La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/06/2018 | FRANCE | N°16LY03984

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 28 juin 2018, 16LY03984


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 10 juin 2014 et du 25 juin 2014 par lesquelles l'inspecteur du travail s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande d'autorisation de licenciement pour inaptitude physique présentée par son employeur.

Par un jugement n° 1406413 du 4 octobre 2016, le tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 2 décembre 2016, la SAS Adequa

t Gestion, représentée par la SELAS Fidal, avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce juge...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 10 juin 2014 et du 25 juin 2014 par lesquelles l'inspecteur du travail s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande d'autorisation de licenciement pour inaptitude physique présentée par son employeur.

Par un jugement n° 1406413 du 4 octobre 2016, le tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 2 décembre 2016, la SAS Adequat Gestion, représentée par la SELAS Fidal, avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 4 octobre 2016 ;

2°) de rejeter la demande de Mme B... devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que Mme B... a bénéficié simultanément des protections de six mois accordées par les articles L. 2411-6 et L. 2411-7 du code du travail, dès le 5 septembre 2013, de sorte qu'elle n'en bénéficiait plus à la date de la demande de l'autorisation de licenciement.

Par un mémoire, enregistré le 31 mai 2017, Mme B..., représentée par Me Touahri, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros lui soit allouée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen soulevé par la SAS Adequat Gestion n'est pas fondé ;

- la décision du 25 juin 2014, identique à la décision du 10 juin 2014 et postérieure au licenciement, est entachée d'un vice de forme ;

- il existe un lien entre la demande d'organisation d'élections professionnelles et son licenciement.

Par un mémoire, enregistré le 29 juin 2017, la SAS Adequat Gestion conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens.

Elle soutient en outre que les autres moyens invoqués par Mme B... ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée au ministre du travail, qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Savouré, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Bourion, rapporteur public,

- les observations de Me Amblard, avocat de la SAS Adequat Gestion ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... a été embauchée le 1er juillet 2007 par la SAS Adequat Gestion en qualité d'assistante services généraux, puis, à compter du 29 avril 2011, en qualité d'aide comptable recouvrement. Par courrier du 9 août 2013, elle a demandé l'élection de délégués du personnel en indiquant faire acte de candidature. Par courrier du 5 septembre 2013, le syndicat CFDT a également demandé l'organisation de ces élections en indiquant présenter comme candidate Mme B.... Un protocole d'accord préélectoral a été signé le 6 janvier 2014 et les élections ont eu lieu le 27 janvier 2014, à l'issue desquelles Mme B... n'a pas été élue. Mme B... a, par ailleurs, été déclarée inapte au poste qu'elle occupait, le 9 décembre 2013, et son employeur n'a pu lui proposer un reclassement. La SAS Adequat Gestion l'a ainsi convoquée, le 8 avril 2014, à un entretien préalable à son licenciement et a saisi, le 28 avril 2014, l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation de licenciement. Par deux décisions identiques datées du 10 juin 2014 et du 25 juin 2014, l'inspecteur du travail s'est déclaré incompétent pour examiner cette demande, estimant, d'une part, que si Mme B... avait bénéficié d'une protection pour une période de six mois à compter du 5 septembre 2013, celle-ci était expirée et, d'autre part, que le syndicat CFDT n'avait pas confirmé sa candidature après la conclusion du protocole d'accord, de sorte qu'elle n'avait pas bénéficié d'une nouvelle protection. La SAS Adequat Gestion interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé cette décision.

2. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 2314-24 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable : " Au premier tour de scrutin, chaque liste est établie par les organisations syndicales (...). " Aux termes de l'article L. 2411-6 du même code : " L'autorisation de licenciement est requise, pendant une durée de six mois, pour le salarié ayant demandé à l'employeur d'organiser les élections de délégués du personnel ou d'accepter d'organiser ces élections. Cette durée court à compter de l'envoi à l'employeur de la lettre recommandée par laquelle une organisation syndicale a, la première, demandé ou accepté qu'il soit procédé à des élections. / Cette protection ne bénéficie qu'à un seul salarié par organisation syndicale ainsi qu'au premier salarié, non mandaté par une organisation syndicale, qui a demandé l'organisation des élections. ".

