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29/03/2018 | FRANCE | N°16LY03064

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 29 mars 2018, 16LY03064


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL Label a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de des années 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes, des droits de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a été déclarée redevable au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 et des pénalités correspondantes et des amendes qui lui ont été infligées sur le fondement des articles 1737 et 17

59 du code général des impôts.

Par un jugement n° 1304177 - 1304178 - 1301479 - 1408...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL Label a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de des années 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes, des droits de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a été déclarée redevable au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 et des pénalités correspondantes et des amendes qui lui ont été infligées sur le fondement des articles 1737 et 1759 du code général des impôts.

Par un jugement n° 1304177 - 1304178 - 1301479 - 1408836 du 5 juillet 2016, le tribunal administratif de Lyon a prononcé la réduction, à hauteur de 26 102,80 euros, de l'amende infligée sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts et rejeté le surplus des conclusions de ses demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 1er septembre 2016, un mémoire enregistré le 22 mai 2017 et un mémoire récapitulatif présenté, sur demande de la cour, le 26 septembre 2017, la SARL Label, représentée par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 5 juillet 2016 en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

2°) de lui accorder la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la vérification de comptabilité a excédé la durée de trois mois, en méconnaissance de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, de sorte que la procédure est irrégulière ;

- la réponse à ses observations manifeste un manquement à la garantie d'un débat contradictoire ;

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée ;

- elle conteste le caractère fictif des factures rejetées ;

- l'administration ne démontre ni qu'elle a commis un manquement délibéré, ni qu'elle a commis une manoeuvre frauduleuse ;

- par voie de conséquence du caractère injustifié des rehaussements, la pénalité infligée sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts n'est pas justifiée ;

- les factures n'étant pas fictives, la pénalité infligée sur le fondement de l'article 1737 du code général des impôts n'est pas justifiée.

Par des mémoires enregistrés les 25 janvier 2017, 5 avril 2017 et 10 juillet 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par la SARL Label n'est fondé.

Par une ordonnance du 2 octobre 2017, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 20 octobre 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Savouré, premier conseiller,

- les conclusions Mme Bourion, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Label, qui exerce l'activité d'éclairage de chantiers et de sonorisation, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière d'impôt sur les sociétés, sur les exercices clos en 2008 et 2009 et, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sur la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009, à l'issue de laquelle elle a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, notifiés selon la procédure contradictoire, assortis, pour partie de majoration pour manquement délibéré et pour une autre partie de majorations pour manoeuvre frauduleuse. Elle s'est aussi vu infliger les amendes prévues par les articles 1737 et 1759 du code général des impôts. Par les articles 1er et 2 du jugement du 5 juillet 2016, le tribunal administratif de Lyon doit être regardé comme ayant réduit la pénalité infligée sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts d'un montant de 26 102,80 euros. Par les articles 3 et 4 de ce jugement le tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus des conclusions de ses demandes tendant à la décharge des impositions issues de cette procédure. La SARL Label interjette appel de ce jugement dont elle doit être regardée comme demandant l'annulation des articles 3 et 4.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales : " I. - Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts (...) ".

3. La vérification sur place des livres et documents mentionnés à l'article L. 52 du livre des procédures fiscales s'est déroulée dans les locaux du cabinet comptable de la SARL Label, du 27 avril 2011, date à laquelle le vérificateur a commencé à contrôler sur place la sincérité des déclarations fiscales, au 9 juin 2011, date de la réunion de synthèse au cours de laquelle ont notamment été communiqués les rehaussements envisagés et qui constitue, en l'espèce, la dernière intervention sur place du vérificateur. Si une entrevue a eu lieu le 7 septembre 2011 dans les locaux de l'administration entre le vérificateur et le représentant de la société, celle-ci a seulement eu pour objet de présenter à la SARL Label les documents obtenus par l'administration dans le cadre du droit de communication, postérieurement au 9 juin 2011, auprès de la banque de la société, alors d'ailleurs que le vérificateur n'avait plus accès aux documents comptables de celle-ci. Ainsi, l'article L. 52 du livre des procédures fiscales n'a pas été méconnu.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". L'article R. 57-1 du même livre ajoute que : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...) ".

