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08/03/2018 | FRANCE | N°16LY00284

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 08 mars 2018, 16LY00284


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007, 2008 et 2009 ainsi que des pénalités appliquées au titre du 1° de l'article 1729 du code général des impôts.

Par un jugement n° 1300299 du 29 septembre 2015, le tribunal administratif de Lyon a fixé la base imposable de Mme A... à l'impôt sur le revenu au titre des années

2007, 2008 et 2009 à, respectivement, 42 087 euros, 67 676 euros et 64 055 euros, l'a d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007, 2008 et 2009 ainsi que des pénalités appliquées au titre du 1° de l'article 1729 du code général des impôts.

Par un jugement n° 1300299 du 29 septembre 2015, le tribunal administratif de Lyon a fixé la base imposable de Mme A... à l'impôt sur le revenu au titre des années 2007, 2008 et 2009 à, respectivement, 42 087 euros, 67 676 euros et 64 055 euros, l'a déchargée des droits et pénalités correspondant à la réduction des bases d'imposition ainsi définie et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par un recours, enregistré le 22 janvier 2016, et des mémoires, enregistrés les 13 juin 2016 et 3 février 2017, le ministre des finances et des comptes publics demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1300299 du 29 septembre 2015 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de rétablir Mme A... aux rôles de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales au titre des années 2007, 2008 et 2009 à raison des droits et pénalités dont la décharge a été ordonnée par les premiers juges, soit les sommes de 21 470 euros pour l'impôt sur le revenu et de 7 217 euros pour les contributions sociales ;

3°) de condamner Mme A... au reversement de la somme de 1 000 euros allouée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

3°) de rejeter la demande de Mme A... devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- dès lors que l'administration a considéré que des frais de déplacements, outre le fait qu'ils n'étaient pas appuyés de justificatifs, n'étaient pas exposés dans l'intérêt direct de l'exploitation de la SARL Donna, qu'ils ne se rattachaient pas à une gestion normale de l'entreprise et que, par suite, ils ne présentaient pas un caractère déductible, ces frais, pris en charge par la société, correspondant à des dépenses exposées dans l'intérêt de Mme A..., qui n'ont pas été comptabilisés comme un avantage consenti par la société à sa dirigeante mais comme des frais de déplacements de la société Donna, constituent des avantages occultes au sens de l'article 111 c du code général des impôts, dès lors que l'inscription en comptabilité de frais de déplacements professionnels qui ont en réalité un caractère personnel, ne répond pas à l'exigence, posée par l'article 54 bis du code général des impôts, d'une comptabilisation explicite des avantages en nature ; l'imposition sur ce fondement de ces frais ne prive Mme A... d'aucune garantie de procédure ;

- dans l'hypothèse où la cour considérerait que le caractère occulte de l'avantage n'est pas établi, l'administration demande le rétablissement des impositions en litige dans la catégorie des rémunérations allouées aux gérants majoritaires de SARL sur le fondement de l'article 62 du code général des impôts, s'agissant de frais non justifiés et non engagés dans l'intérêt de la société et remboursés par elle à Mme A... ;

- la procédure diligentée à l'encontre de la Sarl Donna apparaît parfaitement régulière ;

- dès lors que les informations recueillies ne l'ont pas été dans le cadre du droit de communication, que le site Mappy était librement consultable et qu'à aucun moment Mme A... n'a fait valoir qu'elle n'aurait pu y avoir librement accès, c'est à bon droit que l'administration n'a pas donné suite à sa demande de communication des résultats des recherches entreprises sur ce site pour mettre en évidence des discordances flagrantes entre les distances déclarées et celles ressortant de ce site ; le champ d'application de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales n'a donc pas été méconnu ;

- l'application des pénalités pour manquement délibéré est fondée, dès lors que les frais de déplacements qui n'ont pu être justifiés ont donné lieu à des versements au profit de Mme A... qui, en sa qualité de gérante et d'associée majoritaire, ne pouvait pas ignorer leur absence de justification, alors que ces remboursements ont représenté respectivement 32, 27 et 47 % de sa rémunération pour les années 2007, 2008 et 2009 ; en sa qualité de seule maîtresse de l'affaire, elle a fait délibérément prendre en charge par la société des frais qui lui étaient personnels.

