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26/06/2018 | FRANCE | N°15LY03145

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 26 juin 2018, 15LY03145


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

1°) Par une première demande, la société Fibre Excellence Tarascon a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler le titre exécutoire d'un montant de 1 412 120 euros correspondant à la redevance pour pollution non domestique de l'eau au titre de l'année 2012 émis le 29 mars 2013 par le directeur général de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse ainsi que celle de la décision du 29 juillet 2013 rejetant son recours gracieux, de la décharger de l'obligation de payer ladite somme et de condamn

er l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse à lui payer une somme de 5 000 e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

1°) Par une première demande, la société Fibre Excellence Tarascon a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler le titre exécutoire d'un montant de 1 412 120 euros correspondant à la redevance pour pollution non domestique de l'eau au titre de l'année 2012 émis le 29 mars 2013 par le directeur général de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse ainsi que celle de la décision du 29 juillet 2013 rejetant son recours gracieux, de la décharger de l'obligation de payer ladite somme et de condamner l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par jugement n° 1306710 du 2 juillet 2015, le tribunal administratif de Lyon a fait droit à sa demande.

2°) Par une seconde demande, la société Fibre Excellence Tarascon a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 29 juillet 2013 par laquelle le directeur général de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse a rejeté sa demande de remise gracieuse d'une fraction de la redevance pour pollution non domestique de l'eau à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2012, d'enjoindre au directeur de cette agence de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de deux mois sous astreinte de 200 euros par jour de retard et condamner l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par jugement n° 1306712 du 2 juillet 2015, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision attaquée du directeur de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse, a condamné cette agence à payer une somme de 1 000 euros à la société requérante au titre des frais du litige et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

I/ Par une requête n° 15LY03145 enregistrée le 23 septembre 2015 et un mémoire complémentaire enregistré le 30 juin 2016, l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse, représentée par la SCP d'avocats aux Conseils Lyon-Caen et Thiriez, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement n° 1306710 du 2 juillet 2015, du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de rejeter la demande de la société Fibre Excellence Tarascon ;

3°) de condamner la société Fibre Excellence Tarascon à lui payer une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son directeur est compétent pour interjeter appel du jugement du tribunal administratif de Lyon en vertu d'une délibération du 18 septembre 2008 de son conseil d'administration qui, contrairement à ce qui est soutenu, est conforme aux dispositions des articles R. 213-39 et R. 213-40 du code de l'environnement ;

- c'est à tort que, pour faire droit à la demande de la société Fibre Excellence Tarascon, le tribunal a retenu que le titre exécutoire contesté était dépourvu de base légale faute de publication au journal officiel des " unités géographiques cohérentes " ;

- le titre exécutoire, qui précise les bases de la liquidation, est suffisamment motivé ;

- la mise en cause de la constitutionnalité du dispositif est inopérante en raison de ce que le juge administratif n'est pas juge de la constitutionnalité des lois alors, au demeurant, que par arrêt du 29 janvier 2014, le Conseil d'Etat a refusé de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité que la société Fibre Excellence Tarascon lui avait soumise ;

- le site industriel objet de la redevance est situé dans une zone où les taux de redevance ne sont pas majorés, alors que la détermination de deux zones géographiques tient compte des critères fixés par le troisième alinéa de l'article L. 213-10-2 du code de l'environnement ; que la requérante ne caractérise aucune erreur d'appréciation dans la détermination de ces unités géographiques en faisant valoir que l'état de l'eau du Rhône n'est pas la plus polluée au point de rejet des eaux par son activité ;

- contrairement à ce que soutient la société Fibre Excellence Tarascon, l'évaluation des quantités de pollution tient compte de la pollution déjà présente qui a été déduite alors, du reste, que cette société, à qui il revient de déterminer la quantité des éléments constitutifs de pollution contenus dans l'eau qu'elle prélève, n'a jamais contesté les taux de pollution lors des opérations de calage du suivi régulier des rejets figurant dans l'au prélevée ;

