...interjette appel de ce jugement ayant rejeté sa demande et ajoute des conclusions tendant à la condamnation du professeur Bousquet à lui verser une somme de 1 980 780,97 euros.

Sur les conclusions tendant à la condamnation du professeur Bousquet :

2. Seule peut être mise en cause devant le juge administratif l'éventuelle responsabilité des personnes morales de droit public à raison des fautes commises par leurs agents. Par suite, doivent être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître les conclusions de M.B..., au demeurant nouvelles en appel et donc en tout état de cause irrecevables, tendant à la condamnation indemnitaire du professeur Bousquet, dont du reste il n'est pas contesté qu'il est décédé depuis plusieurs années, pour des faits commis dans l'exercice de son activité médicale.

Sur la régularité du jugement :

3. Contrairement à ce que soutient le requérant, le tribunal administratif de Lyon, après avoir relevé ses dires quant à une participation du professeur Bousquet, praticien au centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne, à l'opération en litige du 12 décembre 1985, s'est prononcé sur la question de savoir si une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne avait été commise en estimant, par un jugement suffisamment motivé sur ce point, que les conclusions aux fins d'indemnisation présentées à l'encontre du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne étaient mal dirigées dès lors que la prise en charge de M. B...avait été réalisée par des établissements hospitaliers réunionnais et que seule la responsabilité desdits établissements pouvait être engagée en raison d'un défaut d'information ou d'une faute médicale. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement doit être écarté.

Sur l'exception de prescription :

4. D'une part, aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. / Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public. ". Aux termes de l'article 3 de cette loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement ".

5. Le délai de prescription ne court pas à l'encontre d'une victime qui n'est pas en mesure de connaître l'origine du dommage ou du moins de disposer d'indications suffisantes selon lesquelles ce dommage pourrait être imputable au fait de la personne publique. S'agissant d'une créance indemnitaire détenue sur une collectivité publique au titre d'un dommage corporel engageant sa responsabilité, le point de départ du délai de prescription prévu par ces dispositions est le premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les infirmités liées à ce dommage ont été consolidées. La consolidation de l'état de santé de la victime d'un dommage corporel fait courir le délai de prescription pour l'ensemble des préjudices directement liés au fait générateur qui, à la date à laquelle la consolidation s'est trouvée acquise, présentaient un caractère certain permettant de les évaluer et de les réparer, y compris pour l'avenir. Si l'expiration du délai de prescription fait obstacle à l'indemnisation de ces préjudices, elle est sans incidence sur la possibilité d'obtenir réparation de préjudices nouveaux résultant d'une aggravation directement liée au fait générateur du dommage et postérieure à la date de consolidation. Le délai de prescription de l'action tendant à la réparation d'une telle aggravation court à compter de la date à laquelle elle s'est elle-même trouvée consolidée.

6. D'autre part, aux termes de l'article L. 1142-28 du code de la santé publique, issu de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé : " Les actions tendant à mettre en cause la responsabilité des professionnels de santé ou des établissements publics ou privés à l'occasion d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins se prescrivent par dix ans à compter de la consolidation du dommage ". En vertu du deuxième alinéa de l'article 101 de la même loi, ces dispositions sont immédiatement applicables, en tant qu'elles sont favorables à la victime ou à ses ayants droit, aux actions en responsabilité, y compris aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable. Toutefois, le législateur n'a pas entendu rendre la prescription décennale applicable aux actions dirigées contre des établissements publics de santé au titre de créances indemnitaires qui, à la date de publication de la loi du 4 mars 2002, étaient déjà atteintes par la prescription quadriennale prévue par la loi du 31 décembre 1968.

7. Le fait générateur de la créance que M. B...prétend détenir sur le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne est constitué des fautes imputées au professeur Bousquet, praticien hospitalier au sein de cet établissement à l'occasion d'une opération de plastie réalisée le 12 décembre 1985 à la clinique privée Saint-Benoît à La Réunion, à savoir un défaut d'information quelques jours avant l'opération quant aux risques et aux conséquences d'une telle opération et une erreur médicale, sans autre précision, lors de l'opération du 12 décembre 1985.

8. Suite aux mesures d'instruction menées par la cour quant au déroulement de cette opération, le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne ne conteste pas que lors de l'opération de plastie en litige, qui aurait été réalisée le 12 décembre 1985 à la clinique privée Saint-Benoit à La Réunion, le professeur Bousquet aurait réalisé ou participé à cette opération avec d'autres médecins ou supervisé celle-ci. Dans ces conditions, le professeur Bousquet doit être regardé comme ayant agi, dans le cadre de cette opération, en qualité d'agent du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne. Ainsi, le litige indemnitaire né des fautes alléguées décrites au point précédent doit être regardé comme susceptible d'engager la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne.

9. Le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne oppose en défense au fond à la créance indemnitaire dont se prévaut M. B...l'exception de prescription quadriennale faute pour ce dernier d'avoir formulé une demande indemnitaire relative à cette opération du 12 décembre 1985 et à la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne avant la publication de la loi du 4 mars 2002. Le requérant, qui évoquait en première instance une demande indemnitaire adressée au centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne le 31 juillet 2014 et une décision implicite de rejet l'ayant amené à saisir le 10 octobre 2014 le tribunal administratif de Lyon, se borne, suite aux mesures d'instruction menées par la cour, à se prévaloir de l'introduction d'une demande indemnitaire le 10 avril 2003 devant le tribunal administratif de la Réunion, pour défaut d'information concernant l'opération du 11 octobre 1990 d'ablation de la rotule du genou droit, laquelle aurait eu selon lui pour effet d'interrompre le délai de prescription de dix ans prévu par l'article L. 1142-28 du code de la santé publique et fait également état d'une aggravation de son état de santé, lequel ne serait pas complètement consolidé.