5. La proposition de rectification du 24 novembre 2011, qui comporte la désignation des impôts concernés, la période et les bases d'imposition, énonce suffisamment les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées. Si la SARL Label fait valoir notamment que l'administration n'a mentionné aucun document lui permettant d'affirmer que ses fournisseurs allégués, les sociétés Icare et Aeropub, n'auraient pas travaillé pour elle, il résulte de l'instruction que l'administration a précisément constaté que ces dernières n'étaient en mesure de produire aucune facture adressée à la SARL Label et en a déduit que les factures présentées par cette dernière comme émanant de ces sociétés étaient fictives. Ainsi, la proposition de rectification était suffisamment motivée pour permettre à la SARL Label de formuler ses observations.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".

7. En faisant valoir, au soutien de son moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, qu'elle n'a pas été suffisamment informée sur les documents reçus des sociétés Icare et Aeropub par l'administration, la SARL Label doit être regardée comme invoquant, en réalité, la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales. Cependant, ce moyen manque en fait dès lors que l'administration a indiqué, dans sa proposition de rectification, que ces sociétés avaient fait parvenir des factures pro forma démontrant que le modèle de factures de ces dernières était différent des factures présentées par la SARL Label. Ce faisant, l'administration a suffisamment informé la requérante de l'origine et la teneur des renseignements et documents obtenus de tiers.

8. Enfin, en se bornant à se plaindre de ce que l'administration n'aurait pas suffisamment fait usage de son droit de communication pour retrouver les adresses des sociétés Elec G et HMR diffusion, la SARL Label, qui n'invoque aucun texte, ne saurait sérieusement soutenir qu'elle a été privée, pour ce motif, de la garantie d'un débat contradictoire.

Sur le bien-fondé des impositions :

9. En premier lieu, aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. / 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...). ".

10. Aux termes du 2 de l'article 269 du code général des impôts, relatif à la taxe sur la valeur ajoutée : " La taxe est exigible : (...) c) Pour les prestations de services autres que celles visées au b bis, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits. (...) " ;

11. L'administration a recueilli auprès de la société Veolia Onyx Ara l'information suivant laquelle la SARL Label a réalisé, au cours de l'exercice clos en 2009, des prestations pour un montant total de 9 600 euros hors taxe, lesquelles ont été intégralement réglées au cours dudit exercice. L'administration a constaté que la SARL Label n'avait comptabilisé des produits en provenance de cette société qu'à concurrence de 8 100 euros hors taxe et a donc, d'une part, rehaussé sa base imposable à l'impôt sur les sociétés d'un montant de 1 500 euros et, d'autre part, procédé à un rappel de taxe sur la valeur ajoutée de 294 euros.

12. Si la SARL Label soutient que cette omission de chiffre d'affaires de 1 500 euros tiendrait à un double règlement d'une même facture par la société Veolia Onyx Ara, la vérification de comptabilité a révélé, au contraire, que la SARL Label a adressé à cette société au cours de cet exercice deux factures d'un montant de 1 500 euros hors taxe, lesquelles ont été réglées, respectivement, le 12 octobre 2009 et le 11 novembre 2009. Si la SARL Label soutient qu'elle aurait émis une facture d'avoir concernant la seconde facture, elle ne l'a produite ni au cours de la vérification de comptabilité, ni en cours d'instance. Dans ces conditions, l'administration rapporte la preuve du bien-fondé du rehaussement de sa base imposable à l'impôt sur les sociétés et du rappel de taxe sur la valeur ajoutée litigieux.

13. En second lieu, aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ".

14. D'une part, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis. La seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense. Le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration.

15. D'autre part, en vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts et de l'article 230 de l'annexe II à ce code, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services. Dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance. Si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération.

