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24/05/2018 | FRANCE | N°17LY03841

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 24 mai 2018, 17LY03841


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...C...et M. B...C...ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les arrêtés du 11 mai 2017 par lesquels le préfet du Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi et d'enjoindre au préfet de leur délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou de réexaminer leur situation, dès la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros p

ar jour de retard.

Par un jugement n° 1703992-1703993 du 17 octobre 2017, le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...C...et M. B...C...ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les arrêtés du 11 mai 2017 par lesquels le préfet du Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi et d'enjoindre au préfet de leur délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou de réexaminer leur situation, dès la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1703992-1703993 du 17 octobre 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté les demandes présentées par Mme et M.C....

Procédure devant la cour

I. Par une requête enregistrée le 9 novembre 2017, sous le n° 17LY03841, M. C..., représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lyon du 17 octobre 2017 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du 11 mai 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " ou de réexaminer sa situation, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à compter de la notification de la décision ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil, sous réserve qu'il renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que :

Sur la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour :

- le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de sa demande dès lors que sa mère, son frère et sa soeur résident en France en situation régulière et qu'il prend soin de sa mère, âgée de 83 ans, atteinte de la maladie d'Alzheimer et d'une pathologie cardiaque et qui vit avec lui et sa famille ; il bénéficie d'une promesse d'embauche et suit des cours d'alphabétisation ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 dès lors qu'il vit en France avec son épouse et ses quatre enfants ; ses trois enfants sont scolarisés en France ; il bénéficie d'une promesse d'embauche ; il n'est pas entré récemment en France ; il prend soin de sa mère gravement malade alors que son frère et sa soeur vivant en France ne peuvent s'en occuper ; il est bien intégré et bénéficie d'une promesse d'embauche ;

- la décision méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors qu'elle a pour effet de priver les enfants de la présence régulière de leur père ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision sera annulée par voie de conséquence de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour les motifs précédemment indiqués à l'encontre du refus de titre ;

- la décision méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors que les enfants sont scolarisés en France et bien intégrés ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

- la décision sera annulée par voie de conséquence de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour et de l'illégalité affectant l'obligation de quitter le territoire ;

II. Par une requête enregistrée le 9 novembre 2017, sous le n° 17LY03842, Mme C..., représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lyon du 17 octobre 2017 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du 11 mai 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " ou de réexaminer sa situation, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à compter de la notification de la décision ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil, sous réserve qu'il renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient que :

Sur la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour :

- le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de sa demande dès lors que sa belle-mère, son beau-frère et sa belle-soeur résident en France en situation régulière et que son époux prend soin de sa mère, âgée de 83 ans, atteinte de la maladie d'Alzheimer et d'une pathologie cardiaque et qui vit avec eux ; son mari bénéficie d'une promesse d'embauche et suit des cours d'alphabétisation ; elle participe aux activités d'un centre social ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 dès lors qu'elle vit en France avec son époux et ses quatre enfants ; ses trois enfants sont scolarisés en France ; son époux bénéficie d'une promesse d'embauche ; ils ne sont pas entrés récemment en France ; son époux prend soin de sa mère gravement malade alors que son frère et sa soeur vivant en France ne peuvent s'en occuper ; ils sont bien intégrés ;

- la décision méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors qu'elle a pour effet de priver les enfants de la présence régulière de leur mère ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision sera annulée par voie d'exception de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour les motifs précédemment indiqués à l'encontre du refus de titre ;

- la décision méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors que les enfants sont scolarisés en France et bien intégrés ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

- la décision sera annulée par voie d'exception de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour et de l'illégalité affectant l'obligation de quitter le territoire ;

Par un mémoire en défense enregistré le 28 mars 2018, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête et s'en rapporte à ses écritures de première instance.

Mme et M. C...n'ont pas été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 27 décembre 2017.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Caraës.

