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08/02/2018 | FRANCE | N°17LY02447

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 08 février 2018, 17LY02447


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D...B..., représenté par MeC..., a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler l'arrêté n° 2016/103 du 18 août 2016 par lequel le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays de destination ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Savoie, dans le délai de trente jours à compter de la notification du jugement, de lui délivrer un titre de séjour, subsidi

airement de réexaminer sa situation après remise d'une autorisation provisoire de séjour sous deux...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D...B..., représenté par MeC..., a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler l'arrêté n° 2016/103 du 18 août 2016 par lequel le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays de destination ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Savoie, dans le délai de trente jours à compter de la notification du jugement, de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement de réexaminer sa situation après remise d'une autorisation provisoire de séjour sous deux jours ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Par jugement n° 1607323 du 14 mars 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 19 juin 2017, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 14 mars 2017 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées du 18 août 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Savoie de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt ou à défaut de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, d'une somme 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour Me C...de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

Sur le refus de titre de séjour :

- la décision attaquée méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision attaquée méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus d'attribution d'un certificat de résidence ;

- la décision attaquée méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision attaquée méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision attaquée est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- il ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dès lors qu'il remplit les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour de plein droit ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- la décision attaquée méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Par décision du 3 mai 2017, la demande d'aide juridictionnelle de M. B...a été rejetée.

Par mémoire enregistré le 12 janvier 2018, le préfet de la Savoie conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le fils du requérant est majeur et à même de recevoir effectivement en Algérie un traitement adapté à ses pathologies ; la décision de refus de séjour ne méconnaît pas les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- les autres moyens ne sont pas davantage fondés ;

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Cottier, premier conseiller.

1. Considérant que M. D...B..., ressortissant algérien né le 7 octobre 1969, est entré en France le 10 octobre 2013 sous couvert d'un visa de court séjour; qu'il a demandé le 2 mai 2016 une carte de séjour en qualité de parent d'enfant malade ; que, par arrêté du 18 août 2016, le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que M.B... interjette appel du jugement du 14 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de la décision portant refus de certificat de résidence :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant que M. B...se prévaut de sa résidence en France depuis 2013 et de la circonstance qu'il a été rejoint en France en juin 2014 par son épouse et deux de ses enfants, A...etE... ; qu'il indique qu'Anis, né le 29 janvier 1998, souffre d'handicaps lourds et qu'Abdelhasset, né le 8 janvier 2000, est scolarisé en CAP " installateur thermique " ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que le requérant ne résidait en France que depuis moins de trois ans à la date de la décision en litige ; que la circonstance qu'A... fait l'objet depuis fin 2014 d'un suivi médico-psychologique et éducatif et a subi une opération chirurgicale en janvier 2016 afin d'améliorer sa statique ne saurait suffire à démontrer la nécessité d'une prise en charge médicale en France de ce dernier et la nécessité pour le requérant d'y résider pour l'assister ; qu'en effet, s'il se prévaut de certificats médicaux établis en Algérie évoquant des difficultés d'accès à certain soins et modalités de traitement pour son fils ainsi que d'un certificat médical du 19 avril 2017, postérieur à la décision en litige, mentionnant une convocation à un rendez-vous de suivi médical le 27 septembre 2017, le préfet de la Savoie apporte des éléments concordants sur l'existence de structures médicales adaptées aux handicaps d'A... et sur la prise en charge financière des soins correspondants ; que le préfet établit ainsi la possibilité effective pour le jeune A...de bénéficier d'un suivi médical adapté à ses pathologies en cas de retour en Algérie ; qu'il produit également des documents sur la possibilité d'une prise en charge sociale d'A... en Algérie, lesquels ne sont pas contestés par le requérant ; que, par deux arrêts de ce jour, ont été confirmées les décisions du 18 août 2016 du préfet de la Savoie portant refus de certificat de résidence et obligation de quitter le territoire français prises à l'encontre de son fils A...et de son épouse ; que si son fils E...est scolarisé en France depuis la rentrée scolaire 2014-2015 et a été inscrit à compter de septembre 2016, soit postérieurement à la décision attaquée, en première année de CAP " installeur thermique ", ces seuls éléments ne sauraient démontrer l'existence de liens forts, durables et stables du requérant en France alors qu'en l'espèce, il n'est fait état d'aucun obstacle à la scolarisation d'E... en cas de retour en Algérie ; qu'il n'est pas contesté que la cellule familiale peut se reconstituer en Algérie, pays où résident notamment trois beaux-enfants du requérant, lequel y a vécu jusqu'à l'âge de 44 ans ; qu'il ne fait état d'aucune insertion sociale particulière en France ni d'aucune insertion professionnelle ; que, dans ces circonstances, le refus de titre de séjour qui lui a été opposé n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

5. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment il n'est pas établi que le jeune E...ne pourrait pas poursuivre sa scolarité hors de France ; qu'aucune circonstance ne fait obstacle à ce que la cellule familiale de M. B...se reconstitue en Algérie, pays dont lui-même, son épouse ainsi que leurs enfants ont la nationalité ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse méconnaîtrait les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

6. Considérant, en troisième lieu, que pour les mêmes motifs, le requérant n'est pas non plus fondé à soutenir que le refus de régularisation serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle et familiale ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant, en premier lieu, que les moyens invoqués à l'encontre du refus de titre de séjour ayant été écartés, le requérant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que le requérant se borne à reprendre son argumentation relative à la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant sans apporter de précisions supplémentaires ; que, par suite, ces moyens ne peuvent qu'être écartés pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés ;

9. Considérant, en troisième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 3 et 5 et eu égard aux conséquences d'une mesure d'éloignement, le préfet de la Savoie en faisant obligation au requérant de quitter le territoire français, n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

10. Considérant, en quatrième lieu, que contrairement à ce qu'il soutient, le requérant ne démontre pas, ainsi qu'il a été dit au point 3, qu'il pouvait se voir délivrer de plein droit un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il n'est par suite pas fondé à soutenir qu'il ne pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

11. Considérant que le requérant se borne à indiquer sans autre précision que cette décision méconnaitrait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; qu'en l'espèce, eu égard à ce qui a été précédemment exposé au point 5 et en l'absence de toute argumentation supplémentaire permettant d'en apprécier le bien fondé, un tel moyen ne peut qu'être écarté ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2018 à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

M. Carrier, président-assesseur,

Mme Cottier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 février 2018.

2

N° 17LY02447


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY02447
Date de la décision : 08/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: Mme Cécile COTTIER
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : PIEROT

Origine de la décision
Date de l'import : 27/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-02-08;17ly02447 ?
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