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05/07/2018 | FRANCE | N°15LY03774

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 05 juillet 2018, 15LY03774


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL Jacquet a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand à titre principal d'annuler le contrat conclu le 1er août 2014 entre le syndicat mixte de travaux de la Chaise-Dieu et le groupement d'entreprises Comte-C... pour la réalisation du lot n° 4 " échafaudage-déconstruction-maçonnerie-façades " du marché de restauration de l'aile dite de l'Echo et des espaces thématiques de l'abbaye de la Chaise-Dieu et de condamner le syndicat mixte des travaux de la Chaise-Dieu à l'indemniser pour un mon

tant de 450 000 euros.

Par un jugement n° 1500464 du 1er octobre 2015, le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL Jacquet a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand à titre principal d'annuler le contrat conclu le 1er août 2014 entre le syndicat mixte de travaux de la Chaise-Dieu et le groupement d'entreprises Comte-C... pour la réalisation du lot n° 4 " échafaudage-déconstruction-maçonnerie-façades " du marché de restauration de l'aile dite de l'Echo et des espaces thématiques de l'abbaye de la Chaise-Dieu et de condamner le syndicat mixte des travaux de la Chaise-Dieu à l'indemniser pour un montant de 450 000 euros.

Par un jugement n° 1500464 du 1er octobre 2015, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 30 novembre 2015 et 7 septembre 2016, la SARL Jacquet, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ce contrat ou, subsidiairement, de le résilier ;

3°) de condamner le syndicat mixte de travaux de la Chaise-Dieu à lui verser la somme de 450 000 euros à titre d'indemnités ;

4°) de mettre à la charge du syndicat mixte de travaux de la Chaise-Dieu la somme de 5 000 euros au titre des frais du litige.

Elle soutient que :

- son gérant a qualité pour agir en son nom ;

- sa requête est motivée ;

- le pouvoir adjudicateur a manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence en ce que les candidats n'ont pas été informés par le règlement de consultation que le critère du prix serait évalué par rapport à la décomposition du prix global et forfaitaire ; or la seule référence à la décomposition du prix global et forfaitaire peut entraîner une distorsion de concurrence entre les candidats qui, compte tenu de l'autorisation de présenter des variantes, peuvent modifier ou proposer des prestations particulières qui auront nécessairement pour effet de modifier le contenu de ce document ; n'ayant pas eu d'information précise sur la mise en oeuvre du critère prix, elle n'a pas pu adapter son offre pour répondre le plus précisément possible ;

- en utilisant un sous-critère d'appréciation du critère valeur technique de l'offre contenant des demandes d'informations relevant de la capacité des entreprises et non de l'analyse des offres, il a méconnu les dispositions des articles 52 et 53 du code des marchés publics ;

- il a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de son offre au regard du critère de la valeur technique en lui attribuant la note de 42 sur 60 ;

- elle est fondée à demander l'indemnisation du manque à gagner résultant de la perte de ce marché ; elle établit que son préjudice s'élève à la somme de 450 000 euros.

Par un mémoire en défense enregistré les 15 avril 2016, le syndicat mixte de travaux de la Chaise-Dieu, représenté par la SELARL Drai associés, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société Jacquet au titre des frais du litige.

Il fait valoir que :

- la requête est irrecevable, faute pour la société Jacquet de justifier de la qualité de la personne qui la représente et d'être motivée ;

- les moyens tirés de l'insuffisante information des candidats des conditions de mise en oeuvre du critère du prix et de la méconnaissance des dispositions des articles 52 et 53 du code des marchés publics sont inopérants et en toute hypothèse infondés ;

- le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dans la notation des candidats n'est pas fondé ;

- le préjudice de la société Jacquet, qui ne peut invoquer que la perte de chance, n'est pas établi et elle n'est pas lésée de façon directe par les irrégularités invoquées.

Par une ordonnance du 12 septembre 2016, l'instruction a été close au 28 septembre 2016.

