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13/06/2019 | FRANCE | N°19LY00973

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 13 juin 2019, 19LY00973


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au président du tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 23 octobre 2018 par laquelle le préfet de l'Isère a décidé de la transférer vers l'Italie en vue de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1807524 du 30 novembre 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 mars 2019, Mme B..., représentée par Me Huard,

avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du t...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au président du tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 23 octobre 2018 par laquelle le préfet de l'Isère a décidé de la transférer vers l'Italie en vue de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1807524 du 30 novembre 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 mars 2019, Mme B..., représentée par Me Huard, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble du 30 novembre 2018 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère d'enregistrer sa demande d'asile, à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- sa requête est recevable dès lors qu'une demande d'aide juridictionnelle a été déposée dans le mois suivant la notification du jugement attaqué et que la décision lui accordant l'aide juridictionnelle totale a été notifiée à son avocat à une adresse erronée ;

- le premier juge a omis de répondre au moyen tiré de ce qu'un traitement approprié à son état de santé n'est pas disponible en Italie ;

- la décision de transfert est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- elle déclare reprendre les moyens de sa demande de première instance tirés de ce que le préfet n'a pas produit l'intégralité de son dossier, du défaut de motivation de la décision, de la méconnaissance de l'article 4, de l'article 5, de l'article 21, paragraphe 2 et de l'article 26 paragraphe 2 du règlement.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, l'affaire a été dispensée d'instruction.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 décembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 modifié par le règlement (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Mme B... ayant été régulièrement avertie du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Clot, président, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante camerounaise née le 22 octobre 1994, déclare être entrée irrégulièrement en France le 15 mai 2018. Le 8 juin 2018, elle a demandé l'asile auprès des services de la préfecture de l'Isère. Le 23 octobre 2018, le préfet de l'Isère a décidé de la transférer vers l'Italie, État membre de l'Union européenne responsable, selon lui, de l'examen de sa demande d'asile. Mme B... relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort du point 7 du jugement attaqué que le premier juge, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments avancés à l'appui du moyen, s'est effectivement prononcé sur le moyen, soulevé devant lui, tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, pour l'écarter, au motif que les difficultés que connaît l'Italie pour faire face à un afflux massif de demandeurs d'asile ne sont pas telles qu'elles entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant et s'opposeraient à un transfert vers cet État. Ainsi, contrairement aux allégations de la requérante, le jugement attaqué n'est pas entaché d'une omission de répondre à ce moyen.

3. Il ressort des pièces du dossier que le préfet a communiqué au tribunal, avec son mémoire en défense, l'ensemble des pièces sur la base desquelles a été prise la décision contestée et que l'ensemble de ces productions a été communiqué au conseil de Mme B....

Sur la légalité de la décision de transfert :

4. Aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. (...) ".

5. La faculté laissée à chaque État membre, par le paragraphe 1 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.

6. Mme B... fait valoir qu'elle est atteinte du VIH et que les soins dont elle a besoin n'ont pas été convenablement mis en place en Italie au vu des difficultés d'accès aux soins que connaissent les demandeurs d'asile présents dans ce pays. Elle a dû être hospitalisée dès son arrivée en France où elle a reçu un traitement médicamenteux. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle ne pourrait pas bénéficier en Italie des soins que requiert son état de santé. Si elle soutient avoir fait l'objet en Italie d'un ostracisme en raison de sa maladie au sein du camp de réfugiés dans lequel elle se trouvait et d'une mise à l'écart sans possibilité de mener une vie normale et d'accéder aux éléments de confort et d'hygiène du camp, elle n'apporte aucun élément corroborant ses allégations. Dès lors, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage de la clause discrétionnaire prévue au paragraphe 1 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, qui permet à un État d'examiner la demande d'asile d'un demandeur même si cet examen ne lui incombe pas en application des critères fixés dans ce règlement.

7. Mme B... déclare reprendre en appel les moyens de sa demande de première instance tirés du défaut de motivation de la décision, de la méconnaissance de l'article 4, de l'article 5, de l'article 21, paragraphe 2 et de l'article 26 paragraphe 2 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Ces moyens doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux retenus par le premier juge, qu'il y a lieu pour la cour d'adopter.

8. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et celles de son conseil tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2019 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Dèche, premier conseiller,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 juin 2019.

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N° 19LY00973


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 19LY00973
Date de la décision : 13/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

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Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : HUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-06-13;19ly00973 ?
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