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08/10/2018 | FRANCE | N°15LY03761

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 08 octobre 2018, 15LY03761


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme E...B..., représentée par la SCP d'avocats interbarreaux Reffay et associés, a demandé dans ses dernières écritures le 12 juillet 2013 au tribunal administratif de Lyon :

1°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse la somme de 11 000 euros, somme à parfaire au regard des dépenses actuelles et futures ainsi que de l'incidence professionnelle, en réparation des préjudices de tous ordres imputables à l'infection nosocomiale dont elle a été victime au décours d'une osté

osynthèse par plaque suite à une fracture du quart inférieur du péroné gauche le 1er ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme E...B..., représentée par la SCP d'avocats interbarreaux Reffay et associés, a demandé dans ses dernières écritures le 12 juillet 2013 au tribunal administratif de Lyon :

1°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse la somme de 11 000 euros, somme à parfaire au regard des dépenses actuelles et futures ainsi que de l'incidence professionnelle, en réparation des préjudices de tous ordres imputables à l'infection nosocomiale dont elle a été victime au décours d'une ostéosynthèse par plaque suite à une fracture du quart inférieur du péroné gauche le 1er janvier 2010 ;

2°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1300207 du 13 octobre 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 16 novembre 2015, Mme E...B..., représentée par la SCP d'avocats interbarreaux Reffay et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 13 octobre 2015;

2°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse la somme de 11 000 euros, somme à parfaire au regard des dépenses actuelles et futures ainsi que de l'incidence professionnelle, en réparation des préjudices de tous ordres imputables à l'infection nosocomiale dont elle a été victime au décours d'une ostéosynthèse par plaque suite à une fracture du quart inférieur du péroné gauche le 1er janvier 2010 ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- suite à une chute le 1er janvier 2010, elle s'est fracturée le quart inférieur du péroné gauche ; elle a été opérée le même jour au centre hospitalier de Fleyriat à Bourg-en-Bresse ; a été réalisée une ostéosynthèse par plaques ; le 11 février 2011, lors de la dépose de la résine, la découverte de pus au niveau de sa cicatrice a conduit à sa réhospitalisation ; une infection par plusieurs germes a alors été identifiée ;

- les conclusions du rapport d'expertise judiciaire sont erronées car lors de la visite du 21 janvier 2010, elle a mis en garde le Dr A...sur la présence d'une phlyctène au niveau de la cicatrice, ce qui démontre l'existence d'un processus infectieux en cours à cette date ; la circonstance que l'infection se soit déclarée plus de 3 semaines après l'hospitalisation ne fait pas échec à la reconnaissance du caractère nosocomial de l'infection dont elle a souffert ;

- le rapport d'expertise retient que la contamination a eu lieu " à partir d'une zone de désunion cicatricielle avec les germes présents sur la peau " et l'expert en a déduit à tort que le caractère endogène, c'est-à-dire la contamination par le malade par ses propres germes, empêcherait de retenir le caractère nosocomial de cette infection ; le Conseil d'Etat a jugé que la responsabilité pour infection nosocomiale s'applique, que ce soit pour des germes endogènes ou exogènes ; le rapport d'expertise retient que c'est à partir de la zone de désunion cicatricielle que les germes ont pénétré ; c'est à partir de la cicatrice, qui résulte de l'intervention pratiquée par le centre hospitalier, que l'infection nosocomiale s'est propagée ; le centre hospitalier n'apporte pas la preuve d'une cause étrangère ; il existe une contradiction entre les différents documents médicaux, la position de l'assureur SHAM du centre hospitalier qui a reconnu le caractère nosocomial de l'infection, ce qui constitue un aveu de responsabilité, et l'expertise judiciaire ;

- il existe à titre subsidiaire un défaut d'information, le centre hospitalier ne l'ayant pas avertie des conséquences de l'intervention chirurgicale et ne lui ayant pas transmis ou mis à sa disposition le rapport d'expertise amiable en méconnaissance des articles R. 4127 et R. 4127-35 du code de la santé publique ; ce manquement au devoir d'information sera indemnisé à hauteur de 2 000 euros ;

