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04/10/2018 | FRANCE | N°16LY04404

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 04 octobre 2018, 16LY04404


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D...et Mme A...ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler, d'une part, la décision du 13 juin 2013 par laquelle le principal du collège Pierre Valdo a rejeté la candidature de leur fille Ambrine en section sportive " handball " et la décision implicite de rejet des recours gracieux et hiérarchique présentés à l'encontre de cette décision et, d'autre part, la décision du 25 juin 2013 par laquelle le principal du collège Pierre Valdo a rejeté la candidature de leur fille en section bilangue

(anglais-espagnol) de la classe de 6ème pour l'année scolaire 2013-2014 et...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D...et Mme A...ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler, d'une part, la décision du 13 juin 2013 par laquelle le principal du collège Pierre Valdo a rejeté la candidature de leur fille Ambrine en section sportive " handball " et la décision implicite de rejet des recours gracieux et hiérarchique présentés à l'encontre de cette décision et, d'autre part, la décision du 25 juin 2013 par laquelle le principal du collège Pierre Valdo a rejeté la candidature de leur fille en section bilangue (anglais-espagnol) de la classe de 6ème pour l'année scolaire 2013-2014 et la décision implicite de rejet du recours gracieux et hiérarchique présentés à l'encontre de cette décision.

Par jugement n° 1306711 du 6 octobre 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 12 décembre 2016, M. C...D...et Mme B...A..., représentés par MeE..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lyon du 6 octobre 2016 ;

2°) d'annuler les décisions du principal du collège Pierre Valdo des 13 juin et 25 juin 2013 ainsi que les décisions implicites de rejet des recours gracieux et hiérarchiques ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le tribunal ne pouvait pas opposer l'inopérance du moyen tiré de la méconnaissance de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 en se fondant sur les prescriptions de l'article D. 331-34 du code de l'éducation nationale applicables aux décisions d'orientation concernant les élèves du secondaire ; les décisions prises à l'issue de la classe de primaire CM2 doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 et en vertu de l'article D. 331-34 du code de l'éducation nationale ;

- les dispositions de l'article D. 331-34 du code de l'éducation n'ont pas été respectées ;

- le rectorat n'a pas produit le procès-verbal de la délibération de la commission alléguée ;

- aucune information n'a été communiquée aux parents quant aux modalités de sélection des candidatures en cas de dépassement des capacités d'accueil ; aucune disposition du code de l'éducation ne soumet l'admission des élèves dans des sections spécialisées de classe de 6ème au pouvoir discrétionnaire du principal du collège ou d'une commission ou d'un jury ; l'administration a procédé à une sélection des candidats selon des critères définis a posteriori et de façon arbitraire ;

- le rectorat n'a pas fourni les fiches passerelles CM2/6ème des candidats retenus pour permettre la comparaison des mérites respectifs des candidats et d'Ambrine ;

- les mentions de la pièce adverse n° 8 sont en contradiction avec celles figurant sur la pièce adverse n° 2 et contiennent des appréciations contradictoires ;

- concernant la section bilangue, les décisions méconnaissent le principe d'égalité dès lors qu'Ambrine maîtrisait le niveau A1 en anglais à l'issue de la classe de CM2 et il appartenait au recteur de produire les fiches passerelles des autres candidats ; l'administration a accepté des candidatures d'élèves domiciliés hors secteur ;

- Ambrine présentait le profil pour intégrer la classe bilangue compte tenu de ce qu'elle avait validé le palier 2 en anglais en CM2 ; la circulaire du 23 octobre 2012 préconisait de privilégier les élèves ayant un réel profil linguistique en évitant toute sélection qui pourrait s'appuyer sur les résultats scolaires dans d'autres disciplines ;

- les décisions méconnaissent l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que le chef d'établissement ou le recteur devaient transmettre les recours à la commission d'appel institué par l'article D. 331-35 du code de l'éducation ;

Par un mémoire en défense enregistré le 18 mai 2018, le ministre de l'éducation nationale conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la demande présentée en première instance est irrecevable dans la mesure où les avis émis par un chef d'établissement sur l'admission d'un élève dans une classe spécifique pour laquelle les demandes excèdent les capacités d'accueil sont des mesures préparatoires qui ne constituent pas des décisions faisant grief ; seul le directeur académique des services de l'éducation nationale (DASEN), agissant par délégation du recteur d'académie, est compétent pour prononcer l'affectation des élèves en classe de 6ème au collège conformément à l'article D. 211-11 du code de l'éducation ; les courriers des 13 et 25 juin 2015 sont des avis sans caractère décisoire ;

- au vu de l'avis précité, l'autorité académique a estimé qu'Ambrine ne pouvait pas être admise au regard du profil des autres élèves qui demandaient également leur inscription ; elle ne présentait pas le profil pour intégrer les classes précitées ;

- compte tenu de la particularité des classes en litige, celles-ci font l'objet d'un secteur de recrutement élargi pour lequel l'autorité académique a déterminé l'ordre de priorité des demandes d'inscription ;

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'incompétence du chef d'établissement pour prendre les décisions contestées.

Par lettre enregistrée le 26 juin 2018, le ministre de l'éducation nationale indique que la demande présentée par M. D...et Mme A...n'implique pas que soit relevé d'office un moyen tiré de ce que le chef d'établissement serait incompétent pour prendre la décision en litige, dès lors que ce dernier n'a pas pris d'acte à caractère décisoire.

Par ordonnance du 27 juillet 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 22 août 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Caraës,

- et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public.

