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05/04/2018 | FRANCE | N°17LY00333

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 05 avril 2018, 17LY00333


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL Entreprise Gibello a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la communauté de communes du pays d'Alby à lui verser une indemnité de 146 845 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de la résiliation pour motif d'intérêt général du marché public de travaux dont elle était titulaire.

Par le jugement n° 1406520 du 22 novembre 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mé

moire enregistrés le 23 janvier et le 5 mai 2017, la société Gibello, représentée par Me B..., dem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL Entreprise Gibello a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la communauté de communes du pays d'Alby à lui verser une indemnité de 146 845 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de la résiliation pour motif d'intérêt général du marché public de travaux dont elle était titulaire.

Par le jugement n° 1406520 du 22 novembre 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés le 23 janvier et le 5 mai 2017, la société Gibello, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 22 novembre 2016 ;

2°) de condamner le syndicat intercommunal du Pays d'Alby à lui verser la somme de 146 845 euros au titre du préjudice résultant de la résiliation unilatérale du marché public dont elle était titulaire, pour motif d'intérêt général ;

3°) de mettre à la charge du syndicat intercommunal du Pays d'Alby la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Gibello soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont rejeté son recours indemnitaire, alors qu'elle n'a elle-même commis aucune faute ;

- c'est à tort également qu'ils ont jugé qu'il ne s'agissait pas d'une résiliation unilatérale mais d'une résolution, une personne publique ne pouvant résoudre unilatéralement un contrat ; le recours gracieux du préfet portait sur la délibération du 27 février 2014, et non sur le contrat lui-même ; s'agissant d'un acte détachable du contrat, son retrait n'aboutit pas nécessairement à la nullité du marché ; c'est à tort que les premiers juges ont jugé que le vice en cause pouvait justifier la résolution du contrat ;

- le marché n'était pas entaché de nullité et ne pouvait être résolu ; à la date de la résiliation il était déjà signé et notifié ; elle ne s'était jamais prévalue du cahier des clauses administratives générales ; l'absence de tout commencement d'exécution ne la prive pas de l'indemnisation de son gain manqué ;

- son taux de marge est de 6,6 % pour ce marché d'un montant de 2 216 451 euros HT ; il faut prendre comme période de référence l'exercice comptable au cours duquel le marché devait être exécuté.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 avril 2017, le syndicat intercommunal du Pays d'Alby, qui vient aux droits de la communauté de communes du pays d'Alby, ayant pour avocat Me C..., demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de la société Gibello ;

2°) à titre subsidiaire, de ne pas lui accorder une indemnité supérieure à 14 000 euros ;

3°) de mettre à sa charge la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le syndicat intercommunal fait valoir que :

- un contrat qui n'a pas eu de commencement d'exécution ne permet pas au cocontractant, dans le cadre d'une résiliation pour motif d'intérêt général, d'obtenir une indemnisation faute pour lui de rapporter la preuve d'un préjudice réel et certain ;

- le mode de calcul de l'indemnisation demandée par la SARL entreprise Gibello ne peut être retenu ; une indemnité, à supposer qu'elle soit admise par la cour, ne saurait excéder 14 000 euros.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gondouin,

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la société Gibello et de Me D... représentant le syndicat intercommunal du Pays d'Alby ;

Une note en délibéré présentée pour la société Gibello a été enregistrée le 15 mars 2018.

