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13/06/2019 | FRANCE | N°18LY04006

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 13 juin 2019, 18LY04006


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société coopérative agricole fruitière de Loriol " Lorifruit " a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 15 janvier 2016 par laquelle l'inspecteur du travail a refusé d'autoriser le licenciement de M. A..., ainsi que la décision implicite par laquelle le ministre du travail a rejeté le recours hiérarchique formé contre cette décision.

Par un jugement n° 1604972 du 21 septembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure de

vant la cour

Par une requête enregistrée le 7 novembre 2018, la société Lorifruit, repr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société coopérative agricole fruitière de Loriol " Lorifruit " a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 15 janvier 2016 par laquelle l'inspecteur du travail a refusé d'autoriser le licenciement de M. A..., ainsi que la décision implicite par laquelle le ministre du travail a rejeté le recours hiérarchique formé contre cette décision.

Par un jugement n° 1604972 du 21 septembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 7 novembre 2018, la société Lorifruit, représentée par Me de Guérines, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 21 septembre 2018 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées de l'inspecteur du travail et du ministre du travail ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- M. A... s'est rendu coupable de faits de complicité de détournement ou de vol de marchandises ;

- la gravité de la faute justifie le licenciement de l'intéressé.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, l'affaire a été dispensée d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

La société Lorifruit ayant été régulièrement avertie du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Bourion, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. La société Lorifruit, qui est spécialisée dans le commerce de gros de fruits et légumes, a saisi l'inspecteur du travail, le 12 novembre 2015, d'une demande d'autorisation de licenciement, pour motif disciplinaire, de M. A..., délégué du personnel titulaire, salarié de l'entreprise depuis 1992, employé en dernier lieu en qualité de responsable de l'encadrement de la réception, du conditionnement et de l'expédition. Le 15 janvier 2016, l'inspectrice du travail de la Drôme a refusé d'accorder l'autorisation demandée. Le 8 mars 2016, la société Lorifruit a saisi le ministre du travail d'un recours hiérarchique qui a été implicitement rejeté. La société Lorifruit fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de l'inspectrice du travail du 15 janvier 2016 et de la décision implicite du ministre rejetant son recours hiérarchique.

2. En vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi.

3. Pour demander l'autorisation de licencier M. A..., la société Lorifruit lui a reproché de s'être rendu complice de détournement ou de vol de marchandises et d'avoir laissé sortir des marchandises à plusieurs reprises sans bon de livraison ni facturation.

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le 3 septembre 2015, M. A... a ouvert le portail du site de l'entreprise pour permettre à un client individuel de charger deux palettes de fruits dans son camion sans lui remettre de bon de livraison et de facture et qu'il n'a remis le paiement de la somme correspondant à ces marchandises ainsi qu'un bon de livraison manuscrit à la société que le 27 octobre 2015.

5. La société requérante soutient que cette sortie de marchandises sans justificatif est contraire à la procédure instaurée au sein de l'entreprise qui impose l'édition d'un bordereau de livraison indiquant les coordonnées du client et le détail quantitatif de la commande. Elle ajoute que le bon manuscrit remis par M. A... le 27 octobre 2015 n'a été établi que parce que l'intéressé a eu connaissance de la plainte pour vol de marchandises déposée par l'employeur.

6. Toutefois, il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport de la contre-enquête diligentée par le ministre du travail à la suite du recours hiérarchique exercé par l'employeur, que la société Lorifruit avait admis, dans le cas de vente directe, l'existence d'une pratique particulière mise en place par M. A... depuis 2010, permettant notamment de délivrer des bons manuscrits afin d'éviter l'enregistrement de bons de commande en comptabilité.

7. Si la société requérante produit plusieurs attestations indiquant qu'il n'était toléré aucune exception à la procédure de vente mise en place par l'entreprise, ces documents ne permettent pas d'établir que M. A... se serait livré, le 3 septembre 2015, à une vente de marchandises à son profit et non à celui de l'entreprise. Par suite, la société requérante n'établit pas que ces faits pourraient être qualifiés de détournement ou de vol de marchandises.

8. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment des images de vidéosurveillance que M. A... était présent sur son lieu de travail le 12 septembre 2015 à 5 h 53 du matin et qu'il manipulait des fiches palettes. Toutefois, ces seuls faits ne suffisent pas à établir que ce salarié, dont les fonctions l'amenaient à procéder à la vérification des fiches palettes, aurait organisé un trafic de marchandises.

9. En troisième lieu, la société requérante se prévaut d'un constat d'huissier montrant que le 28 août 1015, à 12 h 48, M. A... a rejoint un camion qui venait d'arriver sur le site de l'entreprise et que ce camion est reparti vers la sortie à 12 h 50. Toutefois, la société Lorifruit n'explique pas comment M. A... aurait pu participer à un chargement de marchandises compte tenu de la brièveté du délai séparant l'arrivée sur le quai et le départ du camion. Par suite, elle n'établit pas que l'intéressé aurait participé à un vol de marchandises au cours de la journée du 28 août 2015.

10. En dernier lieu, si la société requérante fait valoir que le 31 août 2015, le même camion a été aperçu sur un des quais du site de l'entreprise, il est constant que la présence de M. A... n'a pu être établie par les images de vidéosurveillance. Dès lors, les faits de vol de marchandises reprochés au titre de cette journée ne sont pas établis.

11. Il résulte de ce qui précède que la société Lorifruit n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Lorifruit est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Lorifruit, à M. B... A... et à la ministre du travail.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2019 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Dèche, premier conseiller,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 juin 2019.

2

N° 18LY04006


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY04006
Date de la décision : 13/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

66-07-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : FAYOL ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-06-13;18ly04006 ?
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