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01/03/2018 | FRANCE | N°17LY02621

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 01 mars 2018, 17LY02621


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 4 octobre 2016 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou subsidiairement de réexaminer sa demande dans

les mêmes conditions.

Par un jugement n° 1700131 du 20 juin 2017, le tribunal a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 4 octobre 2016 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou subsidiairement de réexaminer sa demande dans les mêmes conditions.

Par un jugement n° 1700131 du 20 juin 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande présentée par M.D....

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 6 juillet 2017, M.D..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 20 juin 2017 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du 4 octobre 2016 du préfet du Rhône ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence de 10 ans portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil, sous réserve qu'il renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour :

- la décision méconnaît l'article 7 bis a) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1869 modifié dès lors qu'il est marié avec une ressortissante de nationalité française depuis le 23 août 2014 ; le couple est marié depuis plus d'un an et fait vie commune depuis plus de deux ans ; si les courriers adressés à son épouse mentionne son nom de jeune fille, l'épouse n'est pas obligée de prendre le nom de son épouse lors du mariage ; le préfet n'a pas étudié de façon approfondie l'exactitude et la réalité des déclarations qui démontreraient l'absence de communauté de vie ; l'absence de courrier à son nom le jour de la visite domiciliaire n'est pas de nature à établir l'existence d'un mariage de complaisance ; aucun élément ne permet d'établir l'absence de communauté de vie ;

- la décision méconnaît l'article 14 de la directive 2010/64/UE du Parlement européen et du Conseil de l'Europe du 20 octobre 2010 et l'article 6-3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il aurait dû être assisté d'un interprète lors de son audition ; par suite, les indices retenus par le préfet pour conclure à l'absence de vie commune n'ont pas de force probante compte tenu de l'irrégularité de la procédure ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il est marié avec un ressortissante française depuis 2 ans ; il a des liens privés et familiaux durables en France ; il établit l'existence d'une communauté de vie ; il pourrait trouver un emploi s'il était en possession d'un titre de séjour ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision est illégale en raison de l'illégalité affectant le refus de délivrance d'un titre de séjour ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il sera privé de son épouse et de ses attaches en France ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour les motifs précédemment énoncés ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

- la décision est illégale en raison de l'illégalité affectant le refus de délivrance d'un titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français ;

Par un mémoire enregistré le 18 janvier 2018 et non communiqué, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête en s'en rapportant à ses écritures produites devant le tribunal administratif de Lyon ;

M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 08 août 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- la directive 2010/64/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de procédure pénale ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Caraës,

- et les observations de Me Hmaida, avocat de M.D....

1. Considérant que M. D..., ressortissant algérien né le 8 juin 1976, est entré en France le 9 avril 2015 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour ; qu'il a bénéficié d'un premier certificat de résidence en tant que conjoint de français valable du 26 juin 2015 au 26 juin 2016 ; que, le 23 juin 2016, il a sollicité le renouvellement de son certificat de résidence algérien en application du a) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; que, par décisions du 4 octobre 2016, le préfet du Rhône a refusé de renouveler son certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que M. D... fait appel du jugement du 20 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur la légalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :

2. Considérant que M. D... soutient que faute pour lui d'avoir été assisté d'un interprète lors de son audition, les procès-verbaux de police sur lesquels le préfet du Rhône s'est appuyé pour établir l'absence de communauté de vie entre les époux seraient irréguliers ; que, toutefois, M. D... ne peut utilement invoquer la méconnaissance de l'article 14 de la directive 2010/64/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010, dès lors qu'elle a été transposée en droit français dans le III de l'article préliminaire du code de procédure pénale, par la loi du 5 août 2013 portant diverses dispositions d'adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l'Union européenne et des engagements internationaux de la France, dont il n'est pas soutenu qu'elle aurait méconnu les objectifs ou des dispositions précises et inconditionnelles de la directive ou qu'elle l'aurait incomplètement transposée, et alors surtout que cette directive s'applique, selon son article 1er, dans le cadre des procédures pénales et des procédures relatives à l'exécution d'un mandat d'arrêt européen, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; qu'au surplus il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant n'aurait pas été en mesure de comprendre les questions posées et d'y répondre ; qu'il ne peut pas plus se prévaloir des stipulations de l'article 6-3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la mesure où un arrêté portant refus de délivrance d'un titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire ne constitue pas une accusation en matière pénale ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour (...) : a) au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6 nouveau 2) et au dernier alinéa de ce même article. /(...) " ; qu'aux termes de l'article 6 de cet accord : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...)/ 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français/ (...)/ Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux " ;

4. Considérant que M. D...a bénéficié du 26 juin 2015 au 25 juin 2016 d'un certificat de résidence en qualité de conjoint d'une ressortissante française, MmeA..., qu'il a épousée le 23 août 2014 ; qu'il ressort d'un rapport d'enquête de la police nationale du 7 septembre 2016 que la visite de l'appartement censé être le domicile des époux D...a permis de constater l'absence d'effets personnels appartenant à M. D...ou de documents administratifs à son nom ; que, lors des auditions séparées des époux, M. D...a déclaré que Mme A..." a voulu l'aider pour les papiers " et leurs déclarations se sont révélées différentes notamment quant à l'année d'emménagement de M. D...dans l'appartement de Mme A...; que, pour établir la réalité de leur vie commune, M. D...produit des factures ou des courriers établis au nom des époux ; que, toutefois, ces pièces ne sont pas suffisantes pour contredire les conclusions de l'enquête de police ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet a estimé que la communauté de vie entre les époux n'existait pas et a refusé pour ce motif de délivrer à M. D...un titre de séjour sur le fondement du a) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien modifié ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance..." ;

6. Considérant qu'à la date de la décision contestée, M. D...n'était marié que depuis moins de deux ans avec une ressortissante française avec laquelle il ne justifie d'aucune communauté de vie ainsi qu'il a été indiqué au point 4 ; qu'il est sans enfant et a conservé en Algérie, où il a vécu jusqu'à l'âge de 38 ans, des attaches privées et familiales ; que s'il indique qu'il pourrait trouver aisément du travail en France, cette circonstance n'est pas de nature à justifier de son intégration socioprofessionnelle ; que, dès lors, la décision contestée ne peut être regardée comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'ainsi le préfet du Rhône n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant que les moyens invoqués à l'encontre du refus de délivrance d'un titre de séjour ayant été écartés, M. D... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre ;

8. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux qui ont été précédemment énoncés dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour, la décision portant obligation pour M. D...de quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

9. Considérant que les moyens invoqués à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire ayant été écartés, M. D...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 1er février 2018 à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

M. Carrier, président-assesseur,

Mme Caraës, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er mars 2018.

2

N° 17LY02621


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY02621
Date de la décision : 01/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU et SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 13/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-03-01;17ly02621 ?
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