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28/05/2019 | FRANCE | N°18LY01540

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 28 mai 2019, 18LY01540


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 10 novembre 2015 par laquelle la société Orange a refusé de lui accorder un congé de longue maladie et la décision du 22 avril 2016 confirmant la décision du 10 novembre 2015 après avis du comité médical supérieur.

Par un jugement n° 1601120, 1603537 du 8 mars 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions et enjoint à la société Orange d'accorder à Mme A... un congé de longue maladie

à compter du 3 novembre 2014.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 10 novembre 2015 par laquelle la société Orange a refusé de lui accorder un congé de longue maladie et la décision du 22 avril 2016 confirmant la décision du 10 novembre 2015 après avis du comité médical supérieur.

Par un jugement n° 1601120, 1603537 du 8 mars 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions et enjoint à la société Orange d'accorder à Mme A... un congé de longue maladie à compter du 3 novembre 2014.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 27 avril 2018, la société Orange, représentée par la société Baker et McKenzie AARPI, avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 8 mars 2018 ;

2°) de rejeter la demande de Mme A... devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- si le tribunal estimait insuffisante l'expertise effectuée, il lui appartenait d'en prescrire une, seul moyen d'assurer, compte tenu du secret médical, le respect du droit à un procès équitable garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- Mme A...ne remplissait pas les conditions posées par le 3° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 pour obtenir un congé de longue maladie ; selon l'expertise du 9 octobre 2015, sa pathologie ne figure pas sur la liste des maladies fixée par l'arrêté du 14 mars 1986 et ne saurait correspondre aux " rhumatismes chroniques invalidants, inflammatoires ou dégénératifs " mentionnés dans cette liste ; elle ne présente pas les caractères invalidant et de gravité confirmée au sens du 3° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, Mme A...ne souffrant, en réalité, d'" aucune pathologie rhumatologique ostéo articulaire objective d'importance inhabituelle " ; la société Orange n'a fait que suivre ces conclusions et l'avis du comité médial et du comité médical supérieur ; les certificats médicaux produits pas l'intéressée sont dénués de caractère probant sur la question du caractère de gravité exigé par les textes ;

- aucun des autres moyens invoqués par Mme A... devant le tribunal administratif n'est fondé.

Par un mémoire enregistré le 11 juillet 2018, Mme A..., représentée par Me Pallanca, avocat, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Orange d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les décisions en litige sont insuffisamment motivées ;

- elle satisfait aux conditions requises pour bénéficier d'un congé de longue maladie.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le décret n° 2014-107 du 4 février 2014 ;

- l'arrêté du 14 mars 1986 relatif à la liste des maladies donnant droit à l'octroi de congés de longue maladie ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Clot, président,

- les conclusions de Mme Bourion, rapporteur public,

- les observations de Me Perche, avocat de la société Orange ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., fonctionnaire de France Télécom depuis 1984, désormais employée par la société Orange, souffre depuis le mois de juillet 2014 de douleurs articulaires et musculaires multiples et notamment de névralgies cervico-brachiales gauches et de douleurs à l'épaule droite. Elle a bénéficié de congés de maladie à compter du 3 novembre 2014. Le 10 novembre 2015, la société Orange lui a refusé un congé de longue maladie et a confirmé ce refus le 22 avril 2016, après avis du comité médical supérieur. Cette société relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions des 10 novembre 2015 et 22 avril 2016.

2. Les pièces médicales produites par Mme A... devant le tribunal administratif ont été soumises au débat contradictoire entre les parties. Dès lors, si le tribunal n'a pas estimé devoir prescrire une mesure d'expertise, la société Orange n'a pas, en l'espèce, été privée de la garantie d'un procès équitable prévue, notamment, par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

3. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 35. (...) / 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu'elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. (...) / Les dispositions du deuxième alinéa du 2° du présent article sont applicables au congé de longue maladie. (...) ". Le bénéfice de ces dispositions est soumis à la condition que la maladie mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct avec l'exercice des fonctions.

