Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme A...C...a demandé le 20 octobre 2016 au tribunal administratif de Grenoble :
1°) d'annuler l'arrêté du 2 août 2016 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
2°) d'enjoindre au préfet de la Drôme, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de sept jours ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1605959 du 30 décembre 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 4 avril 2017, MmeC..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ledit jugement du 30 décembre 2016 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) d'annuler les décisions préfectorales susmentionnées du 2 août 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de sept jours ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, à charge pour son conseil de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat ;
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier en tant que les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire ; le jugement est irrégulier en tant également que les premiers juges ont omis de statuer sur les conclusions relatives à la décision fixant le pays de destination ;
S'agissant de la décision portant refus de certificat de résidence :
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 car elle est intégrée socialement et poursuit des études universitaires brillantes, elle n'a pas de garantie d'obtenir un visa de long séjour, le temps d'instruction de sa demande d'un visa " étudiant " est susceptible de la pénaliser dans la poursuite de ses études ; sa tante et son oncle qui l'ont accueillie dans le cadre d'une kafala résident en France, sa soeur vit également en France ; elle est en cours de construction d'un parcours professionnel en France ;
- les premiers juges ont commis une erreur de fait sur la demande de titre de séjour car elle a formulé également une demande " étudiant " sur le fondement du titre III de l'accord franco-algérien ; ce refus d'un tel titre est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation car elle est sérieuse dans ses études ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur sa situation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Par décision en date du 28 février 2017, l'aide juridictionnelle totale a été accordée à MmeC....
Par des mémoires en défense, enregistrés les 12 juin et 15 juin 2017, le préfet de la Drôme conclut au rejet de la requête ;
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Cottier, premier conseiller.
1. Considérant que Mme A...C..., ressortissante algérienne née le 16 novembre 1997, indique avoir résidé en France du 1er juillet 2006 à la fin de l'année 2006 auprès de sa tante, de nationalité française, dans le cadre d'une kafala puis être retournée en Algérie auprès de ses parents ; qu'en janvier 2013, à l'âge de 15 ans, elle est revenue en France sous couvert d'un visa de court séjour " tourisme " délivré par les autorités espagnoles, expirant le 1er juin 2013 ; qu'elle s'est installée chez sa tante dans la Drôme et s'est maintenue irrégulièrement sur le sol français à l'expiration de son visa ; qu'après avoir obtenu son baccalauréat scientifique en juin 2016 à Valence, elle a souhaité intégrer une classe préparatoire aux grandes écoles commerciales, démarche qui n'a pas abouti ; que, par décisions du 2 août 2016, le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de départ volontaire de 30 jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement ; que Mme C...interjette appel du jugement du 30 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses conclusions à fin d'annulation desdites décisions préfectorales ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant, d'une part, qu'ainsi que le soutient MmeC..., les premiers juges ont omis de se prononcer sur les moyens opérants tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation, qui avaient été soulevés à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; que ces omissions rendent irrégulier le jugement en tant qu'il se prononce sur l'obligation de quitter le territoire français ;
3. Considérant, d'autre part, que Mme C...avait demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision fixant le pays de renvoi ; que le tribunal administratif a omis de se prononcer sur ces conclusions ; qu'il y a lieu dès lors d'annuler son jugement du 30 décembre 2016 en tant qu'il n'a pas statué sur ces conclusions ;
4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande de Mme C...dirigées contre la décision du préfet de la Drôme portant obligation de quitter le territoire français et contre la décision fixant le pays de destination ; qu'il y a lieu de statuer dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel sur le surplus de ses conclusions ;
Sur la légalité de la décision portant refus de certificat de résidence :
5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du titre III du protocole à l'Accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les ressortissants algériens qui suivent un enseignement, un stage ou font des études en France et justifient de moyens d'existence suffisants (bourses ou autres ressources) reçoivent, sur présentation, soit d'une attestation de pré-inscription ou d'inscription dans un établissement d'enseignement français, soit d'une attestation de stage, un certificat de résidence valable un an, renouvelable et portant la mention " étudiant " ou " stagiaire " " ; qu'aux termes de l'article 9 § 2 du même accord : " Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5, 7, 7 bis al. 4 (lettre c et d) (a à d) et du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises ".
6. Considérant que, contrairement à ce qu'ont indiqué les premiers juges, Mme C..., dans le courrier adressé le 20 avril 2016 par son conseil aux services préfectoraux, avait demandé un certificat de résidence sur le fondement du titre III de l'accord franco-algérien en se prévalant de bons résultats à son baccalauréat " blanc ", du sérieux dans ses études et de sa candidature à l'entrée dans une classe préparatoire aux grandes écoles commerciales ; qu'il n'est pas contesté que Mme C...ne disposait pas au 2 août 2016, date du refus de certificat de résidence, d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises, requis pour la délivrance d'un tel certificat de résidence ; que, dès lors et eu égard au fondement de la demande dont il était saisi, le préfet a pu à bon droit refuser pour ce motif de délivrer à la requérante le certificat de résidence sollicité ; que ce refus n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation ;
7. Considérant, en second lieu, que Mme C...se borne en appel à reprendre, à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision refusant de lui délivrer un certificat de résidence, les moyens déjà invoqués devant les premiers juges, tirés de la méconnaissance des stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation, et n'apporte aucune justification supplémentaire ; que ces moyens ont été écartés à bon droit par le jugement attaqué, dont il y a lieu par suite d'adopter les motifs ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :
8. Considérant, en premier lieu, que, pour les motifs précédemment énoncés dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de certificat de résidence, Mme C...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français ;
9. Considérant, en second lieu, que Mme C...indique qu'elle réside et est scolarisée en France depuis 2013, qu'elle a obtenu son baccalauréat scientifique avec mention assez bien et a débuté à compter de septembre 2016, postérieurement à la décision en litige, une licence en économie-gestion à la faculté d'Angers; qu'elle mentionne également que sa " vie privée est aujourd'hui en France ", " où elle se bâtit un avenir professionnel " ; que, toutefois, Mme C...s'est maintenue irrégulièrement en France à l'expiration de son visa de court séjour en juin 2013 ; que si elle a vécu en France trois ans à la date de la décision en litige et s'est investie dans ses études, ces circonstances ne suffisent pas, compte tenu notamment des conditions du séjour de l'intéressée et de la possibilité dont elle dispose de demander un visa de long séjour pour poursuivre des études en France, à faire considérer que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français porte, par rapport aux buts poursuivis, une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'ainsi et en tout état de cause cette décision ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
10. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit aux points précédents, Mme C... n'est pas fondée à se prévaloir de l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé et de la mesure d'éloignement prise à son encontre à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision désignant le pays de renvoi ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est fondée ni à demander l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination ni à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le surplus de sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles tendant au remboursement de ses frais d'instance non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1605959 du tribunal administratif de Grenoble du 30 décembre 2016 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme A...C...tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Drôme en date du 2 août 2016 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.
Article 2 : Les conclusions de Mme C...présentées devant le tribunal administratif de Grenoble tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Drôme en date du 2 août 2016 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C...est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.
Délibéré après l'audience du 21 septembre 2017 à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Carrier, président-assesseur,
Mme Cottier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 octobre 2017.
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N° 17LY01583