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28/09/2017 | FRANCE | N°17LY00800

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 28 septembre 2017, 17LY00800


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...A...a demandé le 26 octobre 2016 au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler l'arrêté du 15 septembre 2016 par lequel le préfet de l'Isère lui a refusé un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et d'une obligation de pointage et a fixé la destination de la mesure d'éloignement en cas de non-respect de ce délai de départ volontaire ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de s

éjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...A...a demandé le 26 octobre 2016 au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler l'arrêté du 15 septembre 2016 par lequel le préfet de l'Isère lui a refusé un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et d'une obligation de pointage et a fixé la destination de la mesure d'éloignement en cas de non-respect de ce délai de départ volontaire ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai et à défaut de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de travail dans l'attente d'une nouvelle décision sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour lui de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Par un jugement n° 1606087 du 9 février 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 17 février 2017 M.A..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 9 février 2017 ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées du préfet de l'Isère en date du 15 septembre 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai et à défaut de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de travail dans l'attente d'une nouvelle décision sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui notifier une nouvelle décision ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour lui de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le refus de délivrance d'un certificat de résidence méconnaît les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 car il ne peut pas effectivement bénéficier des dispositions relatives au regroupement familial, les ressources de son épouse, handicapée, étant insuffisantes, les aides sociales dont l'allocation aux adultes handicapés ne pouvant être prises en compte ;

- ce refus est entaché de vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour alors qu'il remplissait les conditions d'attribution d'un certificat de résidence au titre des stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité car il démontre être bénéficiaire d'un droit au séjour en application de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car il réside en France depuis plus de 2 ans, il a établi sa vie commune avec son épouse, laquelle dispose d'un certificat de résidence de 10 ans, est handicapée et est enceinte depuis janvier 2017, il justifie d'une promesse d'embauche ;

- cet arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 mars 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique du 7 septembre 2017 le rapport de Mme Cottier, premier conseiller.

1. Considérant que M. B...A..., ressortissant algérien né le 3 septembre 1993, indique être entré en France le 1er septembre 2014 sous couvert d'un visa Schengen valable du 20 juillet au 19 octobre 2014 après une arrivée à Alicante (Espagne) le 25 août 2014 ; qu'il a sollicité le 9 janvier 2015 son admission au séjour au titre de l'asile ; que, par décision du 27 avril 2015, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'asile ; que cette décision a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 4 novembre 2015 ; que le requérant, qui s'est maintenu en situation irrégulière, a épousé le 23 janvier 2016 une compatriote titulaire d'un certificat de résidence de 10 ans valable jusqu'en 2023 ; qu'il a sollicité, le 8 février 2016, un titre de séjour sur le fondement du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, par un arrêté du 15 septembre 2016, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ; que M. A...relève appel du jugement du 9 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précitées ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ;

3. Considérant que M.A..., qui est depuis le 23 janvier 2016 le conjoint d'une ressortissante algérienne titulaire d'un certificat de résidence valable dix ans, entre dans l'une des catégories ouvrant droit au regroupement familial ; que s'il fait valoir que les ressources financières actuelles de son épouse, à raison notamment de la perception par cette dernière de l'allocation aux adultes handicapés et d'aides sociales, sont insuffisantes pour qu'une décision de regroupement familial puisse être prise en sa faveur, il ne démontre pas toutefois qu'il serait dans l'impossibilité de bénéficier de la procédure de regroupement familial, le préfet n'étant pas en effet, au regard des stipulations de l'article 4 de l'accord franco-algérien, en situation de compétence liée pour refuser une autorisation de regroupement familial au seul motif de l'insuffisance des ressources ; qu'en outre, la perception de l'allocation aux adultes handicapés n'est pas un motif de refus susceptible d'être opposé par le préfet au titre de la condition de ressources ; que le requérant ne peut dès lors utilement se prévaloir des stipulations précitées du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé, dans le champ d'application desquelles il n'entre pas ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " 1°Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

5. Considérant que le requérant fait valoir qu'il réside en France depuis deux ans et s'y est marié en janvier 2016 ; qu'il indique en appel que son épouse, handicapée, est enceinte depuis janvier 2017 et produit une promesse d'embauche en qualité de peintre, datée du 24 novembre 2016 ;

6. Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...résidait en France depuis moins de deux ans à la date de l'arrêté en litige ; qu'il ne démontre pas avoir perdu toute attache familiale et personnelle en Algérie, pays dans lequel il a vécu jusqu'à son entrée en France à l'âge de 21 ans ; que son mariage est récent ; que le requérant ne fait état d'aucune insertion professionnelle à la date de l'arrêté en litige ; que la promesse d'embauche, au demeurant établie postérieurement à l'arrêté préfectoral, qui se borne à mentionner la fonction de " peintre ", un salaire et un volume horaire sans aucune mention quant à ses qualifications professionnelles, ses compétences et sa classification professionnelle ne saurait démontrer des perspectives d'insertion professionnelle solides ; que si son épouse est enceinte depuis janvier 2017, cette circonstance est postérieure à la date de l'arrêté en litige et est sans influence sur la légalité du refus de certificat de résidence ; que si M. A...se prévaut de la circonstance que son épouse est handicapée, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il serait le seul à même d'assister son épouse alors qu'au demeurant la nécessité d'une assistance particulière de cette dernière dans les actes de la vie quotidienne n'est pas démontrée par les pièces du dossier ; qu'ainsi, et compte tenu notamment des conditions du séjour du requérant en France et du caractère très récent de son mariage à la date de l'arrêté contesté, la décision lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a pas, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que cette décision n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission [du titre de séjour] est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles précités, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;

8. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, M. A...n'entre pas dans le champ d'application du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, dont les dispositions sont équivalentes à celles du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le préfet n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ; que le moyen tiré de ce que le préfet de l'Isère aurait commis un vice de procédure ne peut donc qu'être écarté ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant, en premier lieu, que, comme exposé plus haut, le requérant entrant dans l'une des catégories des personnes pouvant bénéficier du regroupement familial, il ne disposait pas à la date de la décision en litige d'un droit au séjour sur le fondement du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que, dès lors, après lui avoir refusé le certificat de résidence sollicité, le préfet pouvait légalement prendre à son encontre une décision portant obligation de quitter le territoire français ;

10. Considérant, en second lieu, que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard à ce qui été exposé sur la situation personnelle et familiale du requérant aux points 3 et 6, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère

Délibéré après l'audience du 7 septembre 2017, à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

M. Carrier président-assesseur,

Mme Cottier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 septembre 2017.

5

N° 17LY00800


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY00800
Date de la décision : 28/09/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: Mme Cécile COTTIER
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : BORGES DE DEUS CORREIA

Origine de la décision
Date de l'import : 10/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-09-28;17ly00800 ?
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