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26/11/2018 | FRANCE | N°18LY02495

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre b - formation à 3, 26 novembre 2018, 18LY02495


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 30 avril 2018 par laquelle le préfet de la Haute-Savoie a ordonné sa remise aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1802876 du 30 mai 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 5 juillet 2018, le préfet de la Haute-Savoie demande à l

a cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 30 avril 2018 par laquelle le préfet de la Haute-Savoie a ordonné sa remise aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1802876 du 30 mai 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 5 juillet 2018, le préfet de la Haute-Savoie demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble du 30 mai 2018 ;

2°) de rejeter la demande de M. A... devant le tribunal administratif.

Il soutient que, contrairement à ce qui a été jugé, il a justifié devant le tribunal administratif de la saisine des autorités italiennes.

La requête a été communiquée à M. A... qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 modifié par le règlement (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Clot, président, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant soudanais né le 1er janvier 1983, déclare être entré en France le 9 juillet 2017. Le 11 octobre 2017, il a déposé une demande d'asile à la préfecture de l'Isère. Le fichier Eurodac a révélé que ses empreintes avaient été relevées en Italie le 27 mai 2017. Le 7 février 2018, le préfet de la Haute-Savoie a décidé la remise de l'intéressé aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile. Par un jugement du 6 avril 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision. Le 30 avril 2018, ce préfet a de nouveau ordonné la remise de l'intéressé aux autorités italiennes. Ledit préfet relève appel du jugement du 30 mai 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision du 30 avril 2018.

2. Aux termes de l'article 21 du règlement du 26 juin 2013 : " 1. L'État membre auprès duquel une demande de protection internationale a été introduite et qui estime qu'un autre État membre est responsable de l'examen de cette demande peut, dans les plus brefs délais et, en tout état de cause, dans un délai de trois mois à compter de la date de l'introduction de la demande au sens de l'article 20, paragraphe 2, requérir cet autre État membre aux fins de prise en charge du demandeur. / Nonobstant le premier alinéa, en cas de résultat positif ("hit") Eurodac avec des données enregistrées en vertu de l'article 14 du règlement (UE) n° 603/2013, la requête est envoyée dans un délai de deux mois à compter de la réception de ce résultat positif en vertu de l'article 15, paragraphe 2, dudit règlement. / Si la requête aux fins de prise en charge d'un demandeur n'est pas formulée dans les délais fixés par le premier et le deuxième alinéa, la responsabilité de l'examen de la demande de protection internationale incombe à l'État membre auprès duquel la demande a été introduite (...) / 3. Dans les cas visés aux paragraphes 1 et 2, la requête aux fins de prise en charge par un autre État membre est présentée à l'aide d'un formulaire type et comprend les éléments de preuve ou indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, et/ou les autres éléments pertinents tirés de la déclaration du demandeur qui permettent aux autorités de l'État membre requis de vérifier s'il est responsable au regard des critères définis dans le présent règlement (...) ".

3. Aux termes de l'article 15 du règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003, dans sa rédaction issue du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 : " 1. Les requêtes et les réponses, ainsi que toutes les correspondances écrites entre États membres visant à l'application du règlement (UE) n° 604/2013, sont, autant que possible, transmises via le réseau de communication électronique " DubliNet " établi au titre II du présent règlement / (...) / 3. L'accusé de réception émis par le système fait foi de la transmission et de la date et de l'heure de réception de la requête ou de la réponse. "

4. Devant le tribunal administratif, le préfet de la Haute-Savoie a produit la demande de prise en charge adressée aux autorités italiennes, l'accusé de réception du 12 octobre 2017, de transmission de cette demande à la cellule chargée du réseau de communication électronique " DubliNet " et l'accusé de réception du constat de l'accord implicite de ces autorités, du 15 décembre 2017. Dès lors, c'est à tort que, pour annuler la décision de transfert en litige, le premier juge s'est fondé sur le motif tiré de ce que le préfet ne justifiait pas avoir régulièrement saisi les autorités italiennes, dans le délai de deux mois prévu par les dispositions de l'article 21 du règlement du 26 juin 2013.

5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. A....

6. Aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement et notamment : / a) des objectifs du présent règlement (...) / b) des critères de détermination de l'État membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée (...) / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5 (...) ".

7. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et en tout état de cause en temps utile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend.

8. Comme il a été dit, M. A... a déposé sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile à la préfecture de l'Isère le 11 octobre 2017 et a bénéficié le même jour d'un entretien avec un agent du service. Toutefois, les informations prévues par l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 ne lui ont été remises que le 19 avril 2018. Dès lors, les dispositions de ce règlement ont été méconnues, ce qui a eu pour effet, en l'espèce, de le priver d'une garantie.

9. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Haute-Savoie n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision en litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Haute-Savoie est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... A....

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2018 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 novembre 2018.

N° 18LY02495 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre b - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY02495
Date de la décision : 26/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: M. LAVAL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-11-26;18ly02495 ?
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