4. Selon le rapport de l'expertise réalisée le 9 octobre 2015 par un médecin rhumatologue à la demande de la société Orange, Mme A... souffre d'une fibromyalgie dont le diagnostic a été confirmé en 2002. Elle présente " au niveau de l'épaule droite une tendinopathie micro calcifiante pouvant expliquer un épisode algique passager " et " au niveau du genou une gonarthrose débutante, sans lésion méniscale spécifique isolable, n'expliquant pas par elle-même la gonalgie persistante. " Ce rapport ajoute qu' " il n'y a aucune pathologie rhumatologique ostéo articulaire objective d'importance inhabituelle " et que la pathologie principale ne justifie pas l'attribution d'un congé de longue maladie.

5. Toutefois, le 15 décembre 2015, un médecin du travail de la société Orange a estimé que Mme A...présente " une pathologie de la coiffe des rotateurs droite, entraînant un état douloureux chronique rebelle au traitement, plus diffus, sur fond de stress, essentiellement (...) professionnel " et qu'un congé de longue maladie devait pouvoir lui être attribué " car la pathologie qui provoque l'indisponibilité présente un caractère invalidant et de gravité confirmée et nécessite un traitement et des soins prolongés ".

6. Un certificat d'un médecin généraliste du 26 décembre 2015 indique qu'une modification du poste de travail de l'intéressée survenue en juillet 2014 a entraîné une augmentation des douleurs de la colonne cervicale, de l'épaule droite et des membres supérieurs, qui sont la cause des arrêts de travail jusqu'à ce jour.

7. Un praticien du centre hospitalier Pierre Oudot de Bourgoin-Jallieu indique, dans un certificat du 15 avril 2015, que la " patiente présente un syndrome fibromyalgique par hypersensibilisation à la douleur, associé à des éléments de troubles musculo-squelettiques (épaules, jambes G) " et, dans une certificat du 12 septembre 2016, qu'elle souffre d'un " syndrome d'hypersensibilisation à la douleur évoluant depuis 1990 associé à un syndrome fibromyalgique et des douleurs de l'épaule droite sur pathologie de la coiffe avec calcification. "

8. Ces éléments contradictoires ne permettent ni de connaître la nature exacte des pathologies dont souffre Mme A..., ni d'en déterminer la cause, et notamment de savoir si elles ont un lien direct avec l'exercice de ses fonctions, ni si ces pathologies nécessitent un traitement et des soins prolongés et présentent un caractère invalidant et de gravité confirmée. Dès lors, il y a lieu, avant de statuer sur la requête de Mme A... d'ordonner une expertise sur ces différents points.

DÉCIDE :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur la requête de Mme A..., procédé par un expert, désigné par le président de la cour, à une expertise.

L'expert aura pour mission de :

- décrire l'état de santé de Mme A... à la date du 10 novembre 2015 ;

- indiquer de quelles pathologies elle était atteinte à cette date, en déterminer la cause, et notamment si elles ont un lien direct avec l'exercice par l'intéressée de ses fonctions, indiquer si ces pathologies nécessitent un traitement et des soins prolongés et présentent un caractère invalidant et de gravité confirmée ;

- fournir, d'une manière générale, tous éléments de nature à permettre à la cour de se prononcer en toute connaissance de cause.

Article 2 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Il prêtera serment par écrit. L'expert déposera son rapport au greffe du tribunal en deux exemplaires et en notifiera copie aux parties dans le délai fixé par le président de la cour dans sa décision le désignant.

Article 3 : Les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance.

Article 4 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Orange et à Mme B... A....

Délibéré après l'audience du 9 mai 2019 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Dèche, premier conseiller,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 mai 2019.

4

N° 18LY01540


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY01540
Date de la décision : 28/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36 Fonctionnaires et agents publics.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : SCP BAKER et MCKENZIE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-05-28;18ly01540 ?
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