- elle a été contrainte de prolonger son arrêt de maladie jusqu'au 27 juillet 2010 ; son immobilisation, prolongée plusieurs mois, l'a contrainte à ne pas travailler durant une période importante ; cet arrêt de travail l'exposait à un risque de perte de sa clientèle ; son préjudice financier peut être évalué à 5 000 euros ;

- elle réserve le poste des dépenses de santé futures ainsi que le poste d'incidence professionnelle ;

- les souffrances endurées évaluées à 2,5 sur une échelle de 7 par l'expertise judiciaire sont sous-estimées ; compte tenu de ses souffrances physiques et du contexte personnel, ce préjudice peut être évalué à 3,5 sur une échelle de 7 soit une somme de 6 000 euros ;

- elle présente encore une légère boiterie le matin, est contrainte de s'allonger en journée du fait de l'engourdissement de la jambe, elle présente une augmentation du volume de la cheville, elle ne peut s'accroupir ou marcher sur le talon, et éprouve des difficultés pour descendre les escaliers ; le préjudice esthétique a été sous-évalué par l'expert à 0,5/7 ; il sera réévalué à 3/7 ; il en sera fait une juste réparation à hauteur de 5 000 euros.

Par mémoire enregistré le 26 décembre 2016, le centre hospitalier de Bourg-en-Bresse, représenté par Me C...conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'expertise judiciaire est formelle sur l'absence de caractère nosocomial de l'infection ; le tribunal administratif a relevé le respect strict des protocoles de prévention des infections nosocomiales et le caractère favorable de la situation post-opératoire ; la cicatrisation était acquise 3 semaines après l'intervention et Mme B...était en cours de consolidation ; les quatre germes identifiés sont non hospitaliers, d'origine endogène et appartiennent à la flore normale de la peau et du tube digestif ; le Dr F...a écarté deux hypothèses et a retenu que la contamination de la plaie opératoire a eu lieu de l'extérieur vers l'intérieur ; la complication infectieuse n'est pas la conséquence de l'intervention d'ostéosynthèse mais de l'accident initial et de la nécessité d'une immobilisation par plâtre favorisant la multiplication bactérienne ; la souffrance tissulaire liée à la fracture et la surcharge pondérale ont favorisé l'évolution infectieuse ; l'infection d'origine exclusivement endogène n'a pas été introduite dans l'organisme à l'occasion des soins dispensés par le centre hospitalier ;

- le manquement au devoir d'information ne peut pas être retenu car il n'y a pas d'infection nosocomiale imputable au centre hospitalier ;

- la requérante n'établit pas l'existence d'une perte de revenus imputable aux complications infectieuses car elle a souffert d'une fracture grave qui nécessitait au moins 6 mois d'arrêt de travail ; la requérante a repris son travail le 26 juillet 2010 ; elle n'apporte pas la preuve d'une perte de revenus ;

- le préjudice d'incidence professionnelle n'est pas chiffré ; la requérante a pu reprendre son travail le 26 juillet 2010 ; les complications infectieuses ne sont pas à l'origine d'une incidence professionnelle ; ses séquelles sont imputables à sa fracture initiale ;

- les préjudices personnels, esthétiques, de loisirs ne sont pas en lien avec les complications infectieuses ; le Dr F...a évalué à 0,5 sur une échelle de 7 le préjudice esthétique imputable à l'infection ; la requérante n'apporte pas de preuve sur son préjudice d'agrément en lien avec l'infection ;

Par courriers des 2 mai 2018, 4 mai et 8 juin 2018, les parties ont été informées que la cour est susceptible de relever d'office le moyen d'ordre public tiré de l'irrégularité du jugement de première instance à défaut de mise en cause de la Caisse autonome de retraite et de prévoyance des infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, orthophonistes et orthoptistes (CARPIMKO) dont relève MmeB..., infirmière libérale ayant connu un arrêt de travail supérieur à 91 jours ;

Par mémoire enregistré le 27 juin 2018, la CARPIMKO conclut à ce que le centre hospitalier de Bourg-en-Bresse soit condamné à lui verser une somme de 5 269,88 euros au titre de sa créance constituée des prestations versées à Mme B...divorcée D...à la suite de son accident et une somme de 1 066 euros au titre de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.

