Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 28 juillet 2015 par laquelle le président du conseil départemental de l'Isère a retiré son agrément d'assistante maternelle à compter du 10 août 2015.
Par un jugement n° 1505933 du 2 juin 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 1er août 2016, Mme D... B..., représentée par Me Eisler, avocat, demande à la cour d'annuler pour excès de la décision du 28 juillet 2015 par laquelle le président du conseil départemental de l'Isère a retiré son agrément d'assistante maternelle à compter du 10 août 2015.
Elle soutient que :
- la décision en litige aurait dû comporter la mention de la délégation de signature accordée le 2 avril 2015 à son signataire ;
- le délai de onze jours entre la notification de la décision contestée, le 30 juillet 2015, et son entrée en vigueur, le 10 août 2015, n'est pas justifié par l'urgence et ne respecte pas le préavis contractuel ;
- la lettre du 29 juin 2015 du président du conseil départemental l'informant de ce qu'il envisageait le retrait de son agrément et la saisine préalable pour avis de la commission consultative paritaire départementale ne mentionne aucun fait ni aucune date ;
- la décision en litige est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'erreur d'appréciation, dès lors qu'elle n'a pas commis de manquements professionnels répétés de nature à justifier un retrait d'agrément.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 novembre 2016, le département de l'Isère, représenté par la SELARL Urban Conseil, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que soient mis à la charge de Mme B... les entiers dépens ainsi que la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- la requête est irrecevable en l'absence de contestation du dispositif du jugement n° 1505933 du 2 juin 2016 du tribunal administratif de Grenoble ;
- les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Drouet, président-assesseur,
- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public,
- et les observations de Me Drouin, avocat (SELARL Urban Conseil), pour le département de l'Isère ;
1. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier de première instance, que M. A... C..., directeur adjoint de l'insertion et de la famille du département de l'Isère et signataire de la décision contestée du 28 juillet 2015, disposait d'une délégation de signature accordée par le président du conseil départemental de l'Isère par arrêté n°2015-2262 du 2 avril 2015, affiché et publié au recueil des actes administratifs du département et reçu en préfecture le 3 avril 2015 ; que Mme B... ne saurait utilement soutenir que la décision en litige ne comporte pas le visa de cet arrêté de délégation de signature, dès lors qu'une omission dans les visas d'une décision est sans incidence sur sa légalité ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision litigieuse doit être écarté ;
2. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 421-23 du code de l'action sociale et des familles : " Lorsque le président du conseil départemental envisage de retirer un agrément, d'y apporter une restriction ou de ne pas le renouveler, il saisit pour avis la commission consultative paritaire départementale mentionnée à l'article R. 421-27 en lui indiquant les motifs de la décision envisagée. / L'assistant maternel ou l'assistant familial concerné est informé, quinze jours au moins avant la date de la réunion de la commission, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, des motifs de la décision envisagée à son encontre, de la possibilité de consulter son dossier administratif et de présenter devant la commission ses observations écrites ou orales. La liste des représentants élus des assistants maternels et des assistants familiaux à la commission lui est communiquée dans les mêmes délais. L'intéressé peut se faire assister ou représenter par une personne de son choix. (...) " ;
3. Considérant qu'il est constant que, par courrier du 29 juin 2015, le président du conseil départemental de l'Isère a informé Mme B..., qui exerce la profession d'assistante maternelle agréée sur le territoire de la commune de Grenoble, de ce qu'il envisageait de retirer son agrément ; qu'il est notamment mentionné dans ce courrier que " les recommandations formulées pour assurer santé, sécurité et épanouissement des enfants ne sont pas respectées (capacités relationnelles, relations avec les parents, environnement non sécurisé, carences dans le domaine affectif et éducatif) " ; que l'autorité territoriale a ainsi suffisamment informé l'intéressée des motifs de la décision envisagée à son encontre, conformément aux dispositions précitées du deuxième alinéa de l'article R. 421-23 du code de l'action sociale et des familles, alors même que ledit courrier ne comporte pas l'énoncé de dates relatives à ces motifs ;
4. Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision en litige doit être écarté par le motif retenu par le tribunal administratif de Grenoble, et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter ;
5. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision en litige : " L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil départemental du département où le demandeur réside. / (...) / L'agrément est accordé à ces deux professions si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne. (...) " ; que selon le troisième alinéa de l'article L. 421-6 de ce code : " Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil départemental peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 421-26 dudit code : " Un manquement grave ou des manquements répétés aux obligations de déclaration et de notification prévues aux articles R. 421-38, R. 421-39, R. 421-40 et R. 421-41 ainsi que des dépassements du nombre d'enfants mentionnés dans l'agrément et ne répondant pas aux conditions prévues par l'article R. 421-17 peuvent justifier, après avertissement, un retrait d'agrément. " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il incombe au président du conseil départemental de s'assurer que les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis et de procéder au retrait de l'agrément si ces conditions ne sont plus remplies ;
6. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces des dossiers de première instance et d'appel, et notamment des comptes-rendus des 20 avril et 21 mai 2015 des visites effectuées le 6 avril 2015 et le 21 mai 2015 par les puéricultrices du département au domicile de Mme B..., que, le 6 avril 2015, les écuelles des chats étaient posées par terre à l'entrée de la cuisine accessible aux enfants et les enfants dormaient dans des lits parapluies avec la table de change posée dessus ; que, le 21 mai 2015, les bouteilles de vin étaient visibles et accessibles aux enfants, les tables à langer étaient encore posées sur le lit parapluie et l'accès à la cuisine n'était toujours pas fermé ; que ces faits constituent des manquements aux règles relatives à la sécurité des enfants accueillis ;
7. Considérant, d'autre part, qu'il a été constaté lors de la visite du 6 avril 2015 et qu'il ressort d'un courrier du 24 mars 2015 du centre communal d'action sociale de Grenoble que Mme B... ne prend pas suffisamment en compte les attentes éducatives des parents ni les besoins des enfants en adoptant une attitude passive face aux pleurs des enfants ;
8. Considérant, enfin, qu'il a été constaté lors de la visite du 21 mai 2015 que Mme B..., qui avait fait l'objet d'un avertissement le 9 octobre 2012 et d'un rappel à ses obligations professionnelles le 27 janvier 2014 pour défaut de transmission de plusieurs des fiches de liaison, persistait à manquer à ses obligations de déclaration, ne permettant pas ainsi aux services départementaux d'être tenus informés des enfants accueillis ;
9. Considérant qu'eu égard aux manquements professionnels répétés ainsi établis à l'encontre de Mme B..., le président du conseil départemental de l'Isère a pu légalement estimer, sans commettre d'erreur d'appréciation, qu'elle ne remplissait plus les conditions de l'agrément tenant aux garanties de sécurité, de santé et d'épanouissement des enfants et procéder au retrait de son agrément, alors même qu'elle a produit des témoignages de satisfaction de la part de parents ayant par le passé fait appel à ses services ;
10. Considérant, en cinquième lieu, qu'aucune disposition du code de l'action sociale et des familles, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe général du droit, ne prescrit le respect d'un délai minimal entre la notification d'une décision de retrait d'agrément d'assistant maternel et son entrée en vigueur ; que, par suite, Mme B... ne saurait utilement soutenir que le délai de onze jours entre la notification de la décision contestée, le 30 juillet 2015, et son entrée en vigueur, le 10 août 2015, n'est pas justifié par l'urgence ;
11. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 423-27 du code de l'action sociale et des familles : " Le préavis n'est pas requis dans le cas où la rupture est liée à l'impossibilité de confier ou d'accueillir un enfant compte tenu de la suspension ou du retrait de l'agrément de l'assistant maternel relevant de la présente section, tels qu'ils sont prévus par les dispositions de l'article L. 421-6. " ;
12. Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 423-27 du code de l'action sociale et des familles, la requérante ne saurait, en tout état de cause, utilement invoquer, à l'encontre de la décision en litige qui porte retrait d'agrément d'assistant maternel, la méconnaissance du préavis prévu dans les contrats de travail la liant à des particuliers employeurs ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le département de l'Isère à la requête de Mme B..., que celle-ci n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées les conclusions de sa requête tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... la somme demandée par le département de l'Isère au même titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du département de l'Isère présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B...et au département de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 4 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Drouet, président-assesseur,
Mme Cottier, premier conseiller.
Lu en audience publique le 25 octobre 2018.
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N° 16LY02762