- les zones géographiques ont, contrairement à ce que soutient la société Fibre Excellence Tarascon, été approuvées par délibération du conseil d'administration du 14 octobre 2010 ;

- il n'est avancé aucun élément à l'appui du moyen tiré de ce que les taux appliqués présentent un caractère confiscatoire, la circonstance qu'elle est en difficulté ne pouvant suffire à considérer que ces taux seraient excessifs.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 mai 2016 et des mémoires complémentaires enregistrés les 24 mai 2016, 30 mai 2016 et 16 décembre 2016, la société Fibre Excellence Tarascon, représentée par Me Lahami, avocat, conclut au rejet de la requête, à titre principal comme irrecevable par une ordonnance prise sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, subsidiairement comme non fondée et à la condamnation de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- en décidant, par une ordonnance du 26 mai 2016, de reporter du 31 mai 2016 au 1er juillet 2016 la clôture de l'instruction afin de permettre à l'agence de régulariser sa requête en produisant une délibération de son conseil d'administration habilitant son directeur général à agir en justice, au lieu de rejeter la requête par une ordonnance prise sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative comme il y était tenu en présence de l'irrecevabilité incontestable qu'elle avait opposée, le président de la formation de jugement qui, après avoir examiné son objection, a pris une mesure non motivée et insusceptible de recours en vue de permettre à son adversaire de faire échec à cette contestation, ne s'est pas borné à prendre une simple mesure d'administration judiciaire, mais a mis en oeuvre des dispositions du code de justice administrative d'une manière qui, s'il devait advenir que la recevabilité de la requête soit admise au vu d'une délibération produite postérieurement au 31 mai 2016, caractériserait une violation du droit au procès équitable garanti par l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la requête d'appel est irrecevable faute pour le directeur général de l'agence d'avoir produit la délibération du conseil d'administration qui l'habilite à agir en justice ; la délibération du 18 septembre 2008 produite par l'agence est trop imprécise en ce qu'elle ne fixe aucune limite ni aucune condition à la délégation ;

- c'est à bon droit que le tribunal a retenu que les délibérations délimitant les unités géographiques cohérentes concourant à la détermination des taux de redevance devaient faire l'objet d'une publication au journal officiel ;

- cette obligation s'imposait d'autant plus que la délibération du 16 octobre 2009, elle-même abrogée par la délibération en cause, avait expressément abrogé, en son article 3, la précédente délibération du 16 octobre 2008 délimitant ces zones, la liste de ces zones n'ayant au demeurant alors pas été publiée au Journal Officiel ;

- l'agence ne peut davantage se prévaloir de la jurisprudence admettant la publication au Journal Officiel par extraits en affirmant que la délimitation des zones tarifaires pouvait être consultée depuis son site Internet alors, en outre, qu'elle n'établit pas que cette consultation était possible à la date d'émission du titre litigieux ; l'agence ne peut d'ailleurs sérieusement soutenir qu'il lui serait impossible d'apporter la preuve d'une telle publication plusieurs années après, puisqu'il existe des moyens techniques très simples et peu onéreux permettant de donner date certaines aux publications sur un site Internet ;

- le titre de recettes n'indique que de manière très incomplète les bases de la liquidation ; en effet, le décompte accompagnant ce titre n'indique ni la moyenne de la pollution mensuelle moyenne, ni la pollution mensuelle la plus forte retenues par l'agence ; qu'il ne contient aucune information sur les autres éléments retenus en application de l'article R. 213-48-4 du code de l'environnement, pas plus qu'il n'indique de manière claire si la pollution entrante a été ou non déduite ; il n'indique pas non plus la délibération tarifaire sur laquelle il se fonde, qui n'a pas été jointe, cette information ne lui ayant été communiquée qu'à l'occasion de sa réclamation ;

- dès lors qu'il adoptait une nouvelle délibération instaurant la redevance litigieuse et fixant les tarifs, le conseil d'administration devait, pour épuiser sa compétence, délibérer à nouveau sur les zones tarifaires ou, à tout le moins, décider explicitement que les zones antérieurement délimitées restaient fixées par l'une de ses délibérations antérieures ;

