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12/10/2017 | FRANCE | N°16LY00590

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 12 octobre 2017, 16LY00590


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E...C...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du préfet de la Savoie du 13 janvier 2016 ordonnant son placement en rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire et du 14 janvier 2016 prescrivant son maintien en rétention.

Par un jugement n° 1600177 du 18 janvier 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire,

enregistrés les 18 février 2016 et 20 juin 2017, le préfet de la Savoie demande à la cour :

1°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E...C...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du préfet de la Savoie du 13 janvier 2016 ordonnant son placement en rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire et du 14 janvier 2016 prescrivant son maintien en rétention.

Par un jugement n° 1600177 du 18 janvier 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 février 2016 et 20 juin 2017, le préfet de la Savoie demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon du 18 janvier 2016 ;

2°) de rejeter la demande de M. C...devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- M. C...a été condamné à une interdiction du territoire français par jugement du tribunal de grande instance d'Albertville le 3 décembre 2015 ; il était tenu d'exécuter cette décision ;

- l'imminence de la libération de M. C...justifiait son placement en rétention nonobstant sa demande d'asile.

Par un mémoire enregistré le 14 juin 2017, M.C..., représenté par Me Hemery, avocat, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par le préfet sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Clot, président,

- les conclusions de Mme Bourion, rapporteur public ;

1. Considérant que M.C..., qui déclarait alors se nommer M. D...et posséder la nationalité sénégalaise, a été interpellé par les services de la police aux frontières à Modane le 29 novembre 2015 et trouvé en possession d'un passeport diplomatique sénégalais volé ; que par jugement définitif du tribunal de grande instance d'Albertville du 3 décembre 2015, M.C..., qui est en réalité ressortissant de Côte-d'Ivoire, a été déclaré coupable d'entrée irrégulière en France, détention et usage de faux document administratif et condamné à une peine d'emprisonnement de deux mois et, à titre de peine complémentaire, à l'interdiction du territoire français d'une durée d'un an ; que par une première décision du 13 janvier 2016, le préfet de la Savoie à prescrit son placement en rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ; que l'intéressé ayant déclaré demander l'asile, le préfet a, par une seconde décision, du 14 janvier 2016, ordonné le maintien de cette mesure ; que le préfet de la Savoie relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date des décisions en litige : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) 3° Doit être reconduit à la frontière en exécution d'une interdiction judiciaire du territoire prévue au deuxième alinéa de l'article 131-30 du code pénal (...) " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 555-1 du même code : " L'interdiction du territoire prononcée à titre de peine principale et assortie de l'exécution provisoire entraîne de plein droit le placement de l'étranger dans des lieux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, dans les conditions définies au présent titre, pendant le temps strictement nécessaire à son départ. Le deuxième alinéa de l'article L. 551-2 et l'article L. 553-4 sont applicables. Quand un délai de cinq jours s'est écoulé depuis le prononcé de la peine, il est fait application des dispositions des chapitres II à IV du présent titre. / L'interdiction du territoire prononcée à titre de peine complémentaire peut également donner lieu au placement de l'étranger dans des lieux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, le cas échéant à l'expiration de sa peine d'emprisonnement, dans les conditions définies au présent titre. " ;

4. Considérant que la circonstance que l'étranger faisant l'objet d'une peine d'interdiction judiciaire du territoire a demandé l'asile ne fait pas obstacle à son placement en rétention administrative dès lors que cette demande est présentée dans le seul but de faire échec à l'exécution de cette peine ;

5. Considérant que, compte tenu de la peine complémentaire prononcée à son encontre, le préfet de la Savoie avait la faculté de placer M. C... en rétention administrative, comme le permettent les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 555-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mais n'y était pas tenu ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a déclaré solliciter l'asile dès le 7 janvier 2016 ; que, dès lors, le préfet ne pouvait décider son placement en rétention, par une décision écrite et motivée, que s'il estimait que sa demande d'asile avait été présentée dans le seul but de faire échec à l'exécution de l'interdiction judiciaire du territoire dont il faisait l'objet ; que ce n'est que le 14 janvier 2016, après avoir décidé, le 13 janvier 2016, de placer M. C... en rétention administrative, que le préfet a estimé que sa demande d'asile ne visait qu'à faire échec à son éloignement ; qu'ainsi, sa décision du 13 janvier 2016 est entachée d'illégalité ;

6. Considérant que la décision du 14 janvier 2016 constitue, en réalité, en l'espèce, un nouveau placement en rétention de l'intéressé en vue de son éloignement ; que cette décision repose sur le motif tiré de ce que la demande d'asile de M. C... ne visait qu'à faire échec à son éloignement ; qu'un tel motif n'est entaché d'aucune erreur de droit ; que, dès lors, c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif l'a annulée en conséquence de l'annulation de la décision du 13 janvier 2016 ;

7. Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. C...contre la décision du 14 janvier 2016 ;

8. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M.C..., qui a d'ailleurs pu présenter une demande d'asile, n'a pas été suffisamment informé de la procédure de demande d'asile et de ses droits et obligations, ainsi que le prescrivent les dispositions de l'article R. 556-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

9. Considérant que la décision en litige a été signée par Mme B...A..., directrice de la règlementation et des services aux usagers de la préfecture de la Savoie, qui avait reçu délégation de signature du préfet par arrêté du 26 octobre 2015, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture ;

10. Considérant que la décision du 14 janvier 2016, qui comporte l'énoncé des éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée ;

11. Considérant que sa demande d'asile a été formulée par M. C... alors que sa détention allait prendre fin et que le préfet l'avait informé de ce qu'il envisageait de procéder à son éloignement ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le préfet a pu légalement estimer que cette demande était présentée dans le seul but de faire échec à son éloignement ;

12. Considérant que l'intéressé, qui ne justifiait d'aucune garantie de représentation, a pu, dès lors, être légalement placé en rétention administrative ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Savoie est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du14 janvier 2016 ;

DÉCIDE :

Article 1er : En tant qu'il annule la décision du préfet de la Savoie du 14 janvier 2016, le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon du 18 janvier 2016 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de la demande de M. C...devant le tribunal administratif de Lyon dirigées contre la décision du préfet de la Savoie du 14 janvier 2016 sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du préfet de la Savoie est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Savoie et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Chambéry.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 octobre 2017.

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N° 16LY00590


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY00590
Date de la décision : 12/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : HEMERY

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-10-12;16ly00590 ?
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