Elle soutient que :

- cet accident a entrainé une incapacité professionnelle d'une durée supérieure à 90 jours et Mme D...a bénéficié à ce titre de prestations servies par la CARPIMKO ;

- en cas de reconnaissance de la responsabilité du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse, elle doit être remboursée des prestations indemnitaires qu'elle a versées ; le montant des indemnités journalières versées du 1er avril 2010 au 25 juillet 2018 est de 5 269,88 euros ;

- elle a droit à l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de sécurité sociale pour un montant de 1 066 euros ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Cottier,

- et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public.

1. Considérant qu'à la suite d'une chute dans la nuit du 31 décembre 2009 au 1er janvier 2010, Mme B...a été transportée par les pompiers au centre hospitalier de Bourg-en-Bresse; où lui ont été diagnostiquées une fracture fermée déplacée du quart inférieur du péroné gauche avec luxation de la cheville, sans atteinte cutanée au regard de la fracture, ainsi qu'une fracture déplacée de la malléole externe ; qu'une ostéosynthèse par plaque sous anesthésie générale a été réalisée dans cet hôpital le 1er janvier 2010 ; que Mme B...a quitté le centre hospitalier de Bourg-en-Bresse le 3 janvier 2010 ; que, le 11 février 2010, lors de l'ablation du plâtre/résine circulaire réalisé le 21 janvier 2010, a été constaté un écoulement purulent au niveau de la cicatrice et une fistule sans hyperthermie ; que, le 12 février 2010, Mme B... a alors été de nouveau hospitalisée pour une suspicion de sepsis sur la plaque pour retrait du matériel d'ostéosynthèse et excision de la fistule ; que l'examen bactériologique a permis d'établir la présence de 4 germes : enterobacter cloacae, staphyloccus lugdunensis, enterococcus faecalis pseudonomas aeruginosa pour lesquels la patiente a été placée sous antibiothérapie ; que, le 13 février 2010, Mme B...a rejoint son domicile ; que, le 22 février 2010, ont été constatés une cicatrice inflammatoire désunie avec persistance d'un écoulement purulent, un oedème assez important et un érythème au niveau de la cheville ; que Mme B...a alors été hospitalisée du 23 février au 3 mars 2010 et a bénéficié d'une antibiothérapie intraveineuse avec mise en place d'une chambre implantable ; que des soins ont ensuite été réalisés à domicile ; que la cicatrisation complète a été obtenue au mois de juin 2010 ; que Mme B...a repris le travail le 26 juillet 2010 ; que la chambre implantable a été retirée le 22 mai 2011 ; qu'à compter de mars 2010 et jusqu'à octobre 2011, elle a suivi des séances de rééducation ; qu'à la suite d'échanges entre assureurs, la SHAM, assureur du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse, a estimé que l'infection dont Mme B...avait été la victime relevait de la responsabilité de son assuré et a proposé le 26 août 2010 d'indemniser l'assureur de Mme B... ; que, par une ordonnance en date du 27 avril 2011, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon, saisi par MmeB..., a ordonné une expertise judiciaire qui a été déposée 25 novembre 2011 ; que, par jugement du 13 octobre 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de Mme B...tendant à ce que le centre hospitalier de Bourg-en-Bresse l'indemnise de l'ensemble de ses préjudices imputables à cette infection qu'elle qualifie de nosocomiale ; que Mme B...interjette appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'en vertu de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, l'assuré social ou son ayant droit qui demande en justice la réparation d'un préjudice qu'il impute à un tiers doit indiquer sa qualité d'assuré social ; que cette obligation, sanctionnée par la possibilité reconnue aux caisses de sécurité sociale et au tiers responsable de demander pendant deux ans l'annulation du jugement prononcé sans que le tribunal ait été informé de la qualité d'assuré social du demandeur, a pour objet de permettre la mise en cause, à laquelle le juge administratif doit procéder d'office, des caisses de sécurité sociale dans les litiges opposant la victime et le tiers responsable de l'accident ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance, et en particulier de sa demande et de l'expertise judiciaire commise par ordonnance du tribunal administratif de Lyon du 27 avril 2011 que Mme B...a indiqué exercer la profession d'infirmière libérale depuis 1994 et avoir été, du fait de son accident et de l'infection dont elle a été victime, en congé de maladie du 1er janvier 2010 jusqu'au 26 juillet 2010, date de reprise de son travail ; que, dès lors et compte tenu de cette durée d'arrêt de travail de près de 8 mois, en ne communiquant pas la demande à la CARPIMKO auquel l'intéressée est affiliée obligatoirement pour certains risques dont la cessation totale de l'activité professionnelle à compter du 91ème jour en cas d'accident ou de maladie, le tribunal administratif a entaché son jugement d'irrégularité ; que le jugement contesté doit, par suite, être annulé ; que la procédure ayant été communiquée à la CARPIMKO, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions indemnitaires présentées par Mme B...devant le tribunal administratif de Lyon dirigées contre le centre hospitalier de Bourg-en-Bresse, ainsi que sur les conclusions de la CARPIMKO présentées en appel ;

