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07/03/2019 | FRANCE | N°17LY03319

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 07 mars 2019, 17LY03319


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner La Poste à lui verser une somme de 61 600 euros pour la révision de sa carrière, 50 000 euros au titre du préjudice moral et 55 965,72 euros pour les sommes qu'elle serait susceptible de reverser au titre de sa pension d'invalidité.

Par un jugement n° 1605777 du 6 juillet 2017, le tribunal administratif de Grenoble a condamné La Poste à verser à Mme C... une somme de 66 600 euros au titre des préjudices subis et une somme de

1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner La Poste à lui verser une somme de 61 600 euros pour la révision de sa carrière, 50 000 euros au titre du préjudice moral et 55 965,72 euros pour les sommes qu'elle serait susceptible de reverser au titre de sa pension d'invalidité.

Par un jugement n° 1605777 du 6 juillet 2017, le tribunal administratif de Grenoble a condamné La Poste à verser à Mme C... une somme de 66 600 euros au titre des préjudices subis et une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 4 septembre 2017, La Poste, représentée par Me Bellanger, avocat, demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 6 juillet 2017 en tant qu'il l'a condamnée à indemniser Mme C..., de rejeter la demande de Mme C... devant le tribunal et de mettre à sa charge une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qui concerne le montant du préjudice financier ;

- les préjudices allégués sont inexistants et le montant de leur indemnisation n'est pas justifié.

Par un mémoire enregistré le 24 mai 2018, Mme C..., représentée par Me Aldeguer, avocat, conclut au rejet de la requête, subsidiairement, à la condamnation de La Poste à lui verser 55 965,72 euros outre intérêts de droit capitalisés, pour les sommes qu'elle serait susceptible de reverser au titre de sa pension d'invalidité et à la mise à la charge de La Poste d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est suffisamment motivé ;

- les préjudices qu'elle a subis sont justifiés.

Un mémoire présenté pour MmeC..., enregistré le 8 février 2019, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller,

- les conclusions de M. Laval, rapporteur public,

- les observations de Me B..., substituant Me Aldeguer avocat de Mme C... ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., fonctionnaire de La Poste a, sur avis favorable de la commission de réforme du 23 avril 2009, fait l'objet d'une décision du même jour, de mise à la retraite pour invalidité en raison de son inaptitude définitive à la reprise des fonctions, à compter du 22 juillet 2009. Par un jugement du 19 février 2013, devenu définitif, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision pour erreur de droit, au motif que son auteur s'est cru, à tort, en situation de compétence liée au regard de l'avis de la commission de réforme du 23 avril 2009. Par un jugement du 10 décembre 2014, devenu définitif, le tribunal administratif de Grenoble a enjoint à La Poste, dans un délai de trente jours à compter de la notification de sa décision, de " réintégrer Mme C... dans sa situation à la date de la décision annulée, prendre une nouvelle décision sur la situation de Mme C..., reconstituer la carrière que Mme C... aurait pu suivre en l'absence de la décision annulée jusqu'à la date de la nouvelle décision mentionnée ci-dessus ", cette injonction ayant été prononcée sous une astreinte de 200 euros par jour de retard. Par un jugement du 6 juillet 2017, le tribunal administratif de Grenoble a condamné La Poste à verser à Mme C... une somme de 66 600 euros au titre des préjudices subis (article 1er) ainsi qu'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 2) et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande (article 3). La Poste relève appel des articles 1er et 2 de ce jugement. Mme C..., qui conclut au rejet de la requête, demande subsidiairement à la cour de condamner La Poste à lui verser 55 965,72 euros, outre intérêts de droit capitalisés, pour les sommes qu'elle serait susceptible de reverser au titre de sa pension d'invalidité.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Il ressort du point 4 du jugement attaqué que pour fixer à la somme de 61 600 euros le montant du préjudice subi par Mme C... du fait de la perte de traitements, le tribunal a constaté que ce montant présenté par l'intéressée dans ses écritures n'était pas contesté par La Poste. Ainsi, le jugement contesté est suffisamment motivé sur ce point.

