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28/09/2017 | FRANCE | N°15LY04111

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 28 septembre 2017, 15LY04111


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a saisi le 17 juin 2013 le tribunal administratif de Grenoble de trois requêtes par lesquelles elle a demandé :

I - sous le n° 1303080

1°) d'annuler la décision du 6 mars 2013 par laquelle le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère a refusé de saisir la chambre disciplinaire de sa plainte à l'encontre du docteur Valérie Baldin ;

2°) d'enjoindre au conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère de réexaminer sa plainte déposée contre le d

octeur Valérie Baldin ;

3°) de mettre à la charge du conseil départemental de l'ordre des médeci...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a saisi le 17 juin 2013 le tribunal administratif de Grenoble de trois requêtes par lesquelles elle a demandé :

I - sous le n° 1303080

1°) d'annuler la décision du 6 mars 2013 par laquelle le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère a refusé de saisir la chambre disciplinaire de sa plainte à l'encontre du docteur Valérie Baldin ;

2°) d'enjoindre au conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère de réexaminer sa plainte déposée contre le docteur Valérie Baldin ;

3°) de mettre à la charge du conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère le versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

II - sous le n° 1303081

1°) d'annuler la décision du 6 mars 2013 par laquelle le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère a refusé de saisir la chambre disciplinaire de sa plainte à l'encontre du docteur Clara Bitchev ;

2°) d'enjoindre au conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère de réexaminer sa plainte déposée contre le docteur Clara Bitchev ;

3°) de mettre à la charge du conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère le versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

III - sous le n° 1303082

1°) d'annuler la décision du 6 mars 2013 par laquelle le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère a refusé de saisir la chambre disciplinaire à l'encontre du docteurC... ;

2°) d'enjoindre au conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère de réexaminer sa plainte déposée contre le docteurC... ;

3°) de mettre à la charge du conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère le versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1303080-1303081-1303082 du 29 octobre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a joint les trois demandes et les a rejetées. Il a également condamné Mme B...à verser 1 200 euros au conseil de l'ordre des médecins de l'Isère au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Procédure devant la cour :

Par requête n° 15LY04111, enregistrée le 29 décembre 2015, Mme B...représentée par la SELARL Cabinet Balestas, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1303080-1303081-1303082 du 29 octobre 2015 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'enjoindre au conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère de transmettre sa plainte à l'encontre de ces trois médecins au conseil régional disciplinaire Rhône-Alpes ;

3°) de mettre à la charge du conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- après un accident du travail en 2009, elle a repris ses fonctions de praticien hospitalier titulaire au sein du centre hospitalier Yves Touraine à Pont de Beauvoisin ; elle a alors fait l'objet " d'attaques " de trois de ses confrères, les DrsC..., Baldin et Bitchev, ainsi que de la direction administrative dudit hôpital ; suite à des courriers de ces trois confrères la dénigrant, elle a fait l'objet d'une enquête disciplinaire de la part de l'agence régionale de santé (ARS) et d'une suspension dans l'attente des résultats de l'enquête ; malgré une décision de l'ARS du 16 octobre 2012 écartant toute poursuite disciplinaire, sa suspension a été maintenue jusqu'au 4 janvier 2013 ; elle a alors saisi le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère en raison de l'attitude anti-confraternelle de ses trois collègues et a sollicité la saisine de la chambre disciplinaire à leur encontre ; le conseil départemental, par décisions du 6 mars 2013 notifiées le 17 avril 2013, a refusé de saisir la chambre disciplinaire régionale ;

- les décisions du 6 mars 2013 sont insuffisamment motivées en droit et en fait et méconnaissent ainsi les dispositions de la loi du 11 juillet 1979 et les articles R. 4113-8 et R. 4127-283 du code de la santé publique ;

- le principe du respect du contradictoire a été méconnu dès lors que les lettres, qui ont été adressées au directeur par les docteurs Baldin et Bitchev et qui sont visées par la décision attaquée, ne lui ont pas été communiquées ; le droit à un procès équitable tel que reconnu par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été également méconnu ; contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, elle ne pouvait pas préparer sa défense en découvrant le 6 mars 2013 le contenu de ces lettres ;

