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23/04/2019 | FRANCE | N°18LY00289

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 23 avril 2019, 18LY00289


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand, en premier lieu de prononcer la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti, au titre de l'année 2010, en deuxième lieu, de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti, au titre des années 2010, 2011, 2012 et 2013, en troisième lieu, de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires de cont

ributions sociales auxquelles il a été assujetti, au titre des années 2010, 2011,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand, en premier lieu de prononcer la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti, au titre de l'année 2010, en deuxième lieu, de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti, au titre des années 2010, 2011, 2012 et 2013, en troisième lieu, de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles il a été assujetti, au titre des années 2010, 2011, 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1500327, 1501407, 1501781 du 5 décembre 2017, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, après avoir joint ces demandes et prononcé la réduction de ces impositions au titre de l'année 2010, a rejeté le surplus des demandes de M. A....

Procédure devant la cour

I. Par une requête, enregistrée le 25 janvier 2018 sous le n° 18LY00289, M. A..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 4 de ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 5 décembre 2017 ;

2°) de prononcer la réduction de ces impositions ;

3°) d'ordonner le sursis de paiement de ces impositions.

Il soutient que :

- la proposition de rectification du 5 septembre 2011 est insuffisamment motivée dès lors qu'aucune indication n'est fournie sur la reprise des sommes de 6 044 et 30 683 euros, s'agissant du chef de rectification résultant de l'annulation de reports de déficits fonciers d'années antérieures à l'année 2009 ;

- l'imposition de son revenu foncier de l'année 2010 a été établie sur la base d'une somme de 15 035 euros et repose sur une erreur de calcul dès lors que la différence entre ses revenus déclarés et imposables et les charges foncières non admises en déduction n'est que de 12 035 euros ;

- les factures qu'il a présentées permettaient d'établir avec précision la nature et la réalité des charges qu'il était donc fondé à déduire de ses revenus fonciers.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juin 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 23 août 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 28 septembre 2018.

II. Par une requête, enregistrée le 31 janvier 2018, sous le n° 18LY00403, et un mémoire en réplique enregistré le 13 juillet 2018, M. A..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 4 de ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 5 décembre 2017 ;

2°) de prononcer la réduction de ces impositions ;

3°) d'ordonner le sursis de paiement de ces impositions.

Il développe les mêmes moyens que ceux qu'il a développés sous le n° 18LY00289 et ajoute que l'administration ne pouvait lui opposer, au stade de la décision statuant sur sa réclamation préalable, un motif de rejet qui ne figurait pas dans la proposition de rectification.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juin 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant à ce que la cour ordonne le sursis de paiement dès lors qu'il n'appartient pas au juge de l'impôt d'ordonner le sursis de paiement et que le jugement de rejet des demandes met fin à la procédure de sursis de paiement qui aurait été, le cas échéant, mis en oeuvre en première instance.

Par ordonnance du 23 août 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 28 septembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Anne Menasseyre, présidente assesseure,

- et les conclusions de M. Jean-Paul Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n°s 18LY00289 et 18LY00403 sont dirigées contre le même jugement et présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. M. A... est propriétaire de plusieurs immeubles dont les revenus sont imposables dans la catégorie des revenus fonciers. Il a déclaré, en 2010, des revenus fonciers imposables de 98 752 euros, un déficit imputable sur ses revenus fonciers de 83 352 euros et un déficit imputable sur son revenu global de 15 300 euros. Dans le cadre d'un contrôle sur pièces, l'administration, après avoir retracé l'évolution des déficits fonciers réalisés par le contribuable entre les années 2000 et 2009, a estimé qu'aucun déficit foncier ne restait à imputer à la date du 31 décembre 2009. Elle a également remis en cause la déduction de dépenses de travaux déclarés pour un montant de 110 787 euros au titre de l'année 2010. A l'issue d'un second contrôle sur pièces de ses revenus déclarés au titre de l'année 2010, l'administration a notamment envisagé un rehaussement supplémentaire de son revenu net foncier au titre de 2010. Postérieurement, à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. A... portant sur les années 2011 et 2012, l'administration a, notamment, refusé d'admettre l'imputation sur les revenus des années 2011 et 2012, des déficits fonciers que l'intéressé avait déclarés au titre de l'année 2010, ainsi que des reports déficitaires d'années antérieures. Enfin, à l'issue d'un contrôle sur pièces portant sur l'année 2013, l'administration a, notamment, refusé d'admettre l'imputation sur les revenus de l'année 2013 de ces déficits. L'intéressé fait appel du jugement du 5 décembre 2017, par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand n'a que très partiellement fait droit à ses demandes tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti, au titre des années 2010, 2011, 2012 et 2013, à l'issue de ces contrôles.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée ". Il résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées. Dans l'hypothèse où une première proposition de rectification suffisamment motivée a réduit le déficit reportable d'un contribuable, une seconde proposition de rectification qui tire les conséquences de la première n'a pas à reprendre l'exposé des rectifications précédemment opérées pour être suffisamment motivée. Enfin, lorsqu'une proposition de rectification comporte un chef de redressement comportant plusieurs éléments et que chaque élément a fait l'objet d'une justification, d'une évaluation et d'une prise en compte distinctes pour la détermination du montant du redressement, le caractère suffisant de la motivation du chef de redressement comportant plusieurs éléments est apprécié distinctement par élément.