Un mémoire produit le 28 septembre 2018 pour le syndicat mixte de travaux de la Chaise-Dieu n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Michel ;

- et les conclusions de M.A... ;

1. Considérant que le syndicat mixte de travaux de la Chaise-Dieu a lancé une procédure d'appel d'offres ouvert pour la restauration de l'aile dite de l'Echo et des espaces thématiques de l'abbaye ; que la société Jacquet a présenté des offres pour les lots n°s 4 " échafaudage-déconstruction-maçonnerie-façades " et 12 " revêtement de sol carreaux en terre cuite " ; que le marché relatif au lot n° 4 a été attribué au groupement d'entreprises Comte-C... ; que la société Jacquet a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand, à titre principal, d'annuler le contrat conclu le 1er août 2014 et de condamner le syndicat mixte de travaux de la Chaise-Dieu à lui verser la somme de 450 000 euros en réparation du préjudice résultant de son éviction ; que par un jugement du 1er octobre 2015 dont elle relève appel, le tribunal a rejeté sa demande ;

2. Considérant, en premier lieu, que si le syndicat mixte de travaux de la Chaise-Dieu avait l'obligation d'indiquer dans les documents de consultation du marché les critères d'attribution du marché et leurs conditions de mise en oeuvre, il n'était en revanche pas tenu d'informer les candidats de la méthode de notation retenue pour apprécier les offres au regard de chacun de ces critères ; qu'il résulte de l'instruction que les documents de consultation mentionnaient les critères d'attribution et leur pondération ; qu'ils n'avaient pas à préciser, en outre, la méthode de chiffrage de la valeur des offres au regard de ces différents critères et notamment de celui du prix, qui était déterminé suivant le bordereau de décomposition du prix global forfaitaire ; que la société Jacquet ne peut dès lors utilement soutenir que le règlement de la consultation aurait dû comporter ces indications portant sur la méthode d'évaluation des offres pour lui permettre d'apprécier le critère tenant au prix des prestations ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que le règlement de la consultation énonçait à son article 5.1 que les pièces de l'offre que chaque candidat aurait à produire comprenaient notamment un mémoire technique ; que pour le lot n° 4 " échafaudage-déconstruction-maçonnerie-façades " uniquement, le document de consultation intitulé " contenu obligatoire du mémoire technique justificatif des dispositions que le candidat se propose d'adopter pour l'exécution des travaux le concernant ", exigeait des candidats qu'ils indiquassent dans leur offre les moyens généraux de l'entreprise, ainsi que leurs références en restauration de monuments historiques de moins de 5 ans ;

4. Considérant qu'il résulte des dispositions des articles 52 et 53 du code des marchés publics que le pouvoir adjudicateur ne peut se fonder, pour apprécier les offres, que sur les critères qui ont pour seul objet de déterminer la proposition économiquement la plus avantageuse ; que si ces mêmes dispositions ne lui interdisent pas de retenir un critère ou un sous-critère relatif aux moyens en personnel et en matériel affectés par le candidat à l'exécution du marché afin d'en garantir la qualité technique, pourvu que ce critère soit non-discriminatoire et lié à l'objet du marché, il ne peut en aucun cas recourir à des critères destinés à sélectionner les candidatures, qui portent sur les capacités professionnelles, techniques et financières requises pour l'exécution du marché ; que, toutefois et en tout état de cause, il résulte de l'instruction que l'irrégularité affectant l'analyse des offres invoquée par la société Jacquet tel que rappelée au point 3 est sans rapport avec son éviction puisque même sans l'appréciation du sous-critère moyens matériels et humains, le lot aurait été attribué au groupement d'entreprises Comte-C..., qui a obtenu la meilleure note de 60/60 au critère valeur technique ; que, par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant, en dernier lieu, que le règlement de la consultation prévoyait, à son article 6, deux critères de jugement des offres tenant, pour le lot n° 4, au prix des prestations, pondéré à 40 % et au mémoire technique, pondéré à 60 %, lui-même apprécié au regard des moyens en matériels et humains disponibles pour le lot considéré, notés sur 6 points, de la méthodologie d'intervention et de mise en oeuvre, notée sur 10 points et des procédures d'hygiène et de sécurité et des moyens afférents, notés sur 4 points ;

