Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 7 septembre 2015 par laquelle le procureur près le tribunal de grande instance de Lyon lui a retiré son agrément de police municipale et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1509354 du 21 septembre 2016, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision de retrait d'agrément du 7 septembre 2015 prise par le procureur de la République adjoint près le tribunal de grande instance de Lyon et mis à la charge de l'Etat la somme de 600 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour
Par un recours enregistré, le 21 novembre 2016, le ministre de la justice demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1509354 du 21 septembre 2016 du tribunal administratif de Lyon susmentionné.
2°) de rejeter la demande de M.B....
Il soutient que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a jugé que le procureur de la République adjoint, signataire de la décision attaquée, n'avait pas, en vertu du principe d'indivisibilité du ministère public, compétence pour adopter la décision en litige.
Par un mémoire enregistré le 18 décembre 2017, M. B..., représenté par Me Saumet, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que le signataire de la décision lui retirant l'agrément d'agent de police municipale n'était pas compétent ; qu'en effet, le principe d'indivisibilité du ministère public ne s'applique pas en ce qui concerne les décisions administratives prises par le procureur de la République.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'organisation judiciaire ;
- le code de procédure pénale ;
- le code de la sécurité intérieure ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 5 avril 2018 :
- le rapport de M. Carrier,
- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public,
- et les observations de Me Saumet, avocat de M.B....
1. Considérant que, par arrêté du 9 mars 2005, le préfet du Rhône a agréé M. B... en qualité d'agent de police municipale ; que, par arrêté du 2 juillet 2005, le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Lyon a agréé M. B...en qualité de gardien de police municipale ; que, par lettre du 10 avril 2015, le maire de la commune de Mornant, pour laquelle M. B...servait depuis le 1er juin 2014, a sollicité le retrait de l'agrément d'agent de police municipale dont il était titulaire ; que, par décision du 15 juillet 2015, le préfet du Rhône a retiré cet agrément ; que, par décision du 7 septembre 2015, M. A...C..., procureur de la République adjoint près le tribunal de grande instance de Lyon, a retiré l'agrément dont M. B...était titulaire ; que le garde des sceaux, ministre de la justice, relève appel du jugement du 21 septembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 7 septembre 2015 pour incompétence de son signataire ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant que selon l'article L. 122-4 du code de l'organisation judiciaire : " Tout magistrat d'un parquet ou d'un parquet général peut exercer les fonctions du ministère public au sein de ce parquet. " ; qu'aux termes de l'article L. 511-2 du code de la sécurité intérieure : " Les fonctions d'agent de police municipale ne peuvent être exercées que par des fonctionnaires territoriaux recrutés à cet effet dans les conditions fixées par les statuts particuliers prévus à l'article 6 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale. Ils sont nommés par le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale, agréés par le représentant de l'Etat dans le département et le procureur de la République, puis assermentés. Cet agrément et cette assermentation restent valables tant qu'ils continuent d'exercer des fonctions d'agents de police municipale. En cas de recrutement par une commune ou un établissement de coopération intercommunale situé sur le ressort d'un autre tribunal de grande instance, les procureurs de la République compétents au titre de l'ancien et du nouveau lieu d'exercice des fonctions sont avisés sans délai. L'agrément peut être retiré ou suspendu par le représentant de l'Etat ou le procureur de la République après consultation du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale. Toutefois, en cas d'urgence, l'agrément peut être suspendu par le procureur de la République sans qu'il soit procédé à cette consultation. " ; que les décisions susceptibles d'être prononcées par le procureur de la République qui agit, sur le fondement de ces dernières dispositions, comme autorité administrative, ne relèvent pas de ses attributions judiciaires et, dès lors, du principe d'indivisibilité du ministère public invoqué par le ministre de la justice pour justifier de la compétence du signataire de la décision contestée et qui résulte de l'article L. 122-4 précité du code de l'organisation judiciaire ; qu'il s'ensuit que les substituts du procureur de la République ne peuvent légalement prononcer les retraits d'agrément des agents de police municipale que sur le fondement d'une délégation de signature préalablement consentie à cet effet par le procureur de la République et régulièrement publiée ; qu'il ressort des pièces versées au dossier que la décision du 7 septembre 2015 portant retrait de l'agrément dont bénéficiait M. B...depuis le 2 juillet 2005 a été signée par M.C..., procureur de la République adjoint près le tribunal de grande instance de Lyon, qui ne justifiait pas d'une délégation de signature pour ce faire ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif Lyon a jugé que la décision contestée avait été signée par une autorité incompétente et en a prononcé pour ce motif l'annulation ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le garde des sceaux, ministre de la justice, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision de retrait d'agrément du 7 septembre 2015 ;
Sur les frais liés au litige :
4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B...et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le recours du garde des sceaux, ministre de la justice, est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à M. B...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au garde des sceaux, ministre de la justice et à M. D... B....
Délibéré après l'audience du 5 avril 2018 à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Carrier, président-assesseur,
Mme Cottier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 août 2018.
N° 16LY03827 4