1. Considérant que les requêtes n° 17LY03841 et 17LY03842 présentées respectivement par M. et Mme C...sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;

2. Considérant que M.C..., ressortissant algérien né le 22 janvier 1970 et Mme C..., de même nationalité, née le 30 juillet 1979, sont entrés en France le 16 juin 2013 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour, avec leurs enfants ; que M. C... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 ; que, par arrêté du 19 décembre 2014, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que la légalité de cet arrêté a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Lyon le 22 septembre 2015 et par un arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon le 21 avril 2016 ; que, le 11 avril 2017, Mme et M. C...ont déposé une demande de titre de séjour au titre de la vie privée et familiale ; que, par décisions du 11 mai 2017, le préfet du Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que M. C... et Mme C...relèvent appel du jugement du 17 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du 11 mai 2017 ;

Sur la légalité des refus de délivrance de titre de séjour :

3. Considérant qu'il ressort des termes des décisions attaquées que le préfet du Rhône a procédé à un examen particulier de la situation de Mme et M.C..., notamment au regard de leurs attaches familiales et de la présence de leurs enfants en France ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de son refus (....) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance..." ;

5. Considérant que Mme et M. C...font valoir qu'ils résident depuis juin 2013 en France où leurs enfants poursuivent régulièrement leur scolarité, et qu'ils sont bien intégrés ; que, toutefois, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne garantit pas à l'étranger le droit de choisir le lieu le plus approprié pour développer sa vie privée et familiale ; qu'en l'espèce, il est constant que Mme et M. C... étaient en situation irrégulière lorsqu'ils ont développé leur vie privée et familiale en France ; qu'ils ne pouvaient ignorer, par suite, qu'ils étaient susceptibles de faire l'objet d'un refus de délivrance d'un titre de séjour accompagné d'une mesure d'éloignement ; que la famille C...est entrée récemment en France ; que si le requérant fait valoir qu'il prend soin de sa mère âgée et malade, il ne ressort pas des pièces du dossier que les frères de M. C...vivant en France ne seraient pas en mesure d'apporter l'assistance quotidienne dont leur mère a besoin, ni que cette aide ne puisse être donnée par une personne extérieure ; que l'intéressé dispose d'attaches familiales en Algérie où il a vécu jusqu'à l'âge de quarante trois ans ; que son épouse, Mme A...C..., fait l'objet d'un arrêté du même jour par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a assorti d'une obligation de quitter le territoire ; qu'ainsi, et nonobstant la circonstance que M. C...bénéficie d'une promesse d'embauche, le préfet en adoptant les décisions attaquées n'a pas porté au droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel lesdites décisions ont été prises ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 ne peuvent être accueillis ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) " ;

7. Considérant que si Mme et M. C...soutiennent que leurs enfants, scolarisés en France depuis leur arrivée sur le territoire national, sont bien intégrés, rien ne s'oppose à ce que les intéressés repartent avec leurs enfants mineurs dans leur pays d'origine ; qu'il ne résulte pas des pièces des dossiers qu'ils ne puissent y suivre une scolarité normale ; que, dès lors, il n'apparaît pas que l'intérêt supérieur des enfants de Mme et M. C...aurait été méconnu ; que par suite, le moyen tiré de la violation de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté ;

Sur la légalité des obligations de quitter le territoire français :

8. Considérant que les moyens invoqués à l'encontre des refus de titre de séjour ayant été écartés, Mme et M. C...ne sont pas fondés à exciper de l'illégalité de ces décisions à l'appui de leurs conclusions dirigées contre les obligations de quitter le territoire français prises à leur encontre ;

9. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été précédemment énoncés dans le cadre de l'examen de la légalité des décisions de refus de délivrance d'un titre de séjour, les décisions faisant obligation à Mme et M. C...de quitter le territoire français n'ont méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la légalité des décisions fixant le pays de destination :

10. Considérant que les moyens invoqués à l'encontre des refus de titre de séjour et des obligations de quitter le territoire ayant été écartés, Mme et M. C...ne sont pas fondés à exciper de l'illégalité de ces décisions à l'appui de leurs conclusions dirigées contre les décisions fixant le pays à destination duquel ils pourront être éloignés ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes ; que les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. C... et Mme C...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M.B... C..., à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 5 avril 2018, à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

M. Carrier, président-assesseur,

Mme Caraës, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 mai 2018.

6

N° 17LY03841...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY03841
Date de la décision : 24/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU et SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-05-24;17ly03841 ?
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