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20/06/2019 | FRANCE | N°18LY04096

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 20 juin 2019, 18LY04096


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Maïa Sonnier, agissant en qualité de mandataire du groupement d'entreprises constitué avec les sociétés Zwahlen et Mayr, Freyssinet et Maïa Fondations, a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner in solidum la métropole de Lyon et la société BG Ingénieurs conseils à verser au groupement d'entreprises la somme de 1 916 597 euros HT en règlement du marché de travaux de construction d'une passerelle sur le canal de Jonage à Decines-Charpieu et du cheminement sous ouvrage en rive

gauche et d'ordonner une expertise judiciaire.

Par un jugement n° 1605862 du 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Maïa Sonnier, agissant en qualité de mandataire du groupement d'entreprises constitué avec les sociétés Zwahlen et Mayr, Freyssinet et Maïa Fondations, a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner in solidum la métropole de Lyon et la société BG Ingénieurs conseils à verser au groupement d'entreprises la somme de 1 916 597 euros HT en règlement du marché de travaux de construction d'une passerelle sur le canal de Jonage à Decines-Charpieu et du cheminement sous ouvrage en rive gauche et d'ordonner une expertise judiciaire.

Par un jugement n° 1605862 du 20 septembre 2018, le tribunal a rejeté sa demande et mis à sa charge une somme de 277 129,55 euros, au titre de pénalités de retard, à verser à la Métropole de Lyon.

Procédure devant la cour

I. Par une requête et des mémoires enregistrés le 16 novembre 2018 et les 25 janvier et 15 février 2019 sous le n° 1804096, la société Maïa Sonnier, représentée par MeB..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'ordonner avant dire droit une expertise judiciaire ;

3°) de condamner la métropole de Lyon à verser au groupement d'entreprises dont elle est mandataire constitué avec les sociétés Zwahlen et Mayr, Freyssinet et Maïa Fondations la somme de 2 117 718,45 euros HT, assortie des intérêts légaux à compter du décompte final ;

4°) de mettre à la charge de la métropole de Lyon la somme de 5 000 euros au titre des frais du litige.

Elle soutient que :

- le tribunal ne pouvait pas rejeter les postes de réclamations correspondant à des prestations supplémentaires et à des travaux non prévus en se fondant sur le caractère forfaitaire du marché ou de certains de ses prix alors qu'il s'agissait d'un marché sur bordereau de prix unitaires ;

- en l'absence d'opposition du maître de l'ouvrage, la rémunération des travaux supplémentaires sur les parties passerelle et estacade réalisés sous le contrôle du maître d'oeuvre ne peut être refusée au motif qu'ils n'ont pas donné lieu à l'émission d'ordre de service ;

- s'agissant de la partie estacade, le groupement d'entreprises a droit à la somme de 201 148,55 euros HT pour la redéfinition des ouvrages dans leur dimensionnement, implantation et mode constructif et compte tenu des conditions imprévisibles rencontrées ;

- les travaux de blindage en paroi berlinoise ont été rendus nécessaires non par l'emplacement d'une canalisation de la société Veolia mais par l'abaissement de la culée C2 à la demande du maître d'oeuvre qui de surcroît avait fourni des hypothèses de calculs qui se sont révélées erronées ;

- le prix n° 7040 ne rémunère pas le matage béton des culées contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges ;

- les travaux de forages complémentaires de reconnaissance, qui ont fait l'objet d'un ordre de service, n'étaient pas prévisibles compte tenu de ce que l'article 1.2.2 du CCTP stipule que les renseignements sur le plan géotechnique étaient donnés dans le rapport géotechnique auquel les sols rencontrés se sont avérés non conformes ; ces travaux de forages se sont avérés utiles ; s'ils ont fait l'objet d'un prix par l'ordre de service n° 2, celui-ci lui est inopposable dès lors que des réserves ont été émises ; la découverte de la réalité de la nature des sols a engendré des pertes de coulis lors de la réalisation des micropieux et rendu nécessaires des études d'exécution ;

- les hypothèses retenues pour l'établissement du prix n° 2120 " épuisement des eaux " ne couvrent pas les conséquences d'une augmentation de 44 % du volume du batardeau qui n'était pas prévisible et a été décidée en cours de chantier par ordre de service ;

