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26/11/2018 | FRANCE | N°18LY01061

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre b - formation à 3, 26 novembre 2018, 18LY01061


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision implicite par laquelle le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire lui a été retiré et d'enjoindre à l'administration de rétablir le versement à son profit de cette bonification à compter du 1er février 2017.

Par un jugement n° 1701565 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision implicite supprimant à Mme A... le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire à compter

du 1er février 2017 et enjoint au ministre de la transition écologique et solidaire de p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision implicite par laquelle le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire lui a été retiré et d'enjoindre à l'administration de rétablir le versement à son profit de cette bonification à compter du 1er février 2017.

Par un jugement n° 1701565 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision implicite supprimant à Mme A... le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er février 2017 et enjoint au ministre de la transition écologique et solidaire de procéder à la régularisation de sa situation financière.

Procédure devant la cour

Par un recours enregistré le 19 mars 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 29 décembre 2017 ;

2°) de rejeter la demande de Mme A... devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, l'arrêté du 1er avril 2015 n'a pas supprimé mais maintenu l'emploi de Mme A... dans la liste des emplois ouvrant droit à la nouvelle bonification indiciaire (NBI) ; le jugement attaqué est donc entaché d'une erreur de fait ;

- le principe d'égalité de traitement entre agents publics, sur lequel s'est fondé le tribunal administratif, qui s'applique à l'égard de l'ensemble des agents se trouvant dans une même situation, suppose, lorsqu'il s'agit de l'attribution de la NBI, non seulement que les agents occupent les mêmes emplois comportant une responsabilité ou une technicité particulière dans des conditions fixées par décret, mais encore qu'ils relèvent, pour cette attribution, de la même autorité investie du pouvoir de décision ; en l'espèce, en vertu du décret n° 2001-1161 du 7 décembre 2001 et de l'arrêté du 7 décembre 2001, cette autorité est le préfet de l'Yonne ; Mme A... ne pouvait donc pas se prévaloir de la situation de fonctionnaires d'autres départements ;

- à supposer même que la décision qu'elle conteste ait dû être motivée, Mme A... n'a pas demandé communication de ses motifs ; par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que cette décision serait insuffisamment motivée ;

- la circonstance que les fonctions exercées par un agent sont susceptibles de relever de la catégorie des affaires juridiques visée par l'annexe au décret n° 2001-1161 du 7 décembre 2001, comme c'est le cas de Mme A..., ne lui ouvre pas droit, à elle seule, à l'attribution de la NBI ;

- il était loisible au préfet de l'Yonne d'apprécier et de retenir, conformément à la réglementation relative à la NBI, les postes bénéficiaires de points de NBI parmi les différents postes éligibles au sein de la direction des territoires de ce département ; ce service a été réorganisé le 1er janvier 2017 ; la NBI a été attribuée à des postes fortement exposés, présentant un niveau de responsabilité élevé, supérieur à celui de Mme A... et correspondant à des enjeux prioritaires ;

- Mme A... ne peut se prévaloir d'un droit acquis au maintien de la NBI ; c'est la réorganisation de la direction départementale des territoires de l'Yonne en 2017, et non le changement de grade de l'intéressée, qui constitue le motif de la suppression de la NBI dont elle bénéficiait.

Par un mémoire enregistré le 22 mai2018, Mme A... conclut au rejet du recours et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'État au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif n'a commis qu'une erreur de date, sans incidence sur le bien-fondé de son jugement, en confondant les arrêtés du 1er avril 2015 et du 11 avril 2017 ;

- parmi les poste devenus éligibles à la NBI figure celui de responsable de l'unité " planification et appui aux territoires " (UPAT), occupé, comme elle, par un agent de catégorie A ; ce poste ne présente pas un niveau de responsabilité ou de technicité supérieur à celui des affaires juridiques ;

- c'est bien son changement de corps qui a entraîné la suppression de la NBI ;

- cette suppression est intervenue en méconnaissance de la procédure contradictoire, s'agissant d'une décision prise en considération de la personne et qui abroge une décision créatrice de droits ;

- la décision implicite contestée intervenue le 1er février 2017 doit être annulée en tant qu'elle porte sur la période du 1er février 2017 au 1er juin 2017, alors même que cette date du 1er février 2017 ne correspond à aucune modification ; d'une part, le comité technique, chargé d'examiner la nouvelle répartition de la NBI, ne s'est réuni que le 11 avril 2017, date de signature de l'arrêté qui a pris effet au 1er juin 2017 ; d'autre part, aucun changement dans sa situation administrative n'était intervenu, tant en matière statutaire qu'en matière de missions.