Par des mémoires, enregistrés les 25 avril 2016 et 23 novembre 2016, présentés pour Mme B... A..., elle conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration ne peut se prévaloir, pour demander la réintégration des sommes opérée au titre des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement de l'article 111 c du code général des impôts, d'une jurisprudence qui vise uniquement les cas dans lesquels le montant des remboursements de frais professionnels consentis au gérant n'a pas été clairement et explicitement identifiés dans les comptes de la société, alors qu'un tel manquement ne saurait être reproché, en l'occurrence, à la société Donna qui a parfaitement rempli ses obligations comptables et fiscales en la matière, ce qui n'a d'ailleurs jamais été contesté par l'inspectrice chargée du contrôle, de sorte que les frais de déplacements contestés - à tort - par l'administration fiscale ne pouvaient, quoiqu'il en soit, être réintégrés dans l'assiette taxable à l'impôt sur le revenu au titre de revenus de capitaux mobiliers ; en outre, l'administration fiscale, qui n'a pas jugé utile, lors du contrôle et de la procédure de rectification, de s'assurer de la perception effective des sommes concernées ni même de leur caractère excessif, n'est plus admise à régulariser ses manquements alors que, si tant est qu'ils aient pu valablement faire l'objet d'une réintégration - ce qui n'est pas établi en l'occurrence - les remboursements litigieux auraient dû être considérés comme un élément de la rémunération de la contribuable, imposable au titre de l'article 62 du code général des impôts ;

- contrairement à ce que prétend le ministre dans son recours, une substitution de base légale aurait nécessairement une incidence sur la situation de la contribuable et notamment sur les conséquences financières du contrôle notifiées à cette dernière ; pour l'application des dispositions de l'article 111 c du code général des impôts, il incombe à l'administration fiscale d'établir le caractère occulte des rémunérations et avantages prétendument consentis et, si une telle preuve fait défaut en l'occurrence, dans la mesure où les remboursements de frais ont parfaitement été comptabilisés et déclarés par la société Donna, elle n'a, quoiqu'il en soit, pas eu l'occasion d'en débattre dans le cadre de la procédure de rectification menée à son encontre ;

- la vérification de comptabilité est entachée de graves irrégularités, dans la mesure où cette vérification s'apparente davantage à un examen de la situation fiscale personnelle de la gérante ;

- l'administration fiscale n'est pas fondée à remettre en cause les frais de déplacements au motif que ceux-ci n'auraient pas satisfait aux conditions de déductibilité requises par le code général des impôts ;

- la vérificatrice a prétendu retenir le kilométrage indiqué par le site Mappy sans qu'il n'ait jamais été permis à la société Donna d'en vérifier l'exactitude puisque la vérificatrice s'est, en effet, toujours refusée à communiquer les résultats de ses recherches sur ce site, prétextant que l'information était à la disposition de la société sur le site Mappy, ce en totale contradiction avec les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales et la jurisprudence administrative ;

- s'agissant des majorations pour manquement délibéré, l'administration fiscale se contente de pures supputations mais n'établit en aucune façon le caractère intentionnel de la dissimulation invoquée, le parallèle dressé entre les rémunérations perçues par la gérante et le total des sommes réintégrées au résultat ne saurait pas mieux établir l'intention délibérée requise par les textes et la jurisprudence ; de même, le simple fait de prétendre que les remboursements ont été effectués au profit de la gérante ne saurait décemment suffire à établir le caractère délibéré des manquements reprochés à la société Donna.

Par ordonnance du 3 février 2017 la clôture de l'instruction a été fixée au 10 mars 2017.

