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17/05/2018 | FRANCE | N°17LY04391

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 17 mai 2018, 17LY04391


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai 30 jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1705771 du 23 novembre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel le préfet de l'Isère a obligé Mme A... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pay

s de renvoi.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 décembre 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai 30 jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1705771 du 23 novembre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel le préfet de l'Isère a obligé Mme A... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 décembre 2017, le préfet de l'Isère demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 novembre 2017 susmentionné ;

Il soutient que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a estimé que l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de Mme A...méconnaissait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Par un mémoire en défense enregistré le 28 mars 2018, MmeA..., représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête, à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à ce qu'elle soit admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

Elle soutient qu'aucun moyen n'est fondé ;

Par une décision du 27 mars 2018, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé la demande d'aide juridictionnelle présentée par MmeA....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 9l-47du l0 juillet 1991;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Carrier.

1. Considérant que MmeA..., ressortissante algérienne, est entrée en France accompagnée de ses trois enfants en mars 2016 ; qu'elle a présenté une demande tendant au bénéfice du statut de réfugié qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 14 décembre 2016, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 26 mai 2017 ; que, par arrêté du 11 septembre 2017, le préfet de l'Isère a prononcé à l'encontre de l'intéressée une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ; que, par jugement du 23 novembre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions susmentionnées ; que, par sa requête, le préfet de l'Isère demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande de Mme A...;

Sur les conclusions de Mme A...tendant à l'octroi de l'aide juridictionnelle provisoire :

2. Considérant que, par décision du 27 mars 2018, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à Mme A...le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, les conclusions susanalysées sont devenues sans objet ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. - 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui." ;

4. Considérant que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne garantit pas à l'étranger le droit de choisir le lieu le plus approprié pour développer une vie privée et familiale ; qu'en l'espèce, la requérante qui ne réside en France que depuis le mois de mars 2016 n'établit pas disposer d'attaches personnelles et familiales fortes en France ; qu'elle n'est pas dépourvue d'attache dans son pays d'origine où résident notamment ses parents et où elle a vécu jusqu'à l'âge de 27 ans ; que si elle soutient qu'elle et ses enfants ont été victimes de violences de la part de son époux en Algérie, qu'elle court des risques en cas de retour dans son pays d'origine et qu'elle est rejetée par sa famille en raison de sa séparation conjugale, elle n'apporte aucun élément probant au soutien de ses allégations ; que rien ne s'oppose à ce que ses trois enfants l'accompagnent en Algérie où ils pourront poursuivre leur scolarité ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment à la durée et aux conditions de séjour de l'intéressée en France, le préfet en adoptant la décision attaquée n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel ladite décision a été prise ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ; que, dans les circonstances susrappelées, le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur la situation personnelle et familiale de MmeA... ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé pour ces motifs l'arrêté préfectoral du 11 septembre 2017 susmentionné ;

6. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mme A...tant devant la cour que devant le tribunal administratif de Grenoble à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation des décisions susmentionnées ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté du 29 août 2017, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le 30 août 2017, le préfet de l'Isère a donné à Mme Violaine Demaret, secrétaire générale, délégation pour signer tous actes, arrêtés, décisions, documents et correspondances administratives diverses à l'exception d'actes limitativement énumérés parmi lesquels ne figurent pas les décisions relatives à l'éloignement des étrangers ; que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué doit, dès lors, être écarté ;

8. Considérant, en second lieu, qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, la requérante n'apporte aucun élément probant de nature à établir la réalité des violences dont ses enfants auraient été victimes de la part de leur père ; que, par ailleurs, il n'est pas établi qu'ils ne pourraient pas poursuivre leur scolarité en Algérie et que tout retour dans leur pays d'origine serait impossible ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, et nonobstant une bonne intégration des enfants de Mme A...en France, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que le préfet en adoptant la décision attaquée n'aurait pas pris en considération l'intérêt supérieur de ses enfants ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut être accueilli ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

9. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit au point 7, que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté ;

10. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que les moyens dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français ne sont pas fondés ; qu'il s'ensuit que l'exception d'illégalité de cette décision ne peut être accueillie ;

11. Considérant, en troisième lieu, que la requérante n'établit pas qu'elle courrait personnellement des risques en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté préfectoral du 11 septembre 2017 susmentionné et enjoint qu'il soit délivré à Mme A...un titre de séjour ; que les conclusions aux fins d'annulation présentées par Mme A...contre l'arrêté du préfet de l'Isère du 11 septembre 2017 doivent être rejetées ; que les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par Mme A...doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission à l'aide juridictionnelle présentée par MmeA....

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 novembre 2017 est annulé.

Article 3 : La demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif de Grenoble est rejetée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 5 avril 2018, à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

M. Carrier, président-assesseur,

Mme Cottier, premier conseiller.

Lu en audience publique le 17 mai 2018 .

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N° 17LY04391


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY04391
Date de la décision : 17/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: M. Claude CARRIER
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : PIEROT

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-05-17;17ly04391 ?
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