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11/04/2019 | FRANCE | N°17LY00933

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 11 avril 2019, 17LY00933


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'annuler la décision du 18 mars 2014 par laquelle la rectrice de l'académie de Lyon lui a refusé le bénéfice de la protection fonctionnelle.

Par un jugement n° 1403964 du 21 décembre 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 février 2017 et le 28 août 2018, M. B..., représenté par Me Bonicatto, avocat, demande à la cour :

1°) d'

annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 21 décembre 2016 ;

2°) d'annuler pour excès de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'annuler la décision du 18 mars 2014 par laquelle la rectrice de l'académie de Lyon lui a refusé le bénéfice de la protection fonctionnelle.

Par un jugement n° 1403964 du 21 décembre 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 février 2017 et le 28 août 2018, M. B..., représenté par Me Bonicatto, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 21 décembre 2016 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée, au besoin après avoir entendu le médecin conseiller technique auprès du recteur, sur le fondement de l'article R. 625-3 du code de justice administrative ;

3°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Lyon de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle sollicitée, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ou, à défaut, de prendre à nouveau une décision après une nouvelle instruction de sa demande de protection fonctionnelle, dans le délai de deux mois, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État le paiement à son conseil des sommes de 3 500 euros pour la première instance et 3 500 euros pour l'instance d'appel, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ; il est entaché de contradiction de motifs ;

- la décision du 18 mars 2014, méconnaît les dispositions de l'article 4 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le chef de l'établissement où il est affecté a tenté de lui imposer des relations paternalistes ;

- compte tenu notamment de la modification de sa rémunération en tant que formateur dans une unité de formation par apprentissage, il était en droit de saisir son syndicat ; en lui reprochant de l'avoir fait, le chef d'établissement a porté atteinte à l'exercice du droit syndical ;

- l'exigence d'établir des bilans d'activité constitue une forme de harcèlement, dès lors que cela n'est prévu par aucun texte et n'avait jamais été exigé antérieurement ;

- le courriel du 20 juin 2012 du chef d'établissement aux services académiques révèle une volonté de nuire ;

- les inspecteurs pédagogiques régionaux ont mis en doute ses arrêts de travail ; l'un d'eux l'a convoqué le 12 novembre 2012, jour d'un retour de congé de maladie ;

- les services du rectorat ont méconnu le secret médical en faisant état de certaines de ses pathologies et en le faisant convoquer par le médecin conseiller technique du recteur ; la production devant le tribunal administratif d'un document médical caractérise un recel de violation du secret médical ;

- ainsi, le harcèlement moral dont il a fait l'objet, même s'il n'a pas affecté son état de santé, est caractérisé.

Par un mémoire enregistré le 11 juin 2018, le ministre de l'éducation nationale conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.

La clôture de l'instruction a été fixée au 11 juin 2018 par ordonnance du 7 mai 2018 et reportée au 6 septembre 2018 par ordonnance du 29 juin 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le décret n° 72-581 du 4 juillet 1972 ;

- le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Clot, président,

- les conclusions de M. Laval, rapporteur public,

- les observations de Me Bonicatto, avocat de M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., professeur de lycée professionnel, exerçant les fonctions de chef de travaux au lycée Honoré d'Urfé de Saint-Etienne, a sollicité de la rectrice de l'académie de Lyon le bénéfice de la protection fonctionnelle en raison du harcèlement moral dont il estime être victime de la part de la proviseure de ce lycée ainsi que des services du rectorat. Le 18 mars 2014, la rectrice lui a opposé un refus. M. B...interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

S'agissant de la légalité externe de la décision en litige :

2. Aux termes du second alinéa de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000, alors en vigueur, dont les dispositions sont reprises à l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. "

3. La décision contestée, qui a été signée par M. Pierre Arène, secrétaire général de l'académie, pour la rectrice et par délégation, mentionne les nom et prénom de son signataire. Aucune disposition ni aucun principe n'impose qu'elle mentionne, en outre, le nom et le prénom de la rectrice.

S'agissant de l'illégalité interne de la décision en litige :

4. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droit et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa. (...) ".

5. D'une part, il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

6. D'autre part, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. En revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui. Le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé.

7. Selon l'article 4 du décret du 4 juillet 1972 relatif au statut particulier des professeurs certifiés, dans sa rédaction alors applicable, ceux-ci " peuvent exercer les fonctions de chef de travaux. Ces fonctions consistent à assurer, sous l'autorité directe du chef d'établissement, l'organisation et la coordination des enseignements technologiques et professionnels ainsi que la gestion des moyens mis en oeuvre pour ces enseignements. Le chef de travaux conseille le chef d'établissement pour le choix, l'installation et l'utilisation des équipements pédagogiques. Il participe aux relations extérieures de l'établissement, notamment avec les entreprises. "

8. Si le proviseur du lycée où, comme il a été dit, M. B... exerçait les fonctions de chef de travaux, a pu, occasionnellement, faire preuve à l'égard de ce collaborateur d'une attitude familière, ce comportement ne présente pas, en l'espèce, le caractère d'un harcèlement moral. Ne présente pas davantage ce caractère la demande qui lui a été faite de présider des conseils de classe, fonction qui n'est pas étrangère à ses attributions, ainsi que cela résulte de l'article R. 421-50 du code de l'éducation.

9. Il ressort des pièces du dossier que M. B... s'est rapproché d'une organisation syndicale pour contester une décision du centre de formation des apprentis de l'académie de Lyon qui avait pour effet de diminuer les indemnités qu'il percevait en tant que formateur dans une unité de formation par apprentissage. Le proviseur du lycée a, le 20 juin 2012, adressé un courrier électronique au rectorat, pour rendre compte de la vive réaction de son collaborateur. Si le proviseur a pu regretter que M. B... s'adresse à une organisation syndicale avant d'avoir évoqué ce sujet avec lui, ni la rédaction de ce courriel ni les deux convocations à des entretiens qui ont suivi, adressées à M. B... par le délégué académique aux enseignements technologiques et le directeur du groupement d'intérêt public de l'académie de Lyon, n'ont excédé les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. Il en va de même du reproche qui lui a été fait de n'avoir pas établi de bilan d'activité pendant plusieurs années, alors même que cette obligation ne résulterait d'aucun texte et qu'aucune demande ne lui en avait été faite auparavant.

10. La circonstance que les inspecteurs pédagogiques régionaux ont souhaité que M. B... rencontre le médecin de prévention, dont la mission est définie par le décret du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique, ne permet pas d'établir l'existence d'un harcèlement moral. Si ces inspecteurs ont adressé à l'intéressé, le 12 novembre 2012, jour de son retour d'un congé de maladie, suivi de vacances scolaires, une convocation au rectorat le 16 novembre 2012, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette initiative était étrangère à leurs attributions.

11. La production par l'administration devant le tribunal administratif de documents à caractère médical concernant M. B..., sans son accord, en violation du secret médical, constitue une circonstance postérieure à la décision qu'il conteste et, par suite, sans incidence sur sa légalité.

12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé et n'est entaché d'aucune contradiction de motifs, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2019 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Dèche, premier conseiller,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 avril 2019.

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N° 17LY00933


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-07-10-005 Fonctionnaires et agents publics. Statuts, droits, obligations et garanties. Garanties et avantages divers. Protection contre les attaques.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : SELARL REFLEX DROIT PUBLIC

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 11/04/2019
Date de l'import : 23/04/2019

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 17LY00933
Numéro NOR : CETATEXT000038384284 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-04-11;17ly00933 ?
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