4. La proposition de rectification du 5 septembre 2011 comporte un chef de redressement correspondant à la remise en cause des déficits fonciers antérieurs reportables au 31 décembre 2009. Elle reprend, pour les années 2000 à 2009, le montant des déficits fonciers de l'année non déduits des autres revenus, précise si le résultat de l'année en cours est déficitaire ou bénéficiaire et récapitule, pour chaque année d'imposition, le montant total des déficits antérieurs non encore imputés au 31 décembre de chaque année d'imposition. Elle précise ainsi qu'au 31 décembre 2002, ce montant s'élevait à la somme de 154 156 euros en indiquant qu'il s'agit du montant retenu dans la décision du 1er décembre 2004, par laquelle l'administration a statué sur la réclamation préalable du contribuable portant sur ses déficits fonciers reportables des années 1999, 2000, 2001 et 2002. Ce document, reçu par M. A... le 9 décembre 2004 précisait que le déficit foncier trouvant son origine en 1993 s'élevait à 6 044 euros et n'était reportable que jusqu'en 2004 et que le déficit foncier trouvant son origine en 1995 s'élevait à 30 683 euros et n'était reportable que jusqu'en 2005. La proposition de rectification du 5 septembre 2011, qui comporte par ailleurs une motivation suffisante des redressements propres à l'année contrôlée, n'avait pas à reprendre l'exposé des rectifications ayant conduit à fixer à 6 044 euros et 30 683 euros le montant des déficits fonciers respectivement reportables jusqu'au 31 décembre 2003 et 2005.

5. En outre, et en toute hypothèse, il ressort de la lecture de cette proposition de rectification que la remise en cause du déficit reportable au 31 décembre 2009 repose sur deux éléments, qui correspondent, d'une part, à l'impossibilité de reporter au-delà des 31 décembre 2003 et 2005 les déficits fonciers de 6 044 euros et 30 683 euros, et, d'autre part, à la constatation de bénéfices excédant les déficits reportés. Ainsi, au-delà de la remise en cause du report des déficits de 6 044 euros et 30 683 euros, la proposition de rectification du 5 septembre 2011 fait état, par une motivation qui est suffisante et qui n'est d'ailleurs pas critiquée sur ces points, d'un déficit reportable de 154 156 euros en 2002, de 3 032 euros en 2005, et de 803 euros en 2008, et de résultats bénéficiaires en 2004, 2006, 2007 et 2009, pour un montant total de 206 949 euros, lesquels, au 31 décembre 2009, suffisaient à eux seuls à absorber ces déficits, indépendamment de la remise en cause des deux déficits fonciers trouvant respectivement leur origine en 1993 et 1995. Dès lors que la motivation de ces éléments était suffisante et que ces éléments conduisaient, à eux seuls, à annuler en totalité le déficit foncier reportable au 31 décembre 2009, le moyen tiré de ce que la proposition de rectification du 5 septembre 2011 serait insuffisamment motivée faute de comporter des précisions sur les sommes de 6 044 euros et 30 683 euros qu'elle mentionne ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

6. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'erreur de calcul relevée par M. A... a donné lieu à un dégrèvement dans le cadre de l'admission partielle, le 13 juillet 2012, d'une première réclamation dirigée contre les impositions de l'année 2010. Le moyen tiré de ce que les revenus fonciers de l'intéressé ont été arrêtés à la somme de 15 035 euros alors que les calculs de l'administration auraient dû la conduire à en arrêter le montant à la somme de 12 035 euros est, dès lors, inopérant.

