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05/12/2017 | FRANCE | N°16LY02461

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 05 décembre 2017, 16LY02461


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision par laquelle le préfet de la Drôme lui a refusé un titre de séjour à la suite de sa demande du 24 janvier 2014, d'enjoindre audit préfet de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour et de condamner l'État à lui verser une indemnité

de 50 000 euros.

Par un jugement n° 1404207 du 7 juin 2016, le tribunal administr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision par laquelle le préfet de la Drôme lui a refusé un titre de séjour à la suite de sa demande du 24 janvier 2014, d'enjoindre audit préfet de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour et de condamner l'État à lui verser une indemnité de 50 000 euros.

Par un jugement n° 1404207 du 7 juin 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 18 juillet 2016, M. A... B..., représenté par Me Bret, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1404207 du tribunal administratif de Grenoble du 7 juin 2016 ;

2°) d'annuler la décision par laquelle le préfet de la Drôme lui a refusé un titre de séjour à la suite de sa demande du 24 janvier 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de condamner l'État à lui verser une somme de 50 000 euros à titre indemnitaire ;

5°) de mettre à la charge de l'État au profit de son conseil une somme de 2 000 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- la décision attaquée méconnaît la circulaire Valls du 28 novembre 2012 ;

- elle méconnaît l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;

- elle porte atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale tel qu'il est garanti par l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;

- il a subi un préjudice de 50 000 euros car il a dû repartir au Maroc alors qu'il bénéficiait en France d'un contrat à durée indéterminée avec un salaire net mensuel compris entre 1 300 et 1 500 euros et que la décision entraîne un préjudice financier consistant en une perte de salaire, une perte d'emploi, ainsi que la perte de ses droits à la retraite.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 octobre 2016, le préfet de la Drôme conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens présentés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Samuel Deliancourt, premier conseiller.

1. Considérant que M. B... relève appel du jugement du 7 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus que lui a opposé le préfet de la Drôme à sa demande en date du 24 janvier 2014 aux fins de délivrance d'un titre de séjour ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B..., ressortissant marocain, a sollicité par courrier du 24 janvier 2014 adressé à la préfecture de la Drôme la délivrance d'un titre de séjour au titre d'une activité salariée sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile;

3. Considérant que l'article R. 311-1 du code précité dispose : " Tout étranger, âgé de plus de dix-huit ans ou qui sollicite un titre de séjour en application de l'article L. 311-3, est tenu de se présenter (...) à la préfecture ou à la sous-préfecture, pour y souscrire une demande de titre de séjour du type correspondant à la catégorie à laquelle il appartient./ (...)/ Le préfet peut également prescrire : 1° Que les demandes de titre de séjour appartenant aux catégories qu'il détermine soient adressées par voie postale ; (...) " ; qu'à défaut de disposition expresse en sens contraire, une demande de titre de séjour présentée par un ressortissant étranger en méconnaissance de la règle de présentation personnelle du demandeur en préfecture fait naître, en cas de silence gardé par l'administration pendant plus de quatre mois, une décision implicite de rejet susceptible d'un recours pour excès de pouvoir ; que, par suite, M. B... s'est vu opposer une décision implicite de refus à sa demande adressée par courrier du 24 janvier 2014 au préfet de la Drôme ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 9 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord... " ; que l'article 3 du même accord stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1err du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention "salarié"... " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;

5. Considérant que, portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée ; que, dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord ; que, toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié ;

6. Considérant, en premier lieu, que, ainsi que l'a à bon droit jugé le tribunal administratif de Grenoble, les énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne constituent pas des lignes directrices dont les intéressés peuvent utilement se prévaloir devant le juge ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que, ainsi que l'a également relevé le tribunal en première instance, M. B... ne justifie pas remplir les conditions fixées par l'article 3 de l'accord franco-marocain, concernant notamment la présentation d'un contrat de travail visé ;

8. Considérant, en troisième lieu, que lorsque le refus de titre de séjour est fondé à bon droit sur l'absence de présentation personnelle du demandeur, ce dernier ne peut se prévaloir, à l'encontre de la décision de rejet de sa demande de titre de séjour, de moyens autres que ceux tirés d'un vice propre de cette décision ; qu'il en va notamment ainsi du moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ; que ces moyens doivent, par suite, être écartés ;

9. Considérant, en quatrième lieu et dernier lieu, qu'aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien susvisé du 17 mars 1988 modifié : " Sans préjudice des dispositions du b et du d de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit: (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) " ; que si M. B... soulève dans sa requête le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées, celui-ci, qui n'est pas assorti de précisions nouvelles, a été à bon droit écarté par le tribunal administratif dont il y a lieu d'adopter sur ce point les motifs ;

Sur les conclusions indemnitaires :

10. Considérant qu'en l'absence d'illégalité fautive, les conclusions présentées par M. B... tendant à la condamnation de l'État à lui verser une indemnité de 50 000 euros en réparation des divers chefs de préjudices financiers qu'il estime avoir subis ne peuvent qu'être rejetées ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent également être rejetées ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Bret et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 21 novembre 2017, à laquelle siégeaient :

M. Hervé Drouet, président de la formation de jugement,

Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller,

M. Samuel Deliancourt, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 décembre 2017.

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N° 16LY02461


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY02461
Date de la décision : 05/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. DROUET
Rapporteur ?: M. Samuel DELIANCOURT
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : JEAN-YVES BRET -PATRICK BERAS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-12-05;16ly02461 ?
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