- le conseil départemental était incompétent pour se prononcer en tant qu'organe disciplinaire, seule la chambre disciplinaire peut apprécier la recevabilité d'une plainte ; le conseil départemental a essentiellement une mission de conciliation et celle-ci ayant échoué après deux réunions, le conseil départemental devait saisir la chambre disciplinaire Rhône-Alpes afin qu'elle apprécie le caractère fautif ou non de tels courriers ; en refusant cette transmission, le conseil départemental a commis une erreur de droit ;

- ces décisions sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation car les courriers en cause la dénigrent de manière injuste et infondée car non étayée ; la diffusion d'information de nature à porter atteinte à la réputation d'un confrère constitue une faute disciplinaire ; de telles dénonciations non étayées méconnaissent l'article 56 du code de déontologie médicale ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juin 2016, le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère représenté par le Cabinet Gallizia, Dumoulin et Alvinerie conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge du Dr B...la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- la requérante a saisi le conseil départemental de l'ordre par courrier du 11 janvier 2013 d'une plainte contre les docteurs Baldin, Bitchev etC... ; une réunion de conciliation a été organisée les 16 et 29 février 2013 en présence des médecins et de leurs conseils ;

- la motivation prévue par la loi du 11 juillet 1979 n'est exigible qu'à l'égard des décisions dont le contenu est défavorable à une personne physique ; en l'espèce, ce refus de traduire lesdits médecins devant la chambre disciplinaire ne lui refuse pas un avantage constituant un droit et ne relève pas d'une autre catégorie d'actes figurant à l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 ; le Conseil d'Etat a déjà jugé le 25 juillet 2007 qu'il n'y avait pas d'obligation de motivation pour un refus de traduction d'un médecin en chambre de discipline ;

- l'article R. 4127-283 du code de la santé publique n'est applicable qu'aux chirurgiens-dentistes et non pas aux médecins ;

-le principe du contradictoire a été respecté ; " si elle est l'auteur de la plainte ayant provoqué la saisine du conseil de l'ordre, cela ne suffit pas à lui conférer la qualité de partie " ;

- le conseil départemental n'a pas uniquement une mission de conciliation, il doit aussi apprécier l'opportunité des poursuites en matière disciplinaire ; l'article L. 4123-2 du code de la santé publique prévoit qu'en cas d'échec de la conciliation, la plainte est transmise avec l'avis motivé du conseil départemental à la chambre disciplinaire ;

- ces refus ne sont pas entachés d'erreur manifeste d'appréciation ; il n'existe pas de courrier du docteur C...la dénigrant ; aucun élément n'établit la matérialité des faits de non-confraternité ; la circonstance qu'elle a été suspendue n'établit pas un manquement desdits médecins à leurs obligations déontologiques ; la décision d'affectation du Dr B...sur un poste dévolu aux consultations d'évaluation gérontologique est une décision du chef de pôle dans l'exercice de ses prérogatives hospitalières ;

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Cottier, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public,

- et les observations de Me Dumoulin, avocat, représentant le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère.