Sur la responsabilité du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse :

4. Considérant qu'aux termes du second alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, les professionnels de santé et les établissement, services ou organismes dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins " sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère " ; que doit être regardée, au sens de ces dispositions, comme présentant un caractère nosocomial une infection survenant au cours ou au décours de la prise en charge d'un patient et qui n'était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci, sauf s'il est établi qu'elle a une autre origine que la prise en charge ;

5. Considérant que Mme B...soutient qu'elle a contracté une infection nosocomiale au cours ou au décours de l'opération d'ostéosynthèse ayant été réalisée le 1er janvier 2010 au centre hospitalier de Bourg-en-Bresse ; qu'elle fait notamment état de l'existence d'une phlyctène le 3 janvier 2010 au niveau du site opératoire ; qu'elle mentionne que cette phlyctène est le signe d'un processus infectieux en cours à cette date ; qu'elle souligne que contrairement à ce que soutient le centre hospitalier, la contamination infectieuse par des germes endogènes ne s'oppose pas à la reconnaissance du caractère nosocomial de cette infection ; qu'elle indique également que l'assureur du centre hospitalier avait reconnu l'existence d'une infection nosocomiale et lui avait proposé de l'indemniser, et qu'elle en déduit que le centre hospitalier avait ainsi admis sa responsabilité quant à l'origine nosocomiale de cette infection ;

6. Considérant que le centre hospitalier fait valoir en défense, sur la base de l'hypothèse formulée par l'expert commis par le tribunal administratif de Lyon, que Mme B... aurait contracté cette infection à son domicile dans le cadre d'infiltration d'eau contenant des germes ayant pénétré par la cicatrice qui se serait réouverte du fait du frottement du plâtre /résine installé le 21 janvier 2010 ;

7. Considérant qu'il n'est pas soutenu par le centre hospitalier et qu'il ne résulte pas de l'instruction que Mme B...aurait présenté une infection en cours ou en incubation lors de sa prise en charge par ledit centre le 1er janvier 2010 suite à sa chute ; qu'il résulte de l'instruction et notamment des explications du professeur Fessy, sapiteur, que l'infection multi-germes dont la requérante a été victime a été localisée au niveau du site opératoire ; que le DrF..., médecin experte commise par le tribunal administratif, fait état d'un niveau élevé de globules blancs le 2 janvier 2010, ce qui est compatible avec l'argumentation de Mme B...sur un début d'infection dès cette date ; que le Dr F...mentionne également que la pièce A 25 fait état le 3 janvier 2010 lors de la réfection du pansement " d'une phlyctène importante " ; que si la présence d'une phlyctène n'est pas mentionnée dans le dossier médical de l'intéressée au 21 janvier 2010, le centre hospitalier ne conteste pas l'allégation de Mme B...relative à l'existence d'une telle phlyctène à cette date au niveau du même site opératoire ; que, dans le cadre de l'expertise diligentée par le tribunal administratif, le Pr Fessy, sapiteur, n'écarte pas l'hypothèse d'une infection liée au liquide de lavage et aux réseaux du centre hospitalier et mentionne que suite à ses demandes de pièces aucun document n'a été produit par ledit centre hospitalier sur ces points ; que ni le Dr F...experte désignée par le tribunal administratif ni le centre hospitalier n'apportent de réponse à cette remarque du sapiteur quant à une contamination possible au sein de l'hôpital au cours ou au décours de l'opération du 1er janvier 2010 ; que, par suite, au regard de tels éléments, il n'est pas établi par les pièces versées au dossier que l'infection dont a été victime Mme B...aurait une autre origine que la prise en charge par le centre hospitalier ; que, dès lors, l'infection contractée doit être regardée comme ayant un caractère nosocomial et engageant la responsabilité du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse ;

