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04/07/2019 | FRANCE | N°17LY00978

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 04 juillet 2019, 17LY00978


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 24 décembre 2013 par lequel le préfet du Rhône a procédé au retrait de sa carte professionnelle en qualité de chauffeur de taxi et d'enjoindre à cette autorité de lui restituer sa carte professionnelle dans un délai de 8 jours à compter de la notification du jugement à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1400183 du 6 décembre 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté

sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 22 février 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 24 décembre 2013 par lequel le préfet du Rhône a procédé au retrait de sa carte professionnelle en qualité de chauffeur de taxi et d'enjoindre à cette autorité de lui restituer sa carte professionnelle dans un délai de 8 jours à compter de la notification du jugement à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1400183 du 6 décembre 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 22 février 2017, M.B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 6 décembre 2016 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 24 décembre 2013 par lequel le préfet du Rhône a procédé au retrait définitif de sa carte professionnelle en qualité de chauffeur de taxi ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui restituer sa carte professionnelle dans un délai de 8 jours à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les entiers dépens de l'instance, timbre de plaidoirie et CNBF de 13 euros sur le fondement des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'a pas été rendu destinataire du procès-verbal de la séance de la commission du 12 novembre 2013 ; le représentant des services de l'Etat et des services de police ont, lors de cette séance, fait état de faits sans lien avec la procédure en cours et sans apporter la moindre preuve et ce alors que le courrier de convocation ne fait pas mention de ces éléments ;

- la procédure disciplinaire dont il a fait l'objet a été anormalement longue dès lors que le conseil de discipline ne s'est réuni que le 12 novembre 2013 et pendant toute cette période la carte lui a été retirée ; la jurisprudence considère qu'il appartient à l'autorité disciplinaire de respecter un délai raisonnable entre le moment où elle a connaissance des faits commis et le moment où elle décide de lui infliger une sanction ;

- les membres de la commission n'étaient pas impartiaux dès lors que le brigadier Martinez a dressé le procès-verbal de police du 5 juin 2015, qu'il a participé à l'enquête de police ayant conduit à la sanction disciplinaire et qu'il était également membre de la commission de discipline ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que la sanction prononcée est excessive et disproportionnée ; il s'est vu retirer sa carte dès le 5 juin 2013 sans réunion de la commission compétente ; le délai avant la prise de la décision a été anormalement long ; il n'a jamais fait l'objet antérieurement d'une sanction disciplinaire ; il était détenteur d'un permis de conduire probatoire et les compagnies d'assurance ont refusé de l'assurer ; il pouvait seulement souscrire une assurance pour particulier ;

Par un mémoire, enregistré le 17 juillet 2017, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- selon le relevé de conclusions du 19 décembre 2013, il n'est fait aucune mention d'autres faits que ceux pour lesquels M. B...a été convoqué, à savoir la circulation avec un véhicule terrestre à moteur sans assurance et faux et usage de faux ; c'est sur ces seuls faits que la commission a émis un avis ;

- aucun délai réglementaire n'est prévu quant à la saisine de la commission de discipline des taxis ; la procédure disciplinaire a été engagée le 10 octobre 2013, soit seulement 4 mois après connaissance par ses services des infractions commises pour finalement aboutir à un avis le 12 novembre 2013 et à son arrêté du 24 décembre 2013 ;

- l'article 31 de l'arrêté préfectoral du 28 janvier 2010 relatif à la réglementation des taxis dans le Rhône précise que si le titulaire de l'autorisation de stationnement ne peut justifier d'une police d'assurance conforme aux prescriptions de l'article 30, son autorisation lui est immédiatement retirée sans préjudice de la procédure disciplinaire systématiquement engagée à son encontre ;

- si le brigadier Martinez a participé à plusieurs étapes de la procédure disciplinaire, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait eu un intérêt personnel ou fait preuve d'une certaine animosité à l'encontre de M.B... ; la commission disciplinaire s'est prononcée et a retenu par avis le retrait définitif de la carte professionnelle par 7 voix pour et 2 abstentions ; le seul vote du brigadier Martinez n'a pas eu d'influence sur le prononcé du retrait ;

- les faits reprochés à l'intéressé sont graves dès lors qu'il n'a pas été en mesure de présenter une attestation d'assurance avec la mention " taxi ", qu'il a déclaré ne plus être assuré depuis 2011 et avoir en sa possession une fausse vignette d'assurance

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 février 2017.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des transports ;

- le décret n° 86-427 du 13 mars 1986 portant création de la commission des taxis et des voitures de petite remise ;

- l'arrêté n°10-1734 du 28 janvier 2010 modifié relatif à la réglementation des taxis dans le département du Rhône ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Caraës,

- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., représentant M.B....

