Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté en date du 5 octobre 2015 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de trente jours et a désigné un pays de destination et d'enjoindre audit préfet, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour temporaire, portant la mention "Vie privée et familiale", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;
Par un jugement n° 1509344 du 4 mai 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 3 juin 2016 et un mémoire enregistré le 20 juin 2016, M. A... B..., représenté par Me Sabatier, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1509344 du tribunal administratif de Lyon du 4 mai 2016 ;
2°) d'annuler les décisions en date du 5 octobre 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de trente jours et a désigné un pays de destination ;
3°) d'enjoindre audit préfet, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour temporaire, portant la mention "Vie privée et familiale", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;
4°) de condamner l'État à lui verser une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
S'agissant de la régularité du jugement :
- le tribunal ne pouvait reprocher au requérant de ne pas justifier de la date de son entrée en France dès lors que celle-ci n'était pas contestée par le préfet qui n'avait pas produit de mémoire en défense ;
S'agissant du refus de titre de séjour :
- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11,7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il est marié avec une personne titulaire d'une carte de séjour vivant en France depuis 2000, et dont tous les membres de la famille ont la nationalité française et résident en France, avec laquelle il a un enfant né en 2014 et qu'il s'occupe également du premier enfant de son épouse ;
- il ne peut bénéficier de la procédure de regroupement familial dès lors que Mme B... ne dispose pas des ressources satisfaisantes ;
- il réside depuis plus de sept ans en France où il dispose de ses attaches privées et familiales et dispose d'une promesse d'embauche ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant dès lors que la décision contestée va priver son fils de sa présence ;
- il méconnaît les dispositions de l'article 24 de la charte des droits fondamentaux et l'article 20 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire :
- elle est illégale en raison de l'illégalité entachant le refus de titre de séjour ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle méconnaît l'article 24 de la charte des droits fondamentaux et l'article 20 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale en raison de l'illégalité entachant le refus de titre de séjour.
Le préfet du Rhône a produit un mémoire en défense, enregistré le 15 novembre 2017, indiquant s'en rapporter à ses écritures de première instance, lequel n'a pas été communiqué en application des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 22 juin 2016 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code civil ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Samuel Deliancourt, premier conseiller ;
1. Considérant que M. B... relève appel du jugement du 4 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 5 octobre 2015 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de trente jours et a désigné un pays de destination ;
Sur les conclusions à fins d'annulation :
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B..., ressortissant tunisien né le 10 avril 1977, présent en France de manière certaine depuis le mois de novembre 2013, s'est marié le 15 mars 2014 avec Mme C... D..., ressortissante algérienne née le 16 février 1978, laquelle est présente en France depuis 2000, titulaire d'une carte de résident de dix ans et mère d'un enfant français, Mehdi, né le 8 mars 2007 ; qu'il n'est pas contesté que M. B... s'occupe de son fils Adem, né le 8 novembre 2014, ainsi que de son beau-fils avec lesquels il vit avec son épouse et justifie d'une promesse d'embauche en date du 7 janvier 2015 pour un poste d'agent de quai auprès de la société KFT-FCT Express; que, dans les circonstances de l'espèce, le préfet du Rhône a entaché sa décision attaquée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que, sans qu'il soit besoin de statuer ni sur la régularité du jugement contesté, ni sur les autres moyens de la requête, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande et à demander, par voie de conséquence, l'annulation de l'arrêté contesté ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ;
5. Considérant que l'annulation, par le présent arrêt, de la décision du 5 octobre 2015 refusant à M. B... la délivrance d'un titre de séjour implique nécessairement, compte tenu de ces motifs, qu'une carte de séjour temporaire lui soit délivrée ; qu'il y a, dès lors, lieu d'enjoindre au préfet de délivrer à M. B... un tel titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
6. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'État à payer à Me Sabatier la somme demandée au titre de ces dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1509344 du tribunal administratif de Lyon du 4 mai 2016 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du préfet du Rhône en date du 5 octobre 2015 portant refus de délivrer à M. B... un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant un pays de destination est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer à M. B... un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans l'attente, de lui délivrer, sans délai, une autorisation provisoire de séjour.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Sabatier et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2017, à laquelle siégeaient :
M. Hervé Drouet, président de la formation de jugement,
Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller,
M. Samuel Deliancourt, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 décembre 2017.
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N° 16LY01883