Sur les préjudices de MmeB... :

8. Considérant que MmeB..., qui fait état de souffrances liées à cette infection qu'elle évalue à 3,5 sur une échelle de 7, n'apporte pas d'éléments explicatifs probants susceptibles de contredire l'estimation de l'expert de 2,5 sur une échelle de 7 ; que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste estimation de ce chef de préjudice en mettant à la charge du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse une somme de 2 200 euros à verser à Mme B... ;

9. Considérant que l'expert mentionne l'existence d'un préjudice esthétique léger en lien direct avec l'infection nosocomiale et l'évalue à 0,5 sur une échelle de 7 ; que Mme B...ne conteste pas utilement cette analyse en faisant état de difficultés de déplacement lesquelles sont en lien non avec l'infection nosocomiale mais avec les suites de sa fracture ; que, par suite, il sera fait une juste estimation de ce préjudice en l'évaluant à 500 euros ;

10. Considérant que Mme B...se prévaut d'une perte de revenus tirés de son activité d'infirmière libérale ; que, toutefois, les éléments produits en réponse aux mesures d'instruction menées par la cour font apparaître que la caisse primaire d'assurance maladie a versé des indemnités journalières de maladie couvrant les périodes où Mme B...a souffert d'un déficit fonctionnel temporaire en lien direct avec l'infection nosocomiale ; que les bilans comptables de Mme B...intégrant lesdites indemnités journalières n'établissent pas l'existence de pertes de revenus ; qu'il ne résulte ainsi pas de l'instruction qu'elle aurait subi des pertes de revenus en lien direct avec l'infection nosocomiale contractée ; que, par suite, la demande indemnitaire présentée au titre de ce chef de préjudice ne peut qu'être rejetée ;

Sur les conclusions indemnitaires de la CARPIMKO :

11. Considérant qu'il n'est pas établi par les pièces versées au dossier que la période de soins qui a été indemnisée par la CARPIMKO et débutant à compter d'avril 2010 soit en lien direct avec l'infection nosocomiale, l'expert mentionnant sans être contredit par la CARPIMKO seulement trois séquences temporelles, du 11 au 13 février 2010, du 23 février au 3 mars 2010 et le 22 mars 2010 comme étant en lien direct avec cette infection nosocomiale ; que, par suite, les conclusions indemnitaires de la CARPIMKO au titre des sommes versées à Mme B...et au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de sécurité sociale doivent être rejetées ;

Sur les frais d'expertise :

12. Considérant que les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 3 150 euros doivent être mis à la charge du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse, partie perdante ;

Sur les frais liés au litige :

13. Considérant qu'il y a lieu de condamner le centre hospitalier de Bourg-en-Bresse, partie perdante, à verser une somme de 1 500 euros à Mme B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1300207 du 13 octobre 2015 du tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : Le centre hospitalier de Bourg-en-Bresse est condamné à verser une somme de 2 700 euros à Mme B...en réparation de ses préjudices.

Article 3 : Les conclusions de la CARPIMKO sont rejetées.

Article 4 : Les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 3 150 euros sont mis à la charge définitive du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse.

Article 5 : Le centre hospitalier de Bourg-en-Bresse versera une somme de 1 500 euros à Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...B..., au centre hospitalier de Bourg-en-Bresse, à la CARPIMKO, à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ain et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2018 à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

M. Drouet, président-assesseur,

Mme Cottier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 octobre 2018.

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N° 15LY03761


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY03761
Date de la décision : 08/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation.


Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: Mme Cécile COTTIER
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : SCP REFFAY et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-10-08;15ly03761 ?
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