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26/04/2018 | FRANCE | N°17LY04085

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 26 avril 2018, 17LY04085


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du préfet de la Drôme du 11 août 2015 portant autorisation provisoire de séjour, en tant qu'elle ne l'autorise pas à travailler.

Par un jugement n° 1505147 du 21 novembre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 5 décembre 2017, le préfet de la Drôme demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribu

nal administratif de Grenoble du 21 novembre 2017 ;

2°) de rejeter les conclusions de la demande de Mme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du préfet de la Drôme du 11 août 2015 portant autorisation provisoire de séjour, en tant qu'elle ne l'autorise pas à travailler.

Par un jugement n° 1505147 du 21 novembre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 5 décembre 2017, le préfet de la Drôme demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 21 novembre 2017 ;

2°) de rejeter les conclusions de la demande de Mme B... C... tendant à l'annulation de l'autorisation provisoire de séjour du 11 août 2015 en tant qu'elle ne l'autorise pas à travailler.

Il soutient que :

- à titre principal, la mention " n'autorise pas son titulaire à travailler " portée sur l'autorisation provisoire de séjour délivrée à Mme B... C..., qui ne constitue qu'un rappel de la réglementation en vigueur, n'est pas une décision susceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir ;

- à titre subsidiaire, sa décision n'est pas entachée d'incompétence de son signataire ;

- s'agissant des autres moyens invoqués devant les premiers juges, il se réfère à ses écritures de première instance.

Par un mémoire enregistré le 17 janvier 2018, Mme B... C..., représentée par Me Bret, avocat, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'État du paiement à son conseil d'une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'autorisation provisoire de séjour qui lui a été délivrée ne lui permet pas de travailler, en violation de l'article R. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus d'autorisation de travail est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Mme B... C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 janvier 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Clot, président ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... C..., ressortissante de la République démocratique du Congo, où elle est née le 23 mars 1996, déclare être entrée irrégulièrement en France le 22 octobre 2012, soit à l'âge de seize ans révolus. Par décision du tribunal pour enfants de Valence du 9 novembre 2012, elle a été placée auprès des services de l'aide sociale à l'enfance. Elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le 9 avril 2015, le préfet de la Drôme lui a opposé un refus au motif que sa demande, du 24 mars 2015, avait été présentée au-delà de l'année suivant son dix-huitième anniversaire. Par un jugement du 16 juillet 2015, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ce refus et enjoint au préfet de la Drôme de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de deux mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour. Ce jugement a été confirmé par un arrêt de la cour du 13 octobre 2016, selon lequel la demande de titre de séjour a été présentée par l'intéressée le 19 mars 2015, date à laquelle elle n'avait pas encore atteint l'âge de dix-neuf ans. Pour l'exécution de ce jugement, le préfet lui a délivré, le 11 août 2015, une autorisation provisoire de séjour précisant que ce document " ne permet pas à son titulaire d'occuper un emploi ". Le préfet de la Drôme relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé, dans cette mesure, cette décision.

2. L'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable jusqu'au 30 octobre 2016, dispose que : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé ".

3. Aux termes de l'article L. 313-10 du même code : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : / 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. (...) ".

4. Aux termes de l'article R. 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Il est remis à tout étranger admis à souscrire une demande de première délivrance ou de renouvellement de titre de séjour un récépissé qui autorise la présence de l'intéressé sur le territoire pour la durée qu'il précise. (...) ".

5. Aux termes de l'article R. 311-6 du même code : " Le récépissé de la demande de première délivrance d'une carte de séjour prévue aux 1°, 2° bis, 4°, 6°, 8°, 9° et 10° de l'article L. 313-11, aux articles L. 313-13, L. 313-21 et L. 313-24, aux 1° et 3° de l'article L. 314-9, à l'article L. 314-11, à l'article L. 314-12 ou à l'article L. 316-1, ainsi que le récépissé mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 311-4 autorisent son titulaire à travailler. / Il en est de même du récépissé de la demande de première délivrance d'une carte de séjour délivrée sur le fondement des 1° et 2° de l'article L. 313-10, de l'article L 313-23, dès lors que son titulaire satisfait aux conditions mentionnées à l'article L. 5221-2 du code du travail (...). "

6. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... C..., qui suivait alors depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, a présenté le 19 mars 2015 une première demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoit, à titre dérogatoire, la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " sur le fondement du 1° de l'article L. 313-10 du même code. Il résulte des dispositions de l'article R. 311-6 de ce code que, dans ce cas, le préfet doit remettre au pétitionnaire un récépissé de demande de titre de séjour l'autorisant à travailler.

7. En précisant que le récépissé valant autorisation provisoire de séjour remis à Mme B... C... " ne permet pas à son titulaire d'occuper un emploi ", le préfet ne s'est pas borné à rappeler les dispositions applicables, mais a pris une décision que l'intéressée est recevable à déférer au juge de l'excès de pouvoir. Par suite, la fin de non recevoir opposée à sa demande devant le tribunal administratif ne peut être accueillie.

8. La décision du 11 août 2015 en litige a été signée par l'adjoint au chef de bureau, M. D... A..., qui bénéficiait d'une délégation de signature en vertu d'un arrêté du préfet de la Drôme du 19 janvier 2015 à l'effet de signer notamment les " documents provisoires de séjour ". Par suite, c'est à tort que, pour annuler cette décision, les premiers juges se sont fondés sur le motif tiré de l'incompétence de son signataire.

9. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par Mme B... C....

10. Il résulte de ce qui a été dit aux points 6 et 7 que le préfet ne pouvait pas légalement remettre à Mme B... C... une autorisation de travail ne lui permettant pas d'occuper un emploi.

11. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Drôme n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision en litige.

12. Mme B... C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son conseil peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sous réserve que Me Bret, avocat de Mme B... C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État le paiement à cet avocat d'une somme de 1 000 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Drôme est rejetée.

Article 2 : L'État versera à Me Bret, avocat de Mme B... C..., la somme de 1 000 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 5 avril 2018 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 avril 2018.

2

N° 17LY04085


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY04085
Date de la décision : 26/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : JEAN-YVES BRET -PATRICK BERAS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-04-26;17ly04085 ?
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