7. En deuxième lieu, d'une part, l'administration peut, à tout moment de la procédure, et sans être tenue d'adresser une nouvelle proposition de rectification au contribuable, invoquer un nouveau motif de droit propre à justifier l'imposition, dès lors que cette substitution peut être faite sans priver le contribuable des garanties qui lui sont reconnues en matière de procédure d'imposition. D'autre part, il résulte de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'est pas compétente pour se prononcer sur les différends relatifs à des revenus fonciers. Il en résulte que l'administration pouvait légalement opposer, dans la décision statuant sur la réclamation préalable de M. A... puis postérieurement, un motif de rejet de ses charges foncières différent de celui qu'elle avait retenu dans la proposition de rectification qui lui a été adressée.

8. En troisième lieu, en vertu de l'article 28 du code général des impôts, les revenus des propriétés bâties sont imposables, dans la catégorie des revenus fonciers, à raison de la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété. Selon l'article 31-I du même code, ces charges déductibles comprennent notamment : " 1° pour les propriétés urbaines : a) les dépenses de réparation et d'entretien (...) ; / b) les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement (...) ". Les dépenses mentionnées au I de l'article 31 du code général des impôts précité ne peuvent être déduites du revenu foncier brut que dans la mesure où, notamment, les charges alléguées sont dûment justifiées, se rapportent à des immeubles dont les revenus sont imposables dans la catégorie des revenus fonciers, sont effectivement supportées par le propriétaire et sont engagées en vue de l'acquisition ou de la conservation du revenu. Il appartient au contribuable de justifier de la réalité, de la consistance et, par suite, du caractère déductible de ces charges en produisant des pièces justificatives, qui sont constituées de factures, de plans, de photographies et de tous autres éléments permettant d'établir avec précision la nature, le montant et la réalité de la charge supportée.

9. M. A... a acquis par acte notarié le 23 juin 2010 une maison d'habitation destinée à la location située 8 et 8 bis, Boulevard de Courtais à Moulins, et a déduit de ses revenus fonciers imposables au titre de la même année, une somme de 110 787 euros au titre des dépenses d'amélioration, de réparation et d'entretien. Si l'administration, considérant que ces travaux devaient être qualifiés de travaux de construction, de reconstruction et d'agrandissement, a refusé d'admettre qu'ils soient déductibles des revenus fonciers, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a considéré qu'il s'agissait de dépenses d'amélioration, et non d'une reconstruction au sens des dispositions du 1 de l'article 31 du code général des impôts mais, suivant en cela l'argumentation subsidiaire de l'administration, que M. A..., propriétaire de plusieurs habitations, n'apportait pas la preuve, qui lui incombait, du caractère déductible de la totalité des dépenses, dans la mesure où les factures d'achats de matériaux et d'outillages produites par l'intéressé, à l'exception de trois d'entre elles d'un montant de 20 782 euros, ne permettaient pas d'identifier les immeubles pour la rénovation desquels ces achats avaient été destinés, faute de mentionner l'adresse des travaux effectués. L'absence d'adresse sur les factures, bons et tickets de caisse présentés par M. A..., qui, au demeurant ne comportent pas, pour la plupart d'entre eux, la liste détaillée des produits achetés, ne permet pas de rattacher les dépenses ainsi engagées à l'immeuble situé au 8 et 8 bis, avenue de Courtais à Moulins plutôt qu'à un autre des immeubles dont il est propriétaire, ou à sa résidence principale. L'administration relève en outre que dix-sept des factures présentées comportent une date antérieure à celle du 23 juin 2010, de sorte que certaines des dépenses en cause ont été engagées avant l'acquisition du bien par M. A.... Pour ces motifs, c'est dès lors à bon droit que l'administration a réintégré le montant des dépenses restant en litige dans les revenus fonciers de M. A... au titre de l'année 2010.

Sur le sursis de paiement :

10. Les conclusions de M. A... tendant à ce que la cour ordonne le sursis de paiement sont irrecevables dès lors que, en application des articles L. 277 et suivants du livre des procédures fiscales, il n'appartient pas au juge de l'impôt d'ordonner le sursis de paiement et que le jugement de rejet des demandes met fin à la procédure de sursis de paiement qui aurait été, le cas échéant, mis en oeuvre en première instance.

11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté le surplus de ses demandes.

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. A... la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. A... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 26 mars 2019, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Menasseyre, présidente assesseure,

Mme B..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 23 avril 2019.

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N° 18LY00289, 18LY00403

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