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21/05/2019 | FRANCE | N°17LY02093

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 21 mai 2019, 17LY02093


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner le département du Rhône à lui verser une indemnité de 120 000 euros assortie des intérêts légaux en réparation du préjudice moral subi en raison des faits de harcèlement moral dont elle estime avoir été victime et du comportement fautif de l'administration.

Par un jugement n° 1406054 du 22 mars 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée

le 24 mai 2017, et des mémoires, enregistrés les 30 novembre 2018, 11 janvier 2019 et 8 février 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner le département du Rhône à lui verser une indemnité de 120 000 euros assortie des intérêts légaux en réparation du préjudice moral subi en raison des faits de harcèlement moral dont elle estime avoir été victime et du comportement fautif de l'administration.

Par un jugement n° 1406054 du 22 mars 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 24 mai 2017, et des mémoires, enregistrés les 30 novembre 2018, 11 janvier 2019 et 8 février 2019, MmeA..., représentée par Me Brun (cabinet Alternatives Avocats), avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 22 mars 2017 et de condamner le département du Rhône à lui verser une indemnité de 100 000 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter de sa demande indemnitaire préalable, outre capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices qu'elle a subis ;

2°) de supprimer, sur le fondement de l'article L. 741-2 du code de justice administrative, le deuxième paragraphe de la page 5 de la requête, commençant par : " Cette dégradation " et se terminant par " pour déstabiliser sa responsable hiérarchique " ;

3°) de mettre à la charge du département du Rhône une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'elle n'avait pas été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral ;

- la suppression du service de santé au travail constitue une faute en ce qu'elle est entachée de détournement de pouvoir, lequel participe du harcèlement moral qu'elle a subi ;

- elle a subi un préjudice moral, des troubles dans ses conditions d'existence et un préjudice de carrière qui justifient que le département soit condamné à lui verser une indemnité de 100 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 mai 2018, et un mémoire, enregistré le 14 janvier 2019, le département du Rhône, représenté par Me Romanet-Duteil, avocate, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme A...en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Brun, avocat, pour MmeA..., et celles de Me Romanet-Duteil, avocat pour le département du Rhône ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme C...A...a été recrutée à compter du 1er octobre 2006 par le département du Rhône, en qualité de médecin vacataire puis d'agent contractuel, pour exercer les fonctions de médecin territorial. Elle a été nommée médecin territorial de 2ème classe stagiaire le 1er avril 2007 et titularisée dans le cadre d'emploi des médecins territoriaux à compter du 1er avril 2008. Elle a intégré le service de santé au travail du département du Rhône en avril 2010 en qualité de médecin de prévention. Après avoir occupé ce poste jusqu'au 31 juillet 2012, elle a démissionné de la fonction publique territoriale. Estimant avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral de la part de ses supérieures hiérarchiques, elle a, par un courrier du 15 avril 2014, formé une réclamation préalable en vue d'obtenir l'indemnisation des préjudices subis du fait de ces agissements et demandé une indemnisation d'un montant de 100 000 euros. Cette demande ayant été implicitement rejetée, elle a saisi le tribunal administratif de Lyon afin qu'il condamne le département du Rhône à lui verser une indemnité de 120 000 euros. Par le jugement attaqué n° 1406054 du 22 mars 2017, dont Mme A...relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Sur les conclusions indemnitaires :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi susvisée du 13 juillet 1983 : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. (...). ". Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement.

3. Mme A...soutient que ses relations avec sa supérieure directe, la chef du service de santé au travail, MmeB..., se sont brutalement et de manière inexplicable détériorées à partir du mois de juin 2011, que cette dernière aurait alors adopté une attitude irrespectueuse, vexatoire et hostile. Elle fait état, en particulier, de ce que l'intéressée a cessé de la saluer et de lui adresser la parole, lui a imposé des délais spécifiques de réponse à ses demandes de congés et a refusé d'établir un rapport sur sa promotion au grade supérieur en 2012, alors même que le rapport qu'elle avait rédigé pour 2011 était particulièrement élogieux. Ce comportement aurait été relayé par la directrice générale adjointe, MmeD..., notamment au cours d'un entretien auquel elle l'a convoquée en présence de MmeB..., le 13 décembre 2011, à l'issue duquel elle lui aurait enjoint de changer de comportement dans un délai de trois mois sans pour autant lui adresser de reproche suffisamment précis sur sa manière de servir pour lui permettre de s'adapter. Toutefois, les faits ainsi relatés, comme le délai de réponse à une demande de congé ou le refus de rédiger un rapport relatif à l'avancement - qui peut d'ailleurs être regardé comme un avis défavorable -, n'excèdent pas les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, tandis que les autres griefs, qui présentent un caractère isolé, révèlent seulement une attitude discourtoise. De tels faits, considérés isolément ou dans leur ensemble, s'ils illustrent une dégradation des relations entre Mme A...et sa hiérarchie, ne permettent pas de faire présumer l'existence, à son encontre, d'agissements constitutifs de harcèlement moral.

4. En deuxième lieu, si Mme A...soutient que le service de santé au travail faisait lui-même l'objet d'une " situation de harcèlement " lié à un climat de défiance de la direction générale des services vis à vis des préconisations médicales émises par les médecins de prévention, une telle situation, à la supposer établie, n'est pas de nature à caractériser une faute commise par le département à son encontre. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que des " manoeuvres de déstabilisation " émanant de la direction générale seraient à l'origine d'une situation de harcèlement à son encontre au sein de son service.

5. En troisième lieu, Mme A...soutient que le département du Rhône a choisi, après la démission de MmeB..., de supprimer les deux postes de médecins de prévention, dont celui qu'elle occupait, en vue d'obtenir sa propre démission pour ensuite laisser à Mme B...le loisir d'être à nouveau recrutée par le département. Toutefois, il y a lieu pour la cour, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges et non pertinemment critiqués en appel, d'écarter le moyen ainsi soulevé, tiré de ce que ces agissements seraient fautifs en ce qu'ils seraient entachés de détournement de pouvoir pour constituer l'aboutissement de la situation de harcèlement moral.

6. Mme A...n'établissant pas l'existence de fautes susceptibles d'engager la responsabilité du département du Rhône à son égard, elle n'est pas fondée à demander sa condamnation à lui verser une indemnité de 100 000 euros ni, par suite, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative :

7. Le mémoire en défense du département du Rhône ne contient pas, contrairement à ce qui est soutenu, d'imputation à caractère injurieux, outrageant ou diffamatoire, au sens de l'article L. 741-2 du code de justice administrative, de nature à en justifier la cancellation. Il n'y a pas lieu, par suite, de faire droit aux conclusions de Mme A...tendant à une telle suppression.

Sur les frais non compris dans les dépens :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département du Rhône, qui n'est pas partie perdante, la somme que demande Mme A...au titre des frais non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A...une somme de 800 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Mme A...versera au département du Rhône une somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au département du Rhône.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 23 avril 2019, à laquelle siégeaient :

M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,

M. Pierre Thierry, premier conseiller,

Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère.

Lu en audience publique, le 21 mai 2019.

5

N° 17LY02093


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY02093
Date de la décision : 21/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : BRUN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-05-21;17ly02093 ?
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