3. L'article L. 2411-7 de ce code dispose que : " L'autorisation de licenciement est requise pendant six mois pour le candidat, au premier ou au deuxième tour, aux fonctions de délégué du personnel, à partir de la publication des candidatures. La durée de six mois court à partir de l'envoi par lettre recommandée de la candidature à l'employeur. / Cette autorisation est également requise lorsque la lettre du syndicat notifiant à l'employeur la candidature aux fonctions de délégué du personnel a été reçue par l'employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature avant que le candidat ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement. ".

4. En premier lieu, Mme B... a demandé l'organisation d'élections professionnelles le 9 août 2013 et a ainsi bénéficié de la protection de six mois accordée par l'article L. 2411-6 précité à compter du 5 septembre 2013, date à laquelle une organisation syndicale, la CFDT, a, la première, adressé à l'employeur une lettre recommandée demandant qu'il soit procédé à ces élections. Ce courrier, qui indiquait que la candidate de la CFDT serait Mme B..., doit, en outre, être regardé comme lui accordant également le bénéfice de cette protection au titre de son organisation syndicale. Toutefois, à la date de la décision en litige, cette protection était expirée.

5. En second lieu, la publication des candidatures ne peut avoir lieu que postérieurement à la négociation du protocole d'accord préélectoral prévue par l'article L. 2314-3 du code du travail dans sa rédaction alors applicable. Ainsi, contrairement à ce que soutient la SAS Adequat Gestion, le délai de six mois prévu par l'article L. 2411-7 du même code n'a pu commencer à courir dès l'envoi du courrier du 5 septembre 2013, lequel ne pouvait qu'être regardé comme désignant le salarié bénéficiaire de la protection prévue par l'article L. 2411-6.

6. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'entre la signature de ce protocole d'accord et la date limite des candidatures telle qu'elle résulte de ce protocole, soit le 21 janvier 2014, la CFDT ait communiqué une liste de candidats. D'ailleurs, le protocole d'accord préélectoral du 6 janvier 2014 n'a été signé que par les représentants de la CFTC et de la CFE-CGC, tandis que la CFDT, syndicat dont Mme B... est adhérente, n'a pas participé à son élaboration, alors même qu'elle y a été invitée et qu'elle a demandé l'organisation des élections. Dans ces conditions, il doit être tenu pour établi qu'alors même que la CFDT avait indiqué le 5 septembre 2013 qu'elle présenterait Mme B... comme candidate, ce syndicat n'a finalement pas entendu établir de liste de candidats pour cette élection. Par suite, quand bien même la SAS Adequat Gestion a retenu par erreur sa candidature sous l'étiquette CFDT, Mme B..., qui n'était en réalité soutenue par aucun syndicat, n'était pas en droit de se présenter pour le premier tour des élections. Dès lors, elle ne pouvait pas davantage bénéficier de la protection pour une durée de six mois accordée par les dispositions de l'article L. 2411-7 précité.

7. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour annuler les décisions en litige, le tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur le motif tiré de ce que Mme B... bénéficiait de la protection prévue par les dispositions de l'article L. 2411-7 du code du travail.

8. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par Mme B....

9. La circonstance que, par un courrier du 25 juin 2014, l'inspecteur du travail a pris une décision en tout point identique à celle du 10 juin 2014 n'est pas constitutive d'un vice de forme, quand bien-même le licenciement est intervenu le 16 juin 2014, soit antérieurement à la seconde décision.

10. Dès lors que l'autorisation de l'inspecteur du travail n'était pas requise pour licencier Mme B..., celui-ci était tenu de se déclarer incompétent. Par suite, le moyen tiré de ce que le licenciement aurait un lien avec l'organisation d'élections professionnelles est inopérant.

11. Il résulte de ce qui précède que la SAS Adequat Gestion est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions de l'inspecteur du travail.

12. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... le paiement de la somme que la SAS Adequat Gestion demande au titre des frais exposés à l'occasion du litige. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SAS Adequat Gestion qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à Mme B... une somme au titre des frais liés au litige.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 4 octobre 2016 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de Mme B... sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de la SAS Adequat Gestion tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Adequat Gestion, à Mme A... B... et au ministre du travail.

Délibéré après l'audience du 7 juin 2018 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 juin 2018.

5

N° 16LY03984


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY03984
Date de la décision : 28/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Bénéfice de la protection.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : FIDAL SOCIETE D'AVOCATS LYON

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-06-28;16ly03984 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award