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20/12/2018 | FRANCE | N°17LY00065

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 20 décembre 2018, 17LY00065


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Lyon :

- sous le n° 1403919, d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2013 par lequel le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de l'Ain l'a suspendu de ses fonctions de sapeur-pompier professionnel à titre conservatoire ;

- sous le n° 1403923, d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2013 par lequel le SDIS de l'Ain l'a suspendu de son engagement de sapeur-pompier volontaire à titre conservatoire ;<

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Lyon :

- sous le n° 1403919, d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2013 par lequel le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de l'Ain l'a suspendu de ses fonctions de sapeur-pompier professionnel à titre conservatoire ;

- sous le n° 1403923, d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2013 par lequel le SDIS de l'Ain l'a suspendu de son engagement de sapeur-pompier volontaire à titre conservatoire ;

- sous le n° 1403983, de condamner le SDIS de l'Ain à lui verser la somme de 5 800 euros en réparation de son préjudice financier et 10 000 euros en réparation du préjudice moral, résultant de l'illégalité de l'arrêté du 22 novembre 2013 par lequel il a été suspendu de ses fonctions.

Par un jugement n° 1403919, 1403923, 1403983 du 9 novembre 2016, le tribunal administratif de Lyon a annulé les arrêtés du 22 novembre 2013 et condamné le SDIS à indemniser M. C...du préjudice financier résultant de la perte de son régime indemnitaire pour la période comprise entre le 25 novembre 2013 et le 24 mars 2014 et à lui verser la somme de 500 euros en réparation du préjudice moral.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 9 janvier 2017 et 7 février 2018, le SDIS de l'Ain, représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 novembre 2016 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de mettre à la charge de M. C...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le président du conseil d'administration n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation en suspendant M. C...de ses fonctions de sapeur-pompier volontaire et de sapeur-pompier professionnel dès lors que les faits de harcèlement moral étaient corroborés par de nombreux éléments ;

- la mesure conservatoire était justifiée par l'intérêt et la continuité du service.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 janvier 2018, M.C..., représenté par Me A... conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à la réformation du jugement en ce qu'il n'a pas intégralement fait droit à sa demande de réparation de son préjudice moral et, en tout état de cause, à ce que soit mis à la charge du SDIS de l'Ain la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens présentés par le SDIS de l'Ain ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Chevalier-Aubert, rapporteur,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me F...substituant MeB..., représentant le SDIS de l'Ain ;

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., sous-officier titulaire du grade d'adjudant de sapeur-pompier professionnel au sein du SDIS de l'Ain, a été suspendu temporairement de ses fonctions par un arrêté du 22 novembre 2013 du président du conseil d'administration du SDIS de l'Ain. Par un arrêté du même jour il a également été suspendu de son engagement de sapeur-pompier volontaire. Il a été mis fin à ces mesures le 24 mars 2014. M. C...a saisi le tribunal administratif de Lyon d'une demande d'annulation de ces arrêtés et de réparation de ses préjudices en résultant. Par la présente requête, le SDIS de l'Ain relève appel du jugement du 9 novembre 2016, par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé les arrêtés du 22 novembre 2013 et l'a condamné à indemniser M. C...du préjudice financier résultant de la perte de son régime indemnitaire pour la période comprise entre le 25 novembre 2013 et le 24 mars 2014 et à lui verser la somme de 500 euros en réparation du préjudice moral. M. C...demande, dans le cadre de conclusions d'appel incident, que le SDIS de l'Ain soit condamné à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice moral.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai, le conseil de discipline. Le fonctionnaire suspendu conserve son traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement et les prestations familiales obligatoires. Sa situation doit être définitivement réglée dans le délai de quatre mois. Si, à l'expiration de ce délai, aucune décision n'a été prise par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire, l'intéressé, sauf s'il est l'objet de poursuites pénales, est rétabli dans ses fonctions. (...) Le fonctionnaire qui, en raison de poursuites pénales, n'est pas rétabli dans ses fonctions peut subir une retenue qui ne peut être supérieure à la moitié de la rémunération mentionnée à l'alinéa précédent. Il continue, néanmoins, à percevoir la totalité des suppléments pour charges de famille ".

