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21/06/2018 | FRANCE | N°16LY02227

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 21 juin 2018, 16LY02227


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La commune de Rugny a demandé au tribunal administratif de Dijon de déclarer la société CDR et M. C..., architecte, responsables des désordres affectant son église à hauteur de 50% chacun et de condamner M. C... à lui payer la somme de 31 094,13 euros TTC au titre des travaux de reprise des désordres affectant l'église de Rugny, sur le fondement de la garantie décennale.

Par un jugement n° 1501352 du 28 avril 2016, le tribunal administratif de Dijon, après avoir déclaré la société CDR respons

able à hauteur de 80 % des conséquences dommageables des désordres affectant l'église...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La commune de Rugny a demandé au tribunal administratif de Dijon de déclarer la société CDR et M. C..., architecte, responsables des désordres affectant son église à hauteur de 50% chacun et de condamner M. C... à lui payer la somme de 31 094,13 euros TTC au titre des travaux de reprise des désordres affectant l'église de Rugny, sur le fondement de la garantie décennale.

Par un jugement n° 1501352 du 28 avril 2016, le tribunal administratif de Dijon, après avoir déclaré la société CDR responsable à hauteur de 80 % des conséquences dommageables des désordres affectant l'église de Rugny, a condamné M. C... à verser à la commune de Rugny la somme de 12 437,65 euros et a mis à sa charge 20 % des frais d'expertise.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 1er juillet 2016, M. C..., représenté par la SCPA Maurin Teixeira Bonandrini, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 avril 2016 du tribunal administratif de Dijon en tant qu'il prononce des condamnations à son encontre ;

2°) de rejeter les conclusions présentées en première instance par la commune de Rugny à son encontre ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Rugny la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il s'en remet à la sagesse de la cour pour déterminer si les désordres invoqués relèvent de la garantie décennale ;

- seule la responsabilité de la société CDR peut être engagée ainsi que l'a relevé l'expert judiciaire ; l'architecte n'est pas le chef de chantier ni le conducteur de travaux de l'entreprise ; l'entreprise n'a pas respecté le DTU et la responsabilité lui incombe seule.

Par un mémoire, enregistré le 15 janvier 2018, la commune de Rugny, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du 28 avril 2016 du tribunal administratif de Dijon et de porter la condamnation prononcée à l'encontre de M. C... à la somme de 31 094,23 euros ;

2°) de mettre à la charge de M. C... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la responsabilité des constructeurs sur le fondement de la garantie décennale ne fait aucun doute ;

- M. C... était chargé de veiller à la conformité des travaux effectués par l'entreprise CDR avec les pièces du marché et doit être tenu pour responsable des désordres à hauteur de 50% de leurs conséquences dommageables.

La requête a été communiquée à la SELARL François Carlo, mandataire judiciaire de la société CDR, qui n'a pas produit de mémoire.

Par une ordonnance du 16 janvier 2018, l'instruction a été close au 1er février 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics alors en vigueur ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lesieux ;

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public ;

- les observations de MeA..., substituant MeD..., représentant la commune de Rugny ;