- subsidiairement il a droit à la rémunération des conséquences de la conception défectueuse de l'ouvrage qu'il n'a pu déceler avant la réalisation des notes de calculs et des études d'exécution et qui a dû être repensée pendant l'exécution du marché alors qu'il n'avait aucune mission de conception, la métropole de Lyon étant tenue des fautes de son maître d'oeuvre inscrites dans le marché alors qu'elle a lancé une procédure de consultation des entreprises sur la base d'un projet dont elle n'a pas validé la conception en phase études avant l'appel d'offres ;

- s'agissant à ce titre de l'agrandissement de la semelle et du batardeau de la pile n° 1, s'il a fait l'objet de l'ordre de service n° 3, les prix nouveaux n°s 4 et 9 lui sont toutefois inopposables dès lors que des réserves ont été émises ;

- les travaux réalisés sous le contrôle de la maîtrise d'oeuvre pour le déplacement du quai de chargement, l'impact sur la charpente métallique de la modification de la base du mât, le changement de tonnage du mât et de la distance de levage, le matage de plaque de base du mât, du gros béton de bouchon, du soudage des flasques et usinage, des suspentes et oreilles d'ancrage et des tubes inox n'ont fait l'objet d'aucune opposition compte tenu de la nécessité de réaliser des ouvrages différents de ceux prévus au marché ;

- le changement du mode de fondation des culées, décidé par le maître d'oeuvre le 5 janvier 2012, a conduit à l'abandon des études déjà réalisées soit la perte de deux mois de travail ;

- la modification des ancrages du mât dans le fût de la pile 1 après les études d'exécution a eu des incidences sur les frais de chantier et l'enchainement des travaux de la pile ; le matage de la plaque de base du mât n'était pas prévu ; le tonnage du mât estimé a dû être augmenté après la réalisation des calculs et des moyens de levage ont dû être mis en oeuvre pour permettre sa pose ; l'éclairage du mât qui a nécessité une modification de la charpente a été demandé en cours de chantier par le maître d'ouvrage et le maître d'oeuvre ;

- le déplacement du quai de déchargement dans l'emprise du chantier qui a été décidé par le maître d'ouvrage n'était pas prévu au marché ni prévisible et a rendu nécessaire la réalisation d'un quai en palplanches dont il est fondé à demander la rémunération comme l'a reconnu le maître d'oeuvre dans l'analyse de son mémoire de demande de rémunération complémentaire ;

- le tribunal a omis de statuer sur sa demande, fondée, d'indemnisation du préjudice résultant de la notification tardive du marché ;

- au titre des sujétions imprévues, il est fondé à demander le paiement des travaux supplémentaires dus aux intempéries, aux hétérogénéités des sols et aux modifications des ouvrages qui étaient imprévisibles ;

- son préjudice correspondant à 56 % du prix du marché initial, le bouleversement dans l'économie du marché est caractérisé ;

- la demande reconventionnelle de la métropole de Lyon concernant les pénalités de retard était irrecevable au regard des données du marché ; en tout état de cause, le retard n'est pas imputable aux entreprises membres du groupement de sorte qu'elles auraient dû bénéficier d'une prolongation des délais d'exécution et le montant des pénalités appliquées est manifestement excessif.

Par un mémoire en défense enregistré le 31 décembre 2018, la société BG Ingénieurs conseils, représentée par la SCP Ducrot associés DPA, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société Maïa Sonnier en sa qualité de mandataire du groupement d'entreprises au titre des frais du litige.

Elle soutient que :

- le groupement appelant ne démontre pas la nécessité de prescrire une expertise ;

- les demandes indemnitaires ne sont pas fondées en droit et mal fondées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 janvier 2019, la métropole de Lyon, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 6 000 euros soit mise à la charge du groupement appelant.

Elle fait valoir que :

- l'appelant ne démontre pas la nécessité de prescrire une expertise ;

- les demandes indemnitaires ne sont pas fondées en droit et mal fondées.

II. Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 16 novembre 2018 et 15 février 2019, sous le n° 1804097, la société Maïa Sonnier, représentée par MeB..., demande à la cour d'ordonner, sur le fondement des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative, qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement n° 1605862 du 20 septembre 2018 du tribunal administratif de Lyon.