10. Premièrement, il résulte de l'instruction et notamment des mesures d'instruction menées par la cour et des termes de la décision du Conseil d'Etat du 30 novembre 2011 que la demande indemnitaire introduite le 10 avril 2003 devant le tribunal administratif de La Réunion, qui ferait suite à une demande indemnitaire préalable qui aurait été adressée le 25 octobre 2002 au centre hospitalier régional public Félix Guyon, portait sur le défaut d'information préalable relative à l'opération de l'ablation de la rotule droite ayant été réalisée le 11 octobre 1990 par le centre hospitalier régional Félix Guyon et sur les conséquences d'un tel défaut d'information préalable. Cette demande indemnitaire concerne ainsi l'opération du 11 octobre 1990, fait générateur différent et postérieur à celui en litige portant sur la ligamentoplastie réalisée le 12 décembre 1985 au sein de la clinique privée Saint-Benoit. Par suite, cette demande indemnitaire qui concernait un autre fait générateur n'a pas pu interrompre le délai de prescription relatif à l'opération du 12 décembre 1985. En se bornant à évoquer cette demande indemnitaire du 10 avril 2003 devant le tribunal administratif de La Réunion, M. B...ne fait état, en première instance tout comme en appel, d'aucun élément de nature à laisser penser que les conséquences de l'opération en litige du 12 décembre 1985 ayant été réalisée par le professeur Bousquet ou à laquelle celui-ci aurait participé à la clinique privée Saint-Benoit auraient été consolidées postérieurement au 1er janvier 1990, date indiquée par le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne ou postérieurement au 11 octobre 1990, date de l'opération d'ablation de la rotule droite réalisée au sein du centre hospitalier régional public Félix Guyon, laquelle a fait suite à d'autres opérations d'ostéotomie, de valgisation et de plastie du ligament antérieur réalisées au sein de ce même établissement le 9 septembre 1988 et 29 mars 1989. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que M. B...n'aurait pas disposé, au plus tard au 11 octobre 1990, date de l'opération d'ablation de la rotule réalisée au sein du centre hospitalier régional public Félix Guyon, des informations suffisantes pour connaître l'étendue des dommages de l'opération en litige du 12 décembre 1985 et pour rechercher la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne employeur du professeur Bousquet.

11. Deuxièmement, le requérant fait état d'une aggravation de son état de santé laquelle ferait obstacle à une prescription de son action indemnitaire à l'encontre du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne. Toutefois, comme le fait valoir le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne, il résulte de l'instruction que la cour administrative d'appel de Bordeaux, par un arrêt du 22 novembre 2016 devenu définitif, le requérant indiquant ne pas s'être pourvu en cassation, a jugé, sur la base de deux rapports médicaux établis respectivement en 2005 et en 2016, qu'il n'existe aucune preuve d'un lien direct, certain et exclusif entre les séquelles orthopédiques résultant de l'accident de circulation du 1er avril 1982 dont a été victime M. B... et la dégradation arthrosique ayant conduit à pratiquer le 25 mars 2010 une intervention chirurgicale destinée à réduire une hernie discale cervicale, laquelle constitue une aggravation de son état de santé par rapport à la consolidation consécutive à l'opération du 11 octobre 1990 d'ablation de la rotule droite réalisée au centre hospitalier Felix Guyon, consolidation fixée au 31 décembre 2002 par la décision du Conseil d'Etat du 30 novembre 2011. Dès lors, M.B..., qui ne conteste pas cette analyse, ne démontre pas l'existence d'un quelconque lien de causalité entre l'opération de plastie du 12 décembre 1985 ayant eu lieu à la clinique Saint-Benoit et ayant eu pour objet de réparer certaines séquelles orthopédiques en lien avec cet accident de la circulation et l'aggravation de son état de santé postérieurement au 31 décembre 2002.

12. Troisièmement, M. B...n'apporte aucun élément de nature à établir l'existence, avant les démarches effectuées en juillet 2014 auprès du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne, d'une quelconque demande indemnitaire concernant l'opération de plastie en litige réalisée le 12 décembre 1985 à la clinique Saint-Benoit, fait générateur différent et antérieur de celui ayant donné lieu à la procédure engagée devant le tribunal administratif de la Réunion le 10 avril 2003.

13. Dès lors, dans les conditions ainsi décrites, en l'absence de démarches interruptives de prescription concernant l'opération du 12 décembre 1985, fait générateur de la créance que M. B...prétend détenir sur le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne, conformément aux dispositions précitées de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968, le délai de prescription quadriennale avait expiré antérieurement à la date de la publication de la loi du 4 mars 2002. Par suite, il y a lieu d'accueillir l'exception de prescription quadriennale invoquée par le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne.

14. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu d'ordonner l'expertise sollicitée, que M. B...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande à fin d'indemnisation et ses conclusions subsidiaires à fin d'organisation d'une expertise. Par suite, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B..., à la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion et au centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne.

Délibéré après l'audience du 6 juin 2019 à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

M. Drouet, président-assesseur,

Mme Cottier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 juillet 2019.

1

8

N° 17LY01549


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17LY01549
Date de la décision : 18/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-01-01 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation. Responsabilité pour faute simple : organisation et fonctionnement du service hospitalier. Existence d'une faute.


Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: Mme Cécile COTTIER
Rapporteur public ?: Mme TERRADE
Avocat(s) : DBKM AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-07-18;17ly01549 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award