- les dispositions de l'article R. 213-48-4 du code de l'environnement obligeaient son conseil d'administration à délibérer sur les unités géographiques cohérentes sans distinction selon les taux applicables ; qu'ainsi, et contrairement à ce que soutient l'agence, la circonstance qu'on ne lui a pas appliqué un taux majoré ne rend pas inopérant le moyen qu'elle tire de l'absence de délibération délimitant les zone tarifaires ;

- contrairement aux prescriptions de l'article L. 213-10-2 du code de l'environnement, les taux arrêtés par la délibération du 14 octobre 2010 ne tiennent pas compte de l'état des masses d'eau dans lesquels elle effectue ses rejets alors que l'état de l'eau est qualifiée de " bonne " par l'agence et qu'elle ne produit aucune des 41 substances considérées comme dangereuses, de sorte que les taux qui lui ont appliqués sont excessifs ; que la délibération fixant ces taux est donc entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- il conviendra donc pour la cour d'ordonner une expertise aux fins de vérifier si, en scindant son territoire en deux zones tarifaires seulement, l'agence a correctement appliqué le 3ème alinéa de l'article L. 213-10-2 du code de l'environnement ;

- l'agence n'établit pas, au contraire de ses affirmations, que la pollution " entrante " a été déduite alors, en outre, que les modalités de calcul de la pollution de l'eau prélevée doivent être les mêmes que celles retenues pour la pollution de l'eau rejetée, c'est-à-dire mois par mois, de sorte que l'agence ne peut déduire, comme elle prétend l'avoir fait, la pollution entrante de 2007 de la pollution sortante de 2011 ; le titre de recette litigieux méconnait donc, pour cette raison, les dispositions de l'article R. 213-48-5 du code de l'environnement ;

- eu égard à sa capacité contributive, le taux de la redevance qui lui est réclamée, qui représente plus de 10 % de la valeur ajoutée en 2012 et 160,87 % de cette même valeur en 2013, revêt un caractère confiscatoire, en méconnaissance de l'article 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

- le tableau figurant au IV de l'article L. 213-10-2 du code de l'environnement, en ce qu'il prévoit un taux d'impôt trois fois inférieur au taux de droit commun pour les rejets en mer au delà de 5 kilomètres du littoral et de 250 mètres de profondeur, qui ne concerne qu'une seule entreprise, met en oeuvre une " réduction de taxe environnementale " accordée à une entreprise privée, ce qui constitue une aide d'Etat au sens du TFUE ; cette aide n'ayant pas été notifiée à la commission européenne, en violation de l'article 108 du TFUE, les dispositions instituant une telle taxe ne pouvaient servir de base légale au titre de recettes litigieux.

II/ Par une requête n° 15LY03146 enregistrée le 23 septembre 2015 et un mémoire complémentaire enregistré le 30 juin 2016, l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse, représentée par la SCP d'avocats aux Conseils Lyon-Caen et Thiriez, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement n° 1306712 du 2 juillet 2015, du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de rejeter la demande de la société Fibre Excellence Tarascon ;

3°) de condamner la société Fibre Excellence Tarascon à lui payer une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son directeur est compétent pour interjeter appel du jugement du tribunal administratif de Lyon en vertu d'une délibération du 18 septembre 2008 de son conseil d'administration qui, contrairement à ce qui est soutenu, est conforme aux dispositions des articles R. 213-39 et R. 213-40 du code de l'environnement ;

- c'est à tort que le tribunal a retenu qu'il n'appartenait qu'à son conseil d'administration de statuer sur la demande de remise gracieuse de la société Fibre Excellence Tarascon ; en effet, le directeur, qui bénéficie d'une délégation pour accorder les remises gracieuses d'un montant inférieur à 100 000 euros, n'aurait dû saisir le conseil d'administration que s'il avait envisagé d'accorder la remise, d'un montant supérieur à 100 000 euros, qui lui était demandée ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le directeur n'a pas entendu limiter le bénéfice d'une remise gracieuse aux seules entreprises soumises à une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, mais a simplement constaté que la situation financière de la société n'était pas telle qu'elle justifierait une telle mesure ;

