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28/02/2019 | FRANCE | N°17LY03780

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 28 février 2019, 17LY03780


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler les décisions du 5 mai 2017 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un certificat de résidence, à défaut, de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement et, d

ans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours.
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler les décisions du 5 mai 2017 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un certificat de résidence, à défaut, de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours.

Par un jugement n° 1703429 du 3 octobre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 2 novembre 2017, M.C..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 3 octobre 2017 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " et, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- le signataire de la décision n'était pas compétent pour signer les décisions ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation eu égard à l'ensemble des dispositions de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- sa demande de titre de séjour ne peut être rejetée au seul motif qu'il ne serait pas porteur d'un visa d'une durée supérieure à trois mois ; il justifie d'une entrée régulière sur le territoire français ; la préfecture lui a délivré plusieurs récépissés l'autorisant à travailler et une attestation au terme de laquelle un titre de séjour lui serait délivré sous réserve de la production d'un passeport en cours de validité ; l'absence de production d'un visa de trois mois n'est pas de nature à le priver du droit à l'instruction de son dossier par transmission de sa demande auprès de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) ; le long délai d'instruction est de nature à caractériser qu'au jour où la décision contestée est intervenue, le visa de trois mois aurait en tout état de cause été expiré ; la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que le préfet ne pouvait lui délivrer de récépissés l'autorisant à travailler pour in fine s'opposer à la poursuite de son activité ;

- les décisions méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 dès lors qu'il est en possession de diplôme lui permettant l'exercice d'une activité professionnelle ; la situation de l'emploi ne lui est pas opposable compte tenu de ce que son employeur a tenté en vain de procéder à un recrutement ; il dispose de revenus stables et suffisants lui permettant de trouver un logement et de subvenir à ses besoins ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Caraës.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant algérien né le 8 mars 1980, est entré en France le 30 janvier 2015, sous couvert d'un visa de court séjour. Le 24 octobre 2016, il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence en qualité de salarié. Par un arrêté du 5 mai 2017, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit. M. C... relève appel du jugement du 3 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. En premier lieu, les décisions contestées ont été signées par M. Yves Dareau, secrétaire général adjoint de la préfecture de l'Isère, qui disposait, par arrêté du 1er février 2017 publié au recueil des actes administratifs du 6 février 2017, d'une délégation de signature consentie par M.D..., préfet de l'Isère, en cas d'absence ou d'empêchement de M.G..., directeur de cabinet, et de Mme Violaine Demaret, secrétaire générale de la préfecture de l'Isère, tous deux titulaires d'une délégation de signature qui leur avait été consentie par des arrêtés préfectoraux du même jour. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que, le 5 mai 2017, date à laquelle la décision contestée a été signée, Mme F...et M. G...n'étaient ni absents ni empêchés. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte contesté doit être écarté.

3. En second lieu, en vertu des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les mesures de police doivent être motivées et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.

4. En l'espèce, l'arrêté contesté vise les textes dont il fait application, et notamment les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il énonce que l'intéressé ne dispose pas d'un visa valable pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois tel qu'exigé à l'article 9 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et comporte également des éléments relatifs à la situation personnelle et familiale de l'intéressé et notamment le fait qu'il est célibataire et qu'il n'est pas démuni d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses parents ainsi que ses frères. Cet arrêté comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne :

5. En premier lieu, il ne ressort pas des termes de sa décision que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier et complet de la situation personnelle de M.C....

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La détention d'un récépissé d'une demande de délivrance ou de renouvellement d'un titre de séjour, d'un récépissé d'une demande d'asile ou d'une autorisation provisoire de séjour autorise la présence de l'étranger en France sans préjuger de la décision définitive qui sera prise au regard de son droit au séjour. ".

7. M. C...soutient que lui ayant accordé deux récépissés de demande de titre de séjour l'autorisant à travailler, le préfet de l'Isère ne pouvait ultérieurement s'opposer à la délivrance du titre de séjour sollicité. Toutefois, la détention d'un tel récépissé, si elle autorise la présence de l'intéressé en France, ne préjuge pas de la décision définitive qui sera prise au regard de son droit au séjour, ainsi qu'il résulte des dispositions mentionnées au point 2 de l'article L. 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, et en tout état de cause, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le préfet ne pouvait sans commettre d'erreur de droit lui refuser l'attribution d'un titre de séjour après lui avoir délivré plusieurs récépissés.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les dispositions du présent article et celles de l'article 7 bis fixent les conditions de délivrance du certificat de résidence aux ressortissants algériens autres que ceux visés à l'article 6 nouveau, ainsi qu'à ceux qui s'établissent en France après la signature du premier avenant à l'accord : (...) / b) Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi, un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention " salarié " : cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française ; (...) ". Aux termes de l'article 9 du même accord : " Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles (...) 7 (...), les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises ".

9. Il résulte de ces stipulations qu'un certificat de résidence salarié ne peut être délivré à un ressortissant algérien que s'il justifie présenter un contrat de travail visé par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) ou une autorisation de travail ainsi qu'un visa de long séjour. Si, pour solliciter le bénéfice d'un certificat de résidence, M. C... se prévaut d'une promesse d'embauche, il ne ressort toutefois d'aucune pièce du dossier qu'il était titulaire du visa de long séjour mentionné à l'article 9 de l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968, qui lui aurait éventuellement permis d'obtenir un contrat de travail visé par les autorités du travail habilitées conformément aux prescriptions du b) du 7 du même accord. Par suite, le préfet de l'Isère n'était pas tenu, à peine d'irrégularité de sa décision, de consulter d'office pour avis la Direccte avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié et n'a pas méconnu les stipulations du 7 b) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

10. En quatrième lieu, la circonstance que le préfet de l'Isère lui a indiqué, dans une attestation du 22 septembre 2016, qu'il devait produire un passeport en cours de validité pour permettre l'établissement de son titre de séjour est sans incidence sur la légalité des décisions critiquées dès lors qu'en application des stipulations de l'article 9 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, M. C...avait l'obligation de produire un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour.

11. En cinquième lieu, M. C...fait valoir qu'il dispose d'une promesse d'embauche compte tenu de ses compétences professionnelles comme coiffeur et de revenus stables. Cependant, M.C..., célibataire et sans enfant, n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident ses parents et ses frères et où il a vécu jusqu'à l'âge de 35 ans. Dans ces conditions, le préfet de l'Isère n'a pas méconnu les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à ce que soient mis à la charge de l'Etat les frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2: Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 31 janvier 2019, à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

M. Drouet, président assesseur,

Mme Caraës, premier conseiller.

Lu en audience publique le 28 février 2019.

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N° 17LY03780


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY03780
Date de la décision : 28/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS TARLIER - RECHE - GUILLE MEGHABBAR

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-02-28;17ly03780 ?
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