1. Considérant que le docteurB..., praticien hospitalier exerçant ses fonctions au centre hospitalier de Pont-de-Beauvoisin, a saisi en janvier 2013 le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère de plaintes pour méconnaissance des règles de confraternité de la part des docteurs Baldin et Bitchev, également praticiens au sein du même service dit " court séjour gériatrique " (CSG) ,et du DocteurC..., chef de pôle dudit hôpital ; qu'elle estimait qu'en 2011 ces médecins avaient adopté à son égard un comportement de dénigrement de sa pratique professionnelle et de son insertion au sein de l'équipe médicale, ce qui a conduit à sa suspension de fonctions à titre conservatoire ainsi qu'à une enquête de l'agence régionale de santé, laquelle n'a débouché sur aucune sanction disciplinaire ; qu'elle a demandé au conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère que ses plaintes à l'encontre desdits médecins soient transmises à la chambre disciplinaire de première instance compétente ; que le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère, après avoir engagé des démarches de conciliation et pris acte de leur échec, a estimé que les faits reprochés de non confraternité n'étaient pas établis et a refusé, par décisions du 6 mars 2013, de saisir la chambre disciplinaire de première instance ; que ces décisions ont été notifiées par courriers du 17 avril 2013 au docteurB... ; que, par un jugement du 29 octobre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a joint les demandes du Dr B...tendant à l'annulation de ces trois décisions du 6 mars 2013 et les a rejetées ; que le Dr B...interjette appel de ce jugement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 4124-2 du code de la santé publique : Les médecins (...) chargés d'un service public et inscrits au tableau de l'ordre ne peuvent être traduits devant la chambre disciplinaire de première instance, à l'occasion des actes de leur fonction publique, que par le ministre chargé de la santé, le représentant de l'Etat dans le département, le directeur général de l'agence régionale de santé, le procureur de la République, le conseil national ou le conseil départemental au tableau duquel le praticien est inscrit./Lorsque les praticiens mentionnés à l'alinéa précédent exercent une fonction de contrôle prévue par la loi ou le règlement, ils ne peuvent être traduits devant la chambre disciplinaire de première instance, à l'occasion des actes commis dans l'exercice de cette fonction, que par le ministre chargé de la santé, le représentant de l'Etat dans le département, le directeur général de l'agence régionale de santé ou le procureur de la République " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 4123-2 du code de la santé publique : " Il est constitué auprès de chaque conseil départemental une commission de conciliation composée d'au moins trois de ses membres. La conciliation peut être réalisée par un ou plusieurs des membres de cette commission, selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. Lorsqu'une plainte est portée devant le conseil départemental, son président en accuse réception à l'auteur, en informe le médecin, le chirurgien-dentiste ou la sage-femme mis en cause et les convoque dans un délai d'un mois à compter de la date d'enregistrement de la plainte en vue d'une conciliation. En cas d'échec de celle-ci, il transmet la plainte à la chambre disciplinaire de première instance avec l'avis motivé du conseil dans un délai de trois mois à compter de la date d'enregistrement de la plainte, en s'y associant le cas échéant. Lorsque le litige met en cause un de ses membres, le conseil départemental peut demander à un autre conseil de procéder à la conciliation. En cas de carence du conseil départemental, l'auteur de la plainte peut demander au président du conseil national de saisir la chambre disciplinaire de première instance compétente. Le président du conseil national transmet la plainte dans le délai d'un mois. " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les faits de dénigrement et de non-confraternité reprochés par le Dr B...aux Drs Valérie Baldin et Clara Bitchev et qui sont à l'origine de sa saisine du conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère concernent des courriers adressés par ces dernières fin 2011 au directeur de l'établissement ; que ces courriers relatent l'existence de tensions relationnelles au sein du service CSG de l'hôpital public de Pont-de-Beauvoisin en lien avec des difficultés de planning, de gestion des patients et d'insertion dans l'équipe de travail imputées en partie au DrB... ; que les reproches de non-confraternité concernant le DrC..., chef de pôle, sont fondés sur son absence de soutien au Dr B...au cours de l'année 2011 dans le cadre de la gestion du service CSG et sur une mise en difficulté professionnelle liée à l'absence de réponses ou de positionnement du Dr C...face aux questions de l'équipe CSG ; que, dès lors et nonobstant les mentions figurant dans les courriers du 17 avril 2013 et les procès-verbaux associés de la réunion du conseil de l'ordre des médecins de l'Isère du 6 mars 2013, les agissements en cause et les faits allégués n'étaient manifestement pas détachables des actes de la fonction publique hospitalière réalisés par les Drs Baldin, Bitchev et C...au sein du centre hospitalier de Pont-de-Beauvoisin ; que, par suite, et contrairement à ce que fait valoir le DrB..., seules les dispositions précitées de l'article L. 4124-2 du code de la santé publique trouvaient en l'espèce à s'appliquer et non pas celles de l'article L. 4123-2 du même code ; que les dispositions de l'article L. 4124-2 investissent le conseil départemental de l'ordre des médecins, lorsqu'il a connaissance de faits pouvant faire l'objet de poursuites disciplinaires, du pouvoir de décider, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, s'il y a lieu ou non de traduire le praticien hospitalier concerné devant la chambre disciplinaire de première instance ; qu'ainsi le conseil départemental de l'ordre dispose d'un pouvoir d'appréciation dont il lui appartient de faire usage ; qu'il s'ensuit qu'en pareil cas, même s'il a soumis à une conciliation préalable la plainte qui lui a été transmise, le conseil départemental n'est pas tenu, en cas d'échec de la conciliation, de saisir la chambre disciplinaire ; que c'est dès lors sans commettre d'erreur de droit que le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère a refusé de " transmettre " les trois plaintes du Dr B...à la chambre disciplinaire ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 alors applicable et reprises à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent./A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : -restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; -infligent une sanction ; -subordonnent l'octroi d'une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ; -retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; -opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance ; -refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; -refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions des deuxième à cinquième alinéas de l'article 6 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public ; -rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire. " ;

6. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, il appartient au conseil départemental de l'ordre des médecins, qu'il soit ou non saisi d'une plainte par un tiers, de décider de traduire un praticien hospitalier devant la chambre disciplinaire de première instance ; qu'ainsi Mme B...ne peut se prévaloir d'un droit à ce que le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère transmette la plainte dont elle l'a saisi à la chambre disciplinaire ; que les décisions contestées n'entrent dans aucun des autres cas prévus par l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 imposant une motivation ; que si le Dr B...se prévaut des dispositions des articles R. 4113-8 et R. 4127-283 du code de la santé publique comme imposant une motivation des décisions du conseil départemental de l'ordre des médecins, il est constant que l'article R. 4113-8 dudit code ne porte pas sur la motivation des décisions et que l'article R. 4127-283 du même code concerne les chirurgiens-dentistes et non les médecins ; que le Dr B...n'invoque aucun autre texte ou aucun autre principe qui imposerait la motivation des décisions en litige ; que, par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation desdites décisions du conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère doit être écarté ; qu'au surplus, ces décisions qui mentionnent les plaintes du DrB..., l'organisation de réunions de conciliation, l'appréciation portée par le conseil départemental sur la matérialité des faits allégués sont suffisamment motivées ;

7. Considérant, en troisième lieu, que le Dr B...soutient désormais en appel que son " droit à un débat contradictoire et à une défense " a été méconnu et que les stipulations du premier paragraphe de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues dès lors qu'elle n'aurait pas eu communication personnelle des courriers des 19 et 26 septembre 2011 transmis au directeur du centre hospitalier de Pont de Beauvoisin par les docteurs Baldin et Bitchev ;

8. Considérant, d'une part, que lorsqu'un conseil départemental de l'ordre des médecins décide de ne pas déférer un praticien hospitalier devant la juridiction disciplinaire pour des actes accomplis dans le cadre de sa fonction publique, il ne statue pas sur une contestation portant sur un droit ou une obligation de caractère civil, ni ne décide du bien-fondé d'une accusation en matière pénale au sens des stipulations du premier paragraphe de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le Dr B...n'est pas fondé à se prévaloir de la méconnaissance desdites stipulations ;

9. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du procès-verbal de la réunion de conciliation du 19 février 2013 et des courriers postérieurs que lors de cette réunion le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère a décidé de surseoir à statuer dans l'attente de la production des courriers des 19 et 26 septembre 2011 transmis au directeur du centre hospitalier de Pont de Beauvoisin par les docteurs Baldin et Bitchev ; que la requérante ne conteste pas sérieusement que si elle n'a pas reçu ces courriers, elle a néanmoins eu connaissance de leur contenu ainsi que des propos tenus par les DrsC..., Baldin et Bitchev sur sa situation au sein de l'équipe CSG lors des réunions organisées par la commission de conciliation du conseil départemental de l'ordre des médecins, lesquelles se sont déroulées antérieurement à la réunion du 6 mars 2013 du conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère au cours duquel sa demande de transmission de ses trois plaintes à la chambre disciplinaire a été examinée ; que, lors de la réunion du 6 mars 2013, le Dr B...ne s'est pas plaint de l'absence de communication de telles correspondances qui en outre ont été produites devant le tribunal administratif de Grenoble ; que, dès lors et en tout état de cause, la requérante n'est pas fondée à soutenir que son " droit à un débat contradictoire et à une défense " a été méconnu ;

10. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 56 du code de déontologie médicale, repris par l'article R. 4127-56 du code de santé publique : " Les médecins doivent entretenir entre eux des rapports de bonne confraternité. Un médecin qui a un différend avec un confrère doit rechercher une conciliation, au besoin par l'intermédiaire du conseil départemental de l'Ordre. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 4127-1 du code de santé publique : " Les dispositions du présent code de déontologie s'imposent aux médecins inscrits au tableau de l'ordre, à tout médecin exécutant un acte professionnel dans les conditions prévues à l'article L. 4112-7 ou par une convention internationale, ainsi qu'aux étudiants en médecine effectuant un remplacement (...)/Conformément à l'article L. 4122-1, l'ordre des médecins est chargé de veiller au respect de ces dispositions. Les infractions à ces dispositions relèvent de la juridiction disciplinaire de l'ordre." ;

11. Considérant que la requérante soutient que des lettres de dénigrement et de dénonciation émanant de médecins, non étayées et lui attribuant de manière infondée des pratiques professionnelles contraires à la déontologie, constituent " une violation potentielle " de l'article 56 du code de déontologie qui aurait dû conduire le conseil départemental de l'ordre à saisir la juridiction disciplinaire ;

12. Considérant, toutefois, que, d'une part, l'envoi par le Dr C...d'une lettre à sa hiérarchie concernant le Dr B...n'est pas matériellement établi ; que s'agissant des autres reproches formulés par le Dr B...à l'encontre du Dr C...et figurant dans le procès-verbal de la réunion du 6 mars 2013 du conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère, à savoir l'absence de soutien lors de son conflit avec ses consoeurs et dans ses démarches vis-à-vis des Drs Baldin et Bitchev, le manque d'égards, l'absence de fiche de poste, le défaut de réponse aux questions des différents personnels et la mise en difficulté par rapport au personnel soignant, l'absence de soutien lors de son burn-out, et alors que de tels reproches étaient sérieusement contestés par le Dr C...notamment dans un courrier du 25 janvier 2013 adressé au conseil départemental de l'ordre, la requérante ne verse au débat contentieux aucun élément de nature à en établir la teneur exacte ; que ; dès lors, le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère a pu à bon droit estimer que les faits de non-confraternité n'étaient pas établis ;

13. Considérant, d'autre part, que si les docteurs Valérie Baldin et Clara Bitchev ont adressé chacune un courrier au directeur de l'établissement hospitalier indiquant leur souhait de ne plus travailler avec le Dr B...et ont fait part de différentes doléances concernant son attitude professionnelle au sein de l'équipe CSG, il ne ressort pas des pièces du dossier que c'est à tort que le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère a estimé qu'eu égard à leur contenu ces lettres ne constituaient pas des faits méconnaissant les rapports de bonne confraternité entre médecins ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a refusé de faire droit à sa demande tendant à l'annulation des décisions litigieuses ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

15. Considérant que le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par le DrB... ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge du Dr B...la somme de 1 000 euros demandée par le conseil départemental de l'ordre au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du Dr B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au Dr B...et au conseil départemental de l'ordre des médecins de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 7 septembre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

M. Carrier, président-assesseur,

Mme Cottier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 septembre 2017.

8

N° 15LY04111


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

55-01-02-01-03 Professions, charges et offices. Ordres professionnels - Organisation et attributions non disciplinaires. Questions propres à chaque ordre professionnel. Ordre des médecins. Conseils départementaux.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: Mme Cécile COTTIER
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : GALLIZIA et DUMOULIN et ALVINERIE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 28/09/2017
Date de l'import : 10/10/2017

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 15LY04111
Numéro NOR : CETATEXT000035743239 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-09-28;15ly04111 ?
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