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05/12/2017 | FRANCE | N°16LY00523

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 05 décembre 2017, 16LY00523


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La région Auvergne a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'avis en date du 10 juillet 2015 du conseil de discipline de recours des fonctionnaires territoriaux d'Auvergne défavorable à la sanction de révocation de M. C... A....

Par un jugement n° 1501507 du 15 décembre 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 15 février 2016, M. C... A..., représenté par la SCP

Teillot et Associés, avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1501507 du tr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La région Auvergne a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'avis en date du 10 juillet 2015 du conseil de discipline de recours des fonctionnaires territoriaux d'Auvergne défavorable à la sanction de révocation de M. C... A....

Par un jugement n° 1501507 du 15 décembre 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 15 février 2016, M. C... A..., représenté par la SCP Teillot et Associés, avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1501507 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 15 décembre 2015 ;

2°) de rejeter la demande de la région Auvergne tendant à l'annulation de l'avis du 10 juillet 2015 du conseil de discipline de recours des fonctionnaires territoriaux d'Auvergne défavorable à la sanction de révocation de M. A... ;

3°) d'enjoindre à la région Auvergne de le réintégrer dans ses services ;

4°) de mettre à la charge de ladite région la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les faits reprochés ont déjà été sanctionnés ;

- la procédure dont il fait l'objet fait suite à ses courriers dénonçant une situation de stress et sollicitant la révision de son évaluation pour l'année 2014 ;

- le tribunal a omis de prendre en compte divers éléments comme son état de santé, le harcèlement dont il est victime, le témoignage en sa faveur de M. D... et leurs conditions de travail ;

- le tribunal n'a pas statué sur le caractère manifestement disproportionné et infondé de la sanction ;

- le jugement est entaché d'une erreur de fait au motif que l'incident du local de douche du 12 décembre 2014 est lié à la configuration des lieux et n'a pas motivé l'arrêté de révocation ;

- le jugement est entaché d'une erreur de droit au motif qu'il a dénoncé des faits de harcèlement moral lors de son entretien annuel d'évaluation et que les observations formulées à cette occasion ne peuvent lui être reprochées ;

- s'agissant du repas servi le 11 décembre 2014, il n'a commis aucun manquement établi et que le rapport de Mme B... en date du 12 décembre 2014 ne lui a été transmis que trois mois plus tard, sans qu'il puisse s'expliquer sur la matérialité des faits ;

- son comportement vis-à-vis de ses collègues n'est pas établi, ainsi que le confirment ses évaluations depuis 2010 et alors que les témoignages produits sont imprécis et font suite à son courrier du 10 novembre 2014.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 avril 2016, la région Rhône-Alpes-Auvergne, représentée par Me Joly, avocate, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. A... à lui verser une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête de M. A... n'est fondé.

L'instruction a été close le 7 avril 2017 à 16 h 30 par ordonnance du 14 mars 2017 prise sur le fondement de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée, portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux ;

- le décret n° 2007-913 du 15 mai 2007 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux des établissements d'enseignement ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Samuel Deliancourt, premier conseiller,

- les conclusions de M. Marc Clément, rapporteur public,

- et les observations de Me Marion, avocat (SCP Teillot et Associés), pour M. A... ;

1. Considérant que le président du conseil régional Auvergne a, après avoir par un arrêté notifié le 27 janvier 2015 suspendu M. A..., adjoint technique territorial des établissements d'enseignement, affecté au lycée Jeanne d'Arc à Clermont-Ferrand en qualité de cuisinier, saisi le conseil de discipline des fonctionnaires territoriaux du Puy-de-Dôme; que par un avis en date du 13 avril 2015, ledit conseil a estimé que les faits reprochés à M. A... justifiaient sa révocation ; que, par un arrêté du 29 avril 2015, le président du conseil régional a infligé à M. A... la sanction disciplinaire de révocation ; que l'intéressé a saisi le conseil de discipline de recours de la fonction publique territoriale d'Auvergne qui a le 10 juillet 2015 émis un avis défavorable à la sanction ; que M. A... relève appel du jugement du 15 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a, à la demande de la région Auvergne, annulé cet avis ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, qu'en vertu de l'article L. 9 du code de justice administrative, " Les jugements sont motivés " ; que ces dispositions n'imposent cependant pas au juge administratif de répondre à chacun des arguments des parties ; que, par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement d'annulation serait irrégulier, faute pour le tribunal de ne pas avoir répondu à tous les arguments relatifs à sa situation personnelle comme professionnelle qu'il avait invoqués devant le tribunal administratif dans ses écritures en défense ;