Par un mémoire, enregistré le 6 mars 2017, présenté pour Mme A..., elle maintient ses conclusions pour les mêmes motifs.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Seillet, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Bourion, rapporteur public,

- les observations de Me Bonnet, avocat de Mme A... ;

1. Considérant que la Sarl Donna, dont Mme A... était alors associée à 95 % et gérante, son père détenant le solde du capital, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2007, 2008 et 2009, à l'issue de laquelle l'administration fiscale a remis en cause la déduction d'une partie des frais de déplacements remboursés à Mme A... ; que l'administration fiscale a regardé les sommes litigieuses comme des revenus distribués imposables entre les mains de Mme A..., au titre des années 2007 à 2009, sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ; que, par un jugement du 29 septembre 2015, le tribunal administratif de Lyon, après avoir relevé d'office le moyen selon lequel les dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts n'étaient pas applicables aux redressements en litige, n'a pas accueilli la demande de substitution de base légale présentée par l'administration, sur le fondement de l'article 111 c du même code, et a déchargé Mme A... des impositions litigieuses et des pénalités correspondantes ; que le ministre des finances et des comptes publics relève appel de ce jugement ;

2. Considérant que l'administration a imposé, entre les mains de Mme A..., sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, des frais de déplacements dont elle a considéré qu'ils n'avaient pas été, en totalité ou en partie, justifiés, en raison soit d'un kilométrage déclaré regardé comme excessif, soit d'une absence de lien entre les déplacements et l'activité de l'entreprise ; qu'à la suite du moyen soulevé d'office par le tribunal, l'administration a demandé une substitution de base légale et que les rectifications litigieuses soient désormais fondées sur les dispositions de l'article 111 c du code général des impôts ; que l'administration, qui ne peut renoncer à appliquer la loi fiscale, est en droit, à tout moment de la procédure, de justifier l'impôt sur un nouveau fondement légal, en vertu des dispositions de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales, à condition de ne priver le contribuable d'aucune des garanties légales auxquelles il a droit ; qu'en l'espèce, il ne résulte pas de l'instruction, et alors même que la proposition de rectification qui a été adressée à l'intimée était fondée, en ce qui concerne les rehaussements en cause, sur les dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, que cette substitution ait pour effet de priver l'intéressée, qui a fait l'objet à cet égard de la procédure de rectification contradictoire, d'une des garanties de procédure prévues par la loi ;

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) / c. les rémunérations et avantages occultes (...) " ; qu'aux termes de l'article 54 bis du code général des impôts : " Les contribuables visés à l'article 53 A (...) doivent obligatoirement inscrire en comptabilité, sous une forme explicite, la nature et la valeur des avantages en nature accordés à leur personnel " ;

4. Considérant que, si la Sarl Donna avait inscrit en comptabilité l'ensemble des frais remboursés à Mme A..., y compris en ce qui concerne la part de ces sommes correspondant à des dépenses dont le caractère professionnel n'a pas été reconnu par l'administration, cette inscription, qui ne répondait pas à l'exigence d'une comptabilisation explicite des avantages en nature au sens des dispositions précitées de l'article 54 bis du code général des impôts, ne fait pas obstacle à ce que les sommes versées à Mme A... soient qualifiées de rémunérations et avantages occultes au sens des dispositions précitées de l'article 111 du même code ;

5. Considérant, d'autre part, que l'administration fiscale a constaté, lors de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la Sarl Donna, que cette société a comptabilisé en charges des frais de déplacements effectués par Mme A..., avec son véhicule personnel, au cours de la période vérifiée, pour des montants de 17 078 euros, 18 532 euros et 18 669 euros, durant les exercices clos, respectivement, en 2007, 2008 et 2009, calculés, par application d'un coefficient à un montant de kilomètres fixé à, respectivement, 40 374, 42 118 et 42 429 ; que la société n'a alors fourni comme seul justificatif de ces frais qu'une liste de déplacements établie par la gérante, Mme A..., sans produire les factures d'entretien de véhicules ou les justificatifs de visites de contrôle technique demandés ; que la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires du département du Rhône, dans sa séance du 16 septembre 2011, a émis un avis favorable au rehaussement relatif au caractère majoré des distances retenu lors du contrôle, ainsi qu'aux rectifications relatives à la déduction des trajets domicile-travail dont le bien-fondé était d'ailleurs admis par Mme A... et au rehaussement, en l'état du dossier, des trajets pour lesquels aucun justificatif du caractère professionnel n'avait été fourni lors du contrôle, l'intéressée étant invitée à se rapprocher du vérificateur pour produire tout document de nature à justifier de la réalité et du caractère professionnel des dépenses engagées ;

