Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les décisions du 22 mars 2017 par lesquelles le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office, et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.
Par un jugement n° 1701419 du 19 décembre 2017, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 16 avril 2018, M.B..., représenté par Me Loiseau, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler ces décisions ;
3°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme, à titre principal, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, puis un titre de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au profit de son conseil, une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
. sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
- elle méconnait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- elle porte atteinte à l'intérêt supérieur de ses deux enfants mineurs, garanti par les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
. sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est entachée d'un défaut de base légale ;
. sur la décision portant fixation du pays de renvoi :
- elle est entachée d'un défaut de base légale ;
- elle porte atteinte à l'intérêt supérieur de ses deux enfants mineurs, garanti par les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnait les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
. sur la décision portant interdiction de retour :
- elle est entachée d'un défaut de base légale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juin 2018, le préfet du Puy-de-Dôme conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 février 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Chassagne ;
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., ressortissant arménien, déclare être entré en France le 23 mai 2011 avec son épouse. La décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 31 mai 2012, rejetant sa demande de bénéficier de l'asile, a été confirmée par la cour nationale du droit d'asile le 10 avril 2013. La demande de délivrance d'un titre de séjour de M. B...a été rejetée par le préfet du Puy-de-Dôme, qui l'a également obligé à quitter le territoire français, par arrêté du 23 avril 2014. M. B...a formé une nouvelle demande de délivrance d'un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale le 27 juin 2016. Par arrêté du 22 mars 2017, le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office, et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Par un jugement n° 1701419 du 19 décembre 2017, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de M. B... tendant notamment à l'annulation de cet arrêté du 22 mars 2017, en tant qu'il comporte les décisions qui viennent d'être mentionnées, dont il relève appel.
I- Sur la légalité de l'arrêté du 22 mars 2017 :
2. En premier lieu, M. B...soutient que la décision contestée portant refus de délivrance d'un titre de séjour méconnait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle. Ces moyens, qui ne diffèrent pas de ceux invoqués en première instance, ne sont assortis d'aucune précision supplémentaire, ni d'aucun élément nouveau pertinent de nature à critiquer les motifs par lesquels le tribunal administratif de Clermont-Ferrand les a écartés. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs du jugement attaqué.
3. En deuxième lieu, M. B...et son épouse qui sont tous les deux en situation irrégulière, n'ont pas vocation à se maintenir sur le territoire français. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'ils ne pourraient quitter le territoire français avec leurs enfants et reconstruire leur cellule familiale hors de ce pays, alors d'ailleurs que l'intéressé ne démontre pas qu'ils subvenaient auparavant aux besoins de leurs enfants par le fruit de leur travail, voire par le biais d'aides sociales. Ainsi, nonobstant la circonstance que, par un jugement n° 1701420 du 19 décembre 2017, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a prononcé l'annulation de décisions du préfet du Puy-de-Dôme fixant le pays à destination duquel son épouse pourrait être éloignée d'office, et lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an, le refus de titre de séjour contesté ne porte donc pas atteinte à l'intérêt supérieur des deux enfants mineurs de M.B..., et ne méconnait ainsi pas les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
4. En troisième lieu, il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient M.B..., les décisions contestées portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français ne sont pas entachées d'un défaut de base légale compte tenu de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour le concernant.
5. En cinquième lieu, il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été précédemment dit, que par un jugement n° 1701420 du 19 décembre 2017, devenu définitif sur ce point, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a prononcé l'annulation de décisions du préfet du Puy-de-Dôme fixant le pays à destination duquel l'épouse de M. B...pourrait être éloignée d'office, et lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Ainsi, ces décisions sont réputées avoir disparu de l'ordonnancement juridique et n'être jamais intervenues. De plus, il ressort de la décision de la cour nationale du droit d'asile du 10 avril 2013, n° 12031935-12031936, que si Mme C...épouseB..., compte tenu de son mariage avec un citoyen arménien, est susceptible de solliciter la nationalité arménienne, cette acquisition n'est toutefois pas de plein droit. Ainsi, la décision contestée, portant fixation du pays à destination duquel M. B...pourrait être éloigné d'office, visant l'Arménie, est susceptible de conduire à son éloignement vers ce pays, et cette décision peut donc être de nature à séparer les enfants de M. B...de l'un de ses parents. Par suite, cette décision porte donc atteinte à leur intérêt supérieur, et méconnait ainsi les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Ce moyen doit donc, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés contre cette décision, être accueilli et cette décision annulée.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 mars 2017 par laquelle le préfet du Puy-de-Dôme a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.
II- Sur les conclusions aux fins d'injonction :
7. Le présent arrêt, qui prononce l'annulation de la décision par laquelle le préfet du Puy-de-Dôme a fixé le pays à destination duquel M. B...pourrait être éloigné d'office, implique seulement que cette autorité procède à un nouvel examen de la situation de l'intéressé, dans un délai de deux mois à compter de la notification de cet arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
III- Sur les frais liés au litige :
8. M. B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Loiseau, avocat de M.B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Loiseau de la somme de 800 euros.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1701419 du 19 décembre 2017 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. B...tendant à l'annulation de la décision du 22 mars 2017 par laquelle le préfet du Puy-de-Dôme a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.
Article 2 : La décision du 22 mars 2017 par laquelle le préfet du Puy-de-Dôme a fixé le pays à destination duquel M. B...pourrait être éloigné d'office est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au préfet du Puy-de-Dôme de procéder au réexamen de la demande de M. B...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera Me Loiseau une somme de 800 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Loiseau renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 5 : Le surplus des conclusions présentées par M. B...est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., au ministre de l'intérieur, à Me Loiseau et au préfet du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l'audience du 28 février 2019, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président de chambre,
Mme Michel, président-assesseur,
M. Chassagne, premier conseiller.
Lu en audience publique le 21 mars 2019.
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N° 18LY01387