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12/04/2018 | FRANCE | N°16LY01243

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 12 avril 2018, 16LY01243


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 29 septembre 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné un pays de destination.

Par un jugement n° 1509212 du 8 mars 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 8 avril 2016, M. B... C..

., représenté par Me Sabatier, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribuna...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 29 septembre 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné un pays de destination.

Par un jugement n° 1509212 du 8 mars 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 8 avril 2016, M. B... C..., représenté par Me Sabatier, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 8 mars 2016 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- s'agissant du refus de titre de séjour, en estimant qu'il n'y avait pas de communauté de vie entre lui et sa concubine, le préfet a commis une erreur de fait ; ce refus méconnaît l'article L. 313-14 et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, l'article 24 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et l'article 20 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, l'article 24 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et l'article 20 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence.

Par un mémoire enregistré le 16 mars 2018, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête en s'en rapportant à ses écritures devant le tribunal administratif.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Clot, président,

- les observations de MeA..., substituant Me Sabatier, avocat de M. C... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., né le 17 juin 1993, ressortissant de la République démocratique du Congo, est entré irrégulièrement en France le 22 juin 2010, alors qu'il était âgé de dix-sept ans. Il a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance. Devenu majeur, il a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 27 mars 2012 et par la Cour nationale du droit d'asile le 5 octobre 2012. Il a obtenu une carte de séjour temporaire mention " étudiant " pour la période du 1er novembre 2012 au 23 avril 2015. Le 16 juin 2015, il a sollicité une carte de séjour temporaire en se prévalant de sa vie privée et familiale. Le 29 septembre 2015, le préfet du Rhône lui a opposé un refus, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé un pays de destination. M. C... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions du 29 septembre 2015.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.".

3. L'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a séjourné régulièrement en France du 1er novembre 2012 au 23 avril 2015. Il a obtenu un certificat d'aptitude professionnelle en juillet 2013. Il a été embauché en 2015 dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée. Il est le père d'un enfant, né en France, le 17 août 2015, de sa relation avec l'une de ses compatriotes titulaire d'une carte de séjour temporaire en qualité de parent d'enfant français. Les parents de l'enfant de M. C... ne vivent pas ensemble, sa mère occupant un emploi en alternance à Saint-Etienne, tandis que M. C... travaille dans la région de Lyon. L'intéressé produit quelques pièces relatives à des dépenses effectuées pour cet enfant, ainsi que le certificat d'un médecin selon lequel il l'accompagne lors des visites au cabinet de ce praticien. Toutefois, M. C..., qui n'était titulaire que d'un titre de séjour en qualité d'étudiant, ne pouvait ignorer le caractère précaire de sa situation au regard de son droit au séjour en France. Dès lors, et en l'absence de communauté de vie entre M. C... et la mère de son enfant, le refus de titre de séjour qui lui a été opposé ne porte pas, compte tenu des buts poursuivis, une atteinte disproportionné à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, le préfet, qui ne s'est pas fondé sur des faits matériellement inexacts en estimant qu'il n'existait pas de communauté de vie entre M. C... et la mère de leur enfant commun, n'a méconnu ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

6. L'article 24 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne stipule : " (...) 2. Dans tous les actes relatifs aux enfants, qu'ils soient accomplis par des autorités publiques ou des institutions privées, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. / 3. Tout enfant a le droit d'entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec ses deux parents, sauf si cela est contraire à son intérêt. ".

7. Pour les motifs qui viennent d'être exposés, et en l'absence de relations suffisamment suivies entre M. C... et son enfant, le refus de titre de séjour contesté n'a méconnu ni l'intérêt supérieur de cet enfant, garanti par l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, ni l'article 24 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

8. Enfin, aux termes de l'article 20 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " 1. Il est institué une citoyenneté de l'Union. Est citoyen de l'Union toute personne ayant la nationalité d'un État membre. La citoyenneté de l'Union s'ajoute à la citoyenneté nationale et ne la remplace pas. 2. Les citoyens de l'Union jouissent des droits et sont soumis aux devoirs prévus par les traités. Ils ont, entre autres: a) le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres (...). Ces droits s'exercent dans les conditions et limites définies par les traités et par les mesures adoptées en application de ceux-ci. ".

9. Le refus de titre de séjour en litige reste sans incidence sur la situation de l'enfant français de la mère de l'enfant de M. C..., qui possède la nationalité de l'Union européenne. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 20 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne doit être écarté.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

10. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) ".

11. M. C..., ressortissant de la République démocratique du Congo, s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour le 29 septembre 2015. Ainsi, à la même date, il était dans le cas prévu par les dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'il n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de ce refus de titre de séjour.

12. Pour les motifs indiqués dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour contesté, la décision faisant obligation à M. C... de quitter le territoire français ne méconnaît ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, ni l'article 24 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ni l'article 20 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Pour ces mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle est susceptible de comporter pour la situation personnelle de l'intéressé.

Sur la légalité de la décision désignant le pays de destination :

13. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. C... n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ni, en tout état de cause, de l'illégalité du refus de lui délivrer un titre de séjour.

14. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 22 mars 2018 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

Mme Dèche, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 12 avril 2018.

2

N° 16LY01243


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY01243
Date de la décision : 12/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU et SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 24/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-04-12;16ly01243 ?
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