6. Considérant, en premier lieu, que l'administration a estimé que le nombre de kilomètres indiqué pour certains déplacements était manifestement exagéré, par comparaison entre, d'une part, le nombre de kilomètres retenu par la société pour le calcul des frais de déplacements déduits et, d'autre part, la distance calculée par le site Internet "Mappy" pour des allers-retours entre Lyon, siège de la société, et les destinations portées sur la liste présentée lors des opérations de contrôle, les frais de déplacement admis en déduction ayant été limités aux distances ressortant de la consultation du site "Mappy" ; qu'en se bornant à faire valoir que les calculs d'itinéraires fournis par d'autres sites Internet que celui choisi par l'administration peuvent conduire à des résultats différents, sans au demeurant contester que les distances prises en compte par la Sarl Donna pour le calcul de ses frais de déplacements étaient supérieures au nombre de kilomètres correspondant à des allers-retours entre le siège de l'entreprise et le lieu de destination, et à faire état de la nécessité de visiter avec ses clients des magasins de bricolage ou de décoration, sans pouvoir en justifier, Mme A... ne démontre pas que ces frais ont été exposés dans l'intérêt de la Sarl Donna ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que l'administration, après avoir procédé au rapprochement des déplacements mentionnés dans la liste fournie par Mme A... avec les factures clients émises par la Sarl Donna, n'a admis en déduction que les frais exposés à l'occasion de déplacements auprès de clients pour lesquels des factures avaient été émises au cours de la période vérifiée, sous réserve de l'exactitude des distances retenues par la société ; qu'en se bornant à produire, outre la copie de ses agendas, quelques devis et attestations de fournisseurs, Mme A... ne démontre pas que ces frais ont été exposés dans l'intérêt de la Sarl Donna ; qu'il en est de même, s'agissant de déplacements à Aubenas, au domicile de son père, M. C...A..., associé de la Sarl Donna jusqu'au 20 décembre 2009, et à Alba-la-Romaine, où Mme A... dispose d'une résidence, dès lors que cette dernière se borne à produire un devis pour la décoration d'une des pièces de la maison de M.A..., projet dont elle affirme qu'il a nécessité plusieurs déplacements en 2007, 2008 et 2009 afin qu'elle étudie la configuration des lieux, sans toutefois aboutir à une prestation facturée ; que, si Mme A... se prévaut de la nécessité pour elle et son père de se réunir au domicile de ce dernier pour discuter de la gestion et des résultats de la société, il est constant que le père de l'intéressée, porteur de 5 % des parts de ladite société, n'y a pas exercé de fonctions ;

8. Considérant, par suite, que l'administration est fondée à solliciter que les frais de déplacement en cause soient imposés sur le fondement de l'article 111 c du code général des impôts ; que, par suite, c'est à tort que, pour refuser de faire droit à la demande de substitution de base légale présentée par l'administration et prononcer la décharge des impositions en litige, le tribunal administratif s'est fondé sur le motif tiré de ce que l'administration n'apportait pas la preuve de la justification du caractère occulte des avantages en cause ;

9. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mme A... ;

10. Considérant, en premier lieu, que les moyens contestant la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'encontre d'une société soumise au régime d'imposition des sociétés de capitaux sont inopérants à l'égard des impositions personnelles mises à la charge des bénéficiaires des revenus réputés distribués par cette société en application des dispositions de l'article 111 du code général des impôts ; qu'il est constant que la Sarl Donna était assujettie à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices vérifiés ; que, par suite, doit être écarté comme inopérant le moyen soulevé par Mme A..., tiré de l'irrégularité de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet ladite société ;