16. La société Label a porté en charges des factures en provenance des sociétés Elec G, HMR Diffusion, Aeropub et Icare, d'un montant total de 86 739,77 euros hors taxe au titre de l'exercice clos en 2008 et de 115 246,41 euros hors taxe au titre de l'exercice clos en 2009. Elle a par ailleurs déduit la taxe sur la valeur ajoutée correspondante, pour un montant total de 17 001 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2008 et de 22 588 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2009. L'administration a exercé son droit de communication auprès de ces sociétés en vue d'obtenir copie des factures émises par ces dernières. Les sociétés Aeropub et Icare ont informé l'administration qu'elles n'avaient facturé aucune prestation à la SARL Label au cours des exercices litigieux. Elles ont aussi fait parvenir des modèles de factures différents des factures justificatives produites par la SARL Label au cours du contrôle. Par ailleurs, l'administration a constaté que la société Elec G avait cessé son activité depuis le 31 juillet 2008 alors que la plupart factures produites par la SARL Label étaient postérieures à cette date. Enfin, les courriers adressés à la société HMR diffusion sont revenus au service avec la mention " n'habite pas à l'adresse indiquée " tandis que les recherches téléphoniques pour contacter cette société sont demeurées infructueuses. Par ailleurs, les renseignements obtenus auprès de la banque de la SARL Label ont permis d'établir qu'aucun des chèques prétendument émis pour régler les factures comptabilisées au débit du compte de charge de sous-traitance et de locations immobilières n'avaient été encaissés par les fournisseurs inscrits en comptabilité, ceux-ci ayant été encaissés exclusivement par des personnes physiques, parmi lesquelles le gérant de fait associé à 93 % de la SARL Label, M. A... D....

17. Les éléments susmentionnés, découverts au cours du contrôle permettent d'établir que les factures prétendument émises par les sociétés Icare et Aeropub, qui ne correspondent à aucune prestation, sont fictives. Par conséquent, leur montant hors taxe n'est pas déductible de l'impôt sur les sociétés. Compte tenu de ce que la société requérante les a émises elle-même, elle ne pouvait ignorer être intégrée à un circuit de fraude. Ces factures ne permettent donc pas davantage de déduire la taxe sur la valeur ajoutée correspondante. La SARL Label ne critique pas sérieusement ce chef de rectification en se bornant à contester, sans plus de précision, les éléments indiqués par ces sociétés au cours du contrôle ou fournis à l'occasion de l'exercice par l'administration du droit de communication.

18. Il ressort par ailleurs du jugement du tribunal correctionnel de Saint-Etienne du 5 juillet 2016, qui a condamné le gérant de fait de la SARL Label pour escroquerie, altération frauduleuse de la vérité dans un écrit et usage de faux, que le gérant de la société Elec G a admis " avoir fait 5 ou 6 prestations pour la société Label " et n'avoir " signé que 4 des 19 factures présentées ". Ces déclarations sont en contradiction avec l'attestation établie par ce dernier et produite devant la cour suivant laquelle il affirme avoir effectué la totalité des prestations et avoir encaissé leur règlement sur les comptes bancaires de sa compagne et de son ex-compagne. Cette attestation constitue le seul élément sur lequel s'appuie la société requérante pour justifier la réalité des prestations et de leur règlement. Compte tenu des faits relevés par le tribunal correctionnel de Saint-Etienne, dont le constat s'impose au juge administratif, il doit être tenu pour établi que la plupart des factures émises au nom de la société Elec G sont fictives. La SARL Label quant à elle ne donne aucune indication utile permettant de justifier tout ou partie de la réalité des prestations ainsi facturées. Ayant émis elle-même les factures litigieuses, la SARL Label ne pouvait ignorer leur caractère frauduleux. Dans ces conditions, l'administration apporte la preuve du bien-fondé des rectifications notifiées en matière tant de taxe sur la valeur ajoutée que d'impôt sur les sociétés.