- contrairement à ce qui était soutenu, la décision en cause n'avait pas à être motivée en droit ; qu'elle est au demeurant motivée en fait ;

- il n'a jamais été indiqué que le refus de remise était fondé sur le fait que la société était assujettie à la redevance, mais seulement précisé que, s'agissant d'une imposition, les remises ne pouvaient être accordées que de manière exceptionnelle au regard du principe d'égalité devant les charges publiques ;

- la référence faite au paramètre AOX ne peut être interprétée comme signifiant qu'elle a fondé le refus de la remise demandée sur le fait que la soumission de la société à l'impôt sur ce polluant aurait empêché toute remise ;

- enfin, le refus de remise gracieuse n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des capacités financières de l'entreprise alors que par ailleurs, cette dernière a déjà bénéficié de nombreuses facilités et aides à la réalisation d'investissement.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 mai 2016 et des mémoires complémentaires enregistrés les 24 mai 2016, 31 mai 2016 et 13 février 2017, la société Fibre Excellence Tarascon, représentée par Me Lahami, avocat, conclut au rejet de la requête, à titre principal comme irrecevable par une ordonnance prise sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, subsidiairement comme non fondée et à la condamnation de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête d'appel est irrecevable faute pour le directeur général de l'agence d'avoir produit la délibération du conseil d'administration qui l'habilite à agir en justice ; la délibération du 18 septembre 2008 produite par l'agence est trop imprécise en ce qu'elle ne fixe aucune limite ni aucune condition à la délégation ;

- aucun des autres moyens de la requête d'appel n'est fondé ;

- elle réitère les moyens qu'elle avait soulevés en première instance ;

- en outre, la décision attaquée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation économique, fortement dégradée, alors que le montant de la redevance qui lui est réclamée, qui représente plus de 160 % de la valeur ajoutée a pour effet de l'asphyxier, de sorte qu'elle se trouve en situation de gêne financière au regard de l'article L. 213-11-11 du code de l'environnement.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Alfonsi, président,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Lahami représentant la société Fibre Excellence Tarascon.

1. Considérant que les requêtes susvisées n° 15LY03145 et 15LY03146 de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse sont dirigées contre deux jugements du 2 juillet 2015 par lesquels le tribunal administratif de Lyon a, d'une part, annulé le titre exécutoire émis le 29 mars 2013 à l'encontre de la société Fibre Excellence Tarascon en vue de recouvrer la redevance pour pollution non domestique de l'eau au titre de l'année 2012, d'un montant de 1 412 120 euros, et, d'autre part, annulé la décision du 29 juillet 2013 par laquelle son directeur a rejeté la demande que lui avait adressée cette société pour obtenir une remise gracieuse d'au moins un million d'euros sur cette même redevance ; que ces requêtes, qui ont trait à des litiges entre les mêmes parties au sujet d'une même redevance, ont fait l'objet d'une instruction commune et présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt ;

Sur la requête n° 15LY03145 :

2. Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 213-9-1 du code de l'environnement : " Les délibérations concernant les taux des redevances sont publiées au Journal officiel. Elles sont tenues à la disposition du public. " ; qu'aux termes de l'article R. 213-48-20 de ce même code : " Les délibérations des agences de l'eau concernant les taux des redevances sont publiés au Journal officiel de la République française avant le 31 octobre de l'année précédant celle pour laquelle ils sont applicables. " ; qu'aux termes, enfin, du IV l'article L. 213-10-2 de ce code : " Pour chaque élément d'assiette (...), le tarif de la redevance est fixé par unité géographique cohérente définie (...) " ;