1. Considérant que dans le cadre de l'opération de réalisation d'un pôle culturel et d'un gymnase à Alby-sur-Cheran, la communauté de communes du pays d'Alby, aux droits de laquelle vient, depuis le début de l'année 2017, le syndicat intercommunal du pays d'Alby, a attribué le lot n° 2 "gros oeuvre" à la SARL Entreprise Gibello pour un montant de 2 216 451 euros HT ; que le marché attribué, à l'issue d'une procédure adaptée, par une délibération du conseil communautaire du 24 février 2014, a été notifié à l'entreprise le 19 mars 2014 ; que, par un courrier du 31 mars 2014, le préfet de la Haute-Savoie a informé le président de la communauté de communes de l'irrégularité de la procédure d'attribution du marché et de son intention de saisir le tribunal administratif si cette délibération du 24 février 2014 n'était pas retirée ; que le président de la communauté de communes a informé la société Gibello, par lettre du 23 avril 2014, de la résiliation de ce marché à la suite du recours du préfet et de ce qu'une consultation par voie d'appel d'offres ouvert était relancée ; que la société Gibello a sollicité, en vain, auprès de la communauté de communes une indemnisation correspondant à la marge nette bénéficiaire escomptée du marché ; qu'elle a ensuite saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande de condamnation de la communauté de communes du pays d'Alby à lui verser une indemnité de 146 845 euros en réparation de son préjudice ; que la société Gibello relève appel du jugement du 22 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

2. Considérant que, dans son recours gracieux adressé au président de la communauté de communes, le préfet de la Haute-Savoie avait invoqué la méconnaissance du paragraphe III de l'article 27 du code des marchés publics alors applicable en précisant : " L'utilisation de la procédure adaptée n'était pas envisageable lors de la relance du lot n° 2 du marché évoqué puisque le montant du lot ne remplissait aucune des conditions énoncées dans l'article 27 du CMP (montant supérieur à 1 000 000 euros HT et à 20 % de la valeur totale des lots) " ; que, par sa lettre du 23 avril 2014, le président de la communauté de communes du pays d'Alby a tiré les conséquences de ce recours préfectoral et prononcé la résiliation du marché passé avec la société Gibello ;

3. Considérant qu'en vertu des règles générales applicables aux contrats administratifs, la personne publique contractante peut toujours, pour un motif d'intérêt général, résilier unilatéralement un tel contrat, sous réserve des droits à indemnité de son cocontractant ; que l'étendue et les modalités de l'indemnisation due par la personne publique à son cocontractant en cas d'annulation ou de résiliation pour un motif d'intérêt général du contrat peuvent être déterminées par les stipulations du contrat ;

4. Considérant qu'aux termes des stipulations du premier alinéa de l'article 46-4 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicable au marché litigieux : " Lorsque le représentant du pouvoir adjudicateur résilie le marché pour motif d'intérêt général, le titulaire a droit à une indemnité de résiliation, obtenue en appliquant au montant initial hors taxes du marché, diminué du montant hors taxes non révisé des prestations reçues, un pourcentage fixé par les documents particuliers du marché ou, à défaut, de 5 %. " ;

5. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la société Gibello avait elle-même commis une faute lors de la passation du contrat ; que le cahier des clauses administratives particulières applicable à ce marché ne dérogeait pas aux stipulations précitées de l'article 46-4 du CCAG portant sur la résiliation pour motif d'intérêt général ; que la société Gibello qui demande une indemnisation du fait de la résiliation de son marché pour motif d'intérêt général ne pouvait en l'espèce, comme elle l'a fait tant devant les premiers juges que devant la cour, invoquer d'autre fondement que le CCAG en l'espèce applicable et partie intégrante du marché en litige ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Gibello qui persiste à soutenir qu'elle ne s'est jamais prévalue du CCAG Travaux devant le tribunal administratif et n'entend pas davantage le faire devant la cour, n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que la société Gibello étant partie perdante dans la présente instance, ses conclusions tendant à ce que soit mise une somme à la charge du syndicat intercommunal du Pays d'Alby sur le fondement de ces dispositions ne peuvent qu'être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, les conclusions présentées sur le même fondement par le syndicat intercommunal du Pays d'Alby doivent être également rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1 : La requête de la société Gibello est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du syndicat intercommunal du Pays d'Alby présentées sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Gibello et au syndicat intercommunal du Pays d'Alby.

Délibéré après l'audience du 15 mars 2018 où siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Gondouin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 avril 2018.

4

N° 17LY00333


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY00333
Date de la décision : 05/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04-02-03 Marchés et contrats administratifs. Fin des contrats. Résiliation. Droit à indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Genevieve GONDOUIN
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : ASEA - CABINET ALDO SEVINO ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-04-05;17ly00333 ?
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