3. Considérant, en second lieu, que si le tribunal doit répondre à tous les moyens dont il est saisi, il en va toutefois différemment lorsqu'il fait droit à la demande dont il est saisi en se fondant sur un seul moyen ou lorsque le moyen invoqué est inopérant ; que, par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la juridiction de première instance, qui a fait droit à la demande d'annulation présentée par la région Auvergne dirigée contre l'avis de la commission de discipline de recours, n'aurait pas répondu aux moyens qu'il avait soulevés en défense et dirigés contre la décision de révocation dont il avait fait l'objet ;

Sur la légalité de la décision en litige :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. " ; qu'aux termes de l'article 89 de la loi sus-visée du 26 janvier 1984 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / (...) Quatrième groupe : / (...) / la révocation " ; qu'aux termes de l'article 91 de cette même loi : " Les fonctionnaires qui ont fait l'objet d'une sanction des deuxième, troisième et quatrième groupes peuvent introduire un recours auprès du conseil de discipline départemental ou interdépartemental (...). / L'autorité territoriale ne peut prononcer de sanction plus sévère que celle proposée par le conseil de discipline de recours " ;

5. Considérant que l'avis de la commission de discipline de recours contesté en date du 10 juillet 2015 est motivé par l'absence de faits établis constitutifs d'une faute disciplinaire commise par l'intéressé dans le cadre de ses fonctions susceptible de sanction ; que cet avis, défavorable à la sanction de révocation de M. A..., doit être regardé, au regard de ses motifs, comme défavorable au prononcé de toute sanction à l'égard de cet agent ;

6. Considérant, en premier lieu, que l'incident relatif à l'absence de fermeture du local mixte de douche les 2 et 8 décembre 2014 de la part de M. A... alors que ce dernier prenait sa douche, et empêchant les membres du personnel féminin d'y avoir accès ne fonde pas la sanction de révocation et est dès lors sans incidence sur la légalité de la décision contestée ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que les faits reprochés à M. A... dans l'arrêté le révoquant pour "avoir manqué aux règles techniques qui régissent sa profession, notamment en matière d'hygiène et de sécurité alimentaires", ne sont pas suffisamment précis, ni circonstanciés ;

8. Considérant, en troisième lieu, que la matérialité des faits reprochés à M. A..., consistant à ne pas avoir préparé en vue du repas du soir du 11 décembre 2014 au cours duquel ont été servis les reliquats du repas de Noël du midi, une entrée pour un élève interne du lycée Jeanne d'Arc allergique aux oeufs, n'est pas établie par la région Rhône-Alpes-Auvergne, M. A... affirmant pour sa part lui avoir servi une salade verte en remplacement de l'entrée composée au choix de blinis ou toasts ;

9. Considérant, en quatrième et dernier lieu, que les griefs reprochés à M. A..., lequel aurait, selon la décision de révocation, "fait preuve d'une attitude générale d'insubordination" et eu une "attitude provocatrice, agressive, voire menaçante, tant verbalement que physiquement, et le manque de respect dont il a fait preuve de façon récurrente vis-à-vis de sa hiérarchie et desdits collègues", à l'origine d'une "ambiance de travail délétère" sont étayés et justifiés par les huit témoignages précis et détaillés, en date du mois de décembre 2014 émanant de ses collègues et de sa supérieure hiérarchique, Mme B..., dans son courrier du 15 décembre 2014, et non sérieusement contredit par le seul témoignage positif du 5 octobre 2015 d'un collègue ayant travaillé avec l'intéressé ; que ces éléments ayant été fournis à la commission de discipline de recours, cette dernière a, ainsi que l'a à bon droit jugé le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, commis une erreur de fait en estimant que les agissements répréhensibles témoignant du comportement conflictuel adopté par M. A... à l'égard de certains de ses collègues, de son manque d'initiative ainsi que de son insubordination récurrente n'étaient pas justifiés par les pièces fournies ; que, dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé l'avis rendu par la commission de discipline de recours ;

S'agissant des conclusions à fin d'injonction :

10. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de M. A..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions du requérant à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;

S'agissant des conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que M. A... demande sur leur fondement au titre de ses frais non compris dans les dépens soit mise à la charge de la région Auvergne Rhône-Alpes qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions également présentées à ce titre par la région Auvergne Rhône-Alpes ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la région Auvergne Rhône-Alpes au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à la région Auvergne Rhône-Alpes et au centre de la gestion de la fonction publique territoriale du Rhône.

Délibéré après l'audience du 21 novembre 2017, à laquelle siégeaient :

M. Hervé Drouet, président de la formation de jugement,

Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller,

M. Samuel Deliancourt, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 décembre 2017.

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N° 16LY00523


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY00523
Date de la décision : 05/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Sanctions.

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions.


Composition du Tribunal
Président : M. DROUET
Rapporteur ?: M. Samuel DELIANCOURT
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : TEILLOT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-12-05;16ly00523 ?
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