Elle soutient que :

- l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables compte tenu du montant de la condamnation ;

- la demande reconventionnelle de la métropole de Lyon concernant les pénalités de retard était irrecevable au regard des données du marché ; en tout état de cause, le retard n'est pas imputable aux entreprises membres du groupement de sorte qu'elles auraient dû bénéficier d'une prolongation des délais d'exécution et le montant des pénalités appliquées est manifestement excessif ;

- les moyens qu'elle invoque sont sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 janvier 2019, la métropole de Lyon, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 6 000 euros soit mise à la charge du groupement appelant au titre des frais du litige.

Elle fait valoir que la requête de la société Maïa Sonnier, qui ne démontre pas que l'exécution du jugement attaqué entrainerait des conséquences difficilement réparables, doit être rejetée en l'absence de moyens sérieux.

Un mémoire produit pour la métropole de Lyon, enregistré le 6 mai 2019, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Michel,

- et les observations de MeB..., pour la société Maïa Sonnier, de MeD..., pour la métropole de Lyon et de Me A...pour la société BG Ingénieurs conseils.

Une note en délibéré a été produite le 3 juin 2019 pour la métropole de Lyon.

Considérant ce qui suit :

1. Il y a lieu de joindre, pour qu'il y soit statué par un même arrêt, les requêtes visées ci-dessus de la société Maïa Sonnier qui tendent respectivement à l'annulation et au sursis à l'exécution du même jugement.

2. La métropole de Lyon a confié le 14 septembre 2011 au groupement momentané d'entreprises constitué par la société Maïa Sonnier, mandataire, avec les sociétés Zwahlen et Mayr, Freyssinet et Maïa Fondations, les travaux de construction de la passerelle de franchissement du canal de Jonage à Decines-Charpieu et la réalisation du cheminement sous ouvrage en rive gauche, dans le cadre de l'opération d'aménagement des berges du canal. La maîtrise d'oeuvre des travaux a été confiée à un groupement momentané d'entreprises composé notamment de la société Tonello, aux droits de laquelle est venue la société BG ingénieurs conseils. Le 7 avril 2014, la société Maïa Sonnier a adressé le projet de décompte final du marché du groupement d'entreprises, accompagné de deux mémoires de demande de rémunération complémentaire et d'indemnisation portant respectivement sur les parties passerelle et estacade de l'opération. Les travaux ont été réceptionnés le 12 juin 2013 avec réserves dont certaines n'ont pas été levées. Après une mise en demeure infructueuse de notifier le décompte général adressée par la société Maïa Sonnier à la métropole de Lyon, le mandataire du groupement d'entreprises a saisi le CCIRA de Lyon qui, dans son avis du 11 janvier 2016, a proposé qu'il soit fait partiellement droit à ses demandes de rémunérations complémentaires et d'indemnisation pour un montant global de 150 000 euros HT et de ne pas appliquer de pénalités de retard pour tenir compte de ce que si le groupement d'entreprises avait sous estimé la complexité des études d'exécution et des mises au point qui restaient à effectuer avant de passer à la phase de réalisation, la société Maïa Sonnier, mandataire, avait fait son possible, tout au long du chantier, pour limiter les retards. C'est dans ces conditions que la société Maïa Sonnier, agissant en qualité de mandataire du groupement d'entreprises, a saisi le tribunal administratif de Lyon d'une demande tendant à prescrire une expertise judiciaire et à condamner in solidum la métropole de Lyon et la société BG Ingénieurs conseils à lui verser la somme de 1 916 597 euros HT. Par un jugement du 20 septembre 2018, le tribunal a rejeté sa demande et l'a condamnée à verser à la métropole de Lyon la somme de 277 129,55 euros au titre des pénalités de retard portées au décompte général notifié en cours d'instance le 22 novembre 2016 par le maître d'ouvrage. Si dans sa requête introductive d'appel enregistrée sous le n° 18LY04096, la société Maïa Sonnier a déclaré rechercher la responsabilité solidaire de la métropole de Lyon et de la société BG Ingénieurs conseils, dans ses mémoires enregistrés les 25 janvier et 15 février 2019, elle ne recherche plus que la condamnation de la métropole de Lyon.

Sur les conclusions à fin d'annulation du jugement :

3. En premier lieu, les travaux supplémentaires effectués par l'entrepreneur en l'absence de tout accord écrit et préalable du maître d'oeuvre ne peuvent être indemnisés que s'ils revêtent un caractère indispensable à l'exécution de l'ouvrage selon les règles de l'art.