Considérant ce qui suit :

1. Une carte professionnelle de chauffeur de taxi a été délivrée à M. B...le 8 décembre 2005 et a été renouvelée à partir du 16 avril 2012. Le 5 juin 2013, M. B...a fait l'objet d'un contrôle de police conduisant à la rédaction d'un procès-verbal de contravention pour défaut d'assurance et faux et usage de faux au motif que l'intéressé n'a pu présenter d'attestation d'assurance pour son taxi, a réalisé une fausse attestation d'assurance et en a fait usage. Le jour même, sa carte professionnelle lui a été retirée par les services de police. Le 10 octobre 2013, le préfet du Rhône a informé M. B...de la réunion du conseil de discipline de la commission départementale des taxis et voitures de petite remise le 12 novembre 2013. Par avis du 12 novembre 2013, la commission a proposé le retrait définitif de la carte professionnelle de M. B...et, par arrêté du 24 décembre 2013, le préfet du Rhône a procédé au retrait définitif de sa carte professionnelle en qualité de chauffeur de taxi. M. B...relève appel du jugement du 6 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande dirigée contre cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du préfet du Rhône du 24 décembre 2013 :

2. Aux termes de l'article L. 3121-10 du code des transports : " L'exercice de l'activité de conducteur de taxi est subordonné à la délivrance d'une carte professionnelle par l'autorité administrative ". Aux termes de l'article L. 3124-2 du même code : " En cas de violation par un conducteur de taxi de la réglementation applicable à la profession, l'autorité administrative peut lui donner un avertissement ou procéder au retrait temporaire ou définitif de sa carte professionnelle. ". Aux termes de l'article 1er du décret du 13 mars 1986 portant création de la commission des taxis et des voitures de petite remise, dans sa rédaction alors en vigueur : " Il est créé une commission départementale des taxis et des voitures de petite remise dans les conditions prévues par le présent décret, chargée de formuler des avis sur les questions d'organisation, de fonctionnement et de discipline des professions concernées (...) ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " (...) La commission départementale est présidée par le commissaire de la République ou par son représentant ". Aux termes de l'article 3 de ce même décret, " Les commissions communales et départementales comprennent, en nombre égal, des représentants de l'administration, des représentants des organisations professionnelles les plus représentatives au plan local et des représentants des usagers. Ces membres sont désignés par le maire ou par le commissaire de la République, suivant le cas. Ils siègent avec voix délibérative. ". Aux termes de l'article 4 du décret : " Les avis des commissions doivent être rendus en séance plénière. Toutefois, en matière disciplinaire, siègent seuls les membres des professions concernées et les représentants de l'administration, dans des sections spécialisées désignées à cet effet. Les membres de ces sections ne peuvent prendre part aux délibérations lorsqu'ils ont un intérêt personnel à l'affaire qui en fait l'objet. /Les avis sont pris à la majorité des membres et, en cas de partage, la voix du président est prépondérante. ". Aux termes de l'article 9 de l'arrêté n° 10-1734 du 28 janvier 2010 modifié relatif à la réglementation des taxis dans le département du Rhône : " Nul ne peut exercer l'activité de conducteur de taxi s'il n'est pas titulaire d'une carte professionnelle délivrée par le préfet du Rhône ".

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, par courrier du 10 octobre 2013, M. B...a été convoqué en vue d'une séance, prévue le 12 novembre suivant, de la commission départementale des taxis et voitures de petite remise siégeant en formation disciplinaire. Ce courrier précise les faits reprochés à l'intéressé tirés de la " circulation avec un véhicule terrestre à moteur sans assurance et faux et usage de faux " et mentionne que " la sanction est susceptible d'entraîner un retrait définitif " de sa carte professionnelle. Il ressort du procès-verbal de cette séance que les membres de la commission ne se sont prononcés qu'au vu des faits de circulation avec un véhicule à moteur sans assurance et faux et usage de faux sans prendre en compte, contrairement aux allégations du requérant, des faits sans lien avec cette procédure. Par suite, le moyen tiré de ce que les membres de la commission se seraient prononcés sur des faits étrangers à ceux ayant conduit à la saisine de la commission doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aucun texte applicable ni aucun principe général du droit ne prescrit de délai pour l'exercice d'une action disciplinaire à l'égard d'un conducteur de taxi. Par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir que l'autorité investie du pouvoir disciplinaire n'aurait pas respecté un délai raisonnable à compter de sa connaissance des faits pour le sanctionner.

5. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que le 5 juin 2013, le brigadier de police, Philippe Montagnier a constaté que M. B...n'était pas en mesure de présenter une attestation d'assurance avec la mention taxi et que l'intéressé lui a indiqué qu'il n'était pas assuré depuis environ 2011 et " avait effectué une fausse attestation d'assurance par le biais d'internet ". Le même jour, en application de l'arrêté du préfet du Rhône relatif à la réglementation des taxis dans le département du Rhône, le brigadier Julien Martinez a procédé au retrait matériel immédiat de la carte professionnelle de M. B...afin de la remettre aux autorités administratives. Si le brigadier Julien Martinez était membre de la commission départementale des taxis, en qualité de représentant de la direction départementale de la sécurité publique, lors de la séance de cette commission qui s'est tenue le 12 novembre 2013, la circonstance que le même brigadier, dont il est constant qu'il n'a pas lui-même procédé au contrôle de l'activité de conducteur de taxi de M.B..., a participé à l'examen des faits reprochés à celui-ci et pris part à la délibération par laquelle la commission a proposé que ces faits soient sanctionnés par le retrait définitif de la carte professionnelle n'est pas, par elle-même, de nature à démontrer l'absence d'impartialité de ladite commission, dès lors que le brigadier n'avait pas manifesté d' animosité ou fait preuve de partialité envers M. B...et qu'il n'avait aucun intérêt personnel ou direct à l'affaire.

6. En dernier lieu, aux termes de l'article 28 de l'arrêté du préfet du Rhône du 28 janvier 2010 modifié relatif à la réglementation des taxis dans le département du Rhône : " (...) Doivent être présentés à toute réquisition des agents de l'autorité, les documents suivants : (...) attestation d'assurance en cours de validité et conforme à l'article 30 du présent arrêté " et aux termes de l'article 30, " Le titulaire de l'autorisation de stationnement doit justifier qu'il a contracté une police d'assurance individuelle ou collective à titre professionnel, le garantissant pour une somme illimitée contre les accidents qui pourraient être causés par le conducteur de son véhicule taxi ou du fait de son véhicule taxi soit aux personnes transportées soit aux tiers ".

7. Il est constant que, lors du contrôle de police effectué le 5 juin 2013, M. B...n'a pas été en mesure de présenter une attestation d'assurance avec la mention taxi et qu'il a lui-même précisé qu'il exerçait l'activité de conducteur de taxi sans être assuré depuis 2011et " avait réalisé une fausse attestation d'assurance par le biais d'internet ". Les circonstances, que M. B... n'a pas été sanctionné, préalablement à l'édiction de la décision attaquée et que le brigadier Julien Martinez a procédé au retrait matériel de sa carte professionnelle le 5 juin 2013, sont sans incidence sur la légalité de l'arrêté du préfet du Rhône du 24 décembre 2013. Par suite, eu égard à la gravité des faits dont s'est rendu coupable M. B..., qui par ailleurs procédait au transport de patient pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône ou d'autres départements, celui-ci n'est pas fondé à soutenir qu'en édictant la sanction litigieuse, le préfet du Rhône a commis une erreur d'appréciation, ni que cette sanction est disproportionnée par rapport aux faits en cause.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. C...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2019, à laquelle siégeaient :

M. Drouet, président de la formation de jugement,

Mme Cottier, premier conseiller,

Mme Caraës, premier conseiller.

Lu en audience publique le 4 juillet 2019.

3

N° 17LY00978


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY00978
Date de la décision : 04/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01-06 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. Réglementation des activités économiques. Activités soumises à réglementation. Taxis.


Composition du Tribunal
Président : M. DROUET
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : SELAS LLC et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-07-04;17ly00978 ?
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