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30/11/2017 | FRANCE | N°17LY02431

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 30 novembre 2017, 17LY02431


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté de la préfète de la Côte-d'Or du 24 février 2017 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, lui enjoignant de quitter la France dans les trente jours et fixant le pays de destination, et d'enjoindre à l'administration de lui délivrer le titre sollicité ou de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1700751 du 18 mai 2017, le t

ribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté de la préfète de la Côte-d'Or du 24 février 2017 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, lui enjoignant de quitter la France dans les trente jours et fixant le pays de destination, et d'enjoindre à l'administration de lui délivrer le titre sollicité ou de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1700751 du 18 mai 2017, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 juin 2017, M. B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 mai 2017 ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Côte-d'Or de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter d'un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt et, à défaut, de réexaminer sa situation sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter d'un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que :

Sur la décision portant obligation de pointer chaque semaine au commissariat :

- la décision est insuffisamment motivée dès lors que le préfet ne fait état d'aucune justification par rapport à la mesure d'éloignement et méconnaît l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile;

Sur la légalité de l'arrêté :

- la décision a été prise par une autorité incompétente dès lors que le préfet ne produit pas l'arrêté de délégation de signature du signataire de la décision ;

- la décision méconnaît le 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que le préfet se fonde sur des poursuites pénales anciennes pour tenter de démontrer l'existence d'un trouble à l'ordre public et que la cour d'assises l'a acquitté des faits reprochés ; il a travaillé pour une entreprise viticole en septembre 2014 et en tant que palettiseur dans une entreprise en décembre 2014 et janvier 2015 ; il voit régulièrement son fils et ses 3 soeurs vivant en France, dont deux sont de nationalité française.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 octobre 2017, la préfète de la Côte-d'Or conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait ;

- l'arrêté est suffisamment motivé en droit et en fait ; la motivation de la décision portant obligation de pointer au commissariat de police peut se confondre avec celle de l'obligation de quitter le territoire assortie d'un délai de départ volontaire ;

- la décision a été prise à la suite d'un examen particulier de la situation de M.B... ;

- le seul acquittement de l'intéressé ne saurait suffire à démontrer que la menace pour l'ordre public ne présenterait pas un caractère de gravité justifiant le refus de délivrance d'un titre de séjour ;

- l'intéressé n'a manifesté aucune volonté d'intégration professionnelle ; il n'est pas établi que l'intéressé, entré récemment en France, aurait effectivement exercé son autorité parentale sur l'enfant qu'il a reconnu en contribuant à son entretien et à son éducation de manière stable et durable et qu'il serait dépourvu de toute attache familiale en Algérie ;

Par ordonnance du 18 octobre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 3 novembre 2017.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 juin 2017.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Caraës.

1. Considérant que M.B..., ressortissant algérien né le 19 juillet 1966, est entré en France le 3 juillet 2013 sous couvert d'un visa de court séjour ; qu'il a bénéficié du 7 mai 2014 au 6 mai 2015 d'un certificat de résidence en qualité de conjoint de français ; que, le 6 mai 2015, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que la préfète de la Côte-d'Or a, par arrêté du 24 février 2017, refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, l'a astreint à se présenter aux services de police une fois par semaine et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ; que M. B...fait appel du jugement du 18 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

En ce qui concerne les moyens communs aux décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi :

2. Considérant, en premier lieu, que M. Bideau, secrétaire général de la préfecture de la Côte-d'Or, a reçu délégation de signature du préfet, par arrêté du 26 juillet 2016 régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Côte-d'Or, à l'effet de signer notamment tous arrêtés et décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département, à l'exception de certaines matières parmi lesquelles ne figurent pas les décisions contestées ; que, par suite, le moyen tiré du vice d'incompétence doit être écarté comme manquant en fait ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précitées ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

4. Considérant que M. B...se prévaut de la présence de son fils, de nationalité française, et de ses soeurs en France ainsi que de sa bonne insertion compte tenu des emplois qu'il a occupés ; que, toutefois, alors que son fils est né en 1992 en France et y poursuit des études universitaires, M. B...n'est entré en France que le 3 juillet 2013 ; qu'il n'établit pas participer à l'entretien et à l'éducation de son enfant ; qu'il n'apparaît pas qu'il serait dépourvu de toute attache en Algérie ; que, par suite et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'arrêté n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien susvisé ;

5. Considérant, en troisième lieu, que si l'un des motifs retenus par la préfète de la Côte-d'Or est tiré de l'existence de trouble à l'ordre public compte tenu de ce que l'intéressé a été poursuivi pour viols sur majeur, alors cependant qu'il a été acquitté par la cour d'assise de Côte-d'Or le 28 mars 2014, il résulte de l'instruction que la préfète aurait pris la même décision si elle s'était fondée sur le seul motif pris de ce que M. B...ne justifie pas de l'intensité de sa vie privée et familiale en France, motif dont la légalité a été reconnue ci-dessus ;

En ce qui concerne le moyen propre à la décision portant obligation de présentation hebdomadaire :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "L'étranger auquel un délai de départ volontaire a été accordé en application du II de l'article L. 511-1 peut, dès la notification de l'obligation de quitter le territoire français, être astreint à se présenter à l'autorité administrative ou aux services de police ou aux unités de gendarmerie pour y indiquer ses diligences dans la préparation de son départ (...) " ; qu'aux termes de 1'article R. 513-3 du même code : " L'autorité administrative désigne le service auprès duquel l'étranger doit effectuer les présentations prescrites et fixe leur fréquence qui ne peut excéder trois présentations par semaine. /L'étranger peut être tenu de lui remettre l'original de son passeport et de tout autre document d'identité ou de voyage en sa possession en échange d'un récépissé valant justification d'identité sur lequel est portée la mention du délai accordé pour son départ " ; qu'en application de ces dispositions, la préfète de la Côte-d'Or a assorti la mesure d'éloignement prise à l'encontre de M. B...d'une obligation de remise de son passeport et d'une obligation de présentation au commissariat de police de Dijon chaque semaine ;

7. Considérant que bien que distincte, l'obligation de présentation à laquelle un étranger est susceptible d'être astreint sur le fondement de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est une décision concourant à la mise en oeuvre de l'obligation de quitter le territoire français ; que, dans ces conditions, si l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, aujourd'hui repris à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, impose que cette décision soit motivée au titre des mesures de police, cette motivation peut, outre la référence à l'article L. 513-4, se confondre avec celle de l'obligation de quitter le territoire français assortie d'un délai de départ volontaire ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté énonce que les mesures prises à l'encontre de M. B...ne portent pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'il précise également que M. B...est astreint à se présenter régulièrement aux services de police pour y indiquer ses diligences dans la préparation de son départ dans le délai de trente jours qui lui a été accordé pour quitter le territoire ; que l'arrêté, qui vise notamment les articles L. 511-1 et L. 513-4 et R. 513-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, comporte ainsi les motifs de droit et de fait pour lesquels l'obligation de quitter le territoire français et la mesure visée à l'article L. 513-4 ont été prises ; que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision litigieuse doit, par suite, être écarté :

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète de la Cote-d'Or.

Délibéré après l'audience du 9 novembre 2017, à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

M. Carrier, président-assesseur,

Mme Caraës, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 novembre 2017.

2

N° 17LY02431


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY02431
Date de la décision : 30/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : MENDEL - VOGUE ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-11-30;17ly02431 ?
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