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02/05/2019 | FRANCE | N°19LY00437

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre a - formation à 3, 02 mai 2019, 19LY00437


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2008 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1303045 du 19 mars 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15LY01695 du 28 mars 2017, la cour administrative d'appel de Lyon, après avoir décidé qu'il n'y avait pas lieu de s

tatuer à hauteur du dégrèvement accordé en cours d'instance (article 1er), a rejeté ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2008 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1303045 du 19 mars 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15LY01695 du 28 mars 2017, la cour administrative d'appel de Lyon, après avoir décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer à hauteur du dégrèvement accordé en cours d'instance (article 1er), a rejeté le surplus des conclusions de l'appel formé par M. B...contre ce jugement (article 2).

Par une décision n° 410533 du 30 janvier 2019, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'article 2 de cet arrêt et, dans cette mesure, renvoyé à la cour le jugement de l'affaire, désormais enregistrée sous le n° 19LY00437.

Procédure devant la cour :

Par un mémoire enregistré le 5 mars 2019, M. B... demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 19 mars 2015 ;

2°) de fixer le montant des revenus distribués au titre de l'année 2008 à 1 250 euros et de réduire les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de ladite année à due proportion ;

3°) de prononcer la décharge de la pénalité pour manquement délibéré ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- conformément à ce qu'il avait indiqué devant la cour dans le cadre de l'instance n° 15LY01695, la méthode de reconstitution de recettes de la société Trust Paving Unipessoal LDA est radicalement viciée ;

- les distributions doivent être limitées aux bénéfices effectivement appréhendés, soit à concurrence de la somme de 1 500 euros au titre de l'année 2008.

Par un mémoire enregistré le 29 mars 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens présentés par M. B...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Savouré, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Bourion, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de la vérification de la comptabilité de la société de droit portugais Trust Paving Unipessoal LDA dont M. B...est l'associé unique, l'administration a procédé à la taxation d'office des résultats réalisés de manière occulte par l'établissement stable de la société en France au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009. Ces résultats ont été regardés comme des revenus distribués entre les mains de M. B...sur le fondement des dispositions du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts et du c de l'article 111 du même code, à concurrence de 10/12e des montants compte tenu de son mariage intervenu au mois d'octobre. Par un jugement du 19 mars 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à le décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des dix premiers mois de l'année 2008 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un arrêt du 28 mars 2017, la cour administrative d'appel de Lyon, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement intervenu en cours d'instance, a rejeté le surplus des conclusions de sa requête. Par une décision du 30 janvier 2019, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de la requête et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire à la cour.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

1.

2. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (...) " ; qu'aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c) Les rémunérations et avantages occultes (...) "

3. L'administration a estimé que la société de droit portugais Trust Paving Unipessoal LDA, dirigée par M. B... son unique associé, disposait d'un établissement stable en France à partir duquel elle exerçait une activité imposable qu'elle avait omis de déclarer. Pour déterminer le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés de la société Trust Paving Unipessoal LDA, l'administration fiscale a reconstitué le chiffre d'affaires réalisé pour chacun des exercices vérifiés à partir des relevés des factures de prestations de sous-traitance comptabilisées par la société B...Bâtiment. Estimant que la première de ces sociétés n'avait pas facturé de marge à la seconde, elle a majoré le montant de ces factures d'un taux de marge de 2,27 calculé à partir de celui de la société B...Bâtiment. Ce chiffre d'affaires reconstitué a, ensuite, été diminué des charges d'exploitation estimées au montant de ces mêmes factures ainsi que des dépenses salariales estimées sur la base du ratio entre le chiffre d'affaires reconstitué et le coefficient de rendement retenu. Elle a ainsi estimé que cette société avait réalisé des bénéfices de 55 792 euros au titre de l'exercice clos en 2007, 106 303 euros au titre de l'exercice clos en 2008 et 51 113 euros au titre de l'exercice clos en 2009. L'administration a estimé que ces bénéfices étaient imposables entre les mains de M. B... sur le fondement des articles 109 et 111 précités du code général des impôts.

4. Il résulte de l'instruction que l'activité de la société Trust Paving Unipessoal LDA ne consistait pas en la mise à disposition de personnel mais en la réalisation, pour le compte de ses clients et grâce au personnel mis à sa disposition ainsi qu'à ses propres matériaux et équipements, des chantiers de pose de pierres et de dalles extérieures. Les activités des deux sociétés étant différentes, le taux de marge appliqué n'est pas pertinent. En outre et surtout, la société Trust Paving Unipessoal LDA a produit à l'instance les documents comptables qui ont servi à établir ses déclarations de résultat déposées au Portugal. Ces documents font apparaître que les montants facturés correspondent à ceux qui ont été comptabilisés par la société B...Bâtiment et qu'ils ont permis de réaliser un bénéfice au titre des deux premières années en litige, ce qui contredit la position de l'administration suivant laquelle les prestations étaient facturées sans marge. Ils font apparaître également les charges de l'entreprise, ce qui retire toute pertinence à la reconstitution des charges d'exploitation opérée par l'administration. Si ces documents ont été produits après les opérations de contrôle, il n'en demeure pas moins qu'ils ont servi de base aux déclarations de résultats réalisées au Portugal et ont ainsi été établis avant la procédure de contrôle. L'administration n'en conteste d'ailleurs pas le caractère probant. Ainsi, M. B...est fondé à soutenir que la méthode retenue par l'administration pour redresser la société Trust Paving Unipessoal LDA est radicalement viciée et à demander la décharge des impositions litigieuses et des pénalités correspondantes.

5. Toutefois, M. B...admet lui-même avoir appréhendé des bénéfices de la part de cette société, à concurrence de la somme de 1 500 euros au titre de l'année 2008, laquelle doit être ramenée à 1 250 euros compte tenu du fait que la période d'imposition en litige ne couvre que les dix mois de l'année durant lesquels il n'était pas marié. Par suite, il y a lieu de limiter la décharge de l'impôt litigieux conformément à la demande du contribuable.

Sur la majoration pour manquement délibéré :

6. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ".

7. Pour justifier l'application des pénalités pour manquement délibéré, l'administration fiscale se borne à faire valoir que M. B...est dirigeant de la société Trust Paving Unipessoal, qui exerce son activité depuis son établissement stable basé en France, sans l'avoir fait connaître auprès d'un centre de formalités des entreprises, dans les locaux de la société B...bâtiment dont il est aussi dirigeant. Toutefois, ces circonstances ne se rapportent pas directement au comportement déclaratif de M. B... et, ainsi, ne suffisent pas à établir son intention d'éluder l'impôt caractérisant un manquement délibéré.

8. Il résulte de ce qui précède que, dans la mesure de ce qui a été dit au point 5, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à M. B... au titre des frais liés au litige.

DÉCIDE :

Article 1er : Le montant des revenus distribués appréhendé par M. B... au titre des dix premiers mois de l'année 2008 est fixé à la somme de 1 250 euros.

Article 2 : M. B... est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales correspondant à la réduction de la base d'imposition décidée à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : M. B... est déchargé de la pénalité pour manquement délibéré à laquelle il a été assujetti au titre des dix premiers mois de l'année 2008.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble, en date du 19 mars 2015, est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2019 à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président,

MmeC..., première conseillère,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 mai 2019.

2

N° 19LY00437


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre a - formation à 3
Numéro d'arrêt : 19LY00437
Date de la décision : 02/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués. Notion de revenus distribués. Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : ELEOM MONTPELLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 14/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-05-02;19ly00437 ?
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