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04/07/2019 | FRANCE | N°18LY02641

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 04 juillet 2019, 18LY02641


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 24 novembre 2017 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.

Par un jugement n° 1800638 du 15 mai 2018, le tribunal a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 11 juillet 2018 et le 27 décembr

e 2018, M.C..., représenté par Me Petit, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 24 novembre 2017 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.

Par un jugement n° 1800638 du 15 mai 2018, le tribunal a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 11 juillet 2018 et le 27 décembre 2018, M.C..., représenté par Me Petit, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, en cas d'annulation du refus de délivrance d'un titre de séjour, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, et à titre subsidiaire, une autorisation provisoire de séjour avec droit au travail, et en cas d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français et ou de la décision fixant le pays de destination, de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour avec droit au travail et de réexaminer sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat au profit de son conseil une somme de 1 500 euros au titre des frais du litige.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une contradiction de motifs, au vu de sa motivation ;

Sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

- elle méconnait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle méconnait les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle méconnait les stipulations l'article 24 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'un défaut de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle méconnait les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle méconnait les stipulations l'article 24 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- elle est entachée d'un défaut de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

La requête et le mémoire ont été communiqués au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations en défense.

Par ordonnance du 14 mars 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er avril 2019.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 juin 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Chassagne,

- et les observations de MeB..., représentant M.C.ensemble depuis l'année 2016, que deux enfants sont nés de cette union en 2014 et en 2015, et déclare contribuer de manière effective à leur éduction et entretien depuis leur naissance

Considérant ce qui suit :

1. M. C...est ressortissant de la République démocratique du Congo. Il déclare être entré en France irrégulièrement le 30 juillet 2013. Sa demande tendant au bénéficie de l'asile a été rejetée par le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 14 novembre 2014, décision qui a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 22 juin 2015. M. C...a sollicité du préfet du Rhône la délivrance d'un titre de séjour en faisant valoir sa vie privée et familiale par demande du 13 janvier 2017. Par décisions du 24 novembre 2017 cette autorité lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office. M. C...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler ces décisions. Par un jugement n° 1800638 du 15 mai 2018, dont il relève appel, le tribunal a rejeté cette demande.

Sur la légalité des décisions du 24 novembre 2017 :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; / (...). ".

3. M. C...se prévaut de sa présence depuis l'année 2013 sur le territoire français, où il a rencontré sa compagne. Il entretient depuis une relation avec cette dernière, qui réside sur le territoire national depuis près de dix ans et où, titulaire d'une carte de résident, elle exerce une activité professionnelle stable. Il ajoute qu'ils demeurent.ensemble depuis l'année 2016, que deux enfants sont nés de cette union en 2014 et en 2015, et déclare contribuer de manière effective à leur éduction et entretien depuis leur naissance Il indique s'occuper également des deux premiers enfants de sa concubine, dont l'un est de nationalité française. M. C...invoque la disparition de ses attaches familiales effectives hors de France, notamment l'absence de contacts avec ses enfants, qui résident en Angola, et avec la fille de sa cousine, dont il s'occupait depuis la mort de cette dernière. Enfin, il fait valoir son insertion sociale notamment par l'intermédiaire d'une communauté religieuse. D'une part, s'il ressort des pièces du dossier que M. C...ne justifiait, à la date de la décision en litige, résider ensemble avec sa compagne que depuis au plus tard mars 2016, au regard des différentes pièces qu'il produit, il est constant que deux enfants étaient déjà nés de leur relation le 5 août 2014 et le 16 août 2015. D'autre part, M. C...apporte des justificatifs à l'appui de ses écritures, pour démontrer sa participation de manière effective à l'éducation et l'entretien de ses enfants, mais aussi de ceux de sa concubine, notamment en accompagnant ces derniers en consultation médicale ou à l'école. Ces attestations, établies antérieurement à la décision contestée, sont corroborées par des pièces postérieures qui se rapportent ainsi à la même situation, préexistante à la décision en litige. De surcroît, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que la compagne de M. C...est mère d'un enfant de nationalité française, la reconstitution de la cellule familiale qu'ils composent, avec ces quatre enfants, apparait pouvoir difficilement être reconstituée hors de France. Dès lors, au regard de l'ensemble des circonstances particulières de l'espèce, le préfet du Rhône en refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. C...a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Il résulte de ce qui précède que M. C...est également fondé à soutenir, d'une part, que la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un défaut de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, et d'autre part, par voie de conséquence, que la décision fixant le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office est entachée d'un défaut de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement, ni examiner les autres moyens soulevés par M.C..., que ce dernier est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes d'annulation des décisions du préfet du Rhône du 24 novembre 2017 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

6. Le présent arrêt, eu égard à ses motifs, implique nécessairement la délivrance par le préfet du Rhône à M. C...d'un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée vie familiale ". Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet du Rhône de délivrer ce titre dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt. Il appartient également au préfet, conformément à ce que prévoient les dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours.

Sur les frais liés au litige :

7. Du fait de l'admission de M. C...au bénéfice de l'aide juridictionnelle, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 800 euros à verser à Me Petit, pour l'application de ces dispositions, sous réserve que Me Petit renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1800638 du 15 mai 2018 du tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : Les décisions du préfet du Rhône du 24 novembre 2017 portant refus de délivrance d'un titre de séjour à M.C..., obligation de quitter le territoire français et fixation du pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office, sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer à M. C...un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de cette notification.

Article 4 : L'Etat versera à Me Petit, avocat de M.C..., une somme de 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Petit renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle au titre de la présente instance.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., à Me Petit et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2019, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

M. Chassagne, premier conseiller.

Lu en audience publique le 4 juillet 2019.

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N° 18LY02641


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY02641
Date de la décision : 04/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: M. Julien CHASSAGNE
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : PETIT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-07-04;18ly02641 ?
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