3. Il résulte de ces dispositions que la mesure provisoire de suspension est uniquement destinée à écarter temporairement un agent du service, en attendant qu'il soit statué disciplinairement ou pénalement sur sa situation. Elle peut être légalement prise dès lors que l'administration est en mesure d'articuler à l'encontre de l'intéressé des griefs qui ont un caractère de vraisemblance suffisant et qui permettent de présumer que celui-ci a commis une faute grave.

4. Les arrêtés litigieux du 22 novembre 2013 de suspension de M. C...de ses fonctions professionnelles et d'engagement de sapeur-pompier volontaire sont fondés sur une plainte déposée à son encontre le 16 novembre 2013 par Mme E...pour des faits en lien avec le service, le compte rendu de Mme E...relatant des graves difficultés relationnelles et, par voie de conséquence, sur la nécessité de prendre des mesures conservatoires au profit des agents concernés et du centre d'incendie et de secours du Pont-d'Ain.

5. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date des arrêtés, le SDIS était informé d'importants différends professionnels entre M. C...et sa collègue MmeE..., sergent-chef, notamment par plusieurs courriers des intéressés adressés à leur hiérarchie en octobre et novembre 2013. Le commandant Sellier, chef de groupement qui a entendu Mme E... et M. C... à la suite d'une altercation, fait état dans son rapport du 22 octobre 2013, de l'état de fragilité psychologique de Mme E...qui " donne l'effet d'être une personne harcelée ou faisant l'objet d'un chantage " mais précise qu'il est d'avis que que cette altercation a pour origine des faits extra-professionnels pour lesquels les torts sont, selon lui, partagés.

6. Le SDIS de l'Ain se prévaut, dans ses écritures, d'un courrier anonyme reçu le 21 octobre 2013, mentionnant " une situation pesante " dans la caserne en raison de l'excès d'autorité et de la nonchalance de M.C.... Les faits invoqués dans cette lettre et les autres pièces du dossier, au demeurant non établis, s'ils révèlent d'importantes tensions entre les deux agents, ne sont pas susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral de M. C...à l'encontre de Mme E...à la date des arrêtés litigieux. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier que les difficultés relationnelles entre M. C...et MmeE..., auraient, comme le soutient le SDIS de l'Ain, été de nature à porter atteinte à la continuité du service public de lutte contre l'incendie et de secours des secours.

7. Il résulte de ce qui précède qu'à la date des arrêtés en litige, les faits reprochés à M. C... ne présentaient pas un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité pour justifier les mesures de suspension dont il a fait l'objet. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont prononcé l'annulation des arrêtés de suspension du 22 novembre 2013 en considérant que le président du conseil d'administration du SDIS de l'Ain avait entaché ces décisions d'une erreur manifeste d'appréciation.

8. Il résulte de ce qui précède que le SDIS de l'Ain n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a prononcé l'annulation des arrêtés du 22 novembre 2013 du président du conseil d'administration du SDIS de l'Ain.

Sur les conclusions incidentes de M. C...:

9. Il ne résulte pas de l'instruction que les premiers juges auraient fait une inexacte appréciation du préjudice moral subi par M. C...du fait de sa suspension, en condamnant le SDIS de l'Ain à lui verser, à ce titre, une somme de 500 euros. Les conclusions d'appel incident par lesquelles M. C...demande que le montant de cette indemnité soit élevé à la somme de 10 000 euros doivent, dès lors, être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M.C..., qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse au SDIS de l'Ain une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du SDIS de l'Ain la somme de 1 500 euros au titre des frais que M. C...a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du SDIS de l'Ain est rejetée.

Article 2 : Les conclusions incidentes présentées par M.C... sont rejetées.

Article 3 : Le SDIS de l'Ain versera à M. C...une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au service départemental d'incendie et de secours de l'Ain et à M. D...C....

Délibéré après l'audience du 4 décembre 2018, à laquelle siégeaient :

M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,

Mme Virginie Chevalier-Aubert, président assesseur,

M. Pierre Thierry, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 décembre 2018.

2

N° 17LY0065


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY00065
Date de la décision : 20/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-09-01 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Suspension.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SELAS LLC et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-12-20;17ly00065 ?
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