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12/02/2019 | FRANCE | N°18LY00128

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 5, 12 février 2019, 18LY00128


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner l'Etat à lui verser la somme de 16 258 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 1er octobre 2014, en réparation du préjudice que lui a causé l'illégalité de la décision du 8 juillet 2013 lui refusant un titre de séjour en qualité de conjoint de français et l'obligeant à quitter le territoire français et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code

de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 199...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner l'Etat à lui verser la somme de 16 258 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 1er octobre 2014, en réparation du préjudice que lui a causé l'illégalité de la décision du 8 juillet 2013 lui refusant un titre de séjour en qualité de conjoint de français et l'obligeant à quitter le territoire français et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1504536 du 7 décembre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 9 janvier 2018, M. B..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1504536 du 7 décembre 2017 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme 5 000 euros avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par le préfet de sa demande préalable, en réparation du préjudice subi, avec capitalisation des intérêts ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité dès lors que sa demande ne relevait pas des cas prévus par l'article R. 732-1-1 permettant au président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, ce qu'il a pourtant fait ;

- en ne lui délivrant pas un titre de séjour en qualité de conjoint de français, l'Etat a engagé sa responsabilité pour faute ;

- il a subi un préjudice moral et il n'avait pas, pour l'établir, à produire de pièces spécifiques dès lors qu'il a vécu en situation irrégulière sur le territoire français pendant une période de cinq mois et le préfet de l'Isère a mis sept mois à lui délivrer un titre de séjour alors que le tribunal administratif de Grenoble lui avait enjoint d'y procéder dans un délai de trois mois ;

- il n'a été autorisé à travailler que le 7 mai 2014 et a donc été privé de cette possibilité pendant dix mois ;

- son préjudice doit être évalué à 5 000 euros.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant tunisien, né en 1972, expose qu'il est entré en France le 27 avril 2012 et s'est marié avec MmeA..., de nationalité française le 27 avril 2012. Par un arrêté du 8 juillet 2013 le préfet de l'Isère a rejeté la demande de titre de séjour en tant que conjoint de français que M. B... avait formée le 15 mai 2012 et l'a obligé à quitter le territoire. Par un jugement du 3 décembre 2013 passé en force de chose jugée, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté en raison de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour. M. B... relève appel du jugement du 7 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à réparer les préjudices matériel et moral qu'il soutient avoir subis du fait du refus de titre de séjour qui lui a été illégalement opposé.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 732-1 du code de justice administrative : " Dans des matières énumérées par décret en Conseil d'Etat, le président de la formation de jugement peut dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, d'exposer à l'audience ses conclusions sur une requête, eu égard à la nature des questions à juger. " ; aux termes de l'article R. 732-1-1 du même code : " Sans préjudice de l'application des dispositions spécifiques à certains contentieux prévoyant que l'audience se déroule sans conclusions du rapporteur public, le président de la formation de jugement ou le magistrat statuant seul peut dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience sur tout litige relevant des contentieux suivants : /4° Entrée, séjour et éloignement des étrangers, à l'exception des expulsions ; (...) ".

3. En plaçant au nombre des contentieux pour lesquels le rapporteur public peut être dispensé de prononcer des conclusions ceux dont relèvent les litiges relatifs à l'entrée au séjour et à l'éloignement des étrangers à l'exception des expulsions, les dispositions rappelées ci-dessus de l'article R. 732-1-1 ont nécessairement inclus les litiges indemnitaires se rapportant aux décisions prises en ce domaine.

4. Il résulte de ce qui vient d'être dit que M.B..., dont la demande tendait à être indemnisé des conséquences dommageables résultant de l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé, n'est pas fondé à soutenir qu'en l'absence de conclusions prononcées à l'audience par le rapporteur public, le jugement attaqué est entachée d'irrégularité.

Sur les conclusions à fin de condamnation de l'Etat :

5. Si l'intervention d'une décision illégale peut constituer une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise.

6. Aux termes de l'article L. 313-11 dans sa version applicable aux fait de l'espèce : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; ". L'article L. 311-7 du même code dispose : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. ".

7. Il résulte de ces dispositions que pour obtenir un titre de séjour, M. B...devait disposer d'un visa long séjour. Il ne ressort d'aucune des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas soutenu, que l'intéressé était en possession d'un tel visa à la date de la décision attaquée. Il s'ensuit que le préfet de l'Isère, s'il n'avait pas commis l'irrégularité sanctionnée par le tribunal administratif de Grenoble, aurait pu légalement refuser de lui délivrer le titre de séjour qu'il avait sollicité. Il s'ensuit que M. B... n'est pas fondé à soutenir que les préjudices matériel et moral qu'il invoque ont été causés par le caractère irrégulier de la décision du 8 juillet 2013.

Sur les frais du litige :

8. La cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions présentées à ce titre par M. B... doivent, dès lors, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 15 janvier 2018 à laquelle siégeaient :

M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,

Mme Virginie Chevalier-Aubert, président assesseur,

Mme Céline Michel, président assesseur,

M. Pierre Thierry, premier conseiller,

Mme D...C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 12 février 2019.

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N° 18LY00128

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 5
Numéro d'arrêt : 18LY00128
Date de la décision : 12/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Procédure - Diverses sortes de recours - Recours de plein contentieux.

Procédure - Jugements - Règles générales de procédure.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Responsabilité et illégalité - Illégalité engageant la responsabilité de la puissance publique.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Pierre THIERRY
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : LANTHEAUME

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-02-12;18ly00128 ?
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