4. Il est stipulé à l'article 3.1 de l'acte d'engagement que le marché de travaux est traité à prix unitaires, au sens de l'article 8.23 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) de la communauté urbaine de Lyon modifié, dont l'article 8.33 indique que chaque prix unitaire a un caractère forfaitaire et que le libellé des prix unitaires est donné dans le bordereau des prix. Il est mentionné à l'article 5.1.1 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) que les ouvrages ou prestations faisant l'objet du marché seront réglés par application des prix unitaires. Il ressort toutefois des mentions du devis quantitatif estimatif que les travaux et prestations faisant l'objet du marché ont été réglés par application des prix unitaires ou forfaitaires.

5. S'agissant de la partie estacade, la société requérante n'établit pas que la redéfinition des ouvrages dans leur dimensionnement, implantation et mode constructif n'était pas comprise dans les études d'exécution de génie civil, prestation rémunérée par application d'un prix forfaitaire selon l'article 2.10.1 du CCTP, incluses dans le marché du groupement d'entreprises qui était tenu, en vertu des articles 2.10 et 2.10.1 du CCTP, d'optimiser les études de conception de l'ouvrage en phase d'exécution. Si elle soutient en outre que le dossier géotechnique du marché annexé au CCTP faisait apparaître un sol de sables graveleux, alors que le sol a révélé comporter aussi une couche de marne, ce qui a nécessité des investigations et études de sols complémentaires, un nouveau calcul des micropieux, une augmentation de leur longueur et une surconsommation de coulis lors de leur réalisation, l'article 4.2 du CCAP précise que le rapport géotechnique a un caractère indicatif. Il résulte de la page 8 de l'analyse par la société BG ingénieurs conseils du mémoire de demande de rémunération complémentaire que l'émission du prix nouveau n° 1 correspond aux investigations en cause. Il est par ailleurs précisé aux articles 4.8.1.1 et 4.8.3 du CCTP que la longueur des micropieux, dont la réalisation est rémunérée au mètre linéaire, est donnée à titre indicatif. Enfin, il résulte également de la page 8 de l'analyse du mémoire de demande de rémunération complémentaire que le maître d'oeuvre avait proposé à l'entreprise d'adapter la méthode d'injection, ce qu'elle n'a pas fait. Le groupement d'entreprises ne peut donc pas prétendre, en tout état de cause par ces conclusions, nouvelles en appel, à une rémunération complémentaire de ce chef de demande.

6. L'article 5.1.2 du CCAP stipule que les prix sont réputés tenir compte de toutes les sujétions d'exécution des travaux qui sont normalement prévisibles dans les conditions de temps ou de lieu où s'exécutent ces travaux et résultant notamment de la présence de canalisations. Si la société Maïa Sonnier soutient que les travaux de blindage en paroi berlinoise de la culée C2 de la passerelle ont été rendus nécessaires par l'abaissement de la culée C2 de 50 cm à la demande du maître d'oeuvre qui de surcroît avait fourni des hypothèses de calculs qui se sont révélées erronées, il résulte cependant de l'instruction que le blindage de la culée s'est avéré nécessaire en raison de la présence de réseaux à proximité de son emprise malgré leur déviation préalable qui s'est avérée insuffisante. En outre, la société Maïa Sonnier n'établit pas que la modification de la profondeur de la culée n'était pas au nombre des études d'exécution de génie civil incluses dans son marché. Sa demande de rémunération complémentaire au titre des travaux de blindage en paroi berlinoise de la culée C2 de la passerelle ne peut donc être accueillie.

7. Il est ensuite soutenu que les hypothèses retenues pour l'établissement du prix n° 2120 " épuisement des eaux " ne couvrent pas les conséquences d'une augmentation de 44 % du volume du batardeau qui n'était pas prévisible et a été décidée en cours de chantier par ordre de service. Toutefois selon le libellé du prix n° 2120 dans le bordereau de prix unitaires, la rémunération de l'épuisement des eaux du batardeau devait être forfaitaire, indépendamment de la quantité d'eau à évacuer, pendant la durée nécessaire.

8. S'agissant de l'agrandissement de la semelle et du batardeau de la pile n° 1, qui a fait l'objet de l'ordre de service n° 3 complété par l'ordre de service n° 4, la société Maïa Sonnier soutient que les prix nouveaux n°s 4 et 9 lui sont inopposables dès lors que des réserves ont été émises sur les ordres de services n° 3 et 4. Elle ne démontre cependant pas davantage en appel qu'en 1ère instance que la réalisation de ces travaux d'agrandissement n'aurait pas été intégralement comprise dans ces prix.

