Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2017 du préfet de l'Isère portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et d'annuler l'arrêté du même jour par lequel cette même autorité l'a assigné à résidence.
Par un jugement n° 1707121 du 8 mars 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 19 décembre 2017 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. B... et enjoint au préfet de l'Isère de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification du jugement et, de réexaminer sa situation en tenant compte des motifs du jugement, dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 16 avril 2018, le préfet de l'Isère demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 8 mars 2018 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) de rejeter la demande de M. B....
Il soutient qu'il n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que M. B... ne justifie pas contribuer à l'entretien et à l'éducation de son enfant depuis sa naissance ou depuis au moins deux ans à la date de la décision de refus de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 septembre 2018, M. B..., représenté par Me Lantheaume, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'État le paiement à son conseil d'une somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il fait valoir que les moyens présentés par le requérant ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 mai 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code civil ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Chevalier-Aubert, présidente-assesseure ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., né le 9 mai 1994, de nationalité tunisienne, déclare être entré en France en 2011. Par une décision du 19 décembre 2017, le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de titre de séjour présentée en qualité de parent d'enfant français. Le préfet de l'Isère relève appel du jugement du 8 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision.
Sur la légalité de la décision du 19 décembre 2017 portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; (...) ". L'article 371-2 du code civil dispose : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. (...) ".
3. M. B... est père d'un enfant français, Zied, né le 11 février 2013, qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance depuis le 28 mai 2014, sur lequel il exerce, conjointement avec la mère de cet enfant, l'autorité parentale. Si M. B... est séparé de la mère de cet enfant, il est constant qu'à la date de la décision en litige, il bénéficiait d'un droit de visite depuis le placement de l'enfant, même si ce droit a été réduit par jugement d'assistance éducative du tribunal pour enfants de Vienne du 2 décembre 2015, avant d'être rétabli à une journée par jugement du 15 décembre 2016 de ce même tribunal. Il ressort des pièces du dossier et notamment de ce dernier jugement, que M. B... entretient des relations " de bonne qualité " avec son enfant, à qui il rend visite régulièrement, et participe financièrement à son entretien par l'achat régulier de vêtements et de chaussures. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu que, dans les circonstances de l'espèce, M. B... devait être regardé comme justifiant contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil pour en conclure qu'en lui refusant la délivrance du titre de séjour qu'il avait demandé en sa qualité de parent d'un enfant français, le préfet de l'Isère avait méconnu les dispositions précitées du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Isère n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé sa décision du 19 décembre 2017 portant refus de délivrance d'un titre de séjour.
Sur les frais liés au litige :
5. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sous réserve que Me Lantheaume, avocat de M. B... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État une somme de 800 euros au titre des frais exposés à l'occasion du litige.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet de l'Isère est rejetée.
Article 2 : L'État versera à Me Lantheaume la somme de 800 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.
Article 3: Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur à M. A...B...et à Me Lantheaume.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 19 mars 2019, à laquelle siégeaient :
M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
Mme Virginie Chevalier-Aubert, présidente assesseure,
Mme D...C..., première conseillère.
Lu en audience publique le 9 avril 2019.
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N° 18LY01372