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21/03/2019 | FRANCE | N°17LY02646

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 21 mars 2019, 17LY02646


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 17 juillet 2014 par lequel le préfet du Rhône a prononcé la saisie définitive des armes de chasse dont il est détenteur.

Par un jugement n° 1501390 du 21 juin 2017, le tribunal administratif de Lyon a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 7 juillet 2017, le préfet du Rhône demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'ordonner une expertise

avant-dire droit tendant au réexamen de la capacité de M. A...pour pouvoir utiliser des armes pour le tir sport...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 17 juillet 2014 par lequel le préfet du Rhône a prononcé la saisie définitive des armes de chasse dont il est détenteur.

Par un jugement n° 1501390 du 21 juin 2017, le tribunal administratif de Lyon a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 7 juillet 2017, le préfet du Rhône demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'ordonner une expertise avant-dire droit tendant au réexamen de la capacité de M. A...pour pouvoir utiliser des armes pour le tir sportif et la chasse accompagné d'un bilan sanguin ;

3°) de rejeter la requête de M. A...présentée devant tribunal administratif de Lyon.

Il soutient que :

- la requête de première instance de M. A...était irrecevable pour tardiveté, l'arrêté du 17 juillet 2014 étant, en application des dispositions de l'article L. 312-9 du code de la sécurité intérieure, fondé sur un précédent arrêté du 27 janvier 2014, qui n'était pas contesté, alors qu'il était purement confirmatif de ce précédent acte, notifié le 10 février 2014 ;

- l'arrêté en cause n'est pas entaché d'erreur d'appréciation, au regard des dispositions des articles L. 312-7, L. 312-9 du code de la sécurité intérieure, et 63 du décret du 30 juillet 2013, l'état de M. A...étant incompatible avec la détention d'armes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2017, M.A..., représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par le préfet du Rhône ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 28 novembre 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 décembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- le décret n° 2013-700 du 30 juillet 2013 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Chassagne,

- les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant M.A....

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., qui réside sur le territoire de la commune de Monsols, détient plusieurs armes à feu pour sa pratique de la chasse et du tir sportif. Suite à une transmission par le sous-préfet de Villefranche-sur-Saône, le 3 décembre 2013, d'un procès-verbal de renseignements administratifs rédigé le 4 novembre 2013 par un officier de police judiciaire de la gendarmerie de Beaujeu, le préfet du Rhône a été informé de violences commises par M. A...le 28 juillet 2013 et le 15 août 2013. Les services de Gendarmerie avaient d'ailleurs saisi quatre armes suite à leur intervention au domicile de l'intéressé le 28 juillet 2013. Cet officier de police judiciaire estimait qu'au regard du comportement de l'intéressé, il convenait que l'autorité préfectorale envisage de prononcer à l'encontre de M. A...une mesure d'interdiction de détention d'armes. Par arrêtés en date des 17 et 27 janvier 2014, le préfet du Rhône a procédé à la saisie des armes appartenant à M.A..., lui ordonnant de remettre à l'autorité administrative ces armes, et ce alors que l'intéressé avait fait l'acquisition d'une nouvelle arme le 13 décembre 2013, déclarée par dossier reçu en préfecture le 15 janvier 2014. Par demandes du 11 avril 2014, reçue le 14 avril 2014, et du 5 juin 2014, reçue le lendemain, M.A..., se prévalant notamment du rapport d'un médecin psychiatre agréé établi le 4 avril 2014, a demandé la restitution de ses armes. Par un nouvel arrêté en date du 17 juillet 2014, le préfet du Rhône a ordonné la saisie définitive de ces armes. Si M. A...a, par demandes du 26 août 2014, reçue le lendemain, puis du 16 octobre 2014, demandé auprès de cette autorité que ses armes lui soient restituées, le préfet du Rhône a cependant refusé implicitement de faire droit à ces demandes. Le préfet du Rhône relève appel du jugement n° 1501390 du 21 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Lyon a, sur demande de M.A..., annulé cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 17 juillet 2014 :

