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11/07/2017 | FRANCE | N°17LY00223

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 11 juillet 2017, 17LY00223


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... a demandé au président du tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 9 novembre 2016 par laquelle le préfet de la Drôme a décidé son transfert aux autorités norvégiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1607033 du 21 décembre 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 19 janvier 2017, M. B..., représent

par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... a demandé au président du tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 9 novembre 2016 par laquelle le préfet de la Drôme a décidé son transfert aux autorités norvégiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1607033 du 21 décembre 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 19 janvier 2017, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble du 21 décembre 2016 ;

2°) d'annuler la décision susmentionnée pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de l'admettre provisoirement au séjour et d'enregistrer sa demande d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- la décision de transfert est insuffisamment motivée en droit, faute de viser les articles L. 741-1 et L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et en fait, faute de mentionner toutes les étapes de la procédure ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 en l'absence de remise des brochures d'information et d'information communiquées oralement dans une langue qu'il comprend ;

- la notification de la décision est irrégulière ;

- Le préfet a méconnu les dispositions de l'article 16 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 en ne faisant pas application de la clause discrétionnaire prévue par ces dispositions.

Par une ordonnance du 9 mai 2017 la date de clôture de l'instruction a, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative, été fixée 1er juin 2017 à 16H30.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mai 2017, le préfet de la Drôme conclut au rejet de la requête en s'en rapportant aux écritures qu'il a déposées en première instance ;

Par une décision du 14 février 2017, le bureau d'aide juridictionnelle a rejeté la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. B....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mear, président-rapporteur.

1. Considérant que M. B..., ressortissant afghan né le 10 mars 1990, est, selon ses déclarations, entré irrégulièrement en France le 24 février 2015 après être passé par la Norvège ; que, le 24 février 2016, il a demandé son admission au séjour en qualité de demandeur d'asile auprès des services de la préfecture de l'Isère ; que le préfet de la Drôme, par décision du 9 novembre 2016, a décidé de transférer l'intéressé aux autorités norvégiennes, responsables selon lui de l'examen de sa demande d'asile ; que M. B... a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Grenoble, qui a rejeté sa demande par jugement du magistrat désigné par le président de cette juridiction en date du 21 décembre 2016, dont M. B... fait appel ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ;

3. Considérant que M. B... soutient que le premier juge a insuffisamment répondu au moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision de transfert ; que, toutefois, il ressort des mentions du jugement attaqué que le premier juge, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments soulevés par M. B... à l'appui de son moyen, a suffisamment motivé sa réponse en indiquant que l'arrêté en litige mentionne les considérations de fait et de droit sur lesquelles il se fonde pour décider de sa remise aux autorités norvégiennes ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation du jugement attaqué doit être écarté ;

Sur la décision de transfert :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. / Cette décision est notifiée à l'intéressé. Elle mentionne les voies et délais de recours ainsi que le droit d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix. Lorsque l'intéressé n'est pas assisté d'un conseil, les principaux éléments de la décision lui sont communiqués dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend. " ;

5. Considérant que la décision contestée, qui vise les articles L. 742-1 à L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique notamment que les autorités norvégiennes ont été saisies, le 29 mars 2016, d'une demande de reprise en charge de M. B..., demandeur d'asile, en application du d) de l'article 18-1 du règlement UE n° 604/2013 et ont donné leur accord le 6 avril 2016, énonce clairement les considérations de droit dont il est fait application ainsi que les conditions de fait sur lesquelles le préfet s'est fondé pour justifier le transfert du requérant aux autorités norvégiennes ; que, contrairement à ce que fait valoir le requérant, la décision litigieuse vise l'article L.741-1 du même code en précisant qu'il s'est vu remettre, le 21 mars 2016, une attestation de demande d'asile en procédure Dublin en application des articles L. 741-1 et L. 741-2 de ce code ; que l'absence de mention de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne constitue pas le fondement légal de la décision, est sans incidence ; que la circonstance que le préfet n'ait pas mentionné l'entretien individuel en préfecture dont a bénéficié M. B...n'est pas de nature à entacher la décision d'une insuffisance de motivation ; que, par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision ordonnant son transfert est insuffisamment motivée en droit et en fait ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604-2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement et notamment : / a) des objectifs du présent règlement (...) / b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée (...) / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5 (...) " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B... a reçu, le 3 juin 2016, les brochures d'information prévues à l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013, rédigées en langue pachtou, langue que M. B... a indiqué comprendre ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'il a bénéficié au cours de son entretien individuel avec les services préfectoraux, le 24 février 2016, des services d'un interprète bénévole et a certifié avoir compris la traduction qui lui en a été faite ; que, dans ces conditions, son moyen tiré de ce qu'il n'aurait pas reçu une brochure d'information dans une langue qu'il comprend et que la présence d'un interprète lors de son entretien individuel aurait été insuffisante pour comprendre l'ensemble des informations relatives à sa remise aux autorités norvégiennes doit être écarté comme manquant en fait ; que, dès lors, le préfet n'a pas méconnu l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 ;

8. Considérant, en troisième lieu, que si le requérant invoque l'article 16 du règlement (UE) n° 604/2013, il n'apporte aucune précision à l'appui de ce moyen permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que ce moyen ne peut, dès lors, qu'être écarté ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. (...) 2. L'Etat membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'Etat membre responsable, ou l'Etat membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre Etat membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. Les personnes concernées doivent exprimer leur consentement par écrit " ;

10. Considérant, que la faculté laissée à chaque Etat membre en application de l'article 17 du règlement n° 604/2013, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile ;

11. Considérant que M. B...se borne à alléguer, sans apporter aucun justificatif à l'appui de ce moyen, que les autorités norvégiennes sont dans l'incapacité de traiter l'ensemble des demandes d'asile dont elles sont saisies du fait de l'afflux de demandeurs d'asile ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Drôme aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage de la clause discrétionnaire prévue par l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 qui permet à un Etat d'examiner la demande d'asile d'un demandeur même si cet examen ne lui incombe pas en application des critères fixés dans ce règlement ;

12. Considérant, enfin, que si M. B... soutient que la décision litigieuse n'est pas traduite, il ressort des pièces du dossier que, conformément aux dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les principaux éléments de cette décision lui ont été communiqués, par téléphone, par un interprète en langue Pachtou, soit dans une langue qu'il comprend ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Mear, président,

Mme Terrade, premier-conseiller,

Mme Vinet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juillet 2017.

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N° 17LY00223


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY00223
Date de la décision : 11/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEAR
Rapporteur ?: Mme Josiane MEAR
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : ROYON

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-07-11;17ly00223 ?
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