Sur la responsabilité de La Poste du fait de l'illégalité de la décision du 23 avril 2009 :

4. Si l'intervention d'une décision illégale peut constituer une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'administration, elle ne saurait donner lieu à réparation s'il résulte de l'instruction que, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise.

5. Par courrier du 6 juillet 2016, Mme C... a saisi La Poste d'une réclamation indemnitaire en invoquant, d'une part, le préjudice matériel subi depuis la date de son éviction irrégulière, constitué de la différence entre le traitement auquel elle aurait eu droit et la pension de retraite pour invalidité qu'elle a perçue et, d'autre part, le préjudice moral subi du fait de l'abstention de La Poste d'exécuter les décisions du tribunal. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif a fait droit à la demande de l'intéressée en ce qui concerne son préjudice matériel en se fondant sur le constat de l'illégalité de son éviction et de l'absence de contestation du montant réclamé.

6. Toutefois, d'une part, il résulte de l'instruction que le 23 avril 2009, la commission de réforme a donné un avis favorable à la mise à la retraite de l'intéressée pour invalidité en raison de son inaptitude définitive à la reprise de ses fonctions. Mme C... n'apporte aucun élément de nature à contredire cette appréciation. D'autre part, il ne résulte pas de l'instruction que l'auteur de la décision du 23 avril 2009 aurait pris une autre décision s'il n'avait pas renoncé à exercer son pouvoir d'appréciation. Compte tenu de ces éléments, la décision de mise à la retraite d'office de l'intéressée aurait pu être légalement prise si son auteur avait exercé son pouvoir d'appréciation. Ainsi, la décision de licenciement étant justifiée au fond, le préjudice constitué par la privation de son traitement, dont Mme C... demande réparation, ne présente pas un lien direct de causalité avec l'illégalité commise par La Poste.

7. Il résulte de ce qui précède que La Poste est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à indemniser Mme C... des préjudices financiers qu'elle a subis.

Sur la responsabilité de La Poste du fait de l'inexécution des jugements :

8. Il résulte de l'instruction que La Poste n'a mis en oeuvre aucune mesure pour l'exécution des jugements du tribunal administratif de Grenoble. Cette abstention fautive est de nature à engager sa responsabilité à l'égard de Mme C..., qui a été maintenue de manière anormalement prolongée dans l'incertitude en ce qui concerne l'issue de sa situation administrative. Mme C... a ainsi subi un préjudice moral dont les premiers juges ont fait une appréciation suffisante en lui allouant une indemnité d'un montant de 5 000 euros.

9. Il résulte de tout ce qui précède que La Poste est seulement fondée à demander que l'indemnité qu'elle a été condamnée à verser à Mme C... par le jugement attaqué soit limitée à la somme de 5 000 euros.

Sur les conclusions présentées par Mme C... à titre subsidiaire :

10. Mme C... demande la condamnation de La Poste à lui verser 55 965,72 euros pour les sommes dont le remboursement pourrait lui être réclamé au titre de sa pension d'invalidité. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction qu'une telle demande de remboursement lui aurait été présentée. Ainsi, s'agissant d'un préjudice éventuel, la demande indemnitaire formulée à ce titre ne peut qu'être rejetée.

Sur les frais liés au litige :

11. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de La Poste tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font obstacle à ce que La Poste, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, verse une somme à Mme C... au titre des frais exposés par elle à l'occasion du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : L'indemnité que La Poste a été condamnée à verser à Mme C... par l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 6 juillet 2017 est ramenée à 5 000 euros.

Article 2 : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 6 juillet 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de La Poste est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de Mme C... sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à La Poste et à Mme A... C....

Délibéré après l'audience du 14 février 2019 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Dèche, premier conseiller,

Mme Beytout, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 mars 2019

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N° 17LY03319


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY03319
Date de la décision : 07/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

46-01-09-06-03 Outre-mer. Droit applicable. Droit applicable aux fonctionnaires servant outre-mer. Rémunération. Indemnités diverses liées au passage.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : ALDEGUER

Origine de la décision
Date de l'import : 19/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-03-07;17ly03319 ?
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