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12/10/2017 | FRANCE | N°16LY03556

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 12 octobre 2017, 16LY03556


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 4 février 2016 par lequel le préfet de la Côte-d'Or l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a désigné le pays à destination duquel il serait reconduit d'office.

Par un jugement n° 1600362 du 19 septembre 2016, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 26 octobre 2016, M. C..., représenté par MeB..., demande à l

a cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 19 septembre 2016 ;

2°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 4 février 2016 par lequel le préfet de la Côte-d'Or l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a désigné le pays à destination duquel il serait reconduit d'office.

Par un jugement n° 1600362 du 19 septembre 2016, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 26 octobre 2016, M. C..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 19 septembre 2016 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté susmentionné ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au profit de son conseil, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé quant à sa réponse au moyen tiré de la méconnaissance du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français, le préfet a méconnu le 4° et le 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; l'arrêté méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- s'agissant de la décision refusant d'octroyer un délai de départ volontaire, il n'existe pas de risque de fuite.

Par un mémoire enregistré le 9 décembre 2016, le préfet de la Côte-d'Or conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

La demande d'aide juridictionnelle présentée par M. C... a été rejetée par une décision du 14 décembre 2016, confirmée par une ordonnance du président de la cour du 13 janvier 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code civil ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Savouré, premier conseiller ;

1. Considérant que M. C..., ressortissant centrafricain, né le 14 mars 1977, déclare être entré en France le 11 mars 2007 ; qu'il a présenté une demande d'asile rejetée, en dernier lieu, par la Cour nationale du droit d'asile le 7 juillet 2008 ; que, le 22 octobre 2009, il a cependant été mis en possession d'un titre de séjour, en qualité de parent d'enfant français, titre qui a été renouvelé jusqu'au 12 février 2013 ; qu'ayant sollicité le renouvellement de ce titre le 27 juin 2013, le préfet de la Côte-d'Or lui a opposé un refus, par un arrêté du 17 octobre 2014 ; que, par un nouvel arrêté du 4 février 2016, le préfet de la Côte-d'Or l'a obligé à quitter le territoire sans délai ; que M. C... interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le jugement attaqué répond avec une précision suffisante au moyen tiré de la méconnaissance du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) " ; que lorsque la loi prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à l'intéressé, cette circonstance fait obstacle à ce que l'étranger puisse légalement être l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : /(...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) " ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 311-7 de ce code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour " compétences et talents " sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois " ; qu'aux termes du 6ème alinéa de l'article L. 211-2-1 du même code : " Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour ".

6. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que la production d'un visa de long séjour délivré, le cas échéant, selon les modalités fixées au 6ème alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est au nombre des conditions auxquelles est subordonnée la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 ; que, dès lors, le préfet peut refuser de délivrer une telle carte de séjour en se fondant sur le défaut de production par l'étranger d'un visa de long séjour, sans avoir à instruire lui-même la demande de visa, lorsque l'étranger n'établit pas être entré régulièrement en France ; qu'ainsi, l'étranger entré irrégulièrement en France ne peut prétendre à l'attribution de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions ;

7. Considérant qu'il est constant que M. C...est entré irrégulièrement en France ; que la circonstance qu'il y a séjourné régulièrement entre 2009 et 2013 n'a pas eu pour effet de régulariser ses conditions d'entrée sur le territoire ; qu'ainsi, en admettant même qu'il y séjournait depuis au moins six mois avec son épouse de nationalité française à la date de l'arrêté litigieux, il n'est pas fondé à soutenir qu'il pouvait bénéficier, de plein droit, de l'attribution d'un titre de séjour sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, dans sa version applicable à la date de la décision litigieuse : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...) " ; qu'aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. (...) " ;

9. Considérant que M. C...explique qu'il a contribué à l'entretien et l'éducation de ses deux enfants entre leur naissance, le 10 décembre 2008 et son incarcération en 2012 et qu'il a d'ailleurs obtenu une carte de séjour en qualité de parent d'enfant français pendant cette période ; que, toutefois, quand bien même un jugement du tribunal de grande instance de Dijon l'a dispensé de pension alimentaire en raison de son impécuniosité, il n'établit pas contribuer effectivement à l'entretien de ses enfants depuis au moins deux ans à la date de l'arrêté litigieux en se bornant à produire une photographie de lui avec ses enfants et à justifier du règlement de frais de restauration scolaire pour les mois de février, mars et mai 2015 ; qu'ainsi, M. C...n'est pas davantage fondé à soutenir qu'il devait bénéficier d'un titre de séjour de plein droit, sur le fondement de ces dispositions ;

10. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale " ;

11. Considérant que si le requérant fait valoir qu'il est père de trois enfants dont deux nés en France, il résulte de ce qui a été dit au point 9 qu'il n'établit pas contribuer effectivement à leur entretien à la date de l'arrêté en litige ; que s'il fait valoir qu'il vit depuis plus de sept ans en France, il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de trente ans ; que son autre fille possède la même nationalité que lui, de sorte que rien ne fait obstacle à ce qu'il s'installe avec elle dans leur pays d'origine ; qu'il ne saurait se prévaloir de son mariage avec une ressortissante française, dès lors que les époux ne pouvaient pas ignorer, dès le début de leur relation, le caractère incertain de leur installation commune en France ; qu'en outre, le séjour en France de M. C...a été émaillé de nombreuses condamnations pénales, dont deux ont abouti à des peines d'emprisonnement ferme d'un an et de quinze mois ; que, dès lors, compte tenu notamment des conditions particulièrement défavorables de son séjour, auxquelles s'ajoute la soustraction à une précédente mesure d'éloignement, le moyen tiré de ce que le refus de titre de séjour contesté porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et méconnaîtrait, par suite, les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ; que le requérant n'est pas davantage fondé à soutenir que la décision litigieuse méconnaît l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

Sur la légalité de la décision refusant un délai de départ volontaire :

12. Considérant qu'aux termes du II. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) " ;

13. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...s'est maintenu sur le territoire français après avoir fait l'objet d'une précédente obligation de quitter le territoire français ; qu'ainsi, le préfet était en droit de refuser de lui accorder un délai de départ volontaire ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;

15. Considérant que M. C..., qui est au demeurant la partie perdante dans la présente instance, n'a pas obtenu l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son conseil n'est pas fondé à demander que l'Etat, qui, en outre, n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, lui verse une somme au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressé au préfet de la Côte d'Or.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 octobre 2017.

2

N° 16LY03556


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY03556
Date de la décision : 12/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : SCP CLEMANG et GOURINAT

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-10-12;16ly03556 ?
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