19. Enfin, s'agissant des factures prétendument établies par la société HMR diffusion, si la SARL Label produit en cours d'instance un extrait d'immatriculation de celle-ci, démontrant ainsi son existence à l'époque des exercices vérifiés, il n'en demeure pas moins qu'au soutien des factures émises à ce nom, la société requérante se borne à produire une attestation du gérant de ce fournisseur suivant laquelle ce dernier aurait bien facturé des prestations à la SARL Label. Toutefois, compte tenu du nombre de factures fictives établies par ailleurs par la SARL Label, de l'incapacité de cette dernière à donner les coordonnées de la société HMR diffusion au cours du contrôle et de ce qu'aucun versement à cette société n'est établi, l'administration rapporte la preuve de ce que les prestations ainsi déduites constituaient des factures fictives. Au surplus, en admettant même la réalité de tout ou partie des prestations facturées, celles-ci devraient alors à tout le moins, pour l'appréciation des rectifications en matière de taxe sur la valeur ajoutée, être qualifiées de factures de complaisance, dès lors qu'aucune prestation n'a été réglée directement à la société.

20. Ainsi, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, ces factures ne peuvent qu'être écartées dès lors que, compte tenu du mode d'exercice habituel de son activité et de ce que les chèques correspondant à ces prestations ont été versés directement à des personnes physiques, la requérante ne pouvait ignorer cette situation. En matière d'impôt sur les sociétés, alors que la requérante ne justifie pas la réalité des prestations, l'administration apporte suffisamment d'éléments permettant de contester leur déduction. Par suite, la SARL Label n'est pas fondée à demander la décharge des rehaussements relatifs à ces factures.

Sur les majorations :

21. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses (...) ".

22. L'administration a appliqué la pénalité de 40 % pour manquement délibéré à une rectification, non contestée dans son principe, relative à des frais de déplacement non justifiés. En faisant valoir que ces dépenses sont dépourvues de la moindre justification ni du moindre commencement de preuve, l'administration établit l'intention d'éluder l'impôt caractérisant un manquement délibéré.

23. En faisant valoir que la société requérante a déduit des charges et la taxe sur la valeur ajoutée afférentes à des factures fictives qu'elle avait elle-même établies, lesquelles représentent notamment 59 % et 76 % de la taxe déduite, respectivement, en 2008 et en 2009, l'administration justifie l'application aux chefs de rectification correspondants de la pénalité pour manoeuvres frauduleuses.

Sur les amendes :

24. En premier lieu, aux termes de l'article 1737 du code général des impôts : " I. - Entraîne l'application d'une amende égale à 50 % du montant : (...) 2. De la facture, le fait de délivrer une facture ne correspondant pas à une livraison ou à une prestation de service réelle (...) ".

25. Il résulte de ce qui a été dit aux points 16 à 19 que l'administration établit que les factures éditées au nom des sociétés Aeropub, Icare, Elec G et HMR diffusion ont été délivrées par la SARL Label elle-même. L'administration était, par suite, fondée à faire application de l'amende prévue par les dispositions précitées.

26. En second lieu, aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759. ".

27. Aux termes de l'article 1759 du même code : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes versées ou distribuées. Lorsque l'entreprise a spontanément fait figurer dans sa déclaration de résultat le montant des sommes en cause, le taux de l'amende est ramené à 75 %. " ;

28. La SARL Label, invitée à désigner les bénéficiaires des distributions, a désigné M. C... à concurrence de 17 102,80 euros et M. B...à concurrence de 9 000 euros et indiqué, pour le surplus, qu'elle poursuivait ses recherches. Alors que l'administration avait estimé que la désignation de M. C...et M. B...équivalait à un défaut de réponse, le jugement attaqué du tribunal administratif de Lyon a prononcé sur ce point la décharge de l'amende. Si la société requérante conteste devant la cour le surplus de l'amende restant à sa charge, elle ne conteste pas avoir été incapable de désigner le bénéficiaire de ces distributions dans le délai prévu par l'article 117 précité.

29. Il résulte de ce qui précède que la SARL Label n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus des conclusions de ses demandes. Ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Label est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Label et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2018 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 mars 2018.

2

N° 16LY03064


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY03064
Date de la décision : 29/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : JURIS EUROFIS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-03-29;16ly03064 ?
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