1. Considérant que M. D...et Mme A...ont sollicité l'admission de leur fille, Ambrine, née le 20 septembre 2003, en classe de 6ème de leur collège de secteur, Pierre Valdo, en section sportive " handball " ou en section bilangue anglais-espagnol ; que, par courriers des 13 et 25 juin 2013, le principal du collège Pierre Valdo de Vaulx-en-Velin a indiqué que la candidature d'Ambrine n'était retenue ni pour la section sportive " handball " ni pour la section bilangue ; que M. D...et Mme A...relèvent appel du jugement du 6 octobre 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à l'annulation des décisions du principal du collège Pierre Valdo des 13 juin et 25 juin 2013 ainsi que des décisions implicites de rejet des recours gracieux et hiérarchiques ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant qu'aux termes de l'article D. 211-11 du code de l'éducation, " Les collèges et les lycées accueillent les élèves résidant dans leur zone de desserte./L'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'éducation nationale, détermine pour chaque rentrée scolaire l'effectif maximum d'élèves pouvant être accueillis dans chaque établissement en fonction des installations et des moyens dont il dispose./ Dans la limite des places restant disponibles après l'inscription des élèves résidant dans la zone normale de desserte d'un établissement, des élèves ne résidant pas dans cette zone peuvent y être inscrits sur l'autorisation de l'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'éducation nationale, dont relève cet établissement. / Lorsque les demandes de dérogation excèdent les possibilités d'accueil, l'ordre de priorité de celles-ci est arrêté par l'inspecteur d'académie, conformément aux procédures d'affectation en vigueur./ Toute dérogation concernant un élève résidant dans un département autre que celui où se trouve l'établissement sollicité ne peut être accordée qu'après avis favorable de l'inspecteur d'académie du département de résidence. " ;

3. Considérant que si le ministre de l'éducation nationale fait valoir que la demande présentée en première instance était irrecevable dans la mesure où les avis émis par un chef d'établissement sur l'admission d'un élève dans une classe spécifique pour laquelle les demandes excèdent les capacités d'accueil sont des mesures préparatoires qui ne constituent pas des décisions faisant grief, seul le directeur académique des services de l'éducation nationale (DASEN) étant compétent pour prononcer l'affectation des élèves en classe de 6ème au collège conformément à l'article D. 211-11 du code de l'éducation, il ne résulte ni des dispositions dont entend se prévaloir le ministre ni d'aucune autre disposition législative ou réglementaire, et ce alors qu'il n'est pas contesté qu'Ambrine résidait dans la zone normale de desserte du collège Pierre Valdo, que l'admission dans une section sportive ou bilangue d'une classe de 6ème d'un collège relèverait de la compétence du directeur des services départementaux de l'éducation nationale et que le chef d'établissement n'émettrait qu'un avis ; que telle n'est d'ailleurs pas la portée des actes en cause qui s'analysent comme de véritables décisions prises par le principal du collège Pierre Valdo ; que, par suite, les refus d'admission d'Ambrine en classe de 6ème section sportive " handball " ou section bilangue qui ne peuvent être regardés comme sans incidence sur le déroulement de sa scolarité ou ses possibilités ultérieures d'orientation constituent des décisions faisant grief et susceptibles de faire l'objet d'un recours contentieux devant le tribunal administratif ;

Sur la légalité des décisions du principal du collège Pierre Valdo des 13 juin et 25 juin 2013 et des décisions implicites de rejet des recours gracieux et hiérarchiques :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, alors applicable et aujourd'hui repris à l'article L. 211-2 du code des relations entre l'administration et le public : " (...) doivent être motivées les décisions qui : (...) - refusent une autorisation (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

5. Considérant que les décisions des 13 juin et 25 juin 2013 prises par le chef d'établissement du collège Pierre Valdo, qui refusent d'autoriser Ambrine D...à intégrer la section sportive " handball " et la section bilangue de la classe de 6ème, ne peuvent être regardées comme des décisions en matière d'orientation relevant des articles D. 331-23 et suivants du code de l'éducation, lesquelles ne peuvent concerner que des élèves poursuivant leur scolarité en collège et non pas des élèves d'école élémentaire admis en classe de sixième ; qu'elles s'analysent comme des refus d'autorisation et sont en conséquence soumises à l'obligation de motivation prescrite par les dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979 ;

6. Considérant que les décisions critiquées qui se bornent à faire référence au nombre limité de places dans les sections litigieuses sans autre précision ne comportent pas une motivation suffisante en fait et, en outre, sont dépourvues de toute motivation en droit ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués à l'encontre de ces décisions, elles sont entachées d'un défaut de motivation et doivent être annulées ainsi que, par voie de conséquence, les décisions de rejet des recours gracieux et hiérarchiques ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...et Mme A...sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes ;

Sur les frais liés au litige :

8. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. D...et Mme A...présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 6 octobre 2016 est annulé.

Article 2 : Les décisions des 13 et 25 juin 2013 du principal du collège Pierre Valdo de Vaulx-en-Velin ainsi que les décisions de rejet des recours gracieux et hiérarchiques sont annulées.

Article 3 : Les conclusions de M. D...et Mme A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., à Mme B... A...et au ministre de l'éducation nationale.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2018, à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

M. Drouet, président-assesseur,

Mme Caraës, premier conseiller.

Lu en audience publique le 4 octobre 2018.

5

N° 16LY04404


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY04404
Date de la décision : 04/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

30-02-02-01-03 Enseignement et recherche. Questions propres aux différentes catégories d'enseignement. Enseignement du second degré. Scolarité. Questions particulières relatives à la scolarité dans les collèges.


Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : BONNEFOY-CLAUDET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-10-04;16ly04404 ?
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