1. Considérant que la commune de Rugny et M. C..., architecte du patrimoine ont conclu, le 27 novembre 2002 un marché de maîtrise d'oeuvre portant sur des travaux de grosses réparations sur l'église Saint-Marcel ; que par acte d'engagement, notifié le 29 octobre 2005, la commune de Rugny a confié la réalisation des travaux du lot n° 1 " Maçonnerie, pierres de taille, enduits " à la société Chablaisienne de Restauration (CDR) ; que ces travaux ont été réceptionnés sans réserve le 13 octobre 2006 ; que dès le mois suivant, des désordres sont apparus sur les enduits réalisés et que le maire de la commune de Rugny a sollicité de la société CDR la reprise de ces désordres au titre de la garantie de parfait achèvement ; que cette société, qui n'a pas réalisé ces travaux de reprise, a été placée en liquidation judiciaire le 23 juin 2009 ; qu'à la demande de la commune de Rugny, le juge des référés du tribunal administratif de Dijon a, par une ordonnance du 15 novembre 2011, ordonné une expertise contradictoire ; que l'expert judiciaire a déposé son rapport le 19 septembre 2012 ; que la commune de Rugny a saisi le tribunal de grande instance d'Auxerre d'une demande tendant à la condamnation de l'assureur de la société CDR au paiement de la somme de 60 469,25 euros TTC au titre des travaux de reprise ; que par un jugement du 3 novembre 2014, le tribunal de grande instance d'Auxerre a sursis à statuer dans l'attente d'une décision définitive de la juridiction administrative sur la responsabilité des constructeurs au titre de la garantie décennale ; que la commune de Rugny a alors saisi le tribunal administratif de Dijon qui, par un jugement du 28 avril 2016, a déclaré la société CDR responsable des désordres de nature décennale affectant les travaux réalisés sur l'église à hauteur de 80 % des conséquences dommageables de ces désordres, évaluées à 62 188,27 euros TTC ; que le tribunal a alors condamné M. C... au paiement de la somme de 12 437,65 euros TTC correspondant à sa part de responsabilité évaluée à 20 % des conséquences dommageables des désordres affectant l'église de Rugny et a mis à la charge définitive de celui-ci 20 % des frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 6 906,74 euros TTC ; que M. C... relève appel de ce jugement en tant qu'il retient à son encontre une part de responsabilité de 20 % et le condamne à cette hauteur à réparer les préjudices subis par la commune et à supporter les frais d'expertise judiciaire ; que par la voie de l'appel incident, la commune de Rugny demande à la cour de réformer le jugement et de condamner M. C... à lui verser une somme de 31 094,23 euros TTC, correspondant à une part de 50 % de responsabilité de l'architecte ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et en particulier du rapport d'expertise judiciaire, que les désordres affectant l'église de Rugny sont caractérisés par des fissures, des décollements d'enduits et la présence de tâches brunâtres sur les façades de la tour du clocher, de la tourelle et du demi-pignon côté Nord du transept ; que pour retenir le caractère décennal des désordres affectant l'église de Rugny, le tribunal administratif de Dijon a tenu compte, d'une part, de l'aspect inesthétique de ces désordres affectant un édifice inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques et, d'autre part, du risque pour la sécurité des personnes que constituent les décollements d'enduits par plaques ; qu'en se bornant à s'en remettre à la sagesse de la cour, M. C... ne conteste pas sérieusement le caractère décennal des désordres reconnu par le tribunal administratif ;

3. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction et en particulier du rapport d'expertise judiciaire que les désordres décrits au point précédent ont pour origine le mauvais dosage des enduits par la société CDR, qui a utilisé un enduit contenant du ciment, alors que les prescriptions du marché prévoyaient la réalisation d'un enduit composé uniquement de chaux ; que M. C... soutient que la société CDR est la seule responsable de la mauvaise composition de l'enduit qu'elle a utilisé ; que toutefois, il résulte de l'instruction que l'architecte s'est contractuellement engagé envers la commune à réaliser une mission complète de maîtrise d'oeuvre, comprenant notamment la vérification " de l'avancement des travaux et leur conformité avec les pièces du marché " ; que si, contrairement aux affirmations de la commune de Rugny, les désordres affectant l'église résultent pour une part prépondérante du mauvais dosage réalisé par l'entreprise CDR, le maître d'oeuvre, eu égard à la mission de surveillance qui lui était confiée, ne peut s'abstraire de toute responsabilité dans les désordres affectant l'église ; que le tribunal administratif, par le jugement contesté sur ce point tant par M. C... que par la commune de Rugny, a fait une juste appréciation de la part de responsabilité incombant à chacun en fixant à 80 % la part de responsabilité incombant à la société CDR et à 20 % celle incombant à M. C... ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon l'a condamné à verser à la commune de Rugny une somme de 12 437,65 euros TTC correspondant à sa part de responsabilité évaluée à 20 % des conséquences dommageables des désordres affectant l'église de Rugny et a mis à la charge définitive de celui-ci 20 % des frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 6 906,74 euros TTC ; que les conclusions d'appel incident de la commune de Rugny tendant à ce que le montant de la condamnation prononcée à l'encontre de M. C... soit portée à 31 094,23 euros TTC doivent également être rejetées ;

5. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la commune de Rugny, qui n'est pas la partie perdante ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter également les conclusions présentées au même titre contre M. C...par la commune de Rugny qui succombe partiellement dans la présente instance ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Rugny sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et à la commune de Rugny.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2018, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Lesieux, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 juin 2018.

4

N° 16LY02227


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY02227
Date de la décision : 21/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04-04 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité décennale. Responsabilité de l'architecte.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Sophie LESIEUX
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : MAURIN et ASSOCIES - CABINET DE BESANCON

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-06-21;16ly02227 ?
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