3. Considérant que, comme l'ont retenu à bon droit les premiers juges, les dispositions qui viennent d'être rappelées du code de l'environnement imposent que soient publiées au Journal officiel toutes les dispositions arrêtées par le conseil d'administration des agences qui concourent à la détermination du taux des redevances, parmi lesquelles se trouvent nécessairement les " unités géographiques cohérentes " qu'il revient au conseil d'administration de définir en vertu de l'article R. 213-48-16 du code de l'environnement ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la redevance pour pollution non domestique de l'eau des années 2009 à 2012 a été fixée par une délibération du conseil d'administration de l'agence n° 2008-29 du 16 octobre 2008, qui a été publiée au Journal officiel du 31 octobre 2008 ; que, pour les seules années 2010 à 2012, cette délibération a été remplacée par une nouvelle délibération n° 2009-40 du 16 octobre 2009, publiée au Journal Officiel du 29 octobre 2009, avant qu'une dernière délibération n° 2010-32 du 14 octobre 2010, publiée au Journal Officiel du 26 octobre 2010, règle définitivement les dispositions relatives aux redevances de l'année 2012 ;

5. Considérant que le taux de la redevance pour pollution non domestique de l'eau est fixé par l'article 2.1 de chacune des délibérations susmentionnées, qui prévoit, s'agissant de la " demande chimique en oxygène ", de la " demande biochimique en oxygène ", de " l'azote réduit " et du " phosphore total organique ou minéral ", un taux différencié pour chacune des deux unités géographiques ; que l'article 2 de ces mêmes délibérations renvoie, pour les pollutions d'origine non domestique, à la " liste des communes constituant chaque zone géographique " " lorsque ces taux sont différenciés par zone géographique " figurant dans une annexe I qui n'a jamais été publiée au Journal Officiel, ce même article 2 précisant seulement que cette annexe peut être consultée sur le site Internet de l'agence ;

6. Considérant que, contrairement à ce que soutient l'agence, la circonstance que l'annexe fixant la délimitation des unités géographiques cohérentes pouvait être consultée sur son site Internet ne permet pas de considérer qu'elle devrait être regardée comme s'étant acquittée de la totalité des obligations de publicité mises à sa charge par les dispositions sus rappelées des articles L. 213-9-1 et R. 213-48-20 du code de l'environnement alors qu'elle ne fournit, au demeurant, aucune précision sur les garanties apportées quant à la fiabilité des informations accessibles sur un tel site ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de sa requête, l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée Corse n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement n° 1306710 du 2 juillet 2015, le tribunal administratif de Lyon a fait droit à la demande de la société Fibre Excellence Tarascon dirigée contre le titre exécutoire du 29 mars 2013 pour le recouvrement de la redevance, d'un montant de 1 412 120 euros, pour pollution non domestique de l'eau au titre de l'année 2012, et a déchargé cette société de l'obligation de payer la somme ainsi mise à sa charge ;

Sur la requête n° 15LY03146 :

8. Considérant que le présent arrêt, qui confirme le jugement par lequel la société Fibre Excellence Tarascon a été déchargée en totalité de l'obligation de payer la redevance pour pollution non domestique de l'eau au titre de l'année 2012, a pour effet de faire perdre son objet au litige relatif au rejet de la demande de remise gracieuse d'une partie de cette redevance ; qu'il n'y a, dès lors, plus lieu de statuer sur la requête n° 15LY03146 de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse, dirigée contre le jugement n° 1306712 du 2 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 29 juillet 2013 de son directeur ayant un tel objet ;

Sur les frais du litige :

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à chacune des parties la charge de ses propres frais d'instance ;

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 15LY03145 de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 15LY03146 de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse.

Article 3 : Les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse et à la société Fibre excellence Tarascon.

Délibéré après l'audience du 4 juin 2018, à laquelle siégeaient :

M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,

M. Hervé Drouet, président assesseur,

M. Marc Clément, premier conseiller.

Lu en audience publique le 26 juin 2018.

8

N° 15LY03145, 15LY03146

mg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY03145
Date de la décision : 26/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Jean-François ALFONSI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN et THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-06-26;15ly03145 ?
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