2. Aux termes de l'article L. 312-7 du code de la sécurité intérieure : " Si le comportement ou l'état de santé d'une personne détentrice d'armes et de munitions présente un danger grave pour elle-même ou pour autrui, le représentant de l'Etat dans le département peut lui ordonner, sans formalité préalable ni procédure contradictoire, de les remettre à l'autorité administrative, quelle que soit leur catégorie. ". Aux termes de l'article L. 312-9 du même code : " La conservation de l'arme et des munitions remises ou saisies est confiée pendant une durée maximale d'un an aux services de la police nationale ou de la gendarmerie nationale territorialement compétents. / Durant cette période, le représentant de l'Etat dans le département décide, après que la personne intéressée a été mise à même de présenter ses observations, soit la restitution de l'arme et des munitions, soit la saisie définitive de celles-ci. Les armes et les munitions définitivement saisies en application du précédent alinéa sont vendues aux enchères publiques. Le produit net de la vente bénéficie aux intéressés. Aux termes de l'article 63 du décret n° 2013-700 du 30 juillet 2013, alors applicable : " L'arme, les munitions et leurs éléments remis ou saisis provisoirement en application des articles L. 312-7 et L. 312-8 du code de la sécurité intérieure sont conservés, pendant une durée maximale d'un an, par les services de la police nationale ou de la gendarmerie nationale. / A l'expiration de ce délai, le préfet prononce soit la restitution de cette arme et de ces munitions, soit leur saisie définitive, après avoir invité la personne qui détenait l'arme et les munitions à présenter ses observations, notamment quant à son souhait de les détenir à nouveau et quant aux éléments propres à établir que son comportement ou son état de santé ne présente plus de danger grave et immédiat pour elle-même ou pour autrui, au vu d'un certificat médical délivré par un médecin spécialiste mentionné à l'article 13. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que par deux certificats médicaux, l'un établi par le médecin généraliste traitant de l'intéressé le 19 décembre 2013, confirmé par des analyses de sang, et l'autre par un médecin psychiatre agréé, établi conformément aux dispositions précitées de l'article 63 du décret n° 2013-700 du 30 juillet 2013, il a été médicalement estimé que M.A..., depuis les évènements de l'été 2013 ayant précédé l'arrêté en cause, présentait les signes d'un sevrage, alors qu'un excès alcoolique était à l'origine de son comportement violent et des troubles du comportement précédents. Selon ce même médecin, il présentait désormais un état normal, compatible avec la détention d'une arme. Toutefois, d'une part, le préfet du Rhône se prévaut notamment de l'avis défavorable à la restitution à l'intéressé de ses armes émis par les services de la gendarmerie de Beaujeu le 10 mai 2014 après le rappel des actes de violence graves et réitérés survenus au cours de l'été 2013, soit relativement récemment au regard de la date de la demande de restitution formulée au cours de la période probatoire prévue par l'article L. 312-9 du code de la sécurité intérieure. D'autre part, le préfet du Rhône, à qui il appartient, en application des articles L. 312-7 et L. 312-9 du code de la sécurité intérieure, de se prononcer au regard de l'ensemble des éléments portés à sa connaissance, afin d'assurer le respect de l'ordre public, n'est pas lié par des avis médicaux émis notamment en application de l'article 63 du décret n° 2013-700 du 30 juillet 2013. Ainsi, au regard de l'ensemble de ces éléments, en prenant son arrêté du 17 juillet 2014 portant saisie définitive des armes de M.A..., au regard des dispositions des articles L. 312-7, L. 312-9 du code de la sécurité intérieure, et 63 du décret du 30 juillet 2013, en estimant que son comportement ou son état de santé étaient incompatibles avec la détention d'une arme et présentaient un danger grave pour lui-même ou pour autrui, le préfet du Rhône n'a pas fait une inexacte application de ces dispositions. C'est donc à tort que le tribunal administratif de Lyon a retenu ce motif pour annuler la décision en litige.

4. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par M. A...devant le tribunal administratif de Lyon.

5. Il résulte des termes mêmes de l'arrêté en litige que, pour prendre cette décision, le préfet du Rhône s'est notamment fondé sur le motif tiré de ce qu'il ressortait du procès-verbal de la gendarmerie de Beaujeu du 10 mai 2014 qui relatait l'audition de M. D..., maire de la commune où réside M.A..., que ce dernier pourrait présenter un danger et qu'il aurait une addiction à l'alcool. Ce procès-verbal relate clairement les déclarations de M. D...faites durant l'année 2013, sur le comportement de M.A.... Ainsi, à supposer même que M. A...a entendu soulever le moyen tiré de ce que le préfet se serait fondé sur les déclarations de M. D...parce que les réputant contemporaines de la date d'établissement de ce document, le préfet du Rhône n'a pas commis d'erreur de fait en s'appuyant sur ce procès-verbal établi le 10 mai 2014.

6. Ainsi, il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le préfet de Rhône devant le tribunal administratif de Lyon et l'autre moyen de sa requête, ni en tout état de cause de recourir à une expertise médicale plusieurs années après la décision en litige, que le préfet du Rhône est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 17 juillet 2014.

Sur les frais liés au litige :

7. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées par M. A...doivent donc être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1501390 du 21 juin 2017 du tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. A...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée pour information au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 28 février 2019, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

M. Chassagne, premier conseiller,

Lu en audience publique le 21 mars 2019.

5

N° 17LY02646


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY02646
Date de la décision : 21/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05-05 Police. Polices spéciales. Police du port et de la détention d'armes.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: M. Julien CHASSAGNE
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : CIEVET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-03-21;17ly02646 ?
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