6. Considérant qu'en ce qui concerne le premier sous-critère " moyens matériels et humains disponibles ", le document de consultation intitulé " contenu obligatoire du mémoire technique justificatif " imposait aux entreprises concurrentes de disposer de deux équipes au moins en place sur le site simultanément, compte tenu du délai relativement court du chantier ; qu'il ressort du rapport d'analyse des offres que la note de 4/6 attribuée à l'offre de la société Jacquet est justifiée par sa qualification et sa possession de matériel et de personnel adapté à l'opération et sa proposition de deux équipes permanentes ; que selon le rapport d'analyse des offres, son mémoire technique ne comportait pas " de nomination des sous-traitants. Pour les tâches de manutention seulement possibilité de prendre intérimaires locaux ", alors que le groupement attributaire, qui a reçu la note de 6/6, proposait trois équipes en simultané ; qu'en outre, le rapport d'analyse indique, s'agissant de son offre, " nomination des sous-traitants reconnus " ;

7. Considérant que s'agissant du deuxième sous-critère " méthodologie d'intervention et de mise en oeuvre ", il résulte de l'instruction que le mémoire technique remis par les candidats devait préciser la méthodologie et la décomposition des tâches à accomplir en rapport avec une intervention sur le patrimoine inscrit ou classé monument historique et indiquer un calendrier et l'enchainement des tâches envisagées pour le respect du planning et des calendriers contractuels ; que le rapport d'analyse des offres pointe dans celle de la société Jacquet, qui a obtenu pour ce sous-critère la note de 7/10, l'absence de méthodologie pour la restauration des vitraux, du cadran solaire et concernant l'étude géotechnique, l'absence de planning détaillé et l'absence de prise en compte des activités sur site ; que la note de 10/10 a été attribuée au groupement d'entreprises Comte-C... au motif qu'il a pris en compte les activités existantes sur site pour l'installation du chantier, précisé la méthodologie pour la restauration des vitraux du cadran solaire et pour l'étude géotechnique, fourni un planning détaillé et pris en considération et étudié les différentes activités du site susceptibles d'affecter le déroulement du chantier ;

8. Considérant que comme l'a retenu à juste titre le tribunal, l'obligation de présenter une méthodologie pour la restauration des vitraux et du cadran solaire résultait de la combinaison des éléments du " contenu obligatoire du mémoire technique " et du cahier des clauses techniques particulières ; que si la société Jacquet soutient que les informations de son offre sur les délais d'exécution étaient suffisantes puisqu'elles correspondaient au degré de précision le plus pertinent au stade de la passation du marché, il résulte de l'instruction que l'offre du groupement attributaire était cependant plus précise ;

9. Considérant enfin que pour ce qui concerne le troisième sous-critère " procédures d'hygiène et de sécurité - moyens afférents ", la société Jacquet soutient qu'elle aurait dû obtenir la même note que le groupement attributaire, soit la note maximale de 4/4 au lieu de 3/4, puisqu'aucun reproche ne lui a été formulé par le pouvoir adjudicateur qui n'a pas davantage émis d'observations positives en ce qui concerne l'offre remise par ce groupement ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que le mémoire technique de la société Jacquet manquait sur ce troisième sous-critère de précisions ; qu'elle n'est dès lors pas fondée à contester la note totale qui lui a été attribuée pour son mémoire technique sur des éléments objectifs, ni à invoquer une erreur manifeste commise par le pouvoir adjudicateur dans le choix du titulaire du marché ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, la passation du marché en cause n'étant affectée d'aucune illégalité fautive, les conclusions indemnitaires de la société Jacquet ne peuvent qu'être rejetées ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir opposées par le syndicat mixte de travaux de la Chaise-Dieu, la société Jacquet n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ; que sa requête doit dès lors être rejetée, y compris ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge la somme que le syndicat mixte de travaux de la Chaise-Dieu demande au titre des mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Jacquet est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du syndicat mixte de travaux de la Chaise-Dieu tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Jacquet et au syndicat mixte de travaux de la Chaise-Dieu.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2018, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président assesseur,

Mme Gondouin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 5 juillet 2018.

4

N° 15LY03774


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY03774
Date de la décision : 05/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-02 Marchés et contrats administratifs. Formation des contrats et marchés.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : CABINET GRIFFITHS DUTEIL ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-07-05;15ly03774 ?
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