11. Considérant, en deuxième lieu, qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ; que, lorsque le contribuable lui en fait la demande, l'administration est tenue, sauf dans le cas d'informations librement accessibles au public, de lui communiquer les documents ou copies de documents contenant les renseignements obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés, afin de lui permettre d'en vérifier l'authenticité ou d'en discuter la teneur ou la portée ; qu'en ce qui concerne les documents ou copies de documents contenant des renseignements recueillis sur des sites Internet ou sur des serveurs de données et utilisés par l'administration pour établir un redressement, il appartient à celle-ci de les mettre à disposition du contribuable avant la mise en recouvrement des impositions qui en résultent si celui-ci lui indique avant cette mise en recouvrement, en réponse à un refus de communication fondé sur le caractère librement accessible des informations en cause, qu'il n'a pu y avoir accès ;

12. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction, et n'est au demeurant pas allégué par Mme A..., qu'avant la mise en recouvrement des impositions en litige, et après un refus de communication fondé sur le caractère librement accessible des informations du site Internet Mappy en cause, elle n'a pu avoir accès aux informations recueillies sur ce site par l'administration ; que, dès lors, le moyen, tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, que soulève Mme A..., qui au demeurant a eu accès au résultat des recherches de la vérificatrice sur ce site par l'indication, dans la proposition de rectifications du 5 novembre 2011, du kilométrage résultant de la consultation dudit site, pour des distances aller-retour entre le siège de la Sarl Donna à Lyon et les destinations portées sur la liste présentée lors des opérations de contrôle, doit être écarté ;

13. Considérant, en dernier lieu, qu'eu égard aux fonctions de dirigeant exercées par Mme A... dans la Sarl Donna et à la nature des sommes en litige, l'administration doit être regardée, dans les circonstances de l'espèce, comme établissant l'intention délibérée d'éluder l'impôt de la part de l'intéressée, qui ne pouvait ignorer ni l'existence des avantages occultes dont elle a bénéficié et au titre desquels elle demandait systématiquement le remboursement de ses frais, ni le fait que les sommes dont il s'agit étaient imposables entre ses mains et auraient dû être déclarées ; que, par suite, l'administration était fondée à lui appliquer les pénalités pour manquement délibéré prévues à l'article 1729 du code général des impôts ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre des finances et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a accordé la décharge des impositions litigieuses et mis une somme à la charge de l'Etat, qui n'avait pas la qualité de partie perdante, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

15. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 11 du code de justice administrative que les décisions des juridictions administratives sont exécutoires ; que, lorsque le juge d'appel infirme une condamnation prononcée en première instance, sa décision, dont l'expédition notifiée aux parties est revêtue de la formule exécutoire prévue à l'article R. 751-1 du code de justice administrative, permet par elle-même d'obtenir, au besoin d'office, le remboursement de sommes déjà versées en vertu de cette condamnation ; qu'ainsi, les conclusions du ministre des finances et des comptes publics tendant à la condamnation de Mme A...à reverser la somme payée en exécution du jugement attaqué, infirmé en appel, sont sans objet et ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, verse une somme à Mme A... au titre des frais exposés à l'occasion du litige ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 29 septembre 2015 est annulé.

Article 2 : Mme A... est rétablie au rôle de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales au titre des années 2007 à 2009 à raison de l'intégralité des droits et pénalités qui lui ont été assignés.

Article 3 : Le surplus des conclusions du recours du ministre des finances et des comptes publics est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de Mme A...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'action et des comptes publics et à Mme B...A....

Délibéré après l'audience du 15 février 2018 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 mars 2018.

8

N° 16LY00284


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY00284
Date de la décision : 08/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-02-01-02-02 Contributions et taxes. Règles de procédure contentieuse spéciales. Questions communes. Pouvoirs du juge fiscal. Moyens d'ordre public.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : SELAS ABOCAP CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 20/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-03-08;16ly00284 ?
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