9. En ce qui concerne l'augmentation de l'épaisseur du mât et de son tonnage, il résulte de la fiche VISA n° 40 du 3 mai 2012 et de la page 9 de l'analyse du mémoire de demande de rémunération complémentaire que le maître d'oeuvre a donné son accord à cette initiative du groupement d'entreprises pour des raisons de sécurité. Il résulte du libellé du prix n° 6090 du bordereau de prix unitaires que la rémunération du montage et de la mise en place de l'ossature sur le chantier était prévue forfaitairement. La société appelante n'est donc pas fondée à demander une somme supplémentaire au titre de la location d'engins pour le levage du mât.

10. Il résulte de l'instruction que du fait de la modification de la base du mât, son ancrage a été réalisé à l'aide de 48 boulons au lieu des 14 prévus et les platines d'ancrage ont été noyées dans le béton. Toutefois le prix des tiges d'ancrage du mât était unitaire selon le libellé du prix n° 6120 et ce prix incluait donc la fourniture des écrous, quel que soit leur nombre, ainsi que les sujétions dues au gabarit. La demande de la société Maïa Sonnier au titre de l'ancrage du mât doit être rejetée.

11. Il en va de même s'agissant des travaux supplémentaires de soudage des flasques et d'usinage des oreilles d'ancrage et aux suspentes, qui sont imputables à la modification des oreilles d'ancrages en tête de mât et de culée, en conséquence d'un manque de coordination au sein du groupement d'entreprises pour fixer la dimension de ces oreilles.

12. Le groupement peut en revanche prétendre à l'indemnisation du surcoût lié au déplacement du quai de chargement demandé par le maître d'ouvrage postérieurement à l'installation du chantier nautique pour le montant de 31 286 euros HT proposé par le maître d'oeuvre.

13. Il résulte également de l'instruction que des tubes inox ont été mis en place pour le passage des câbles électriques dans la structure du tablier du mât de la passerelle, pour les besoins de son éclairage, décidé en cours de chantier. Le groupement a droit au paiement de la somme de 4 441 euros HT proposée par la société BG Ingénieurs conseils pour la mise en place de ces tubes. Si la société Maïa Sonnier demande en outre l'indemnisation des travaux de modification de la charpente pour le passage des câbles électriques, elle n'apporte pas à la cour d'élément de nature à justifier le versement d'une somme à ce titre.

14. Le maître d'oeuvre a validé dans l'analyse du mémoire de demande de rémunération complémentaire les quantités supplémentaires de gros béton de bouchon. Il y a lieu de mettre à la charge de la métropole de Lyon la somme de 8 577 euros HT calculée à partir des prix du marché par la société BG ingénieurs conseils.

15. Enfin, la société Maïa Sonnier soutient que le changement du mode de fondation des culées, décidé par le maître d'oeuvre le 5 janvier 2012 a conduit à l'abandon des études déjà réalisées, soit la perte de deux mois de travail. La société BG Ingénieurs conseils, dans son analyse du mémoire de demande de rémunération complémentaire, a estimé que compte tenu de la nature et de l'importance de l'adaptation des études en phase d'exécution et conformément au marché après la réalisation des micropieux d'essai, la demande de rémunération complémentaire était justifiée à hauteur seulement de trois journées de travail d'ingénieur pour la reprise du model, soit la somme de 2 170 euros HT qu'il y a lieu de mettre à la charge du maître d'ouvrage.

16. Il résulte de ce qui précède que le groupement d'entreprises peut prétendre, au titre des travaux supplémentaires, non prévus au marché, au versement par la métropole de Lyon d'une somme totale de 46 474 euros HT.

17. En deuxième lieu, la société Maïa Sonnier qui ne demande pas à la cour de se prononcer sur la responsabilité du maître d'oeuvre à son égard ainsi qu'il a été précisé au point 2, ne peut utilement soutenir que le groupement d'entreprises peut prétendre à la prise en charge financière des conséquences subies en raison de la conception défectueuse de l'ouvrage.