Par un mémoire enregistré le 6 août 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de la cohésion des territoires concluent aux mêmes fins que le recours par les mêmes moyens.

Ils soutiennent en outre que :

- le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la suppression de la NBI n'est pas soumise au respect d'une procédure contradictoire.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ;

- la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales ;

- le décret n° 91-1067 du 14 octobre 1991 portant attribution de la nouvelle bonification indiciaire à certains personnels du ministère de l'équipement, du logement, des transports et de l'espace ;

- décret n° 2001-1161 du 7 décembre 2001 portant déconcentration de décisions relatives à l'attribution de la nouvelle bonification indiciaire dans les services du ministère de l'équipement, des transports et du logement ;

- l'arrêté du 7 décembre 2001 portant délégation de pouvoir en matière d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire dans les services du ministère de l'équipement, des transports et du logement ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Clot, président,

- les conclusions de M. Laval, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., membre du corps de catégorie B des secrétaires d'administration et de contrôle du développement durable affectée à la direction départementale des territoires du développement durable, a été intégrée en 2016 dans le corps de catégorie A des attachés d'administration de l'État. Elle exerce depuis le 1er janvier 2009 les fonctions de responsable des affaires juridiques au sein de la direction départementale des territoires de l'Yonne. Elle bénéficiait d'une nouvelle bonification indiciaire (NBI). Cet avantage lui a été supprimé à compter du 1er février 2017. Par un jugement du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision implicite supprimant à Mme A... le bénéfice de la NBI à compter du 1er février 2017 et enjoint au ministre de la transition écologique et solidaire de procéder à la régularisation de sa situation financière. Ledit ministre fait appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article 27 de la loi du 18 janvier 1991 : " I- La nouvelle bonification indiciaire des fonctionnaire et des militaires (...) est attribuée pour certains emplois comportant une responsabilité ou une technicité particulières dans des conditions fixées par décret (...) ".

3. Aux termes de l'article 1err du décret du 14 octobre 1991 : " La nouvelle bonification indiciaire peut être versée mensuellement dans la limite des crédits disponibles aux fonctionnaires relevant du ministère de l'équipement, du logement, des transports et de l'espace (...) qui remplissent l'une des fonctions dont la liste figure à l'annexe du présent décret (...) " .

4. Il résulte des dispositions de l'article 27 de la loi du 18 janvier 1991 que le pouvoir réglementaire peut limiter le versement de la nouvelle bonification indiciaire aux agents occupant les emplois qu'il détermine, comportant une responsabilité ou une technicité particulières. Il est loisible à l'administration, lorsqu'elle établit la liste des emplois ouvrant droit à cette bonification, de prendre en considération des raisons budgétaires et des orientations de politique de gestion des personnels. L'administration peut, sous le contrôle du juge, supprimer un emploi de cette liste en se fondant sur les mêmes motifs, l'agent occupant cet emploi n'ayant aucun droit au maintien de la bonification. Dans tous les cas, l'administration doit, conformément au principe d'égalité, traiter de la même manière tous les agents occupant les emplois correspondant aux fonctions ouvrant droit à la bonification ou n'y ouvrant plus droit et qui comportent la même responsabilité ou la même technicité particulières. Lorsqu'un emploi a été légalement supprimé de la liste des emplois ouvrant droit à la nouvelle bonification indiciaire, l'administration est tenue de mettre fin au versement de la nouvelle bonification indiciaire à l'agent concerné.