18. En troisième lieu, la requérante soutient que le marché de travaux lui a été notifié avec un retard de cinq semaines après la date prévue au planning général d'exécution joint à son offre, qui prévoyait un démarrage des travaux le 29 août 2011, et que ce retard et le décalage de plus de cinq mois de la commande des aciers ont retardé l'exécution du chantier et généré des frais supplémentaires ainsi qu'une perte de chiffre d'affaires. Toutefois, elle n'établit pas que les préjudices qu'elle invoque résulteraient de ce retard et du décalage de commande et non de l'allongement de la durée des études d'exécution et des conditions non conformes de la pose de la suspension par l'entreprise Freyssinet, membre du groupement.

19. En quatrième lieu, la société Maïa Sonnier soutient que le groupement est fondé à demander le paiement des travaux supplémentaires dus aux intempéries, aux hétérogénéités des sols et aux modifications des ouvrages, toutes circonstances qu'elle qualifie d'imprévisibles. Toutefois et comme il déjà été dit, le groupement était tenu conformément à son marché d'optimiser en phase d'exécution les études de conception de l'ouvrage et le rapport géotechnique avait un caractère indicatif. S'agissant des intempéries, il résulte de l'instruction que les camions de livraison de colis de matériel ont été bloqués pendant près d'une semaine au début du mois de février 2013 par un arrêté du préfet de l'Ain interdisant la traversée de la ville de Nantua en raison de fortes chutes de neige. Il résulte de l'analyse du mémoire de demande de rémunération complémentaire que le groupement n'a subi de ce fait aucune perte ni avarie mais seulement un décalage de sept jours ouvrés pour le montage des éléments. La société Maïa Sonnier n'établit pas l'existence d'un lien de causalité direct entre le préjudice invoqué évalué à la somme de 211 943 euros HT et la chute de neige en question.

20. En dernier lieu, aux termes de l'article 7.2 du CCAP : " En cas de retard dans le respect du délai global contractuel ou, lorsqu'ils existent, des délais partiels contractuels, une retenue égale à 1/1000ème du montant initial du marché, évalué en prix de base, par jour calendaire de retard, sera appliqué. ". En vertu de l'article 18 du CCAG de la communauté urbaine de Lyon, la retenue en cas de non respect d'un délai contractuel s'applique par précompte sur le prochain acompte demandé par le titulaire, sur simple constatation faite par le maître d'oeuvre, au fur et à mesure où les retards se produisent. Ces retenues sont transformées en pénalités lors de l'élaboration du décompte général.

21. Il est constant que le maître d'ouvrage n'a pas appliqué de pénalités relatives à des retards dans le respect du délai contractuel sur les décomptes mensuels du groupement d'entreprises. Pour ce motif, la société Maïa Sonnier est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a mis à sa charge des pénalités de retard d'un montant total de 277 129,55 euros HT figurant au décompte, en application de l'article 7.2 du CCAP, au titre des 78 jours de retard dans l'exécution de son marché.

22. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise et d'examiner la régularité du jugement attaqué, que la société Maïa Sonnier est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon après avoir rejeté l'ensemble de ses conclusions, a mis à sa charge la somme de 277 129,55 euros au titre des pénalités de retard. Elle est également fondée à demander la condamnation de la métropole de Lyon à lui verser la somme de 46 474 euros HT, déterminée comme dit au point 16 du présent arrêt, qui portera intérêts au taux légal à compter du 16 novembre 2018, date d'enregistrement de la requête au greffe de la cour. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre des frais du litige.

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement :

23. Le présent arrêt statuant sur l'appel présenté contre le jugement n° 1605862 du tribunal administratif de Lyon du 20 septembre 2018, les conclusions de la requête n° 18LY04097 tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution sont ainsi privées d'objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 18LY04097.

Article 2 : Le jugement n° 1605862 du tribunal administratif de Lyon du 20 septembre 2018 est annulé.

Article 3 : La métropole de Lyon versera à la société Maïa Sonnier la somme de 46 474 euros HT, avec intérêts au taux légal à compter du 16 novembre 2018.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Maïa Sonnier, à la métropole de Lyon et à la société BG Ingénieurs conseils.

Délibéré après l'audience du 29 mai 2019, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président assesseur,

M. Chassagne, premier conseiller.

Lu en audience publique le 20 juin 2019.

2

Nos 18LY04096, 18LY04097


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY04096
Date de la décision : 20/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : BELLIER et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-06-20;18ly04096 ?
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