5. Il résulte de l'arrêté du 7 décembre 2001, portant délégation de pouvoir en matière d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire dans les services du ministère de l'équipement, des transports et du logement, pris en application du décret n° 2001-1161 du 7 décembre 2001, que le préfet de département est compétent pour définir les fonctions ouvrant droit à la nouvelle bonification indiciaire, la détermination du nombre de points correspondant à chacune de ces fonctions, et l'attribution des points de nouvelle bonification indiciaire aux fonctionnaires affectés dans une direction départementale des territoires. Dès lors, il appartient au préfet du département, conformément au principe d'égalité, de traiter de la même manière tous les agents de la direction départementale des territoires occupant les emplois correspondant aux fonctions ouvrant droit à la bonification ou n'y ouvrant plus droit et qui comportent la même responsabilité ou la même technicité particulières. En revanche, compte tenu de la situation particulière de chaque département, le principe d'égalité n'implique pas que les emplois de directions départementales des territoires différentes correspondant aux fonctions comportant la même responsabilité ou la même technicité particulières ouvrent droit à la nouvelle bonification indiciaire. Par suite, pour contester la décision de ne pas lui attribuer cette bonification, Mme A... ne peut pas utilement se prévaloir de ce que les emplois de responsables d'unités juridiques de directions départementales des territoires différentes bénéficient de cette bonification. En conséquence, c'est à tort que, pour annuler la décision en litige, le tribunal administratif a retenu ce moyen.

6. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par Mme A....

7. Il ressort des pièces du dossier que la perte par Mme A... de la nouvelle bonification indiciaire, à compter du 1er février 2017, résulte de la réorganisation des services de la direction départementale des territoires de l'Yonne, à compter du 1er janvier 2017, suivie de l'intervention de l'arrêté du préfet de l'Yonne du 28 avril 2017 fixant la liste des postes de cette direction éligibles à cette bonification à compter du 1er juin 2017, dont ne fait pas partie le poste occupé par l'intéressée. Ces décisions ne constituent pas des décisions individuelles devant être motivées. Elles ne sont pas au nombre des décisions devant être précédées d'une procédure contradictoire.

8. Compte tenu de ce qui vient d'être dit, la suppression de la nouvelle bonification indiciaire perçue par Mme A... ne peut pas être regardée comme résultant de son changement de corps.

9. Mme A... soutient que parmi les poste devenus éligibles à la nouvelle bonification indiciaire figure celui de responsable de l'unité " planification et appui aux territoires " (UPAT), occupé, comme elle, par un agent de catégorie A, qui ne présente pas un niveau de responsabilité ou de technicité supérieur à celui de responsable des affaires juridiques. Il ressort toutefois des pièces du dossier que ce poste, dont la création répond à l'objectif de renforcement de la présence sur le territoire, pris en compte dans la nouvelle organisation de la direction, est l'un des plus lourds et complexes de la direction départementale des territoires (DDT) en termes de missions (planification territoriale et appui aux territoires), d'exposition (collectivités territoriales, élus, préfet) et de management (encadrement de douze agents). Dès lors, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en décidant d'attribuer une nouvelle bonification indiciaire au titulaire de cet emploi et de supprimer celle dont bénéficiait le poste de responsable des affaires juridiques.

10. L'arrêté préfectoral du 1er avril 2015 fixant la liste des postes de la direction départementale des territoires éligibles à la nouvelle bonification indiciaire pour l'année 2015, mentionne l'emploi de responsable de l'unité affaires juridiques. Si l'arrêté du 28 avril 2017 abroge celui du 1er avril 2015, ce dernier avait cessé de produire des effets le 31 décembre 2015. Mme A... ne se prévaut d'aucun texte qui, pour l'année 2016 et jusqu'au 31 mai 2017, aurait attribué une nouvelle bonification indiciaire à l'emploi qu'elle occupait.

11. Il résulte de ce qui précède que le ministre de la transition écologique et solidaire est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision implicite supprimant à Mme A... le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire.

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme au titre des frais exposés par Mme A... à l'occasion du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Dijon du 29 décembre 2017 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de Mme A... sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire et à Mme B... A....

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2018 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 novembre 2018.

6

N° 18LY01061


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre b - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY01061
Date de la décision : 26/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-08-02 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Traitement.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : C.G.B.G - AVOCATS ASSOCIES - CHATON-GRILLON-BROCARD-GIRE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-11-26;18ly01061 ?
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